Le Quotidien du 13 décembre 2023 : Avocats/Accès à la profession

[Brèves] Accès à la profession d'avocat pour un étranger et preuve de la condition de réciprocité

Réf. : Cass. civ. 1, 6 décembre 2023, n° 22-15.558, FS-B N° Lexbase : A669017W

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N7752BZ7

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par Marie Le Guerroué

le 13 Décembre 2023

► L'article VII de l'Accord général sur le commerce de services, qui fait partie des accords de l'Organisation mondiale du commerce, ne peut être invoqué directement devant les juridictions nationales, de sorte que le ressortissant d'un État n'appartenant pas à l'Union européenne ou n'étant pas partie à l'accord sur l'Espace économique européen doit, au soutien d'une demande d'inscription au barreau fondée sur l'article 11, 1°, de la loi n° 71-1130, du 31 décembre 1971, prouver que la condition de réciprocité posée par l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971 est remplie.

Faits et procédure. Un étudiant de nationalité béninoise, avait obtenu au cours de l'année universitaire 2007-2008 un Master en droit de l'entreprise, délivré par une université et occupait depuis 2008, à titre bénévole, les fonctions de juriste au sein d'une organisation syndicale. Par décision du 4 novembre 2020, le conseil de l'Ordre des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis avait accepté sa demande d'inscription au tableau de ce barreau, sur le fondement de l'article 98, 5°, du décret n° 91-1197, du 27 novembre 1991 N° Lexbase : L8168AID permettant aux juristes attachés pendant huit ans au moins à l'activité d'une organisation syndicale de bénéficier d'un accès dérogatoire à la profession d'avocat, sous réserve de satisfaire à l'examen de contrôle des connaissances en déontologie et réglementation professionnelle prévu à l'article 98-1 et de disposer d'un domicile professionnel. Le procureur général près la cour d'appel de Paris a formé un recours contre cette décision. Devant la Cour de cassation, l’interressé fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'inscription au tableau des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis.

Réponse de la Cour. L'article 11, de la loi n° 71-1130, du 31 décembre 1971, portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques N° Lexbase : L6343AGZ détermine les conditions d'accès à la profession d'avocat en France et dispose, en son 1°, que le candidat doit être français, ressortissant d'un État membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen, ou ressortissant d'un État ou d'une unité territoriale n'appartenant pas à l'Union ou à cet Espace économique qui accorde aux Français la faculté d'exercer sous les mêmes conditions l'activité professionnelle que l’intéressé se propose lui-même d'exercer en France, sous réserve des décisions du Conseil de l'Union européenne relatives à l'association des pays et territoires d'outre-mer à la Communauté économique européenne ou avoir la qualité de réfugié ou d'apatride reconnue par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. La Cour de cassation a jugé que, entre les États signataires de l'accord général sur le commerce de services (l'AGCS), directement applicable dans l'ordre juridique interne nonobstant toute disposition contraire ou incompatible, la condition de réciprocité, réputée acquise, n'appelle aucune justification ou vérification particulière (Cass. civ. 1, 22 novembre 2007, n° 05-19.128, FS-P+B N° Lexbase : A7080DZA).
Revirement. Néanmoins, la CJUE a retenu que, compte tenu de leur nature et de leur économie, les accords de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ne figurent pas en principe parmi les normes au regard desquelles elle contrôle la légalité des actes des institutions communautaires et que ce n'est que dans l'hypothèse où la Communauté a entendu donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de l'OMC, ou dans l'occurrence où l'acte communautaire renvoie expressément à des dispositions précises des accords OMC, qu'il appartient à la Cour de contrôler la légalité de l'acte communautaire en cause au regard des règles de l'OMC, relevant que cette interprétation était conforme à l'énoncé du dernier considérant du préambule de la décision 94/800 du Conseil du 22 décembre 1994 relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l'Uruguay, aux termes duquel, « par sa nature, l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce, y compris ses annexes, n'est pas susceptible d'être invoqué directement devant les juridictions communautaires et des États membres » (CJCE, 23 novembre 1999, aff. C-149/96, République portugaise c/ Conseil de l'Union européenne N° Lexbase : A1962AWL ; CJCE, 30 septembre 2003, aff. C-93/02, Biret International SA c/ Conseil de l'Union européenne N° Lexbase : A6944C93 ; CJCE, 1er mars 2005, aff. C-377/02, Léon Van Parys NV c/ Belgisch Interventie- en Restitutiebureau (BIRB) N° Lexbase : A0922DHM ; CJUE, 18 décembre 2014, aff. C-306/13, LVP NV N° Lexbase : A7891M7E).
Il y a donc lieu de juger désormais que l'article VII de l'AGCS, qui fait partie des accords OMC, ne peut être invoqué directement devant les juridictions nationales, de sorte que le ressortissant d'un État n'appartenant pas à l'Union européenne ou n'étant pas partie à l'accord sur l'Espace économique européen doit, au soutien d'une demande d'inscription au barreau fondée sur l'article 11, 1°, de la loi du 31 décembre 1971, prouver que la condition de réciprocité posée par l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971 est remplie.

Rejet. La Cour considère par conséquent que le moyen, fondé sur l'application directe dans l'ordre juridique interne de l'AGCS, est inopérant. Elle rejette le pourvoi.

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