L'avènement de l'action collective ou
class action est à peine annoncé que la Cour de cassation a dû, dernièrement, serrer le frein de la titrisation de la simple action en justice. En effet, si l'apport en jouissance d'une action en justice moyennant l'attribution de parts sociales est plus que douteux sur le terrain du droit des sociétés, cet apport s'avère impossible sur celui de la procédure civile. Chacun conviendra que "
nul ne peut agir en justice s'il n'a pas un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention" et, conformément à l'adage "
nul ne plaide par procureur", un plaignant ne peut saisir les tribunaux au nom d'un autre s'il n'a pas reçu au préalable un mandat officiel de sa part. Ces principes fondamentaux de la procédure civile contraignent à la personnalisation de l'action en justice ; personnalisation qui est en inadéquation avec la mise en commun pour une exploitation en jouissance de cette action. La décision de la Cour suprême n'est donc pas surprenante. Mais, en serait-il de même après l'extension des
class actions ? Si la Commission transversale du CNB sur la "
Class Action à la française" relève les avantages majeurs que représente la
class action par rapport aux actions individuelles ou associatives, à savoir faciliter l'accès à la justice et la moralisation du comportement des acteurs économiques ainsi que participer à la bonne administration de la justice, d'autres, comme Mathieu Laine, avocat et délégué général de l'Institut Turgot, critiquent violemment l'introduction dans le paysage juridique français d'un système de plainte en nom collectif ayant joué, aux Etats-Unis, pays initiateur d'une telle mesure, le rôle particulièrement nocif d'accélérateur du processus de judiciarisation des relations économiques en incitant les consommateurs à s'engager dans un consumérisme judiciaire aussi ruineux qu'excessif (
Les Echos du 6 avril 2005). Mais au-delà du débat sur la
class action à la française, le Président du Conseil national des barreaux rappelle qu'"
il faut donner aux consommateurs les moyens de faire respecter leurs droits : aujourd'hui, ils sont démunis parce que, pris séparément, aucun des préjudices dont ils sont victimes n'est suffisamment important pour couvrir les frais d'une action en justice". Dans cette perspective, la communautarisation des risques et profits liés à ces actions collectives semble inévitable et l'avenir de la jurisprudence ici rapportée plus que compromis. Les éditions juridiques Lexbase vous proposent de lire, cette semaine, le point de vue de
Jean-Philippe Dom, Maître de conférences à l'Université de Caen,
En attendant la class action
: l'action en justice n'est pas susceptible d'apport en jouissance.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable