Que se soit pour répondre aux canons de la modernisation économique, à l'orthodoxie de l'harmonisation communautaire ou au spectre de la délocalisation, l'affaire semble bien lancée : la fiducie devrait, "enfin", voir le jour, ou du moins être réglementée, prochainement, en France. En effet, "
la France ne peut pas rester insensible à la globalisation de cet instrument juridique", comme le soulignent les rapporteurs de la proposition de loi dont il est ici question. Mistigri des tiroirs du Parlement depuis plus d'une dizaine d'année, l'instauration, au sein de la "vie des affaires", de la fiducie, comme contrat particulier réglementant, notamment, toutes les "fiducies innomées" que recèle notre droit, semble répondre à une nécessité croissante : celle d'importer, sous les couleurs communautaires du droit romano-germanique, le régime des
trusts anglo-saxons. Rappelons que la fiducie est une convention par laquelle un constituant transfère des droits de toute nature à une personne physique ou morale dénommée fiduciaire, à charge pour elle de les administrer ou d'en disposer au profit d'un ou plusieurs bénéficiaires. Le transfert s'opère, ainsi, dans un patrimoine d'affectation, appelé patrimoine fiduciaire ; le fiduciaire devenant titulaire ou propriétaire fiduciaire des droits transférés. Aussi, les juristes attribuent, d'ores et déjà, à ce contrat, plusieurs finalités pratiques : la fiducie-sûreté permettant de faciliter le recouvrement des créances par l'appropriation directe du bien confié en cas de manquement de la part du débiteur/constituant ; la fiducie-gestion palliant les limites du mandat en instaurant, notamment, une stabilisation des relations entre le propriétaire des biens et le "gestionnaire" ; la fiducie-transmission à titre onéreux permettant le transfert des biens du constituant à un ou plusieurs bénéficiaires après l'écoulement d'un certain temps ou la survenance d'un événement, afin d'échapper, notamment, au régime de l'indivision. Enfin, les défenseurs de ce contrat soulignent les possibilités ainsi offertes aux "personnes en difficulté" ou "personnes vulnérables", mais qui ne bénéficient pas, aujourd'hui, de la possibilité de recourir à la tutelle ou à la curatelle. Entreprises, comme particuliers, sont donc intéressés à ce que la fiducie "à la française" vienne combler notre droit... Il ne restera plus qu'à combattre les obstacles fiscaux et la possible instrumentalisation de cette nouvelle convention aux fins de blanchiment de capitaux. Lexbase Hebdo - édition affaires vous propose de revenir sur cette proposition de loi avec
Marie-Elisabeth Mathieu, Maître de conférences à l'Université d'Evry-Val d'Essonne, Membre du Centre de formation professionnelle notariale de Paris, et
of counsel JeantetAssociés.
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