La législation de l'Union ne prévoit pas le droit, pour un travailleur alléguant de façon plausible qu'il remplit les conditions énoncées dans un avis de recrutement et dont la candidature n'a pas été retenue, d'accéder à l'information précisant si l'employeur, à l'issue de la procédure de recrutement, a embauché un autre candidat. Toutefois, le refus de tout accès à cette information peut constituer l'un des éléments à prendre en compte dans le cadre de l'établissement des faits qui permettent de présumer l'existence d'une discrimination. Telles sont les solutions retenues par la Cour de justice de l'Union européenne dans un arrêt du 19 avril 2012 (CJUE, 19 avril 2012, aff. C-415/10
N° Lexbase : A0985IKP).
Dans cette affaire, une personne a répondu à deux annonces d'une société allemande en se portant candidate. Ses candidatures successives ont été rejetées, sans qu'elle ne soit convoquée à un entretien et sans que l'entreprise ne lui fournisse d'indication quant aux motifs de ce rejet. Estimant qu'elle remplissait les conditions requises pour occuper le poste, elle considère qu'elle a subi un traitement moins favorable que celui d'une autre personne dans une situation similaire, en raison de son sexe, de son âge et de son origine ethnique. Elle a saisi la justice allemande en demandant, d'une part, que la société lui verse une indemnité pour discrimination à l'emploi et, d'autre part, qu'elle produise le dossier du candidat recruté, ce qui lui permettrait de démontrer qu'elle est plus qualifiée que ce dernier. La juridiction allemande demande à la Cour si le droit de l'Union prévoit la possibilité pour un travailleur d'accéder à l'information précisant si l'employeur a embauché un autre candidat et, si tel est le cas, sur la base de quels critères et si la circonstance que l'employeur ne communique pas les informations demandées constitue un fait permettant de présumer l'existence de la discrimination alléguée par le travailleur. Dans le prolongement de l'arrêt rendu le 21 juillet 2011 (CJUE, 21 juillet 2011, aff, C-104/10
N° Lexbase : A0607HWE), la Cour estime que le droit de l'Union ne prévoit pas spécifiquement la possibilité pour une personne qui s'estime victime d'une discrimination d'accéder aux informations afin qu'elle soit en mesure d'établir les faits qui permettent de présumer l'existence d'une discrimination. Toutefois, il n'en demeure pas moins qu'il ne saurait être exclu qu'un refus d'information opposé par la partie défenderesse est susceptible de compromettre la réalisation de l'objectif poursuivi et de priver le droit de l'Union de son effet utile. Ainsi, pour la Cour, il incombe à la juridiction allemande notamment de prendre en compte toutes les circonstances du litige afin de déterminer s'il y a suffisamment d'indices pour que les faits permettant de présumer l'existence d'une telle discrimination soient considérés comme établis (cf. l’Ouvrage "Droit du travail"
N° Lexbase : E7289ESR).
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