Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 14 octobre 2020, n° 421028, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A65813XZ)
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par Sarah Bessedik
le 03 Novembre 2020
► Par une décision rendue le 14 octobre 2020, le Conseil d’État affirme qu’une instruction fiscale engage l’administration même quand cette instruction offre un pouvoir d’interprétation à l’administration.
Il s’agit, en l’espèce, d’une procédure de divorce qui a donné lieu au versement par le requérant conjoint d'une prestation compensatoire. Par un arrêt du 14 avril 2010, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par l’ex-épouse contre l'arrêt du 8 janvier 2009, par lequel la cour d'appel de Lyon a jugé qu'il n'y avait pas lieu que ce capital fasse l'objet d'un paiement fractionné.
Le requérant s'est tout de même acquitté de ces sommes en trois versements, le 25 août 2010, le 31 août 2010 et le 18 mai 2011.
Il a ensuite déduit les deux premiers versements de son revenu global de l'année 2010, en application du 2°, du II, de l'article 156 du Code général des impôts (N° Lexbase : L7514LXL).
À la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale a réintégré la somme déduite à son revenu imposable et a assujetti le requérant à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales correspondant à la différence entre les impositions résultant de cette réintégration et la réduction d'impôt admise par l'administration.
Le requérant se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 29 mars 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son appel formé contre le jugement du 18 octobre 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande de décharge des impositions supplémentaires qui ont été mises à sa charge à ce titre et des pénalités correspondantes (CAA Lyon, 29 mars 2018, n° 16LY03636 N° Lexbase : A7675XLT).
Les juges du Conseil d’État se fondent sur l’article L. 80 A du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L6958LLB) qui pose le principe de l’opposabilité de la doctrine fiscale et offre au contribuable une garantie contre les changements de position de l’administration.
En l’espèce, le contribuable se prévaut du paragraphe 11 de l'instruction n° 5-B-21-06 publiée au Bulletin officiel des impôts du 17 juillet 2006, dans sa rédaction applicable au litige. Cette instruction indique que lorsque le versement en tout ou partie de la prestation compensatoire est effectué au-delà du délai de douze mois alors que le jugement ou la convention homologuée prévoyait que le versement devait intervenir intégralement dans le délai de douze mois : « les sommes versées sont normalement déductibles du revenu imposable du débirentier et imposables selon le régime des pensions au nom du crédirentier ».
Cette doctrine fiscale ajoute toutefois que, « si les services établissent que les parties, et notamment celle tenue d'acquitter la prestation compensatoire, n'exécutent pas la décision du juge ou la convention homologuée dans les termes prévus aux seules fins d'en retirer le bénéfice d'un régime fiscal favorable, les dispositions précédentes ne leur sont pas applicables. Dans ce cas, les versements ne sont donc ni déductibles, ni imposables ».
Ainsi, le Conseil d’État pose que « la circonstance qu’une instruction fiscale laisse un pouvoir d’appréciation à l’administration ne fait pas obstacle à ce que celle-ci soit regardée comme une interprétation formellement admise du texte fiscal, pour l’application de l’article L. 80 A du Livre des procédures fiscales, dès lors qu’elle énonce une règle d’interprétation de la loi fiscale à portée générale ».
À lire sur cet arrêt : V. Daumas, Sur le régime fiscal des prestations compensatoires – Conclusions du Rapporteur public, Lexbase Fiscal, mai 2016, n° 654 (N° Lexbase : N2634BWH). |
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