Ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020 portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises et des exploitations agricoles aux conséquences de l'épidémie de covid-19

Ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020 portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises et des exploitations agricoles aux conséquences de l'épidémie de covid-19

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L1695LX3

Le Président de la République,

Sur le rapport du Premier ministre et de la garde des sceaux, ministre de la justice,

Vu la Constitution, notamment son article 38 ;

Vu le code civil, notamment son article 1343-5 ;

Vu le code de commerce, notamment son livre VI ;

Vu le code rural et de la pêche maritime, notamment son article L. 311-1 ;

Vu le code de justice administrative, notamment son article R. 123-20 ;

Vu la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 modifiée d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, notamment ses articles 4 et 11 ;

Vu la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises, notamment son article 196 ;

Vu l'ordonnance n° 2020-341 du 27 mars 2020 portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises et des exploitations agricoles à l'urgence sanitaire et modifiant certaines dispositions de procédure pénale ;

Le Conseil d'Etat (section des finances) entendu,

Le conseil des ministres entendu,

Ordonne :

Article 1

I. - Le présent article est applicable en cas de mise en œuvre de la procédure d'alerte prévue par les articles L. 234-1, L. 234-2 et L. 612-3 du code de commerce.

II. - Lorsqu'il lui apparaît que l'urgence commande l'adoption de mesures immédiates et que le dirigeant s'y refuse ou propose des mesures que le commissaire aux comptes estime insuffisantes, ce dernier peut en informer le président du tribunal compétent dès la première information faite, selon le cas, au président du conseil d'administration ou de surveillance ou au dirigeant.

Dans ce cas, le commissaire aux comptes informe par tout moyen et sans délai le président du tribunal de ses constats et démarches. Il lui adresse la copie de tous les documents utiles à cette information ainsi que l'exposé des raisons qui l'ont conduit à constater l'insuffisance des décisions prises.

Le commissaire aux comptes peut, à son initiative ou à la demande du président du tribunal, transmettre à ce dernier tout renseignement complémentaire de nature à lui donner une exacte information sur la situation économique et financière de l'entreprise.

Le commissaire aux comptes peut également, et à tout moment, demander à être entendu par le président du tribunal.

Il est délié du secret professionnel à l'égard du président du tribunal.

III. - Les dispositions des articles L. 234-1 à L. 234-4 et L. 612-3 du code de commerce demeurent applicables, sous réserve des dispositions du II.

Article 2

I. - Le présent article est applicable lorsqu'est mise en œuvre la procédure de conciliation prévue par les articles L. 611-4 et L. 611-5 du code de commerce.

II. - Lorsqu'un créancier appelé à la conciliation n'accepte pas, dans le délai imparti par le conciliateur, la demande faite par ce dernier de suspendre l'exigibilité de sa créance pendant la durée de la procédure, le débiteur peut demander au président du tribunal ayant ouvert cette procédure, qui statue par ordonnance sur requête :

1° D'interrompre ou d'interdire toute action en justice de la part de ce créancier et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent ;

2° D'arrêter ou d'interdire toute procédure d'exécution de la part de ce créancier tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant la demande ;

3° De reporter ou d'échelonner le paiement des sommes dues.

Les observations du conciliateur sont jointes à la requête.

Lorsqu'il est fait application du 1° ou du 2°, les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits sont suspendus. Lorsqu'il est fait application du 3°, les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.

Les mesures ordonnées par le président du tribunal ne produisent leur effet que jusqu'au terme de la mission confiée au conciliateur.

L'ordonnance est communiquée au ministère public.

III. - Par dérogation au cinquième alinéa de l'article L. 611-7 du code de commerce, le débiteur peut demander au juge qui a ouvert la procédure de conciliation de faire application de l'article 1343-5 du code civil avant toute mise en demeure ou poursuite à l'égard d'un créancier qui n'a pas accepté, dans le délai imparti par le conciliateur, la demande faite par ce dernier de suspendre l'exigibilité de la créance.

Article 3

Lorsque l'ouverture d'une procédure de sauvegarde accélérée prévue à l'article L. 628-1 ou à l'article L. 628-9 du code de commerce est demandée, les conditions de seuils mentionnés au quatrième alinéa de l'article L. 628-1 ne sont pas applicables.

A défaut de plan arrêté dans le délai prévu au premier alinéa de l'article L. 628-8 du même code, le tribunal, à la demande du débiteur, de l'administrateur, du mandataire judiciaire, ou du ministère public, ouvre une procédure de redressement judiciaire, si les conditions de l'article L. 631-1 sont réunies, ou prononce la liquidation judiciaire, si les conditions de l'article L. 640-1 sont réunies. Cette décision met fin à la procédure.

Article 4

A la demande de l'administrateur judiciaire, s'il en a été désigné un, ou du mandataire judiciaire, le juge-commissaire peut réduire à quinze jours le délai prévu par la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 626-5.

Pour l'application des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 626-5 ainsi que de l'article L. 626-32 du code de commerce, les propositions pour le règlement des dettes ainsi que les éventuelles réponses à ces propositions peuvent être communiquées par tout moyen permettant au mandataire judiciaire d'établir avec certitude la date de leur réception.

Lorsque les engagements pour le règlement du passif mentionnés à l'article L. 626-10 du code de commerce peuvent être établis sur la base d'une attestation de l'expert-comptable ou du commissaire aux comptes, ils portent sur les créances déclarées admises ou non contestées, ainsi que sur les créances identifiables, notamment celles dont le délai de déclaration n'est pas expiré.

Article 5

I. - Sur requête du ministère public ou du commissaire à l'exécution du plan, le tribunal peut prolonger la durée du plan arrêté en application des dispositions de l'article L. 626-12 ou de l'article L. 631-19 du code de commerce pour une durée maximale de deux ans, s'ajoutant, le cas échéant à la ou aux prolongations prévues au III de l'article 1 et au II de l'article 2 de l'ordonnance du 27 mars 2020 susvisée.

Lorsque le plan fait l'objet d'une prolongation en application de l'alinéa précédent ou de l'ordonnance susvisée, le président du tribunal ou le tribunal, selon les cas, adapte les délais des paiements initialement fixés par le tribunal à la durée du plan qu'il prolonge ou a prolongée, en dérogeant le cas échéant aux dispositions de l'article L. 626-18 du même code. Ils peuvent faire application des dispositions des trois premiers alinéas de l'article 1343-5 du code civil, dans la limite du terme du plan tel que prolongé en application des dispositions de l'alinéa précédent.

II. - La durée maximale du plan arrêté par le tribunal conformément à l'article L. 626-12 ou L. 631-19 du code de commerce est portée, en cas de modification substantielle, à douze ans ou, lorsque le débiteur est une personne exerçant une activité agricole définie à l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, dix-sept ans.

III. - Lorsque la demande de modification substantielle du plan prévue par l'article L. 626-26 du même code porte sur les modalités d'apurement du passif, le défaut de réponse des créanciers intéressés à la lettre recommandée prévue par le troisième alinéa de l'article R. 626-45 vaut acceptation des modifications proposées, sauf s'il s'agit de remises de dettes ou de conversions en titres donnant ou pouvant donner accès au capital.

IV. - Les personnes qui consentent un nouvel apport de trésorerie au débiteur pendant la période d'observation définie par l'article L. 621-3 du même code en vue d'assurer la poursuite d'activité de l'entreprise et sa pérennité et celles qui s'engagent, pour l'exécution du plan de sauvegarde ou de redressement arrêté ou modifié par le tribunal conformément aux dispositions des titres II et III du livre VI du code de commerce, à effectuer un tel apport bénéficient du privilège de sauvegarde ou de redressement dans la limite de cet apport.

Les apports mentionnés au premier alinéa consentis pendant la période d'observation sont autorisés par le juge-commissaire dont la décision est transcrite sur le registre mentionné à l'article R. 622-14 du même code avec l'indication de l'identité de leur auteur et de leur montant.

Le jugement qui arrête ou modifie le plan mentionne chaque privilège ainsi constitué et précise les montants garantis. Il est notifié par le greffier à ces créanciers.

Les créanciers bénéficiant du privilège de sauvegarde ou de redressement prévu au premier alinéa sont payés, pour le montant de leur apport, par privilège avant toutes les autres créances, dans l'ordre prévu au III de l'article L. 622-17 et au III de l'article L. 641-13 du même code, après les créances mentionnées au 1° de ces dispositions et avant celles mentionnées au 2°.

Par dérogation aux articles L. 626-18, L. 626-19 et L. 626-30-2 du code de commerce, les créances garanties par le privilège de sauvegarde ne peuvent faire l'objet de remises ou de délais qui n'auraient pas été acceptés par les créanciers.

Les apports consentis par les actionnaires et associés du débiteur dans le cadre d'une augmentation de capital ne peuvent être garantis par le privilège de sauvegarde ou de redressement.

Article 6

La procédure de liquidation judiciaire simplifiée prévue au chapitre IV du titre IV du livre VI du code de commerce est ouverte à l'égard de toute personne physique dont le patrimoine ne comprend pas de biens immobiliers. Toutefois, si le nombre de salariés du débiteur au cours des six mois précédant l'ouverture de la procédure est supérieur à cinq, le tribunal peut décider, par un jugement spécialement motivé, de ne pas faire application des dérogations prévues pour cette procédure.

La valeur de l'actif mentionnée au premier alinéa de l'article L. 645-1 du code de commerce est fixée à 15 000 euros.

Article 7

Lorsque la cession envisagée est en mesure d'assurer le maintien d'emplois, la requête prévue au deuxième alinéa de l'article L. 642-3 du code de commerce peut être formée par le débiteur ou l'administrateur judiciaire. Les débats ont alors lieu en présence du ministère public. Le tribunal statue par un jugement spécialement motivé, après avoir demandé l'avis des contrôleurs. Le recours formé par le ministère public contre ce jugement est suspensif.

Le délai de convocation prévu à l'article R. 642-7 du code de commerce est réduit à huit jours.

Article 8

Les délais mentionnés aux 4°et 5° de l'article R. 123-135 du code de commerce sont réduits à un an.

Article 9

L'ordonnance du 27 mars 2020 susvisée est modifiée comme suit :

I. - A l'article 1 :

1° Au I, les mots : « Jusqu'à l'expiration d'un délai de trois mois après la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l'article 4 de la loi du 23 mars 2020 susvisée » sont remplacés par les mots : « Jusqu'au 23 août 2020 inclus » ;

2° Au II, au 1°du III et au IV, les mots : « d'une durée équivalente à celle de la période prévue au I » sont remplacés par les mots : « d'une durée de cinq mois » ;

II. - A l'article 2 :

1° Au I, les mots : « Jusqu'à l'expiration d'un délai d'un mois après la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire » sont remplacés par les mots : « Jusqu'au 23 juin 2020 inclus » ;

2° Au II, les mots : « d'une durée équivalente à celle de la période prévue au I » sont remplacés par les mots : « d'une durée de trois mois » ;

III. - A l'article 3, les mots : « Jusqu'à l'expiration d'un délai de trois mois après la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire » sont remplacés par les mots : « jusqu'au 23 août 2020 inclus » ;

IV. - Le II de l'article 5 est complété par les mots suivants : « jusqu'au 23 juin 2020 inclus ».

V. - La première phrase du III de l'article 5 est complétée par les mots suivants : « dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020 ».

Article 10

I. - Les dispositions des articles 1, 2, 4, 5, à l'exception de celles du IV, et 7 de la présente ordonnance sont applicables jusqu'au 31 décembre 2020 inclus.

II. - Les dispositions de l'article 3, du IV de l'article 5, et celles de l'article 6 de la présente ordonnance s'appliquent aux procédures ouvertes entre la date de son entrée en vigueur et celle de l'entrée en vigueur de l'ordonnance prévue par l'article 196 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises, et au plus tard jusqu'au 17 juillet 2021 inclus.

III. - Les dispositions des articles 2, 4, 5 à l'exception de celles du IV, 7 et 8 de la présente ordonnance sont applicables aux procédures en cours.

IV. - Les dispositions de l'article 8 s'appliquent aux procédures ouvertes jusqu'à la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance prévue par l'article 196 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 susvisée, et au plus tard jusqu'au 17 juillet 2021 inclus.

V. - Les délais fixés au second alinéa de l'article 7 et à l'article 8 peuvent être modifiés par décret.

VI. - La présente ordonnance est applicable à Wallis-et-Futuna.

Article 11

Le Premier ministre, la garde des sceaux, ministre de la justice, et le ministre de l'économie et des finances sont responsables, chacun en ce qui le concerne, de l'application de la présente ordonnance, qui sera publiée au Journal officiel de la République française.

Fait le 20 mai 2020.

Emmanuel Macron

Par le Président de la République :

Le Premier ministre,

Edouard Philippe

La garde des sceaux, ministre de la justice,

Nicole Belloubet

Le ministre de l'économie et des finances,

Bruno Le Maire

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