Circulaire CIV 2002-12 D1
du 26 décembre 2002
relative à l'immatriculation des sociétés créées avant 1978 et des sociétés par actions simplifiées
NOR : JUSC0220620C
POUR ATTRIBUTION
Premiers présidents des cours d'appel - Procureurs généraux près les cours d'appel - Présidents des TGI - Présidents des tribunaux de commerce - Greffiers des tribunaux de commerce et des TGI statuant commercialement
Textes sources :
- Loi n° 78-9 du 4 janvier 1978
- Chapitre VII du titre II du livre 2 du code de commerce
- Art. 44 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001
- Décret n° 78-704 du 3 juillet 1978
- Décret n° 84-406 du 30 mai 1984
- Décret n° 2002-1085 du 7 août 2002
De nombreuses questions sont posées au ministère de la justice, d'une part, sur l'immatriculation des sociétés civiles créées avant le 1er juillet 1978 et par l'application de l'article 44 de la loi 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques, et, d'autre part, sur les modalités d'immatriculation des sociétés par actions simplifiées.
La présente circulaire a pour objet de faire le point de ces deux questions.
I. - IMMATRICULATION DES SOCIETES CIVILES CREEES AVANT LE 1ER JUILLET 1978
L'article 44 de la loi du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques, qui contraint les sociétés constituées avant le 1er juillet 1978 à s'immatriculer avant le 1er novembre 2002 sous peine de perdre leur personnalité morale, suscite à ce jour une difficulté d'application.
En effet, un certain nombre de ces sociétés ne se sont pas immatriculées avant cette date et souhaitent désormais procéder à leur immatriculation.
Deux situations se présentent dans ce cas.
La première vise les sociétés qui, bien qu'ayant déposé leur dossier de demande d'immatriculation dans les délais impartis, n'ont pas été immatriculées avant le 1er novembre 2002.
Celles-ci, ayant effectué les démarches nécessaires dans le temps imparti par la loi, doivent pouvoir être immatriculées sans rupture dans le temps de leur capacité juridique, dans les conditions précisées par la circulaire du 24 septembre 2002 du ministère de la justice, qui a préconisé les allégements à la procédure.
La seconde situation, plus fréquente, est celle des sociétés qui ont déposé leur demande après la date du 1er novembre, ou qui souhaitent à l'avenir faire procéder à leur immatriculation.
Pour ces sociétés, sous réserve de l'interprétation souveraine qui pourra être faite par les juridictions, il apparaît que leurs demandes doivent être reçues et ne sauraient être considérées comme tardives.
La loi du 4 janvier 1978 a introduit l'obligation pour toutes les sociétés, y compris civiles, de s'immatriculer au registre du commerce et des sociétés pour disposer de la personnalité morale. Toutefois, le 4e alinéa de l'article 4 de cette loi permettait aux sociétés civiles constituées avant son entrée en vigueur, fixée au 1er juillet 1978, de conserver leur personnalité morale sans immatriculation. C'est ce 4e alinéa de l'article 4 que l'article 44 de la loi du 15 mai 2001 a abrogé. La volonté du législateur est donc bien seulement de faire perdre leur personnalité morale à ces sociétés, non d'entraîner leur dissolution.
La seule conséquence qu'implique cette abrogation est donc celle de la perte de cette personnalité morale. Ces sociétés continuent d'exister, le pacte social n'étant pas rompu, sans disposer toutefois d'une capacité juridique distincte de celle des associés. Elles doivent donc recevoir la qualification de sociétés en participation. Or, à ce jour, toute société en participation peut demander son immatriculation et bénéficier de la personnalité morale à compter de son immatriculation.
Par conséquent, rien ne s'oppose, en application de ce principe, à ce que les associés des sociétés qui n'ont pas sollicité leur immatriculation avant le 1er novembre 2002 puissent déposer, à cette fin, un dossier auprès du greffe compétent.
Une conséquence importante découle de cette immatriculation, qui peut utilement être indiquée lors de la demande. L'effet conjugué de l'article 44 de la loi sur les nouvelles régulations économiques et de l'immatriculation postérieure au 1er novembre 2002 conduit à un double transfert de propriété des biens détenus. Le premier s'effectuant de la société jouissant de la personnalité morale jusqu'au 1er novembre 2002 au bénéfice des associés après cette date ; le second ayant lieu au bénéfice de la société transformée, à compter de son immatriculation.
Il appartient donc aux greffiers chargés de la tenue du registre du commerce et des sociétés de procéder aux immatriculations des sociétés mentionnées à l'article 44 de la loi du 15 mai 2001 précitée, et ce, quelle que soit la date du dépôt de la demande, le cas échéant en recommandant d'examiner avec un conseil les conséquences, notamment fiscales, de cette demande.
La procédure d'immatriculation qu'il conviendra de mettre en uvre pour ces sociétés est celle prévue par le décret du 30 mai 1984 en matière de constitution de sociétés nouvelles.
II. - IMMATRICULATION DES SOCIETES PAR ACTIONS SIMPLIFIEES
A la suite d'un arrêt de la Cour de cassation du 2 juillet 2002, de nombreuses sociétés par actions simplifiées (SAS) rencontrent des difficultés lors de leur immatriculation ou des demandes d'inscriptions modificatives. En effet, la Cour de cassation a déclaré irrecevable une action en justice intentée par un directeur général d'une société par actions simplifiée, en se fondant sur l'article L. 227-6 du code de commerce, selon lequel la société par actions simplifiée est représentée à l'égard des tiers par un président qui est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir au nom de la société.
Cet arrêt a pu être interprété comme excluant toute autre personne du pouvoir d'engager une telle société à l'égard des tiers. Certains greffes en conséquence refusent de mentionner au registre du commerce et des sociétés les personnes habilitées par une société par actions simplifiée à l'engager à l'égard des tiers.
Or cette portée ne semble pas pouvoir être conférée à l'arrêt précité.
En effet, le rappel par la Cour de la désignation par la loi du président de la SAS comme représentant légal n'est que la traduction pour cette dernière des règles relatives à la représentation légale dans les sociétés en général.
La loi désigne en effet toujours une personne représentant la société et ayant le pouvoir général de l'engager à l'égard des tiers. Il peut s'agir du gérant d'une société à responsabilité limitée, du directeur général d'une société anonyme ou du président d'une SAS. Ces règles n'ont jamais été exclusives des délégations de pouvoirs. L'arrêt de la Cour de cassation ne peut être interprété en l'espèce comme ayant entendu remettre en cause celles-ci.
Par conséquent, le rappel du principe de représentation légale tel que réaffirmé par la Cour laisse intacte la possibilité à une société par actions simplifiée, comme à toute autre forme de société et même comme aux commerçants personnes physiques, d'octroyer des délégations de pouvoirs aux fins de l'engager à l'égard des tiers. Simplement, la mention de celles-ci dans les statuts doit être complétée par une déclaration au registre du commerce et des sociétés afin que les mentions correspondantes soient portées sur l'extrait d'immatriculation de la société.
Dès lors, en application de l'article 15 A 10° (a) du décret du 30 mai 1984, ces personnes doivent être mentionnées au registre du commerce et des sociétés comme personnes ayant le pouvoir de diriger, gérer ou engager à titre habituel la société.
Le directeur des affaires civiles et du sceau,
M. GUILLAUME