Le Quotidien du 6 décembre 2021 : Construction

[Brèves] Le maître d’ouvrage doit prendre des mesures pour contraindre l’entrepreneur à respecter ses obligations à l’égard du sous-traitant

Réf. : Cass. civ. 3, 17 novembre 2021, n° 20-20.731, F-D (N° Lexbase : A46897CN)

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, Rome Associés, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

le 03 Décembre 2021

► Si le sous-traitant accepté et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître d’ouvrage ne bénéficie pas de la délégation de paiement, le maître d’ouvrage doit exiger de l’entrepreneur principal qu’il justifie avoir fourni la caution ;
► il appartient au maître d’ouvrage de veiller à l’efficacité des mesures qu’il met en œuvre pour satisfaire aux obligations mises à sa charge ;
► à défaut, il engage sa responsabilité à l’égard du sous-traitant.

Afin d’assurer la protection du sous-traitant, réputé en situation de faiblesse économique, la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 (N° Lexbase : L5127A8E) a instauré de nouvelles règles dont un système efficace de garanties de paiement de l’intégralité des sommes dues par l’entrepreneur au sous-traitant, prévu en son article 14. Deux garanties de paiement, alternatives sont, en effet, offertes au sous-traitant : la caution et la délégation du maître d’ouvrage. L’absence de fourniture, par l’entrepreneur, de l’une de ces deux garanties principales est lourdement sanctionnée par la nullité du sous-traité (pour exemple Cass. civ. 3, 14 septembre 2017, n° 16-18.146, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A6555WR9). Malgré cela, 81 % des sous-traitants sont payés par l’entrepreneur principal sans que celui-ci, dans la plupart des cas, n’ait obtenu de caution (H. Périnet-Marquet, Droit de la construction et de l’urbanisme, Montchrétien, 11ème éd. 2017, n° 874).

L’entrepreneur n’est donc pas le seul à avoir des obligations à l’égard du sous-traitant. Le maître d’ouvrage en a également. Faute pour lui de respecter ses obligations, il engage sa responsabilité délictuelle à l’égard du sous-traitant comme le rappelle l’arrêt rapporté.

En l’espèce, une entreprise principale titulaire d’un marché de travaux en vue de la construction de logements, conclu deux contrats de sous-traitance avec la même société. Le sous-traitant assigne en paiement des travaux le maître d’ouvrage et l’entrepreneur principal, mis en liquidation judiciaire. La cour d’appel de Paris, dans un arrêt rendu le 22 juin 2020 considère que la faute délictuelle du maître d’ouvrage n’est pas établie et déboute le sous-traitant de sa demande à son encontre. Il forme un pourvoi en cassation aux termes duquel il articule, notamment, qu’il appartient au maître d’ouvrage de veiller à l’efficacité des mesures qu’il met en œuvre pour satisfaire aux obligations mises à sa charge aux termes de l’article 14-1 de la loi précitée du 31 décembre 1975.

En application de cet article, si le sous-traitant, accepté et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître d’ouvrage, ne bénéficie pas de la délégation de paiement, le maître d’ouvrage doit exiger de l’entrepreneur principal qu’il justifie avoir fourni la caution.

L’intérêt de l’arrêt n’est pas de rappeler ces dispositions (pour un exemple récent, Cass. civ. 3, 10 novembre 2021, n° 20-17.689, F-D N° Lexbase : A74177BC) mais de confirmer que le maître d’ouvrage doit veiller à l’efficacité des mesures protectrices instaurées par le Législateur au bénéfice du sous-traitant. Précisément, le maître d’ouvrage doit veiller à l’efficacité des mesures qu’il met en œuvre pour satisfaire aux obligations mises à sa charge. A défaut, il engage sa responsabilité à l’égard du sous-traitant en application des dispositions de l’article 1240 du Code civil ([L0950KZ9]), faute de chaîne translative de propriété.

La solution n’est pas nouvelle (pour exemple, Cass. civ. 3, 21 novembre 2012, n° 11-25.101, FS-P+B N° Lexbase : A4932IXX ; Cass. civ. 3, 10 février 2010, n° 09-11.562, FS-P+B N° Lexbase : A7832ERI) et mérite d’être saluée. Elle permet au sous-traitant d’avoir un recours supplémentaire à l’encontre du maître d’ouvrage, lequel peut se révéler fort utile lorsque l’entreprise principale fait, par exemple, l’objet d’une procédure collective.

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