La responsabilité professionnelle de l'avocat ne peut être engagée dès lors que la perte de chance alléguée est hypothétique et donc non-indemnisable. Tel est le rappel opéré par la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 12 mai 2016 (Cass. civ. 1, 12 mai 2016, n° 15-17.062, F-D
N° Lexbase : A0815RPU). En l'espèce, les sociétés D. et K., exploitant des locaux commerciaux dans une galerie marchande, ont confié à Me X, avocat, la défense de leurs intérêts dans le litige les opposant à la société C. à la suite de l'aménagement d'un accès direct à l'hypermarché du centre commercial, les privant du passage d'une partie de la clientèle devant leurs magasins. Un différend étant apparu sur le montant des honoraires restant dus à l'avocat après son dessaisissement, le Bâtonnier les a fixés en écartant les honoraires de résultat, qui n'avaient pas été prévus par une convention conclue avec les clientes ; et cette décision a été confirmée par une ordonnance devenue irrévocable. Reprochant à l'avocat de ne pas avoir respecté ses obligations lors de la facturation de ses honoraires et d'avoir manqué à son devoir de diligence et d'efficacité dans la conduite du dossier, leur ayant ainsi fait perdre une chance d'obtenir plus rapidement satisfaction en choisissant un autre conseil, les sociétés D. et K. l'ont assigné en indemnisation. La cour d'appel ayant rejeté leurs demandes (CA Nancy, 10 février 2015, n° 13/03372
N° Lexbase : A3492NBX), elles ont formé un pourvoi en cassation. En vain. En effet, la Haute juridiction rappelle que même si les juges du fond ont retenu que l'avocat avait manqué à ses obligations professionnelles en facturant des honoraires de résultat en l'absence de toute convention les stipulant et en omettant d'informer ses clientes des conditions de fixation de sa rémunération, les sociétés, s'agissant du préjudice allégué pour perte de chance d'obtenir une décision favorable dans un meilleur délai en choisissant un avocat plus diligent, ne démontrent pas que, mieux informées, elles auraient fait le choix d'un autre conseil. De plus, elles n'établissent pas que l'avocat aurait manqué à ses obligations de diligence et d'efficacité dans la gestion du dossier ni qu'un autre avocat aurait permis d'obtenir plus rapidement la fermeture de l'accès contesté, dès lors que la durée de la procédure résultait de l'opiniâtreté de la société C. dans l'exercice de sa défense. Partant, la cour d'appel, par une appréciation souveraine des éléments du débat, a déduit que la perte de chance alléguée était hypothétique, ce qui excluait toute indemnisation (cf. l’Ouvrage "La profession d'avocat" N° Lexbase : E4316E7Y).
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