Le Quotidien du 9 septembre 2021 : Droit pénal spécial

[Brèves] Loi « séparatisme » : le point sur les principales dispositions en matière pénale

Réf. : Loi n° 2021-1109, du 24 août 2021, confortant le respect des principes de la République (N° Lexbase : L6128L74)

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[Brèves] Loi « séparatisme » : le point sur les principales dispositions en matière pénale. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/72121718-breves-loi-separatisme-le-point-sur-les-principales-dispositions-en-matiere-penale
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par Adélaïde Léon

le 22 Septembre 2021

► Selon les mots du communiqué de presse du Conseil des ministres du 9 décembre 2020, 115 ans après la promulgation de la loi du 9 décembre 1905, concernant la séparation des Églises et de l’État, « l’ambition de ce texte est de permettre à la République d’agir contre ceux qui veulent la déstabiliser afin de renforcer la cohésion nationale ; Ce texte vise à l’émancipation individuelle contre le repli identitaire » ; En matière pénale, cette nouvelle loi prévoit notamment l’élargissement du FIJAIT, le renforcement de la protection des agents publics contre les menaces et actes d’intimidation, un nouveau délit en matière de haine en ligne et des modifications s’agissant de la police des cultes.

Inscriptions au FIJAIT et mesures de sûreté. La loi prévoit notamment l’inscription dans le fichier judiciaire des auteurs d’infractions terroristes des condamnations pour provocation aux actes de terrorisme et apologie (C. pén., art. 421-2-5 N° Lexbase : L8378I43 et 421-2-5-1 N° Lexbase : L4800K8B).

Le régime d’inscription au FIJAIT est également modifié puisque l’ensemble des infractions visées par l’article 706-25-4 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7500L7W) (énumérant les infractions inscrites au fichier) sont désormais inscrites de plein droit sauf décision contraire et spécialement motivée.

Il est par ailleurs précisé que les mesures de sûreté énoncées à l’article 706-25-7 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7501L7X) ne seront pas appliquées aux personnes inscrites au FIJAIT lorsque les décisions ayant conduit à cette inscription concernent les infractions suivantes :

  • provocation aux actes de terrorisme et apologie (C. pén., art. 421-2-5 et 421-2-5-1) ;
  • violation des interdictions de sortie du territoire, de non-remise de passeport ou de carte nationale d’identité (C. pén., art. 421-2-5 et 421-2-5-1) ;
  • non-respect d’une mesure d’assignation à résidence, de violation des mesures d’interdiction d’entrer en relation avec certaines personnes (CSI, art. L. 225-7 N° Lexbase : L4824K88).

Protection des agents publics contre les menaces et actes d’intimidation. Il est créé un nouveau délit constitué par l’usage de menace, de violences ou d’intimidation à l’égard d’un agent public ou de toute autre personne chargée d’une mission de service public afin d'obtenir pour soi-même ou pour autrui une exemption totale ou partielle ou une application différenciée des règles qui régissent le fonctionnement dudit service (C. pén., art. 433-3-1 N° Lexbase : L7490L7K).

Ce délit est puni de 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. Par ailleurs, une interdiction de territoire français peut être prononcée à l’encontre de tout étranger qui se rendrait coupable de cette infraction.

Le texte précise que, lorsqu’il a connaissance de faits susceptibles de constituer cette infraction, le représentant de l'administration ou de la personne de droit public ou de droit privé à laquelle a été confiée la mission de service public dépose plainte.

Protection des enseignants. En réaction à l’assassinat de Samuel Paty le 16 octobre 2020, est par ailleurs créé un nouveau délit d’entrave à la fonction d’enseignant, d’une manière concertée à l’aide de menaces. Cette infraction est punie d’un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende.

Extension du dispositif d’alerte. Le texte étend la protection fonctionnelle des agents publics aux atteintes à leur intégrité physique ainsi qu’aux menaces (loi n° 83-634, du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires, dite loi « Le Pors », art. 6, quater A N° Lexbase : L6938AG3) en leur permettant de signaler ces faits dont ils feraient l’objet dans l’exercice de leur fonction, au dispositif d’alerte dédié.

Par ailleurs, le texte confère à la collectivité publique l’obligation de prendre, sans délai et à titre conservatoire, les mesures d’urgence de nature à faire cesser tout risque manifeste d’atteinte grave à l’intégrité physique d’un fonctionnaire et à prévenir la réalisation ou l’aggravation des dommages directement causés par ces faits.

Fiscalité des associations. La loi comprend également de nombreuses dispositions en matière fiscale, notamment en cas de condamnation pénale d’une association (v. M.-C. Sgarra, Loi confortant le respect des principes de la République : la fiscalité des dons en faveur des associations passée au crible, Le Quotidien Lexbase, 8 septembre 2021 N° Lexbase : N8632BYD).

Lutte contre les discours de haine et contenus illicites en ligne. La loi créée un délit de mise en danger par la révélation ou la diffusion d’informations relatives à la vie privée familiale ou professionnelle d’une personne permettant de l’identifier ou de la localiser aux fins de l’exposer ou d’exposer les membres de sa famille à un risque direct d'atteinte à la personne ou aux biens que l'auteur ne pouvait ignorer (C. pén., art. 223-1-1 N° Lexbase : L7485L7D). Cette infraction est punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. La peine est aggravée lorsque les faits sont commis au préjudice d’une personne dépositaire de l'autorité publique, chargée d'une mission de service public ou titulaire d'un mandat électif public ou d'un journaliste.

La loi aggrave les peines des infractions prévues aux articles suivants de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse (N° Lexbase : L7589AIW) lorsqu’elles sont commises par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission :

  • article 24 : provocation aux crimes et délits ;
  • article 24 bis : contestation de crime contre l’humanité, négation, minoration ou banalisation d’un crime de génocide, réduction en esclavage ou crime de guerre ;
  • article 33, alinéas 2 et 4 : injure envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ou à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou handicap.

Par ailleurs, fait notable en matière de presse, pour les délits précités, la loi nouvelle autorise le recours à la comparution immédiate et à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, sauf si ces délits résultent du contenu d’un message placé sous le contrôle d’un directeur de la publication. Les travaux parlementaires traduisent la volonté du législateur de viser ainsi les contenus publiés sur les réseaux sociaux.

Lutte contre les sites miroirs. La loi instaure une nouvelle procédure permettant de faciliter le blocage de l’accès aux sites miroirs, lesquels reproduisent des contenus déclarés illicites par décision judiciaire.

Modération en ligne. Nouveauté notable en matière de communication au public en ligne, la loi instaure de nouvelles obligations aux opérateurs de plateformes dépassant un certain nombre de connexions en matière de lutte contre la diffusion publique de contenus illicites. Cette disposition anticipe le projet de législation sur les services numériques (Digital Services Actes ou DSA) de la Commission européenne qui doit être présenté en décembre 2021.

Police des cultes. La loi nouvelle modifie la loi du 9 décembre 1905, concernant la séparation des Églises et de l’État (N° Lexbase : C03134QN), en durcissant la peine prévue en cas de :

  • menaces contre un individu, soit en lui faisant craindre de perdre son emploi ou d'exposer à un dommage sa personne, sa famille ou sa fortune, en vue de le déterminer à exercer ou à s'abstenir d'exercer un culte, à faire partie ou à cesser de faire partie d'une association cultuelle, à contribuer ou à s'abstenir de contribuer aux frais d'un culte ;
  • provocation directe, par un ministre du culte, à résister à l’exécution des lois ou aux actes légaux de l’autorité publique, ou à soulever ou à armer une parte des citoyens contre les autres ;
  • l’organisation et la tenue d’activité de réunion politique ou d’activité électorale pour des élections françaises ou étrangères dans un local servant habituellement à l’exercice du culte.

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