Directive communautaire
DIRECTIVE 97/7/CE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL
du 20 mai 1997
concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance
LE PARLEMENT EUROPÉEN ET LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,
vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 100 A,
vu la proposition de la Commission (1),
vu l'avis du Comité économique et social (2),
statuant conformément à la procédure prévue à l'article 189 B du traité (3), au vu du projet commun approuvé le 27 novembre 1996 par le comité de conciliation,
(1) considérant qu'il importe, dans le cadre de la réalisation des objectifs du marché intérieur, d'arrêter les mesures destinées à consolider progressivement ce marché;
(2) considérant que la libre circulation des biens et des services concerne non seulement le commerce professionnel mais également les particuliers; qu'elle implique, pour les consommateurs, de pouvoir accéder aux biens et aux services d'un autre État membre dans les mêmes conditions que la population de cet État;
(3) considérant que la vente transfrontalière à distance peut être l'une des principales manifestations concrètes pour les consommateurs de l'achèvement du marché intérieur, comme cela a été constaté, entre autres, dans la communication de la Commission au Conseil intitulée "Vers un marché unique de la distribution"; qu'il est indispensable, pour le bon fonctionnement du marché intérieur, que les consommateurs puissent s'adresser à une entreprise en dehors de leur pays, même si cette dernière dispose d'une filiale dans le pays de résidence du consommateur;
(4) considérant que l'introduction de nouvelles technologies entraîne une multiplication des moyens mis à la disposition des consommateurs pour connaître les offres faites partout dans la Communauté et pour passer leurs commandes; que certains États membres ont déjà pris des dispositions différentes ou divergentes de protection des consommateurs en matière de vente à distance, avec des incidences négatives sur la concurrence entre les entreprises dans le marché intérieur; qu'il est par conséquent nécessaire d'introduire un minimum de règles communes au niveau communautaire dans ce domaine;
(5) considérant que les points 18 et 19 de l'annexe de la résolution du Conseil, du 14 avril 1975, concernant un programme préliminaire de la Communauté économique européenne pour une politique de protection et d'information des consommateurs (4) font ressortir la nécessité de protéger les acheteurs de biens ou de services contre la demande de paiement de marchandises non commandées et les méthodes de vente agressives;
(6) considérant que la communication de la Commission au Conseil intitulée "Nouvelle impulsion pour la politique de protection des consommateurs", qui a été approuvée par la résolution du Conseil du 23 juin 1986 (5), annonce, au point 33, que la Commission présentera des propositions concernant l'utilisation de nouvelles technologies de l'information qui permettent aux consommateurs de passer, depuis leur domicile, des commandes à un fournisseur;
(7) considérant que la résolution du Conseil, du 9 novembre 1989, sur les priorités futures pour la relance de la politique de protection des consommateurs (6) invite la Commission à consacrer ses efforts en priorité aux domaines visés à l'annexe de ladite résolution; que cette annexe mentionne les nouvelles technologies permettant la vente à distance; que la Commission a donné suite à cette résolution par l'adoption d'un "plan d'action triennal pour la politique de protection des consommateurs dans la Communauté économique européenne (1990-1992)" et que ce plan prévoit l'adoption d'une directive en la matière;
(8) considérant que l'emploi des langues en matière de contrats à distance relève de la compétence des États membres;
(9) considérant que le contrat à distance se caractérise par l'utilisation d'une ou de plusieurs techniques de communication à distance; que ces différentes techniques sont utilisées dans le cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de services à distance sans qu'il y ait présence simultanée du fournisseur et du consommateur; que l'évolution permanente de ces techniques ne permet pas d'en dresser une liste exhaustive mais nécessite de définir des principes valables même pour celles qui ne sont encore que peu utilisées;
(10) considérant qu'une même transaction comportant des opérations successives ou une série d'opérations distinctes à exécution échelonnée peut donner lieu à des descriptions juridiques différentes selon le droit des États membres; que les dispositions de la présente directive ne peuvent être appliquées différemment selon le droit des États membres, sous réserve de leur recours à l'article 14; que, à cette fin, il y a lieu de considérer qu'il doit y avoir au moins conformité avec les dispositions de la présente directive à la date de la première d'une série d'opérations successives ou de la première d'une série d'opérations distinctes à exécution échelonnée pouvant être considérées comme formant un tout, indépendamment du fait que cette opération ou cette série d'opérations fasse l'objet d'un seul contrat ou de plusieurs contrats successifs distincts;
(11) considérant que l'utilisation de techniques de communication à distance ne doit pas conduire à une diminution de l'information fournie au consommateur; qu'il convient donc de déterminer les informations qui doivent être obligatoirement transmises au consommateur, quelle que soit la technique de communication utilisée; que l'information transmise doit en outre être faite en conformité avec les autres règles communautaires pertinentes, et en particulier avec celles de la directive 84/450/CEE du Conseil, du 10 septembre 1984, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de publicité trompeuse (7); que, si des exceptions sont apportées à l'obligation de fournir des informations, il appartient au consommateur, de façon discrétionnaire, de demander certaines informations de base telles que l'identité du fournisseur, les caractéristiques essentielles des marchandises ou des services et leurs prix;
(12) considérant que, dans le cas d'une communication par téléphone, il convient que le consommateur reçoive suffisamment d'informations au début de la conversation afin de décider s'il continue ou non celle-ci;
(13) considérant que l'information diffusée par certaines technologies électroniques a souvent un caractère éphémère dans la mesure où elle n'est pas reçue sur un support durable; qu'il est nécessaire que le consommateur reçoive par écrit, en temps utile, des informations nécessaires à la bonne exécution du contrat;
(14) considérant que le consommateur n'a pas la possibilité in concreto de voir le produit ou de prendre connaissance des caractéristiques du service avant la conclusion du contrat; qu'il convient de prévoir un droit de rétractation, sauf disposition contraire dans la présente directive; que, pour que ce droit ne reste pas de pure forme, les éventuels frais supportés par le consommateur lorsqu'il exerce son droit de rétractation doivent être limités aux frais directs de renvoi des marchandises; que ce droit de rétractation ne doit pas préjuger de l'application des droits dont le consommateur bénéficie en vertu de sa législation nationale, notamment en ce qui concerne la réception de produits endommagés, de services défectueux ou de produits ou services qui ne correspondent pas à la description qui en est faite dans l'offre; qu'il appartient aux États membres de déterminer les autres conditions et modalités consécutives à l'exercice du droit de rétractation;
(15) considérant qu'il est également nécessaire de prévoir un délai d'exécution du contrat si celui-ci n'a pas été défini lors de la commande;
(16) considérant que la technique promotionnelle consistant à envoyer un produit ou à fournir un service à titre onéreux au consommateur sans demande préalable ou accord explicite de sa part, pour autant qu'il ne s'agisse pas d'une fourniture de remplacement, ne peut être admise;
(17) considérant les principes établis par les articles 8 et 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950; qu'il y a lieu de reconnaître au consommateur un droit à la protection de la vie privée, notamment en ce qui concerne la tranquillité à l'égard de certaines techniques de communication particulièrement envahissantes; que, en conséquence, il y a lieu de préciser les limites spécifiques à l'usage de pareilles techniques; que les États membres devraient prendre les mesures nécessaires pour protéger efficacement contre le démarchage les consommateurs qui auront fait savoir qu'ils ne souhaitent pas être démarchés par certains moyens de communication, sans préjudice des sauvegardes particulières dont dispose le consommateur dans le cadre de la législation communautaire relative à la protection des données personnelles et de la vie privée;
(18) considérant qu'il est important que les règles de base contraignantes contenues dans la présente directive soient complétées, le cas échéant, par des dispositions volontaires des professionnels concernés, conformément à la recommandation 92/295/CEE de la Commission, du 7 avril 1992, concernant des codes de conduite pour la protection des consommateurs en matière de contrats négociés à distance (8);
(19) considérant qu'il est important, dans l'intérêt d'une protection optimale du consommateur, que celui-ci soit informé de façon satisfaisante sur les dispositions de la présente directive ainsi que sur les codes de pratique qui peuvent exister dans ce domaine;
(20) considérant que le non-respect des dispositions de la présente directive peut porter préjudice aux consommateurs mais aussi aux concurrents; que l'on peut donc prévoir des dispositions permettant à des organismes publics ou à leur représentant, ou à des organisations de consommateurs ayant, selon la législation nationale, un intérêt légitime à protéger les consommateurs, ou à des organisations professionnelles ayant un intérêt légitime à agir, de veiller à son application;
(21) considérant qu'il est important pour la protection des consommateurs de traiter, dès que possible, la question des plaintes transfrontalières; que la Commission a publié, le 14 février 1996, un plan d'action sur l'accès des consommateurs à la justice et le règlement des litiges de consommation dans le marché intérieur; que ce plan comporte des initiatives spécifiques visant à promouvoir les procédures extrajudiciaires; que des critères objectifs (annexe II) sont établis pour garantir la fiabilité de ces procédures et qu'il est prévu d'utiliser des formules de plainte standardisées (annexe III);
(22) considérant que, dans l'utilisation des nouvelles technologies, le consommateur n'a pas la maîtrise de la technique; qu'il est donc nécessaire de prévoir que la charge de la preuve peut incomber au fournisseur;
(23) considérant qu'il existe le risque, dans certains cas, de priver le consommateur de la protection accordée par la présente directive en désignant le droit d'un pays tiers comme droit applicable au contrat; que, en conséquence, il convient de prévoir dans la présente directive des dispositions visant à éviter ce risque;
(24) considérant qu'un État membre peut interdire, pour des raisons d'intérêt général, la commercialisation de certains produits et services sur son territoire par voie de contrat à distance; que cette interdiction doit se faire dans le respect des règles communautaires; que de telles interdictions sont déjà prévues, notamment en matière de médicaments par la directive 89/552/CEE du Conseil, du 3 octobre 1989, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle (9) et par la directive 92/28/CEE du Conseil, du 31 mars 1992, concernant la publicité faite à l'égard des médicaments à usage humain (10),
ONT ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE:
Article premier
Objet
La présente directive a pour objet de rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant les contrats à distance entre consommateur et fournisseur.
Article 2
Définitions
Aux fins de la présente directive, on entend par:
1) "contrat à distance": tout contrat concernant des biens ou services conclu entre un fournisseur et un consommateur dans le cadre d'un système de vente ou de prestations de services à distance organisé par le fournisseur, qui, pour ce contrat, utilise exclusivement une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu'à la conclusion du contrat, y compris la conclusion du contrat elle-même;
2) "consommateur": toute personne physique qui, dans les contrats relevant de la présente directive, agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle;
3) "fournisseur": toute personne physique ou morale qui, dans les contrats relevant de la présente directive, agit dans le cadre de son activité professionnelle;
4) "technique de communication à distance": tout moyen qui, sans présence physique et simultanée du fournisseur et du consommateur, peut être utilisé pour la conclusion du contrat entre ces parties. Une liste indicative des techniques visées par la présente directive figure à l'annexe I;
5) "opérateur de technique de communication": toute personne physique ou morale, publique ou privée, dont l'activité professionnelle consiste à mettre à la disposition des fournisseurs une ou plusieurs techniques de communication à distance.
Article 3
Exemptions
1. La présente directive ne s'applique pas aux contrats:
- portant sur les services financiers dont une liste non exhaustive figure à l'annexe II,
- conclus par le moyen de distributeurs automatiques ou de locaux commerciaux automatisés,
- conclus avec les opérateurs de télécommunications du fait de l'utilisation des cabines téléphoniques publiques,
- conclus pour la construction et la vente des biens immobiliers ou portent sur d'autres droits relatifs à des biens immobiliers, à l'exception de la location,
- conclus lors d'une vente aux enchères.
2. Les articles 4, 5, 6 et l'article 7 paragraphe 1 ne s'appliquent pas:
- aux contrats de fourniture de denrées alimentaires, de boissons ou d'autres biens ménagers de consommation courante fournis au domicile d'un consommateur, à sa résidence ou à son lieu de travail par des distributeurs effectuant des tournées fréquentes et régulières,
- aux contrats de fourniture de services d'hébergement, de transports, de restauration, de loisirs, lorsque le fournisseur s'engage, lors de la conclusion du contrat, à fournir ces prestations à une date déterminée ou à une période spécifiée; exceptionnellement, dans le cas d'activités de loisirs en plein air, le fournisseur peut se réserver le droit de ne pas appliquer l'article 7 paragraphe 2 dans des circonstances spécifiques.