Réf. : CE, 3e-8e ch. réunies, 18 juin 2024, n° 463484, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A86825IE
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par Yann Le Foll
le 02 Juillet 2024
► La seule méconnaissance par un État des règles en matière de temps de travail constitue un préjudice indemnisable pour les durées maximales de travail et minimales de repos mais pas pour le repos dominical, sauf établissement par l’intéressé des préjudices qui en ont résulté pour lui.
Principe. La méconnaissance des garanties instituées tant par le droit de l'Union européenne que par le droit national en matière de durée maximale journalière et hebdomadaire de travail et de durée minimale journalière et hebdomadaire de repos, est susceptible de porter atteinte à la sécurité et à la santé des intéressés en ce qu'elle les prive du repos auquel ils ont droit.
Dès lors, cette méconnaissance leur cause, par elle-même et quelles que soient leurs conditions de rémunération, un préjudice dont ils peuvent demander la réparation, indépendamment de celle des autres préjudices qu'ils justifieraient avoir subis à raison de cette privation.
Précision. Il avait auparavant été jugé que le dépassement des durées maximales de travail prévues tant par le droit de l'Union européenne que par le droit national, ne peut ouvrir droit par lui-même qu'à l'indemnisation des préjudices résultant de l'atteinte à la santé et à la sécurité ainsi que des troubles subis dans les conditions d'existence (CE 3e et 8e ch. réunies, 13 novembre 2020, n° 430378, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A545534S).
Tel n'est pas le cas, en revanche, de l'exigence relative au repos dominical, dont la méconnaissance n'ouvre droit qu'à réparation des seuls préjudices dont l'intéressé établit qu'ils en ont résulté pour lui.
Faits. Le requérant a été employé en qualité d'agent éducatif au sein de l'institut départemental de l'enfance et de la famille géré par la Métropole de Lyon par des contrats à durée déterminée successifs entre les mois de novembre 2018 et de février 2020.
Il a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la Métropole de Lyon à l'indemniser des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de ses conditions d'emploi et du non-respect par son employeur de la réglementation relative au temps de travail et de repos.
Il se pourvoit en cassation contre le jugement du 23 février 2022 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Position CE. Le tribunal a relevé qu'entre les mois de juin 2019 et février 2020, l’intéressé avait dû reprendre à cinq reprises son service à 6 heurs 45 après n'avoir bénéficié que d'un repos d'une durée comprise entre 9 heures 30 et 10 heures, inférieur à la durée minimale de 12 heures prescrite par les dispositions de l'article 6 du décret n° 2002-9, du 4 janvier 2002 N° Lexbase : L5025DLP, et qu'il avait, entre le mois de janvier 2019 et le mois de février 2020, été amené à travailler à douze reprises pendant une durée excédant en moyenne de deux heures la durée quotidienne de travail maximale de 12 heures prescrite par les dispositions de l'article 7 du même décret.
Le tribunal a toutefois rejeté les demandes indemnitaires du requérant au titre de ces manquements, au motif qu'il se bornait à en réclamer une réparation forfaitaire, sans établir ni même alléguer qu'il aurait effectivement subi, du fait de l'irrégularité de son emploi du temps, des préjudices personnels.
Décision. Il résulte du principe précité qu'en statuant ainsi, le tribunal a commis une erreur de droit.
Le tribunal a également relevé que le requérant avait été privé du bénéfice du repos dominical, tel qu'il est prévu par les dispositions du dernier alinéa de l'article 6 du décret n° 2002-9, du 4 janvier 2002, selon lesquelles sur une période de deux semaines, l'un au moins des jours de repos doit être un dimanche, dès lors qu'il a dû travailler trois dimanches consécutifs au mois de janvier 2019.
Décision. C'est sans commettre d'erreur de droit, et par une appréciation souveraine des faits exempte de dénaturation, que le tribunal a écarté la demande présentée à ce titre au motif que le requérant n'établissait pas l'existence de préjudices personnels résultant de cette méconnaissance.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE, La responsabilité administrative sans faute, La responsabilité administrative sans faute du fait des lois et conventions internationales, in Droit de la responsabilité administrative (dir. P. Tifine), Lexbase N° Lexbase : E3768EU4. |
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