Le Quotidien du 13 décembre 2023 : Protection sociale

[Brèves] Refus d’attribution de la prime à la naissance à un couple d’hommes ayant recouru à la GPA

Réf. : Cass. civ. 2, 30 novembre 2023, n° 22-10.559, FS-B N° Lexbase : A023217Q

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par Laïla Bedja

le 12 Décembre 2023

► Au regard des articles L. 531-2 et suivants du Code de la Sécurité sociale, si la prime à la naissance a notamment pour objet de permettre au ménage ou à la personne de faire face aux dépenses liées à l'arrivée d'un enfant, elle répond également à un objectif sanitaire de surveillance et de protection de la mère et de l'enfant à naître ; pour y prétendre, la mère de l'enfant à naître doit appartenir au ménage auquel la prime est attribuée, de sorte qu'un allocataire ayant eu recours à une convention de gestation pour le compte d'autrui ne peut obtenir le versement de cette prestation familiale.

Quid de la conformité de ces dispositions à la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE), d’une part, et aux articles 14 de la CESDH et 1er du Protocole additionnel n° 1 de la ladite Convention ?

Les dispositions nationales conduisant à refuser à l'allocataire ayant eu recours à une gestation pour le compte d'autrui la seule prime à la naissance versée, sous réserve que les ressources de l'allocataire ne dépassent pas un plafond, en une seule fois et dont le montant était en 2020 de 947,34 euros, ne méconnaissent pas l'intérêt supérieur de l'enfant. Les dispositions nationales ne sont pas non plus contraires aux textes européens au motif que la différence de traitement est justifiée par la prohibition des conventions portant sur la gestation pour le compte d’autrui, telle qu’édictée par les articles 16-7 et 16-9 du Code civil.

Les faits et procédure. Un couple d’hommes mariés a eu recours à la gestation pour le compte d’autrui aux États-Unis. Il a sollicité auprès de la caisse d’allocations familiales le bénéfice de la prestation d’accueil du jeune enfant, pour son enfant. La caisse lui a attribué l’allocation de base, mais a refusé l’octroi de la prime à la naissance.

L’allocataire a alors saisi d’un recours la juridiction chargée de la Sécurité sociale.

Pour rejeter la demande, le tribunal considère qu'en l'état actuel des textes en vigueur, M. X ne peut pas prétendre au bénéfice de la prime de naissance. Il appartient au législateur de s'interroger sur l'évolution éventuelle de la réglementation au regard des nouveaux modes de parentalité, notamment en prenant en compte les textes internationaux tels que la Convention internationale des droits de l'enfant au regard de l'intérêt de l'enfant et de la CESDH au regard de la lutte contre les discriminations. L'adaptation des règles de droit suit souvent l'évolution des comportements de la société, mais le juge du fond ne peut se limiter à appliquer et à interpréter la règle de droit contemporaine. Le juge ne peut ni devenir un militant d'un mode de parentalité qui se base sur un processus de procréation aujourd'hui interdit en France, ni générer de nouveaux droits en privilégiant l'application directe des textes internationaux précités et en sanctionnant de ce fait la non-conformité de réglementations nationales au regard des dits traités.

M. X a alors formé un pourvoi en cassation. Il invoque une discrimination indirecte fondée sur sa situation de famille, son sexe et son orientation sexuelle entraînant une violation de l’article 14 de la CESDH N° Lexbase : L4747AQU et de l’article 1er du Protocole additionnel n° 1. Il reproche au tribunal de ne pas avoir exercé son office en refusant d’analyser si les textes français sont discriminatoires et contraires à la CESDH, entraînant une violation de l’article 4 du Code civil N° Lexbase : L2229AB8 et de l’article 14 de la CESDH précité. Enfin, selon le demandeur, le juge aurait dû analyser le texte par rapport à l’intérêt supérieur de l’enfant ; le refus d’office du juge entraînant une violation de l’article 3 § 1 de la Convention internationale des droits de l’enfant.

La décision. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction rejette le pourvoi du parent.

Dans le cadre de cette affaire, la Défenseure des Droits (décision n° 2021-242, du 10 septembre 2021), saisie par les époux, avait rendu des observations le 2021. Elle y énonce qu’il est de l’intérêt supérieur de l’enfant, que les parents qui sollicitent le versement de la prime à la naissance puissent bénéficier de cette prestation, quel que soit le mode de parentalité, y compris lorsqu’il n’est pas prévu par les textes. Aussi, les dispositions du Code de la Sécurité sociale, qui conduisent les caisses à procéder au versement de cette prime sans prendre en compte la charge réelle de l’enfant, mais uniquement l’état de grossesse, apparaissent contraires aux raisons ayant présidé à la création de la prestation, laquelle n’a pas d’autre but actuellement que de préparer l’arrivée d’un enfant et d’aider les parents à financer des dépenses liées à la naissance de celui-ci. Elle conclut alors que le refus de versement de la prime de naissance à la famille porte atteinte à l’intérêt supérieur de l’enfant et constitue une discrimination fondée sur les critères de la situation de famille, du sexe et de l’orientation sexuelle.

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