Lettre-circulaire ACOSS n° 2006-063 du 21-04-2006

Lettre-circulaire ACOSS n° 2006-063 du 21-04-2006

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L5850HII


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PARIS, le 21/04/2006
DIRECTION DE LA REGLEMENTATION DU
RECOUVREMENT ET DU SERVICE
DIRRES
LETTRE CIRCULAIRE N° 2006-063
OBJET : Loi de financement de la Sécurité sociale pour 2006 : régime social des
sommes versées en compensation de la perte de rémunération
consécutive à la mise en place d'une mesure de réduction du temps de
travail.
TEXTE A ANNOTER : Lettre circulaire n°2004-175 du 28 décembre 2004
Les sommes versées en compensation de la perte de rémunération
consécutive à la mise en place d'une mesure de réduction du temps de travail
constituent une rémunération au sens de l'article L 242-1 du code de la sécurité
sociale.
L'article 14 II 1° de la loi n° 2005-179 du 19 décembre 2005 de financement de la
sécurité sociale pour 2006 complète le premier alinéa de l'article L 242-1 du code de la
sécurité sociale d'une disposition aux termes de laquelle :
« La compensation salariale d'une perte de rémunération induite par une mesure
de réduction du temps de travail est également considérée comme une rémunération, qu'elle
prenne la forme, notamment, d'un complément différentiel de salaire ou d'une hausse du
taux de salaire horaire ».
Le paragraphe III de l'article 14 précise par ailleurs que ces dispositions
s'appliquent aux compensations salariales versées à compter du 1er janvier 2006 dans le
cadre d'accords réduisant la durée du travail conclus à compter du 1er octobre 1996, sous
réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et des instances en cours
à la date de la publication de la loi de financement.
La circulaire ministérielle n° DSS/5B/2006/60 du 14 février 2006, jointe en
annexe, apporte des précisions sur ces dispositions.
1- Rappel du contexte
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Jusqu'à présent, en l'absence de dispositions expresses définissant le régime
social des sommes versées en compensation de la perte de rémunération consécutive à une
réduction du temps de travail, ce dernier dépendait de la nature des sommes en cause.
Seules celles venant compenser un préjudice lié à la réduction de la rémunération pouvaient
être exclues de l'assiette des cotisations.
Ainsi, dans un arrêt du 7 avril 1994 (Sté Bégin Say c/ URSSAF de Lille), la Cour
de cassation a qualifié de dommages et intérêts les indemnités compensatrices versées aux
salariés dont l'emploi à temps complet avait été transformé en emploi à temps partiel dans le
cadre d'un plan social. La lettre ministérielle du 17 mars 1997 diffusée par lettre circulaire
n° 97-051 du 2 juillet 1997 a précisé que l'exonération de cotisations s'applique dès lors que
le préjudice est avéré et que la réduction du temps de travail intervient afin d'éviter des
licenciements pour motif économique.
Ainsi, l'exonération ne trouve pas à s'appliquer dans le cadre de dispositifs de
réduction du temps de travail mis en place en vue de créer des emplois (volet offensif). De
même, les sommes versées dans le cadre des dispositifs de réduction du temps de travail
destinés à éviter des licenciements (volet défensif), pour lesquels l'employeur bénéficie
d'une aide de l'Etat prenant la forme d'un allègement dégressif de cotisations patronales de
Sécurité sociale, ne doivent pas être exclues de l'assiette des cotisations.
Cette position a été suivie, dans un premier temps, par la jurisprudence. Dans un
arrêt portant sur l'assiette de la cotisation d'assurance chômage, en tout point identique à
celle des cotisations, la Cour de cassation a considéré que la garantie de ressources servie
par l'employeur en compensation de la perte de salaire consécutive à une réduction du
temps de travail mise en place dans le cadre d'un accord «de Robien» volet défensif, entrait
dans l'assiette de la contribution des employeurs au financement de l'allocation d'assurance
chômage. L'article 39-1 de la loi du 11 juin 1996 ne prévoyait aucun allègement de cotisation
sur cette indemnité (Cass. ch. Soc, 17 juin 2003 Assedic des Hauts de France c/ Sté Rabot-
Dutilleul).
Dans un arrêt du 20 janvier 2004 (URSSAF de la Mayenne c/ Sté Durand), la
deuxième chambre civile de la Cour de cassation a remis en cause cette position retenant
que les sommes destinées à compenser les pertes de rémunération induites par la réduction
du temps de travail dans le cadre d'un accord «de Robien» défensif ayant pour objet d'éviter
des licenciements pour motif économique, présentent le caractère de dommages et intérêts
exclus à ce titre de l'assiette des cotisations de sécurité sociale.
La lettre circulaire n° 2004-175 du 28 décembre 2004 a précisé la portée de cette
décision. Celle-ci s'applique aux seuls accords défensifs «de Robien», à l'exclusion des
accords conclus en application de l'article 3 V de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 dits
« accords Aubry I ». La solution ne concerne que les seules cotisations, la CSG et la CRDS
restant dues en application de l'article L 136-2 II 5°du Code de la sécurité sociale, en tant
qu'elles portent sur des indemnités liées à la modification du contrat de travail.
Seule la compensation de la perte de rémunération se traduisant par le
versement d'une indemnité préjudicielle présente le caractère de dommages et intérêts à
l'exclusion d'un maintien du niveau de rémunération par l'augmentation du taux horaire.
2- Apport du nouveau texte
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Il résulte de la nouvelle disposition que les sommes versées aux salariés en
compensation de la perte de rémunération induite par une réduction du temps de travail est
considérée comme une rémunération assujettie à ce titre aux cotisations et contributions
sociales. Cette rémunération peut prendre la forme notamment d'un complément différentiel
de salaire ou d'une hausse du taux de salaire horaire.
2.1 Champ concerné
• Type d'accords visés
La nouvelle disposition s'applique aux sommes versées à compter du 1er janvier
2006 en application d'accords collectifs réduisant la durée du travail conclus à compter du 1er
octobre 1996. Compte tenu de la formulation large retenue par la loi, celle-ci vise, outre les
sommes versées dans le cadre des dispositifs légaux, tous les accords collectifs réduisant la
durée du travail et prévoyant une compensation salariale, quelque soit le niveau auquel ils
ont été conclus.
Sont ainsi visés :
- le dispositif «de Robien» institué par la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993
modifiée par la loi n° 96-502 du 11 juin 1996. Ce dispositif a permis la
conclusion d'accords jusqu'en 1998 bénéficiant d'un allègement pendant une
durée maximale de 7 ans, soit jusqu'en 2005. De tels accords peuvent
néanmoins perdurer et continuer à générer le versement d'une indemnité
différentielle,
- les accords de réduction du temps de travail conclus dans le cadre des lois
n°98-461 du 13 juin 1998 dite loi «Aubry» I (conclues pour une durée de cinq
ans, ces conventions peuvent produire leurs effets jusqu'au 31 décembre
2006 en ce qui concerne l'allègement) et n° 2000-37 du 19 janvier 2000 (dite
loi «Aubry» II),
- d'une manière générale tout accord collectif réduisant la durée du travail et
prévoyant une compensation salariale.
• Modalités de compensation
La règle d'inclusion dans l'assiette des cotisations et contributions sociales
s'applique quelle que soit la modalité retenue pour la compensation : le maintien de la
rémunération ou une indemnité différentielle.
2.2 Date d'effet
La nouvelle disposition s'applique aux compensations salariales versées à
compter du 1er janvier 2006 - dans le cadre d'accords collectifs réduisant la durée du travail
conclus à compter du 1er octobre 1996 -sous réserve des décisions de justice passées en
force de chose jugée et des instances en cours à la date de la publication de la loi.
• Accords collectifs conclus à compter du 1er octobre 1996
Lorsqu'un accord de réduction du temps de travail a été conclu antérieurement
au 1er janvier 2006 (et à compter du 1er octobre 1996), les sommes versées postérieurement
au 1er janvier 2006 doivent être soumises aux cotisations et contributions sociales quelle
qu'ait pu être la pratique retenue antérieurement par l'employeur y compris dans l'hypothèse
où une décision de justice est venue entériner cette pratique.
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• Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et
des instances en cours à la date de la publication de la loi.
Ces deux réserves qui tendaient à limiter la portée rétroactive du texte, retenue
dans la première version du projet de loi, ont été maintenues dans la rédaction actuelle du
texte. Elles n'apportent toutefois aucune restriction à la portée de la nouvelle disposition qui
reconnaît la nature de salaire aux compensations salariales versées à compter du 1er janvier
2006.
Les décisions de justice définitives, rendues ou à venir dans le cadre d'instances
en cours au 20 décembre 2005, ne peuvent concerner par hypothèse que des périodes
antérieures à l'application du nouveau texte. Or une décision de justice n'est applicable
qu'aux seuls éléments -période et sommes- objets du du litige, soumis à l'appréciation de la
juridiction.
Par conséquent la nouvelle loi s'applique aux compensations salariales versées
postérieurement au 1er janvier 2006, y compris lorsque le cotisant bénéficie, au titre d'une
période antérieure, d'une décision favorable devenue définitive.



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