Directive communautaire
SIXIÈME DIRECTIVE DU CONSEIL
du 17 mai 1977
en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme
(77/388/CEE)
LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment ses articles 99 et 100,
vu la proposition de la Commission,
vu l'avis de l'Assemblée (1),
vu l'avis du Comité économique et social (2),
considérant que tous les États membres ont adopté un système de taxe sur la valeur ajoutée, conformément à la première et à la deuxième directive du Conseil, du 11 avril 1967, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires (3);
considérant que, en application de la décision, du 21 avril 1970, relative au remplacement des contributions financières des États membres par des ressources propres aux Communautés (4), le budget des Communautés sera, sans préjudice des autres recettes, intégralement financé par des ressources propres aux Communautés ; que ces ressources comprennent, entre autres, celles provenant de la taxe sur la valeur ajoutée et obtenues par l'application d'un taux commun à une assiette déterminée d'une manière uniforme et selon des règles communautaires;
considérant qu'il convient de poursuivre la libération effective de la circulation des personnes, des biens, des services, des capitaux et l'interpénétration des économies;
considérant qu'il convient de tenir compte de l'objectif de la suppression des taxations à l'importation et des détaxations à l'exportation pour les échanges entre les États membres et de garantir la neutralité du système commun de taxes sur le chiffre d'affaires quant à l'origine des biens et des prestations de services, pour que soit réalisé à terme un marché commun comportant une saine concurrence et ayant des caractéristiques analogues à celles d'un véritable marché intérieur;
considérant que la notion d'assujetti doit être précisée en permettant aux États membres, afin de garantir une meilleure neutralité de l'impôt, d'y inclure les personnes effectuant des opérations occasionnelles;
considérant que la notion d'opération imposable a donné lieu à des difficultés, notamment en ce qui concerne les opérations assimilées à des opérations taxables, et qu'il est apparu nécessaire de préciser ces notions;
considérant que la détermination du lieu des opérations imposables a entraîné des conflits de compétence entre les (1)JO nº C 40 du 8.4.1974, p. 25. (2)JO nº C 139 du 12.11.1974, p. 15. (3)JO nº 71 du 14.4.1967, p. 1301/67. (4)JO nº L 94 du 28.4.1970, p. 19
États membres, notamment en ce qui concerne la livraison d'un bien avec montage et les prestations de services ; que, si le lieu des prestations de services doit en principe être fixé à l'endroit où le prestataire a établi le siège de son activité professionnelle, il convient toutefois de fixer ce lieu dans le pays du preneur, notamment pour certaines prestations de services effectuées entre assujettis et dont le coût entre dans le prix des biens;
considérant que les notions de fait générateur et d'exigibilité de la taxe doivent être harmonisées pour que la mise en application et les modifications ultérieures du taux communautaire prennent effet à la même date dans tous les États membres;
considérant que la base d'imposition doit faire l'objet d'une harmonisation afin que l'application du taux communautaire aux opérations imposables conduise à des résultats comparables dans tous les États membres;
considérant que les taux appliqués par les États membres doivent permettre la déduction normale de la taxe appliquée au stade précédent;
considérant qu'il convient d'établir une liste commune d'exonérations en vue d'une perception comparable des ressources propres dans tous les États membres;
considérant que le régime des déductions doit être harmonisé dans la mesure où il a une incidence sur le niveau réel de perception et que le calcul du prorata de déduction doit s'effectuer de manière similaire dans tous les États membres;
considérant qu'il convient de préciser quels sont les redevables de la taxe, notamment pour certaines prestations de services dont le prestataire est établi à l'étranger;
considérant que les obligations des redevables doivent être dans la mesure du possible harmonisées pour assurer les garanties nécessaires quant à la perception équivalente de la taxe dans tous les États membres ; que les redevables doivent notamment déclarer périodiquement le montant global de leurs opérations, tant en amont qu'en aval, lors que cela apparaît nécessaire pour la constatation et le contrôle de l'assiette des ressources propres;
considérant qu'il convient d'harmoniser les divers régimes particuliers existants ; que, en ce qui concerne les petites entreprises, il importe toutefois de permettre aux États membres de maintenir leurs régimes particuliers conformément à des dispositions communes et en vue d'une harmonisation plus poussée ; que, en ce qui concerne les agriculteurs, il convient de laisser aux États membres la faculté d'appliquer un régime particulier comportant une compensation forfaitaire de la taxe sur la valeur ajoutée en amont au profit des agriculteurs qui ne relèvent pas du régime normal ; qu'il importe de fixer les principes essentiels de ce régime et d'arrêter une méthode commune de détermination de la valeur ajoutée de ces agriculteurs pour les besoins de la perception des ressources propres;
considérant qu'il importe de garantir l'application coordonnée des dispositions de la présente directive et que, à cet effet, il est indispensable de prévoir une procédure communautaire de consultation ; que l'institution d'un comité de la taxe sur la valeur ajoutée permet d'organiser une collaboration étroite entre les États membres et la Commission dans ce domaine;
considérant qu'il convient que, dans certaines limites et conditions, les États membres puissent prendre ou maintenir des mesures particulières dérogatoires à la présente directive, afin de simplifier la perception de la taxe ou d'éviter certaines fraudes ou évasions fiscales;
considérant qu'il peut s'avérer approprié d'autoriser les États membres à conclure avec des pays tiers ou des organismes internationaux des accords pouvant contenir des dérogations à la présente directive;
considérant qu'il est indispensable de prévoir une période transitoire permettant une adaptation progressive des législations nationales dans des domaines déterminés,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE:
TITRE PREMIER DISPOSITIONS INTRODUCTIVES
Article premier
Les États membres adaptent leur régime actuel de taxe sur la valeur ajoutée aux dispositions des articles suivants
Ils prennent les dispositions législatives, réglementaires et administratives afin que leur régime ainsi adapté soit mis en vigueur dans les meilleurs délais et au plus tard le 1er janvier 1978
TITRE II CHAMP D'APPLICATION
Article 2
Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée: 1. les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l'intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel;
2. les importations de biens
TITRE III TERRITORIALITÉ
Article 3
1. Aux fins de l'application de la présente directive, l'"intérieur du pays" correspond au champ d'application du traité instituant la Communauté économique européenne tel qu'il est défini, pour chaque État membre, à l'article 227
2. Sont exclus de l'intérieur du pays les territoires nationaux suivants: - république fédérale d'Allemagne : île d'Helgoland, territoire de Büsingen;
- royaume de Danemark : Groenland;
- République italienne : Livigno, Campione d'Italia, les eaux nationales du lac de Lugano
3. Si la Commission considère que les exclusions prévues au paragraphe 2 ne sont plus justifiées, notamment sur le plan de la neutralité concurrentielle ou sur celui des ressources propres, elle présente au Conseil les propositions appropriées
TITRE IV ASSUJETTIS
Article 4
1. Est considéré comme assujetti quiconque accomplit, d'une façon indépendante et quel qu'en soit le lieu, une des activités économiques mentionnées au paragraphe 2, quels que soient les buts ou les résultats de cette activité
2. Les activités économiques visées au paragraphe 1 sont toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est notamment considérée comme activité économique une opération comportant l'exploitation d'un bien corporel ou incorporel en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence
3. Les États membres ont la faculté de considérer également comme assujetti quiconque effectue, à titre occasionnel, une opération relevant des activités visées au paragraphe 2 et notamment une seule des opérations suivantes: a) la livraison d'un bâtiment ou d'une fraction de bâtiment et du sol y attenant, effectuée avant sa première occupation ; les États membres peuvent définir les modalités d'application de ce critère aux transformations d'immeubles, ainsi que la notion de sol y attenant
Les États membres ont la faculté d'appliquer d'autres critères que celui de la première occupation, tels que celui du délai écoulé entre la date d'achèvement de l'immeuble et celle de la première livraison, ou celui du délai écoulé entre la date de la première occupation et celle de la livraison ultérieure, pour autant que ces délais ne dépassent pas respectivement cinq et deux ans
Est considérée comme bâtiment toute construction incorporée au sol;
b) la livraison d'un terrain à bâtir
Sont considérés comme terrains à bâtir les terrains nus ou aménagés définis comme tels par les États membres
4. Le terme "d'une façon indépendante" utilisé au paragraphe 1 exclut de la taxation les salariés et autres personnes dans la mesure où ils sont liés à leur employeur par un contrat de louage de travail ou par tout autre rapport juridique créant des liens de subordination en ce qui concerne les conditions de travail et de rémunération et la responsabilité de l'employeur
Sous réserve de la consultation prévue à l'article 29, chaque État membre a la faculté de considérer comme un seul assujetti les personnes établies à l'intérieur du pays qui sont indépendantes du point de vue juridique mais qui sont étroitement liées entre elles sur les plans financier, économique et de l'organisation
5. Les États, les régions, les départements, les communes et les autres organismes de droit public ne sont pas considérés comme des assujettis pour les activités ou opérations qu'ils accomplissent en tant qu'autorités publiques, même lorsque, à l'occasion de ces activités ou opérations, ils perçoivent des droits, redevances, cotisations ou rétributions
Toutefois, lorsqu'ils effectuent de telles activités ou opérations, ils doivent être considérés comme des assujettis pour ces activités ou opérations dans la mesure où leur non-assujettissement conduirait à des distorsions de concurrence d'une certaine importance
En tout état de cause, les organismes précités ont la qualité d'assujettis notamment pour les opérations énumérées à l'annexe D et dans la mesure où celles-ci ne sont pas négligeables
Les États membres peuvent considérer comme activités de l'autorité publique les activités des organismes précités exonérées en vertu des articles 13 ou 28
TITRE V OPÉRATIONS IMPOSABLES
Article 5
Livraisons de biens
1. Est considéré comme "livraison d'un bien" le transfert du pouvoir de disposer d'un bien corporel comme un propriétaire
2. Sont considérés comme biens corporels le courant électrique, le gaz, la chaleur, le froid et les choses similaires
3. Les États membres peuvent considérer comme biens corporels: a) certains droits sur les biens immeubles;
b) les droits réels donnant à leur titulaire un pouvoir d'utilisation sur les biens immeubles;
c) les parts d'intérêts et actions dont la possession assure en droit ou en fait l'attribution en propriété ou en jouissance d'un bien immeuble ou d'une fraction d'un bien immeuble
4. Sont également considérées comme une livraison, au sens du paragraphe 1: a) la transmission, avec paiement d'une indemnité, de la propriété d'un bien en vertu d'une réquisition faite par l'autorité publique ou en son nom ou aux termes de la loi;
b) la remise matérielle d'un bien en vertu d'un contrat qui prévoit la location d'un bien pendant une certaine période ou la vente à tempérament d'un bien, assorties de la clause que la propriété est normalement acquise au plus tard lors du paiement de la dernière échéance;
c) la transmission d'un bien effectuée en vertu d'un contrat de commission à l'achat ou à la vente
5. Les États membres peuvent considérer comme une livraison, au sens du paragraphe 1: a) la délivrance d'un travail à façon, c'est-à-dire la remise par l'entrepreneur de l'ouvrage à son client d'un bien meuble qu'il a fabriqué ou assemblé au moyen de matières et d'objets que le client lui a confiés à cette fin, que l'entrepreneur ait fourni ou non une partie des matériaux utilisés;
b) la délivrance de certains travaux immobiliers
6. Est assimilé à une livraison effectuée à titre onéreux le prélèvement par un assujetti d'un bien de son entreprise pour ses besoins privés ou ceux de son personnel ou qu'il transmet à titre gratuit ou, plus généralement, qu'il affecte à des fins étrangères à son entreprise, lorsque ce bien ou les éléments le composant ont ouvert droit à une déduction complète ou partielle de la taxe sur la valeur ajoutée. Toutefois, ne sont pas visés les prélèvements effectués pour les besoins de l'entreprise pour donner des cadeaux de faible valeur et des échantillons
7. Les États membres peuvent assimiler à une livraison effectuée à titre onéreux: a) l'affectation par un assujetti aux besoins de son entreprise d'un bien produit, construit, extrait, transformé, acheté ou importé dans le cadre de son entreprise dans le cas où l'acquisition d'un tel bien auprès d'un autre assujetti ne lui ouvrirait pas droit à la déduction complète de la taxe sur la valeur ajoutée;
b) l'affectation d'un bien par un assujetti à un secteur d'activité non imposé, lorsque ce bien a ouvert droit à une déduction complète ou partielle de la taxe sur la valeur ajoutée lors de son acquisition ou de son affectation conformément à la lettre a);
c) à l'exception des cas visés au paragraphe 8, la détention de biens par un assujetti ou par ses ayants droit en cas de cessation de son activité économique taxable, lorsque ces biens ont ouvert droit à déduction complète ou partielle lors de leur acquisition ou de leur affectation conformément à la lettre a)