Directive communautaire
DIRECTIVE 1999/31/CE DU CONSEIL
du 26 avril 1999
concernant la mise en décharge des déchets
LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,
vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 130 S, paragraphe 1,
vu la proposition de la Commission(1),
vu l'avis du Comité économique et social(2),
statuant conformément à la procédure prévue à l'article 189 C du traité(3),
(1) considérant que la résolution du Conseil du 7 mai 1990 sur la politique en matière de déchets(4) accueille favorablement et soutient le document de stratégie communautaire et invite la Commission à proposer des critères et des normes pour l'élimination des déchets par la mise en décharge;
(2) considérant que, dans sa résolution du 9 décembre 1996 sur la politique des déchets, le Conseil considère qu'à l'avenir ne devront être menées dans la Communauté que des activités de mise en décharge sûres et contrôlées;
(3) considérant qu'il convient d'encourager la prévention, le recyclage et la valorisation des déchets ainsi que l'utilisation des matériaux et de l'énergie récupérés afin de ménager les ressources naturelles et d'éviter le gaspillage dans l'utilisation des sols;
(4) considérant qu'il y a lieu de poursuivre la réflexion en ce qui concerne les questions de l'incinération des déchets municipaux et des déchets non dangereux, du compostage, de la biométhanisation et du traitement des boues de dragage;
(5) considérant que, sur la base du principe du pollueur-payeur, il est nécessaire, entre autres, de tenir compte de tous les dommages causés à l'environnement par les décharges;
(6) considérant que la mise en décharge, comme toutes les autres formes de traitement des déchets, doit être contrôlée et gérée de façon adéquate afin de prévenir ou de réduire les conséquences néfastes qu'elle pourrait avoir sur l'environnement et les risques pour la santé humaine;
(7) considérant qu'il est nécessaire de prendre les mesures appropriées pour éviter l'abandon, le rejet ou l'élimination incontrôlée des déchets; que, à cet effet, il convient qu'il soit possible de contrôler les décharges en ce qui concerne les substances contenues dans les déchets qui y sont déposés; que ces substances ne devraient, autant que possible, présenter que des réactions prévisibles;
(8) considérant qu'il y a lieu que tant la quantité que le caractère dangereux des déchets destinés à être mis en décharge soient réduits, le cas échéant; que la manipulation des déchets devrait être facilitée et leur valorisation favorisée; que le recours aux processus de traitement devrait donc être encouragé pour assurer une mise en décharge compatible avec les objectifs de la présente directive; que le tri fait partie de la définition du traitement;
(9) considérant qu'il convient que les États membres soient en mesure de mettre en oeuvre les principes de proximité et d'autosuffisance pour l'élimination de leurs déchets aux niveaux communautaire et national, conformément à la directive 75/442/CEE du Conseil du 15 juillet 1975 relative aux déchets(5); qu'il est nécessaire de poursuivre et préciser les objectifs de ladite directive en établissant un réseau intégré et adéquat d'installations d'élimination sur la base d'un niveau élevé de protection de l'environnement;
(10) considérant que les disparités entre les normes techniques d'élimination des déchets par mise en décharge et les coûts inférieurs qui y sont associés peuvent donner lieu à une élimination accrue des déchets dans des installations où le niveau de protection de l'environnement est faible, ce qui pourrait menacer gravement l'environnement en raison de la longueur inutile du transport des déchets ainsi que de pratiques d'élimination inadéquates;
(11) considérant qu'il est, par conséquent, nécessaire de définir au niveau communautaire des normes techniques pour la mise en décharge des déchets en vue de protéger, de préserver et d'améliorer la qualité de l'environnement dans la Communauté;
(12) considérant qu'il est nécessaire d'indiquer clairement les exigences auxquelles les décharges doivent satisfaire en ce qui concerne leur emplacement, leur aménagement, leur gestion, leur contrôle, leur désaffectation et les mesures de prévention et de protection à prendre contre toute atteinte à l'environnement dans une perspective de court comme de long terme, et plus particulièrement contre la pollution des eaux souterraines par les infiltrations de lixiviats dans le sol;
(13) considérant que, eu égard à ce qui précède, il est nécessaire de définir clairement les catégories de décharges concernées et les types de déchets admissibles dans chacune d'elles;
(14) considérant que les sites de stockage temporaire des déchets doivent satisfaire aux exigences de la directive 75/442/CEE;
(15) considérant que la valorisation, conformément à la directive 75/442/CEE, des déchets inertes ou des déchets non dangereux appropriés, par leur utilisation pour des travaux d'aménagement ou de réhabilitation et de remblai ou à des fins de construction, peut ne pas constituer une mise en décharge;
(16) considérant que, notamment pour lutter contre le réchauffement de la planète, il convient de prendre des mesures afin de diminuer la production de méthane par les décharges, grâce à une réduction de la mise en décharge des déchets biodégradables et à l'obligation d'introduire un contrôle des gaz de décharge;
(17) considérant qu'il est opportun que les mesures prises pour réduire la mise en décharge des déchets biodégradables visent également à encourager la collecte séparée des déchets biodégradables, le tri en général, ainsi que la valorisation et le recyclage;
(18) considérant que, en raison des caractéristiques du mode d'élimination des déchets que constitue la mise en décharge, il est nécessaire de mettre en place une procédure d'autorisation spécifique pour toutes les catégories de décharges, conformément aux exigences générales d'autorisation déjà énoncées dans la directive 75/442/CEE et aux dispositions générales de la directive 96/61/CE du Conseil du 24 septembre 1996 relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution(6); qu'il est nécessaire de vérifier, dans le cadre d'une inspection par l'autorité compétente avant le début des opérations d'élimination, la conformité de la décharge à cette autorisation;
(19) considérant qu'il convient de contrôler, dans chaque cas, si les déchets peuvent être déposés dans la décharge à laquelle ils sont destinés, notamment lorsqu'il s'agit de déchets dangereux;
(20) considérant que, pour prévenir les atteintes à l'environnement, il est nécessaire de mettre en place une procédure uniforme d'admission des déchets sur la base d'une procédure de classification des déchets admis dans les différentes catégories de décharges, comportant en particulier des valeurs limites normalisées; que, à cet effet, un système cohérent et normalisé d'identification, d'échantillonnage, et d'analyse des déchets doit être établi en temps voulu pour faciliter la mise en oeuvre de la présente directive; que les critères d'admission doivent être particulièrement précis en ce qui concerne les déchets inertes;
(21) considérant que, en attendant l'établissement de telles méthodes d'analyse ou des valeurs limites nécessaires à l'identification, les États membres pourront, en vue de l'application de la présente directive, maintenir ou établir des listes nationales de déchets admis ou non en décharge, ou définir des critères, et notamment des valeurs limites, analogues à ceux énoncés dans la présente directive pour la procédure d'admission uniforme;
(22) considérant que le comité technique doit élaborer des critères d'admission afin que certains déchets dangereux soient admis dans des décharges pour déchets non dangereux;
(23) considérant qu'il est nécessaire d'arrêter des procédures communes de surveillance des décharges pendant leur phase d'exploitation et après leur désaffectation, de manière à identifier toute incidence néfaste de la décharge sur l'environnement et à prendre les mesures correctives adéquates;
(24) considérant qu'il est nécessaire de déterminer le moment et les modalités de la désaffectation d'une décharge ainsi que les obligations et la responsabilité que garde l'exploitant sur le site après sa désaffectation;
(25) considérant que les décharges qui ont été désaffectées avant la date de transposition de la présente directive ne doivent pas être soumises aux dispositions que celle-ci contient en matière de procédure de désaffectation;
(26) considérant qu'il convient de réglementer les conditions d'exploitation future des décharges existantes en vue de prendre, dans un délai déterminé, les mesures nécessaires pour leur adaptation à la présente directive sur la base d'un plan d'aménagement du site;
(27) considérant que les exploitants de décharges existantes qui, conformément à des réglementations nationales contraignantes équivalentes à celles de l'article 14 de la présente directive, avaient déjà présenté les documents visés à l'article 14, point a), de la présente directive avant son entrée en vigueur et qui avaient été autorisés par l'autorité compétente à en poursuivre l'exploitation, ne sont pas tenus de présenter une nouvelle fois les documents ou d'obtenir de l'autorité compétente une nouvelle autorisation;
(28) considérant que l'exploitant doit prendre les dispositions appropriées sous la forme d'une garantie financière ou de tout autre équivalent pour assurer que toutes les obligations découlant de l'autorisation seront remplies, notamment celles relatives à la procédure de désaffectation et à la gestion postérieure du site;
(29) considérant que des mesures doivent être prises pour assurer que le prix demandé pour l'élimination des déchets par mise en décharge soit fixé de façon à couvrir l'ensemble des coûts liés à la création et à l'exploitation de la décharge, y compris, dans la mesure du possible, la garantie financière ou son équivalent que l'exploitant doit fournir et les coûts estimés de désaffectation de la décharge, y compris la gestion nécessaire après désaffectation;
(30) considérant que, lorsqu'une autorité compétente estime qu'une décharge n'est pas susceptible de présenter un risque pour l'environnement au-delà d'une certaine période, les coûts estimés à inclure dans le prix exigé par l'exploitant peuvent se limiter à la période en question;
(31) considérant qu'il est nécessaire de veiller à l'application correcte des dispositions de mise en oeuvre de la présente directive dans l'ensemble de la Communauté et de faire en sorte que la formation et les connaissances des exploitants de décharges et de leur personnel leur confèrent les compétences requises;
(32) considérant qu'il convient que la Commission élabore une procédure normalisée d'admission des déchets et établir une classification uniforme des déchets admis en décharge, conformément à la procédure de comité prévue à l'article 18 de la directive 75/442/CEE;
(33) considérant que l'adaptation des annexes de la présente directive au progrès scientifique et technique et la normalisation des méthodes de contrôle, d'échantillonnage et d'analyse devront être réalisées à l'aide de la même procédure de comité;
(34) considérant qu'il y a lieu que les États membres présentent régulièrement des rapports à la Commission sur l'application de la présente directive, en accordant une attention particulière aux stratégies nationales qui doivent être définies conformément à l'article 5; que, sur la base de ces rapports, la Commission doit faire rapport au Parlement européen et au Conseil,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:
Article premier
Objectif général
1. En vue de répondre aux exigences de la directive 75/442/CEE, et notamment de ses articles 3 et 4, la présente directive a pour objet, par des exigences techniques et opérationnelles strictes applicables aux déchets et aux décharges, de prévoir des mesures, procédures et orientations visant à prévenir ou à réduire autant que possible les effets négatifs de la mise en décharge des déchets sur l'environnement, et notamment la pollution des eaux de surface, des eaux souterraines, du sol et de l'air, et sur l'environnement de la planète, y compris l'effet de serre, ainsi que les risques qui en résultent pour la santé humaine, pendant toute la durée de vie de la décharge.
2. Pour ce qui est des caractéristiques techniques des décharges, la présente directive comporte, pour les décharges auxquelles s'applique la directive 96/61/CE, les exigences techniques nécessaires pour traduire dans les faits les exigences générales de ladite directive. Les exigences pertinentes de ladite directive sont réputées satisfaites si les exigences de la présente directive le sont.
Article 2
Définitions
Aux fins de la présente directive, on entend par:
a) déchet, toute substance ou tout objet qui entre dans le champ d'application de la directive 75/442/CE;
b) déchets municipaux, les déchets ménagers ainsi que les autres déchets qui, de par leur nature ou leur composition, sont similaires aux déchets ménagers;
c) déchets dangereux: tout déchet couvert par l'article 1er, paragraphe 4, de la directive 91/689/CEE du Conseil du 12 décembre 1991 relative aux déchets dangereux(7);
d) déchets non dangereux, tout déchet qui n'est pas couvert par le point c);
e) déchets inertes, les déchets qui ne subissent aucune modification physique, chimique ou biologique importante. Les déchets inertes ne se décomposent pas, ne brûlent pas et ne produisent aucune autre réaction physique ou chimique, ne sont pas biodégradables et ne détériorent pas d'autres matières avec lesquelles ils entrent en contact, d'une manière susceptible d'entraîner une pollution de l'environnement ou de nuire à la santé humaine. La production totale de lixiviats et la teneur des déchets en polluants ainsi que l'écotoxicité des lixiviats doivent être négligeables et, en particulier, ne doivent pas porter atteinte à la qualité des eaux de surface et/ou des eaux souterraines;
f) stockage souterrain, un site permanent de stockage des déchets dans une cavité géologique profonde telle qu'une mine de sel ou de potassium;
g) décharge, un site d'élimination des déchets par depôt des déchets sur ou dans la terre (c'est-à-dire en sous-sol), y compris:
- les décharges internes (c'est-à-dire les décharges où un producteur de déchets procède lui-même à l'élimination des déchets sur le lieu de production),
et
- un site permanent (c'est-à-dire pour une durée supérieure à un an) utilisé pour stocker temporairement les déchets
à l'exclusion
- des installations où les déchets sont déchargés afin de permettre leur préparation à un transport ultérieur en vue d'une valorisation, d'un traitement ou d'une élimination en un endroit différent,
et
- du stockage des déchets avant valorisation ou traitement pour une durée inférieure à trois ans en règle générale