Réf. : Cass. civ. 3, 28 mai 2020, n° 19-12.908, F-D (N° Lexbase : A54483MQ)
Lecture: 4 min
N3562BYL
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Anne-Lise Lonné-Clément
le 03 Juin 2020
► Le délai de prescription de l’action du syndicat des copropriétaires en interdiction de poursuivre la location d’une chambre de service, qui contreviendrait au règlement de copropriété, court du jour où le syndicat des copropriétaires a eu connaissance de la location, et non du jour où l'infraction a été commise soit la date de la première location.
Telle est la solution à retenir d’un arrêt rendu le 28 mai 2020 par la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Cass. civ. 3, 28 mai 2020, n° 19-12.908, F-D N° Lexbase : A54483MQ).
En l’espèce, par acte du 22 octobre 2001, un copropriétaire avait donné en location une chambre de service. La locataire s'étant plainte d'infiltrations et de désordres, une expertise avait été ordonnée en référé le 16 décembre 2004. Après dépôt du rapport d'expertise, le syndicat des copropriétaires avait été condamné à payer à titre provisionnel au copropriétaire diverses sommes pour perte de loyers et à procéder, sous astreinte, à des travaux sur les parties communes.
Le syndicat des copropriétaires avait assigné le copropriétaire en interdiction de poursuivre la location de cette chambre de service, qui contreviendrait au règlement de copropriété, et en restitution d'un trop-perçu sur l'indemnisation de son préjudice. Il avait également assigné son ancien syndic, en responsabilité pour les retards pris dans le traitement du dossier de réfection de l'étanchéité de la toiture-terrasse.
Pour déclarer prescrite l'action du syndicat des copropriétaires, la cour d’appel d’Aix-en-Provence avait retenu que les actions tendant à faire respecter le règlement de copropriété se prescrivent par dix ans et que le délai court du jour où l'infraction a été commise, soit, en cas d'affectation irrégulière d'un lot au cours de locations successives, de la date de la première location (CA Aix-en-Provence, 31 mai 2018, n° 16/09376 N° Lexbase : A9081XPZ).
La décision est censurée par la Cour suprême, qui relève que le délai ne courait que du jour où le syndicat des copropriétaires avait eu connaissance de la location.
On rappellera que la jurisprudence portant sur la question du point de départ du délai de prescription des actions personnelles relatives à la copropriété entre copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat, prévu par l’article 42, alinéa 1er , de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : A9081XPZ), a en effet évolué puisqu’il était considéré pendant longtemps que ce point de départ se situait au moment de la survenance des faits étant la cause génératrice de l'action (cf. notamment Cass. civ. 3, 12 juin 2002, n° 01-02.154, FS-P+B N° Lexbase : A9040AYH, et en cas de violation du règlement de copropriété, du jour où l’infraction a été commise : cf. Cass. civ. 3, 23 mai 1991, n° 89-19.879 N° Lexbase : A4652ACB). On comprend donc que la position des juges d’appel dans la présente affaire s’inscrivait dans ce raisonnement, en retenant que le délai courait du jour où l'infraction avait été commise, soit, en cas d'affectation irrégulière d'un lot au cours de locations successives, de la date de la première location.
Mais la règle jurisprudentielle ici posée a évolué notamment dans le cadre d’actions en réparation de dommage intentées par un copropriétaire contre le syndicat, pour lesquelles il a été précisé, que le point de départ était la date à laquelle la cause des désordres avait été révélée, et non la date de survenance des dommages, Cass. civ. 3, 19 novembre 2015, deux arrêts, n° 14-17.784 N° Lexbase : A5469NXT et n° 13-19.999 N° Lexbase : A5411NXP, FS-P+B, cf. les obs. de P. Baudouin, Lexbase, éd. priv., n° 637, 2015 N° Lexbase : N0445BWE).
On comprend alors que la position de la Cour de cassation dans la présente affaire s’inscrit bien dans cette lignée, en considérant que le point de départ correspondait au jour où le syndicat des copropriétaires avait eu connaissance de la location.
Il faut savoir, enfin, que la question du point de départ du délai applicable aux actions personnelles a depuis été clarifiée par la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, dite « ELAN » (N° Lexbase : L8700LM8), qui a modifié l'article 42, alinéa 1, de la loi du 10 juillet 1965, en rendant ici applicable les dispositions de l'article 2224 du Code civil (N° Lexbase : L7184IAC), relatives au délai de prescription et à son point de départ ; non seulement le délai d’action a ainsi été réduit de dix ans à cinq ans, mais encore est-il désormais prévu par la loi que le point de départ du délai est donc le jour où le titulaire du droit a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance des faits lui permettant de l’exercer.
Pour aller plus loin, cf. l’Ouvrage « Droit de la copropriété », Point de départ du délai de prescription quinquennale (N° Lexbase : E7168ETN). |
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:473562