Directive communautaire
DEUXIÈME DIRECTIVE DU CONSEIL
du 13 décembre 1976
tendant à coordonner pour les rendre équivalentes les garanties qui sont exigées dans les États membres des sociétés au sens de l'article 58 deuxième alinéa du traité, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital
(77/91/CEE)
LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 54 paragraphe 3 point g),
vu la proposition de la Commission,
vu l'avis de l'Assemblée (1),
vu l'avis du comité économique et social (2),
considérant que la poursuite de la coordination prévue par l'article 54 paragraphe 3 sous g), ainsi que par le programme général pour la suppression des restrictions à la liberté d'établissement, et commencée par la directive 68/151/CEE (3) est spécialement importante à l'égard des sociétés anonymes, car l'activité de ces sociétés est prédominante dans l'économie des États membres et s'étend souvent au-delà des limites de leur territoire national;
considérant que, pour assurer une équivalence minimale dans la protection tant des actionnaires que des créanciers de ces sociétés, il importe tout particulièrement de coordonner les dispositions nationales concernant leur constitution, ainsi que le maintien, l'augmentation et la réduction de leur capital;
considérant que, sur le territoire de la Communauté, les statuts ou l'acte constitutif d'une société anonyme doivent permettre à tout intéressé de connaître les caractéristiques essentielles de cette société, et notamment la consistance exacte de son capital;
considérant qu'il y a lieu d'arrêter des prescriptions communautaires afin de préserver le capital, gage des créanciers, notamment en interdisant d'entamer celui-ci par des distributions indues aux actionnaires et en limitant la possibilité pour une société d'acquérir ses propres actions;
considérant qu'il est nécessaire, au regard des buts visés à l'article 54 paragraphe 3 sous g), que, lors des augmentations et des réductions de capital, les législations des États membres assurent le respect et harmonisent la mise en oeuvre des principes garantissant un traitement égal des actionnaires qui se trouvent dans des conditions identiques et la protection des titulaires de créances antérieures à la décision de réduction, (1)JO nº C 114 du 11.11.1971, p. 18. (2)JO nº C 88 du 6.9.1971, p. 1. (3)JO nº L 65 du 14.3.1968, p. 8
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE:
Article premier
1. Les mesures de coordination prescrites par la présente directive s'appliquent aux dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux formes de sociétés suivantes: - pour l'Allemagne : die Aktiengesellschaft
- pour la Belgique : la société anonyme / de naamloze vennootschap
- pour le Danemark : aktieselskabet
- pour la France : la société anonyme
- pour l'Irlande : the public company limited by shares et the public company limited by guarantee and having a share capital
- pour l'Italie : la società per azioni
- pour le Luxembourg : la société anonyme
- pour les Pays-Bas : de naamloze vennootschap
- pour le Royaume-Uni : the public company limited by shares et the public company limited by guarantee and having a share capital
La dénomination sociale de toute société ayant l'une des formes indiquées ci-dessus doit comporter une désignation distincte de celles prescrites pour d'autres formes de sociétés ou être accompagnée d'une telle désignation
2. Les États membres peuvent ne pas appliquer la présente directive aux sociétés d'investissement à capital variable et aux coopératives constituées sous l'une des formes de sociétés indiquées au paragraphe 1. Dans la mesure où les législations des États membres font usage de cette faculté, elles imposent à ces sociétés de faire figurer les termes "société d'investissement à capital variable" ou "coopérative" sur tous les documents indiqués à l'article 4 de la directive 68/151/CEE
Par société d'investissement à capital variable, au sens de la présente directive, on entend exclusivement les sociétés: - dont l'objet unique est de placer leurs fonds en valeurs mobilières variées, en valeurs immobilières variées ou en autres valeurs dans le seul but de répartir les risques d'investissement et de faire bénéficier leurs actionnaires des résultats de la gestion de leurs avoirs,
- qui font appel au public pour le placement de leurs propres actions
et
- dont les statuts stipulent que, dans les limites d'un capital minimal et d'un capital maximal, elles peuvent à tout moment émettre, racheter ou revendre leurs actions
Article 2
Les statuts ou l'acte constitutif de la société contiennent au moins les indications suivantes: a) la forme et la dénomination de la société;
b) l'objet social;
c) - lorsque la société n'a pas de capital autorisé, le montant du capital souscrit;
- lorsque la société a un capital autorisé, le montant de celui-ci et le montant du capital souscrit au moment de la constitution de la société ou au moment de l'obtention de l'autorisation de commencer ses activités, ainsi que lors de toute modification du capital autorisé, sans préjudice de l'article 2 paragraphe 1 sous e) de la directive 68/151/CEE;
d) dans la mesure où elles ne résultent pas de la loi, les règles qui déterminent le nombre et le mode de désignation des membres des organes chargés de la représentation à l'égard des tiers, de l'administration, de la direction, de la surveillance ou du contrôle de la société, ainsi que la répartition des compétences entre ces organes;
e) la durée de la société, lorsqu'elle n'est pas indéterminée
Article 3
Les indications suivantes au moins doivent figurer, soit dans les statuts, soit dans l'acte constitutif, soit dans un document séparé qui doit faire l'objet d'une publicité effectuée selon les modes prévus par la législation de chaque État membre conformément à l'article 3 de la directive 68/151/CEE: a) le siège social;
b) la valeur nominale des actions souscrites et, au moins annuellement, le nombre de ces actions;
c) le nombre des actions souscrites sans mention de valeur nominale lorsque la législation nationale autorise l'émission de telles actions;
d) le cas échéant, les conditions particulières qui limitent la cession des actions;
e) lorsqu'il existe plusieurs catégories d'actions, les indications visées sous b), c) et d) pour chacune d'entre elles et les droits afférents aux actions de chacune des catégories;
f) la forme, nominative ou au porteur, des actions, lorsque la législation nationale prévoit ces deux formes, ainsi que toute disposition relative à la conversion de celles-ci sauf si la loi en fixe les modalités;
g) le montant du capital souscrit versé au moment de la constitution de la société ou au moment de l'obtention de l'autorisation de commencer ses activités;
h) la valeur nominale des actions ou, à défaut de valeur nominale, le nombre des actions émises en contrepartie de chaque apport qui n'est pas effectué en numéraire, ainsi que l'objet de cet apport et le nom de l'apporteur;
i) l'identité des personnes physiques ou morales ou des sociétés qui ont signé ou au nom de qui ont été signés les statuts ou l'acte constitutif ou, lorsque la constitution de la société n'est pas simultanée, l'identité des personnes physiques ou morales ou des sociétés qui ont signé ou au nom de qui ont été signés les projets de statuts ou d'acte constitutif;
j) le montant total, au moins approximatif, de tous les frais qui, en raison de sa constitution et, le cas échéant, avant qu'elle obtienne l'autorisation de commencer ses activités, incombent à la société ou sont mis à sa charge;
k) tout avantage particulier attribué lors de la constitution de la société ou, jusqu'à ce qu'elle ait obtenu l'autorisation de commencer ses activités, à quiconque a participé à la constitution de la société ou aux opérations conduisant à cette autorisation
Article 4
1. Lorsque la législation d'un État membre prescrit qu'une société ne peut pas commencer ses activités sans en avoir reçu l'autorisation, elle doit également prévoir des dispositions concernant la responsabilité pour les engagements encourus par la société ou pour le compte de celle-ci pendant la période précédant le moment où ladite autorisation est accordée ou refusée
2. Le paragraphe 1 ne s'applique pas aux engagements découlant de contrats conclus par la société sous la condition que l'autorisation de commencer ses activités lui soit accordée
Article 5
1. Lorsque la législation d'un État membre exige le concours de plusieurs associés pour la constitution d'une société, la réunion de toutes les actions en une seule main ou l'abaissement du nombre des associés au-dessous du minimum légal après la constitution n'entraîne pas la dissolution de plein droit de cette société
2. Si, dans les cas visés au paragraphe 1, la dissolution judiciaire de la société peut être prononcée en vertu de la législation d'un État membre, le juge compétent doit pouvoir accorder à cette société un délai suffisant pour régulariser sa situation
3. Lorsque la dissolution est prononcée, la société entre en liquidation
Article 6
1. Pour la constitution de la société ou pour l'obtention de l'autorisation de commencer ses activités, les législations des États membres requièrent la souscription d'un capital minimal qui ne peut être fixé à un montant inférieur à 25 000 unités de compte européennes
L'unité de compte européenne est celle qui est définie par la décision nº 3289/75/CECA de la Commission (1). La contre-valeur en monnaie nationale est initialement celle qui est applicable le jour de l'adoption de la présente directive
2. Si la contre-valeur de l'unité de compte européenne en monnaie nationale est modifiée de sorte que le montant du capital minimal fixé en monnaie nationale demeure inférieur à la valeur de 22 500 unités de compte européennes pendant une période d'un an, la Commission informe l'État membre intéressé qu'il doit adapter sa législation aux dispositions (1)JO nº L 327 du 19.12.1975, p. 4
du paragraphe 1 dans un délai de douze mois à compter de l'expiration de cette période. Toutefois, l'État membre peut prévoir que l'adaptation de sa législation ne s'applique aux sociétés déjà existantes que dix-huit mois après son entrée en vigueur
3. Le Conseil, sur proposition de la Commission, procède tous les cinq ans à l'examen et, le cas échéant, à la révision des montants du présent article exprimés en unités de compte européennes, compte tenu, d'une part, de l'évolution économique et monétaire dans la Communauté et, d'autre part, des tendances visant à réserver le choix des formes de sociétés indiquées à l'article 1er paragraphe 1 aux grandes et moyennes entreprises
Article 7
Le capital souscrit ne peut être constitué que par des éléments d'actif susceptibles d'évaluation économique. Toutefois, ces éléments d'actif ne peuvent être constitués par des engagements concernant l'exécution de travaux ou la prestation de services
Article 8
1. Les actions ne peuvent pas être émises pour un montant inférieur à leur valeur nominale ou, à défaut de valeur nominale, à leur pair comptable
2. Toutefois, les États membres peuvent admettre que ceux qui, de par leur profession, se chargent de placer des actions paient moins que le montant total des actions qu'ils souscrivent au cours de cette opération
Article 9
1. Les actions émises en contrepartie d'apports doivent être libérées au moment de la constitution de la société ou au moment de l'obtention de l'autorisation de commencer ses activités, dans une proportion non inférieure à 25 % de leur valeur nominale ou, à défaut de valeur nominale, de leur pair comptable
2. Toutefois, les actions émises en contrepartie d'apports autres qu'en numéraire au moment de la constitution de la société ou au moment de l'obtention de l'autorisation de commencer ses activités doivent être entièrement libérées dans un délai de cinq ans à partir du moment de la constitution ou du moment de l'obtention de ladite autorisation
Article 10
1. Les apports autres qu'en numéraire font l'objet d'un rapport établi préalablement à la constitution de la société ou à l'obtention de l'autorisation de commencer ses activités par un ou plusieurs experts indépendants de celle-ci, désignés ou agréés par une autorité administrative ou judiciaire. Ces experts peuvent être, selon la législation de chaque État membre, des personnes physiques ou morales ou des sociétés
2. Le rapport d'expert doit porter au moins sur la description de chacun des apports ainsi que sur les modes d'évaluation adoptés et indiquer si les valeurs auxquelles conduisent ces modes correspondent au moins au nombre et à la valeur nominale ou, à défaut de valeur nominale, au pair comptable et, le cas échéant, à la prime d'émission des actions à émettre en contrepartie
3. Le rapport d'expert doit faire l'objet d'une publicité effectuée selon les modes prévus par la législation de chaque État membre conformément à l'article 3 de la directive 68/151/CEE
4. Les États membres peuvent ne pas appliquer le présent article lorsque 90 % de la valeur nominale ou, à défaut de valeur nominale, du pair comptable de toutes les actions sont émis en contrepartie d'apports, autres qu'en numéraire, faits par une ou plusieurs sociétés et que les conditions suivantes sont remplies: a) en ce qui concerne la société bénéficiaire de ces apports, les personnes ou sociétés indiquées à l'article 3 sous i) ont renoncé à l'établissement du rapport d'expert;
b) cette renonciation a fait l'objet d'une publicité conformément au paragraphe 3;
c) les sociétés faisant ces apports disposent de réserves que la loi ou les statuts ne permettent pas de distribuer et dont le montant est au moins égal à la valeur nominale ou, à défaut de valeur nominale, au pair comptable des actions émises en contrepartie des apports autres qu'en numéraire;
d) les sociétés faisant ces apports se déclarent garantes, jusqu'à concurrence du montant indiqué sous c), des dettes de la société bénéficiaire nées entre le moment de l'émission des actions en contrepartie des apports autres qu'en numéraire et un an après la publication des comptes annuels de cette société relatifs à l'exercice pendant lequel les apports ont été faits. Toute cession de ces actions est interdite pendant ce délai;
e) la garantie visée sous d) a fait l'objet d'une publicité conformément au paragraphe 3;
f) les sociétés faisant ces apports incorporent un montant égal à celui indiqué sous c) dans une réserve qui ne pourra être distribuée qu'à l'expiration d'un délai de trois ans à partir de la publication des comptes annuels de la société bénéficiaire relatifs à l'exercice pendant lequel les apports ont été faits ou, le cas échéant, à un moment ultérieur où toutes les réclamations afférentes à la garantie visée sous d) et faites pendant ce délai auront été réglées