Réf. : Cass. com., 4 avril 2024, n° 22-21.880, F-B N° Lexbase : A63272ZD
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par Vincent Téchené
le 19 Avril 2024
► La caution qui n'a pas été invitée par le créancier à établir une fiche de renseignements n'est pas tenue de déclarer spontanément l'existence d'engagements antérieurs, de sorte qu'en l'absence de telles déclarations, l'ensemble de ses biens et revenus, dont elle établit l'existence, doit être pris en compte pour apprécier l'existence d'une éventuelle disproportion manifeste de son engagement.
Faits et procédure. Le 11 avril 2017, une société a consenti à une autre société un prêt d'un montant de 150 000 euros pour financer l'acquisition d'un fonds de commerce de boulangerie. Par un acte du même jour, deux personnes se sont rendues cautions solidaires de l’emprunteuse à concurrence de 150 360 euros. Celle-ci s'étant avérée défaillante, la prêteuse a assigné en paiement l’une des cautions. Celle-ci invoquait la disproportion de son engagement.
La cour d’appel de Paris ayant condamné la caution à payer une certaine somme (CA Paris, 5-10, 27 juin 2022, n° 20/17953 N° Lexbase : A953478M), cette dernière a formé un pourvoi en cassation.
Décision. En premier lieu, l'arrêt d’appel avait retenu que si la caution fait état de sept cautionnements antérieurs à son engagement qu'elle n'a pas déclarés au créancier, elle était tenue à une obligation déclarative même si certains de ses engagements avaient été consentis au profit de la créancière qui en était, dès lors, informée.
La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel. Elle énonce que n'ayant pas été invitée par le créancier à établir une fiche de renseignements, la caution n'était pas tenue de déclarer spontanément l'existence d'engagements antérieurs, de sorte qu'en l'absence de telles déclarations, l'ensemble de ses biens et revenus, dont elle établissait l'existence, devait être pris en compte pour apprécier l'existence d'une éventuelle disproportion manifeste de l'engagement litigieux. Dès lors la cour d’appel a violé les articles L. 332-1 N° Lexbase : L1162K78 et L. 343-4 N° Lexbase : L1103K7Y du Code de la consommation, ces derniers dans leur rédaction issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 N° Lexbase : L0300K7A.
En second lieu, la Haute juridiction rappelle qu’il incombe au créancier professionnel qui entend se prévaloir d'un contrat de cautionnement manifestement disproportionné, lors de sa conclusion, aux biens et revenus de la caution, personne physique, d'établir qu'au moment où il l'appelle, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation. Ainsi, la cour d’appel a inversé la charge de la preuve en retenant que la caution ne démontre pas qu'elle dispose, à présent, des moyens de faire face aux engagements qu'elle a pris au titre de son cautionnement (v. dans le même sens, Cass. com., 1er avril 2014, n° 13-11.313, FS-P+B N° Lexbase : A6236MIS, G. Piette, Lexbase Affaires, mai 2014, n° 379 N° Lexbase : N1957BUZ ; Cass. civ. 1, 10 septembre 2014, n° 12-28.977, F-P+B N° Lexbase : A4223MWC ; Cass. com., 1er mars 2016, n° 14-16.402, FS-P+B N° Lexbase : A0727QYL). On rappellera que la possibilité pour le créancier d’invoquer le retour à meilleure fortune en cas de disproportion de l’engagement de la caution n’existe plus pour les cautionnements conclus après le 1er janvier 2022 et soumis comme tel aux dispositions issues de l’ordonnance du 15 septembre 2021 (ordonnance n° 2021-1192, du 15 septembre 2021, portant réforme du droit des sûretés N° Lexbase : L8997L7D ; v. C. civ., art. 2300 N° Lexbase : L0174L8X).
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