Le Quotidien du 14 novembre 2023 : Procédure pénale

[Brèves] Enquête et destruction de stupéfiants : constitutionnalité de l’absence de conservation d’échantillon

Réf. : Const. const., décision n° 2023-1067 QPC, du 10 novembre 2023 N° Lexbase : Z858605A

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[Brèves] Enquête et destruction de stupéfiants : constitutionnalité de l’absence de conservation d’échantillon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/101361702-0
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par Adélaïde Léon

le 22 Novembre 2023

► Dans le cadre de l’enquête, l’absence d’obligation de conserver un échantillon des produits stupéfiants saisis avant leur destruction – comme c’est le cas lors de l’instruction – ne prive pas la personne ainsi poursuivie de la possibilité de contester la condition de recueille des éléments de preuve et offre des garanties équivalentes aux mis en cause jugés à l’issue de les deux cadres procéduraux que sont l’enquête et l’instruction.

Rappel de la procédure. Par un arrêt du 6 septembre 2023, la Chambre criminelle de la Cour de cassation (Cass. crim., 6 septembre 2023, n° 23-81.209, F-D N° Lexbase : A38571GX) a saisi le Conseil constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité relative au premier alinéa de l’article 706-30-1 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L7675IPX, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2011-267, du 14 mars 2011, d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure N° Lexbase : L5066IPC.

La première phrase du premier alinéa de l’article en cause prévoit qu’en matière de trafic de stupéfiants, le juge d’instruction qui ordonne la destruction de tels produits doit en conserver un échantillon afin de permettre, le cas échéant, qu’ils fassent l’objet d’une expertise.

Motifs de la QPC. Il était reproché aux dispositions en cause de réserver au cadre de l’instruction l’obligation de conserver un échantillon des produits stupéfiants saisis avant qu’ils ne soient détruits. Une telle obligation n’étant pas prévue pour l’enquête préliminaire ou de flagrance, cette situation priverait la personne poursuivie dans ce cadre de la possibilité de contester la nature desdits produits après leur destruction.

Il résulterait de cet état du droit une méconnaissance des droits de la défense, du droit à un procès équitable et du principe d’égalité devant la justice.

Il était également reproché au législateur d’avoir, pour les mêmes motifs, méconnu l’étendue de sa compétence dans des conditions affectant les droits et principes précités.

Décision. Le Conseil constitutionnel rappelle que la destruction des biens meubles placés sous main de justice peut être ordonnée lorsqu’il s’agit d’objets qualifiés par la loi de dangereux ou de nuisibles, ou dont la détention est illicite.

Cette décision peut être prise par le procureur de la République (dans le cadre d’une enquête, C. proc. pén., art. 41-5 N° Lexbase : L7279LZM) ou le juge d’instruction (dans le cadre d’une information judiciaire, C. proc. pén., art. 99-2 N° Lexbase : L7286LZU).

S’il est prévu que le juge d’instruction doit ordonner la conservation d’un échantillon avant destruction, cette obligation n’est pas prévue dans le cadre de l’enquête.

Le Conseil constitutionnel déclare toutefois les dispositions en cause conforme à la Constitution.

Le Conseil rejette tout d’abord le grief fondé sur la méconnaissance des droits de la défense et du droit au procès équitable :

  • d’une part, dans le cadre d’une enquête préliminaire ou de flagrance, seuls les produits dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité peuvent être détruits (C. proc. pén., art. 41-5). À cette occasion, la personne mise en cause reçoit notification de la décision motivée du procureur de la République et peut ainsi former un recours suspensif devant la chambre de l’instruction ;
  • d’autre part, devant la juridiction de jugement, la preuve de la nature des produits saisis peut être rapportée par tout moyen et le juge ne peut fonder sa décision que sur des éléments qui lui sont apportés au cours des débats et contradictoirement discutés devant lui. À cette occasion, il appartient au ministère public de rapporter la preuve de l’ensemble des éléments constitutifs de l’infraction.

Le mis en cause peut dans ces circonstances contester les conditions de recueil des éléments de preuve.

Le Conseil rejette également le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la justice :

  • à situations différentes, il peut être appliqué des règles différentes. Ainsi, compte tenu de la gravité et la complexité des faits susceptibles de justifier l’ouverture d’une instruction, les personnes renvoyées devant une juridiction de jugement à la suite d’une information judiciaire ouverte pour trafic de stupéfiants dans une situation différente de celles citées à comparaître à l’issue d’une enquête préliminaire ou de flagrance ;
  • la possibilité offerte au mis en cause dans le cadre d’une enquête de contester les conditions de recueil des éléments de preuve permet d’affirmer qu’il bénéficie des garanties équivalentes à l’individu jugé à l’issue d’une information judiciaire.

Pour aller plus loin : v. M. Hy, ÉTUDE : les saisies pénales, Les saisies d’objets particuliers, in Procédure pénale (dir. J.-B. Perrier), Lexbase N° Lexbase : E083903H.

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