Lexbase Droit privé n°806 du 12 décembre 2019 : Copropriété

[Textes] Le conseil syndical : un conseil au rôle renforcé après l’ordonnance du 30 octobre 2019

Réf. : Ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019, portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis (N° Lexbase : Z955378U) ; modifiant la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis (N° Lexbase : L5536AG7)

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par Vivien Zalewski-Sicard, Enseignant-chercheur, Université Toulouse Capitole, IEJUC

le 12 Décembre 2019

Organe-relais, le conseil syndical permet à des copropriétaires de contribuer à la préparation des décisions et de surveiller l’activité du syndic. Le conseil syndical avait vu ses pouvoirs accrus avec l’article 203 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, dite «ELAN» (N° Lexbase : L8700LM8), s’étant vu offrir un moyen de contraindre le syndic à transmettre des pièces, renforçant ainsi le rôle du conseil syndical. C’est, également, un renforcement de ce rôle que consacre l’ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 avec, notamment, la création d’une nouvelle délégation de pouvoirs ayant pour objet de faciliter la réalisation des travaux au sein de la copropriété.

Avant même d’examiner ce rôle renforcé du conseil syndical, il faut préciser que l’article 20 de l’ordonnance modifie l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 quant à la composition du conseil syndical. Tout d’abord, il est précisé que les ascendants et descendants des copropriétaires peuvent être désignés comme membre du conseil syndical. Comme pour les conjoints, les partenaires liés aux copropriétaires par un pacte civil de solidarité, l’accord de l’assemblée générale est nécessaire pour cette désignation. Il est à remarquer qu’il n’y a pas d’exigence particulière quant auxdits ascendants et descendants et en particulier, il n’est nullement nécessaire qu’ils résident au sein de la copropriété pour pouvoir être désignés membres du conseil syndical. Ensuite, ce sont les exclusions relatives au syndic qui sont renforcées. En effet, le neuvième alinéa de l’article 21 qui contenait ces exclusions est entièrement modifié. Ainsi, ledit alinéa précise, désormais, que le syndic, ses préposés, leurs conjoints, leurs partenaires liés à eux par un pacte civil de solidarité, leurs concubins, leurs ascendants ou descendants, leurs parents en ligne collatérale jusqu'au deuxième degré, même s'ils sont copropriétaires, associés ou acquéreurs à terme, ne peuvent être membres du conseil syndical. Les dispositions du présent alinéa ne sont pas applicables aux syndicats gérés par des syndics non professionnels. Cette nouvelle liste des personnes ne pouvant être désignées membres du conseil syndical apparaît cohérente avec celle figurant à l’article 22 de la loi du 10 juillet 1965, relative aux personnes ne pouvant recevoir de mandat pour représenter un copropriétaire et présider l’assemblée générale.

Par ailleurs, le nouvel article 21-4 de la loi du 10 juillet 1965 précise que le syndicat des copropriétaires souscrit, pour chacun des membres du conseil syndical, une assurance de responsabilité civile. La portée de cette obligation d’assurance doit être précisée. En effet, convient-il de la respecter dès lors qu’existe un conseil syndical ou faut-il qu’outre cette existence, le conseil syndical bénéficie de la délégation de pouvoirs du nouvel article 21-1 ? Sur ce point, le rapport au Président de la République, relatif à l’ordonnance du 30 octobre 2019 (N° Lexbase : Z954828U) vient préciser que «dans le cadre de cette délégation conventionnelle de pouvoirs, le syndicat des copropriétaires devra souscrire pour chacun des membres du conseil syndical une assurance de responsabilité civile, dont les responsabilités seront étendues, afin de les protéger et de ne pas décourager les initiatives de mandataires bénévoles (article 21-4)». Au regard de la modification également de l’article 25, a, de la loi du 10 juillet 1965, qui ne contient plus de précision quant à la souscription d’une assurance de responsabilité civile, il y a lieu, selon nous, de considérer que cette obligation d’assurance doit être respectée dès lors qu’une délégation de pouvoir est accordée au conseil syndical, que cela soit sur la base de l’article 21-1 ou du a) de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965. La lettre de l’article 21-4 ne l’interdit pas.

Pour en revenir au renforcement du rôle du conseil syndical, celui-ci peut être apprécié dans les rapports de celui-ci tant avec l’assemblée générale (I) qu’avec le syndic (II).

I - Le conseil syndical et l’assemblée générale

Afin de faciliter la réalisation de travaux au sein des copropriétés, l’article 20 de l’ordonnance du 30 octobre 2019 vient créer une nouvelle délégation de pouvoirs au profit du conseil syndical. Cette nouvelle délégation de pouvoirs s’ajoute à celle existante et qui est prévue à l’article 25, a, de la loi du 10 juillet 1965. Ledit a) est d’ailleurs, également, modifié par l’ordonnance. Il doit être remarqué qu’il ne s’agit pas, ici, d’une délégation au sens de l’article 1336 du Code civil (N° Lexbase : L0984KZH).

Il convient ainsi, désormais, de distinguer entre une délégation de pouvoir spéciale, dont le conseil syndical n’est pas le seul bénéficiaire potentiel (A) et une délégation de pouvoirs générale, ne pouvant être accordée qu’au conseil syndical (B).

A - La délégation spéciale de pouvoir

Cette délégation spéciale de pouvoir est modifiée par l’article 25 de l’ordonnance du 30 octobre 2019.

Cette modification conduit, tout d’abord, à faire apparaître dans le contenu même du a) de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965 des précisions qui se trouvaient jusqu’à présent uniquement à l’article 21 du décret du 17 mars 1967. Ainsi, est-il précisé que cette délégation de pouvoir peut profiter au syndic, au conseil syndical ou à toute personne. De même, est-il ajouté qu’il s’agit avec ladite délégation de prendre un acte ou une décision mentionné à l'article 24. L’article 21 du décret du 17 mars 1967 ajoute que cette délégation ne peut porter que sur un acte ou une décision expressément déterminé. A cet égard, il est également désormais indiqué au a) de l’article 25 qu’il s’agit soit de prendre un acte, soit une décision. Enfin, alors que l’article 21 du décret impose, lorsque le bénéficiaire de la délégation de pouvoir est autorisé à décider de dépenses, à l’assemblée générale de déterminer l'objet et à fixer le montant maximum des dépenses, le a) de l’article 25, dans sa nouvelle rédaction, reprend cette exigence mais en n’imposant que la fixation d’un montant maximum des sommes allouées.

Ensuite, disparaît du a) de l’article 25 la délégation spécifique qui pouvait être accordée lorsque le syndicat comportait au plus quinze lots à usage de logements, de bureaux ou de commerce. Celle-ci concernait la mise en application et le suivi des travaux et contrats financés dans le cadre du budget prévisionnel des charges. Cette suppression est parfaitement compréhensible au regard de la possibilité, d’une part, d’échapper au statut de la copropriété en recourant à une organisation différente remplissant les conditions énoncées au II de l’article 1er de la loi du 10 juillet 1965 et, d’autre part, de recourir à la délégation générale de pouvoir créée par l’ordonnance du 30 octobre 2019.

Enfin, pour cette dernière hypothèse, il était précisé que les membres du conseil syndical devaient être couverts par une assurance de responsabilité civile. Cette précision, logiquement, disparaît de l’article 25. Ainsi que précisé ci-dessus, il reste à déterminer si, comme lorsqu’est en cause une délégation générale de pouvoir, il y a lieu à souscription d’une assurance de responsabilité civile, en application du nouvel article 21-4 de la loi du 10 juillet 1965.

B - La délégation générale de pouvoirs

L'article 21 de l'ordonnance insère cinq articles 21-1 à 21-5 au sein de la loi du 10 juillet 1965 créant la possibilité d'une délégation conventionnelle de pouvoirs au profit d'un conseil syndical composé d'au moins trois membres. Au-delà de cette exigence, un vote de l’assemblée générale est nécessaire pour qu’une telle délégation de pouvoirs puisse être accordée. Lorsque tel est le cas, le conseil syndical va pouvoir prendre des décisions pour la mise en œuvre de cette délégation. Il doit être remarqué que, contrairement à la délégation spéciale de pouvoir, seul le conseil syndical peut bénéficier d’une délégation générale de pouvoirs.

1°) La décision de recourir à une délégation de pouvoirs

Le vote de l’assemblée générale. Suivant l’article 21-1 de la loi du 10 juillet 1965, l'assemblée générale peut, par décision prise à la majorité des voix de tous les copropriétaires, déléguer au conseil syndical le pouvoir de prendre tout ou partie des décisions relevant de la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés, ou votant par correspondance. C’est, donc, une majorité identique à celle de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965 qui a été retenue. Il en résulte, notamment, que la passerelle de l’article 25-1 pourra être mise en œuvre. Autrement dit, lorsque le projet aura recueilli au moins le tiers des voix de tous les copropriétaires, la même assemblée pourra se prononcer à la majorité prévue à l’article 24 en procédant immédiatement à un second vote.

Les limites de la délégation de pouvoirs. La délégation générale de pouvoirs qui peut être accordée au conseil syndical est limitée sur plusieurs points par l’article 21-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Ainsi, et tout d’abord, seules les décisions de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965 peuvent être déléguées au conseil syndical, l’article 21-1 visant les décisions relevant de la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou votant par correspondance. Il est, d’ailleurs, tout à fait permis à l’assemblée générale de ne pas inclure toutes les décisions de l’article 24 dans la délégation de pouvoirs, l’article 21-1 précisant que la délégation de pouvoirs peut être limitée à une partie des décisions relevant de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965.

Ensuite, l’article 21-1 de la loi du 10 juillet 1965 exclut que la délégation de pouvoirs porte sur l’approbation des comptes, sur la détermination du budget prévisionnel ou sur les adaptations du règlement de copropriété rendues nécessaires par les modifications législatives et réglementaires intervenues depuis son établissement.

Par ailleurs, la délégation générale de pouvoirs est obligatoirement limitée dans le temps et dans son montant. Ainsi, l’article 21-3 précise-t-il que la délégation de pouvoirs est accordée pour une durée maximale de deux ans. Bien entendu, la durée de la délégation peut être inférieure à deux ans. Le même texte ajoute que la délégation de pouvoirs est renouvelable par une décision expresse de l’assemblée générale. A cet égard, compte tenu du terme retenu («renouvelable»), il y a lieu de considérer, suivant l’article 1214 du Code civil (N° Lexbase : L0924KZA), que le renouvellement donne naissance à un nouveau contrat dont le contenu est identique au précédent, mais dont la durée est indéterminée. Est-il certain que cette modification de la durée de la délégation générale de pouvoirs a bien été envisagée par les rédacteurs de l’ordonnance ? Si tel est le cas, est-ce une bonne idée de limiter à deux ans la durée initiale de la délégation de pouvoirs pour ensuite la transformer en une délégation à durée indéterminée ? L’on peut en douter et il aurait sans doute mieux valu prévoir une possibilité de prorogation, au sens de l’article 1213 du Code civil (N° Lexbase : L0925KZB), pour une nouvelle période de deux ans. En l’état du texte, une telle prorogation est prohibée dès lors qu’elle conduit à conférer à la délégation de pouvoirs une durée de plus de deux ans. En tout état de cause, il ne peut être que conseillé aux copropriétaires de ne pas voter en faveur d’un tel renouvellement et d’opter pour la conclusion d’une nouvelle délégation à durée déterminée.

Toujours relativement à cette durée de la délégation de pouvoirs, il faut s’interroger sur la possibilité pour l’assemblée générale de mettre fin à la délégation de pouvoirs. Si la question se pose après le renouvellement de la délégation de pouvoirs, celle-ci étant à durée indéterminée, il n’y a pas de doute sur la possibilité pour l’assemblée générale de mettre fin à la délégation, ce en application de l’article 1211 du Code civil (N° Lexbase : L0927KZD). En revanche, qu’en est-il lorsque la délégation est toujours à durée déterminée ? A s’en tenir à l’article 1212 du Code civil (N° Lexbase : L0926KZC), lorsque le contrat est conclu pour une durée déterminée, chaque partie doit l’exécuter jusqu’à son terme. Pour autant, en rapprochant la délégation de pouvoirs du mandat (C. civ., art. 2004 N° Lexbase : L2239ABK et 2007 N° Lexbase : L2242ABN), il devrait être admis que l’assemblée générale et le conseil syndical puissent mettre fin à tout moment à la délégation de pouvoirs. A cet égard, le rapport au Président de la République précise simplement que «cette délégation étant conventionnelle, elle permettra en toute hypothèse à l'assemblée générale de se ressaisir de son droit de vote pour les décisions confiées au conseil syndical».

Au-delà de cette limitation dans le temps, l’article 21-2 précise que l’assemblée générale doit fixer le montant maximum des sommes allouées au conseil syndical pour mettre en œuvre sa délégation de pouvoirs. Il n’y a donc pas de seuil légal, mais un seuil qui sera fixé par l’assemblée générale.

Les effets de la délégation. Il est certain, tout d’abord, que le conseil syndical peut valablement prendre les décisions qui entrent dans le champ de la délégation générale de pouvoirs. Qu’en est-il de l’assemblée générale ? L’assemblée générale peut-elle prendre une décision qui entre dans le champ de la délégation générale de pouvoirs ? En raisonnant en terme de pouvoir et en faisant application du droit commun des obligations, la réponse doit être positive. En effet, suivant l’article 1159 du Code civil (N° Lexbase : L0871KZB), la représentation conventionnelle laisse au représenté l’exercice de ses droits.

2°) Les décisions et obligations du conseil syndical

Une décision prise à la majorité. Faute de dispositions dans la loi du 10 juillet 1965 venant préciser les modalités des prises de décisions au sein du conseil syndical et au regard du silence, le plus souvent, des règlements de copropriété sur ce point (décret n° 67-223 du 17 mars 1967, art. 22), l’ordonnance du 30 octobre 2019 instaure celles-ci avec toutefois une application limitée à l’hypothèse où il y a eu recours à une délégation générale de pouvoirs.

Ainsi, l’article 21-5 précise-t-il que les décisions du conseil syndical pour l’exercice de la délégation de pouvoirs mentionnée à l’article 21-1 sont prises à la majorité de ses membres. Il est à remarquer que, si un règlement de copropriété comporte une clause précisant les modalités des prises de décisions au sein du conseil syndical, celles-ci ne pourront être appliquées pour les décisions prises dans le cadre de la délégation générale de pouvoirs. En effet, en application de l’article 43 de la loi du 10 juillet 1965, les dispositions de l’article 21-5 sont impératives.

Par ailleurs, dès lors qu’il n’est nullement précisé à l’article 21-5, ni dans aucun article du décret du 17 mars 1967, que ces décisions doivent être prises au cours d’une réunion ou d’une assemblée du conseil syndical et dans le silence du règlement de copropriété, il est parfaitement possible que cette prise de décision intervienne dans le cadre d’un vote par correspondance.

Quoi qu’il en soit, en cas de partage des voix, le président du conseil syndical a voix prépondérante, ce qui permet, ainsi, d’assurer que le conseil syndical ne se trouve pas à son tour incapable de prendre une décision.

Relativement à cette prise de décision par le conseil syndical, il est possible que le décret du 17 mars 1967 soit modifié pour instaurer des dispositions visant à encadrer celle-ci. A défaut, compte tenu du renforcement du rôle et des pouvoirs du conseil syndical, il sera bienvenu d’organiser dans le règlement de copropriété les modalités de réunion du conseil syndical (convocation, modalités de vote, etc.) pour la prise de décision relevant du champ de la délégation générale de pouvoirs.

L’obligation de rendre compte. Comme lorsqu’il est recouru à une délégation spéciale de pouvoir (décret n° 67-223 du 17 mars 1967, art. 21), le conseil syndical est tenu de rendre compte à l’assemblée générale. L’article 21-5 précise, ainsi, qu’il rend compte de l’exercice de sa délégation de pouvoirs devant l’assemblée générale votant l’approbation des comptes. Il doit, également, établir un rapport en vue de l’information des copropriétaires. Le contenu de ce rapport ni d’ailleurs la forme ne sont précisés par l’ordonnance et le seront dès lors peut-être par le décret à venir. Il n’y a pas non plus de sanction prévue. Au-delà de la révocation de la délégation de pouvoirs, c’est également la responsabilité des membres du conseil syndical qui pourrait être engagée en cas de violation de ces obligations. Les copropriétaires pourraient ainsi demander au syndic d’agir à l’encontre des membres du conseil syndical.

II - Le conseil syndical et le syndic

Le conseil syndical exerce une surveillance sur l’activité du syndic. Dans le cadre de cette surveillance, il peut être conduit à constater des défaillances du syndic nécessitant que la responsabilité de ce dernier soit mise en cause. L’ordonnance du 30 octobre 2019 permet au président du conseil syndical d’intenter une action contre le syndic au nom et pour le compte du syndicat. Par ailleurs, ladite ordonnance revient sur l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 qui avait été modifié par la loi «ALUR» n° 2014-366 du 24 mars 2014 (N° Lexbase : L8342IZY) et la loi «Macron» n° 2015-990 du 6 août 2015 (N° Lexbase : L4876KEC) sur deux points : la mise en concurrence des contrats de syndic et les pénalités applicables au syndic pour défaut de transmission des pièces. Elle permet, également, au conseil syndical d’agir en vue de l’obtention d’une décision de désignation d’un mandataire ad hoc.

A - L’action du président du conseil syndical contre le syndic

Suivant l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat a qualité pour agir en justice, tant en demandant qu’en défendant, même contre certains des copropriétaires. Le syndicat peut, ainsi, décider d’agir contre le syndic lorsque ce dernier manque à ses obligations. Il revient alors au syndic, en application de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, d’agir, étant chargé de représenter le syndicat dans les actes civils et en justice dans les cas mentionnés aux articles 15 et 16 de ladite loi. Le syndic doit ainsi porter une action qui est exercée contre lui. La situation n’est pas idéale. Pour y remédier, l’article 12 de l’ordonnance du 30 octobre 2019 vient permettre au président du conseil syndical de représenter le syndicat dans le cadre d’une action exercée à l’encontre du syndic. Le président du conseil syndical a l’exclusivité d’une telle représentation. En effet, ce n’est qu’en l’absence de conseil syndical que cette action peut être exercée par un ou plusieurs copropriétaires représentant au moins un quart des voix de tous les copropriétaires.

1°) Les conditions de l’action

Le président du conseil syndical n’est pas d’office autorisé par la loi à représenter le syndicat. Il est, en effet, nécessaire que l’assemblée générale des copropriétaires autorise une telle action par le conseil syndical. Les nouveaux alinéas de l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965 précisent, à cet égard, que le président du conseil peut, également, sur délégation expresse de l'assemblée générale, exercer une action contre le syndic, en réparation du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires. La majorité nécessaire à l’adoption d’une telle délégation est celle de l’article 25, ainsi qu’il est précisé au i dudit article, tel que modifié par l’ordonnance.

Il va s’agir, alors, pour le président du conseil syndical d'introduire une action judiciaire contre le syndic en réparation du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires à la suite d’une carence ou d’une inaction du syndic. Une action pourra, donc, être exercée tant lorsque le syndic ne remplit pas ses obligations, que lorsqu’il les exécute improprement.

2°) Les effets et le coût de l’action

S’agissant, tout d’abord, du coût de l’action, les nouveaux alinéas de l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965 précisent que si, à l'issue de l'instance judiciaire, l'action exercée dans l'intérêt du syndicat est déclarée bien fondée par le juge, la charge des frais de procédure non supportés par le syndic est répartie entre tous les copropriétaires proportionnellement aux quotes-parts de parties communes afférentes à leur lot.

Pour bien appréhender cette précision, il y a lieu de distinguer deux situations : celle où la copropriété est pourvue d’un conseil syndical, et où donc le président du conseil syndical a été autorisé par l’assemblée générale à agir contre le syndic ; celle où il n’existe pas de conseil syndical, et où ce sont des copropriétaires qui, de leur propre initiative et sans autorisation de l’assemblée générale, ont agi en responsabilité contre le syndic.

Dans la première situation, il y a lieu de faire application du troisième alinéa de l’article 27 du décret du 17 mars 1967 suivant lequel les dépenses nécessitées par l’exécution de la mission du conseil syndical constituent des dépenses courantes d’administration. Elles sont supportées par le syndicat et réglées par le syndic. Ainsi, et dès lors que le président du conseil syndical agit en vertu d’une délégation accordée par l’assemblée générale, c’est le syndicat qui va devoir supporter les frais de l’action, que celle-ci ait été jugée bien fondée ou non.

Dans la deuxième situation, le (ou les) copropriétaire(s) représentant au moins un quart des voix de tous les copropriétaires agi(ssen)t contre le syndic sans autorisation de l’assemblée générale. Si l’action est jugée bien fondée, en cette hypothèse, la précision apportée à l’article 15 s’appliquera : la charge des frais de procédure non supportés par le syndic est répartie entre tous les copropriétaires proportionnellement aux quotes-parts de parties communes afférentes à leur lot. Si maintenant l’action n’est pas jugée bien fondée et dès lors que le (ou les) copropriétaire(s) a(ont) agi de leur propre initiative, sans autorisation de l’assemblée générale, il leur reviendra d’assumer personnellement les conséquences de l’action qu’ils ont exercée.

C’est en ce sens que se prononce le rapport au Président de la République : «les frais de procédure engagés par le président du conseil syndical constituent des dépenses courantes d'administration supportées par le syndicat et réglées par le syndic, en application du dernier alinéa de l'article 27 du décret du 17 mars 1967. Les copropriétaires exerçant cette même action doivent faire l'avance des frais de procédure, répartis ensuite entre tous les copropriétaires à proportion de leurs quotes-parts de parties communes afférentes à leurs lots, dès lors que la prétention est déclarée bien fondée par le juge».

Il faut, également, supposer que les frais irrépétibles suivront le même sort, tout comme les dommages et intérêts qu’il y aurait lieu de verser au syndic, lorsque l’action a échoué pour le syndicat.

S’agissant, ensuite, des dommages et intérêts dus par le syndic à la suite du succès de l’action, ils sont alloués au syndicat, ce que l’action ait été exercée par le président du conseil syndical ou par le (ou les) copropriétaire(s) représentant au moins un quart des voix de tous les copropriétaires.

B - L’obligation de mise en concurrence des contrats de syndic

L’obligation de mise en concurrence des contrats de syndic est prévue par l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965. Ce dernier est modifié par l’article 20 de l’ordonnance du 30 octobre 2019.

Tout d’abord, le délai de trois ans prévu pour la mise en concurrence des projets de contrats de syndic est supprimé. De façon pertinente, il est maintenant seulement prévu que cette mise en concurrence doit intervenir avant toute assemblée générale appelée à se prononcer sur la désignation d’un syndic professionnel. Une telle modification fait, ainsi, disparaître les interrogations qui pouvaient surgir lorsque le contrat du syndic prenait fin avant son terme et qu’il s’avérait nécessaire de désigner un nouveau syndic avant qu’un délai de trois ans ne soit à nouveau expiré.

Ensuite, est apportée une précision sur les conséquences d’une absence de mise en concurrence lorsque le conseil syndical n’a pas été dispensé par l’assemblée générale d’y procéder. En effet, en l’absence de cette mise en concurrence, il pouvait être soutenu que la délibération désignant le syndic pouvait être annulée, ce que la jurisprudence n’avait pas jusqu’à présent retenu. L’article 20 de l’ordonnance rend impossible une telle annulation en précisant que cette formalité n’est pas prescrite à peine d’irrégularité de la désignation du syndic. Il précise, également, qu’il s’agit avec cette mise en concurrence d’informer l’assemblée générale lorsqu’elle est amenée à se prononcer sur la désignation d’un syndic. A notre sens, il doit être possible au syndicat d’obtenir l’annulation du contrat de syndic pour vice du consentement, notamment, lorsque cette mise en concurrence n’aura pas été réalisée, et ce alors même que l’assemblée générale n’a pas accordé de dispense sur ce point au conseil syndical. Simplement, pour tenir compte de cette nouvelle rédaction du troisième alinéa de l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965, la preuve d’une absence de mise en concurrence ne suffira pas à établir l’existence d’un vice du consentement.

D’ailleurs, le conseil syndical peut être dispensé par l’assemblée générale de procéder à cette mise en concurrence par une délibération adoptée à la majorité de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965. Il lui revient, lorsqu’il souhaite bénéficier d’une telle dispense, de faire inscrire la demande à l’ordre du jour de l’assemblée générale précédant celle où un nouveau syndic doit être désigné.

Afin d’assurer la protection des copropriétaires, il est possible, dans tous les cas, pour un copropriétaire, de demander au syndic d'inscrire, à l'ordre du jour de l'assemblée générale appelée à se prononcer sur la désignation du syndic, l'examen de projets de contrat de syndic qu'il communique à cet effet.

Qu’il s’agisse de projets présentés par le conseil syndical ou par un copropriétaire, la mise en concurrence sera facilitée puisqu’elle se fera sur la base de projets de contrats de syndic respectant le contrat type mentionné à l'article 18-1, assortis d'une fiche d'information sur le prix et les prestations proposés par chaque syndic.

C - Les pénalités pour défaut de transmission des pièces par le syndic

L’article 203 de la loi «ELAN» avait modifié l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 en donnant au conseil syndical un moyen de contraindre le syndic à transmettre des pièces. En effet, des pénalités par jour de retard devaient être imputées sur les honoraires de base du syndic. Le texte a donné lieu à de nombreuses interrogations quant aux termes utilisés («honoraires de base» ?), mais également quant à ses modalités d’application. Ainsi, et par exemple, se posait la question de savoir quel organe aurait le pouvoir d’imputer les pénalités sur les «honoraires de base» et qui aurait autorité pour décider du montant de la pénalité.

L’article 20 de l’ordonnance du 30 octobre 2019 modifie, donc, à nouveau l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965. En premier lieu, il n’est plus prévu de montant minimal, mais un montant de pénalité qui doit être fixé par décret. En deuxième lieu, les termes «honoraires de base» sont remplacés par ceux de «rémunération forfaitaire annuelle du syndic», ce qui est plus compréhensible. En troisième lieu, les modalités de cette imputation, de cette déduction, sont précisées. Elles doivent être déduites de la rémunération du syndic lors de l’établissement des comptes définitifs à clôturer et à soumettre à l’assemblée générale pour approbation. A défaut, donc si le syndic ne procède pas à cette déduction, le président du conseil syndical peut demander au président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond, la condamnation du syndic au paiement de ces pénalités au profit du syndicat des copropriétaires. A priori, une telle action peut être exercée sans que le président du conseil syndical ait à obtenir une autorisation de l’assemblée générale. En effet, les nouveaux alinéas de l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965, qui précisent que le président du conseil peut, sur délégation expresse de l'assemblée générale, exercer une action contre le syndic, en réparation du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires, ne sont pas applicables, l’action du président du conseil syndical ne tendant pas à la réparation d’un préjudice mais à l’imputation de pénalités sur la rémunération du syndic.

Bien que l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 ressorte clarifié de cette modification, il est probable que ces pénalités ne seront que rarement appliquées, compte tenu de la mise en ligne sur l’extranet des documents relatifs à la copropriété auxquels les membres du conseil syndical ont accès, conformément au décret n° 2019-502 du 23 mai 2019, relatif à la liste minimale des documents dématérialisés concernant la copropriété accessibles sur un espace sécurisé en ligne (N° Lexbase : L3492LQE). Ce n’est, ainsi, que lorsque le syndic ne respectera pas cette obligation de mise en ligne qu’il sera susceptible de se voir sanctionné par application de l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965.

D - La désignation d’un mandataire ad hoc

L’article 29-1 A de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que lorsqu’à la clôture des comptes les impayés atteignent 25 % des sommes exigibles en vertu des articles 14-1 et 14-2, le syndic doit en informer le conseil syndical et saisir sur requête le juge d'une demande de désignation d'un mandataire ad hoc. Pour les copropriétés de plus de deux cents lots, le pourcentage des impayés déclenchant la saisine est fixé à 15 %.

En l'absence d'action du syndic dans un délai d'un mois à compter de la clôture des comptes, le juge peut être saisi d'une même demande par des copropriétaires représentant ensemble au moins 15 % des voix du syndicat ; un créancier, sous certaines conditions ; le représentant de l'Etat dans le département ou le procureur de la République près le tribunal de grande instance ; le maire de la commune du lieu de situation de l'immeuble ; le président de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'habitat du lieu de situation de l'immeuble.

De façon très étonnante, l’article 29-1 A, s’il précise que le syndic doit informer le conseil syndical, ne prévoyait pas la possibilité pour le conseil syndical de saisir le juge en vue d’obtenir la désignation d’un mandataire ad hoc. Or, le conseil syndical, compte tenu de son rôle et de l’implication de ses membres, a une bonne connaissance de la situation financière de la copropriété.

L’article 33 de l’ordonnance du 30 octobre 2019 répare cet oubli en ajoutant, à la liste de l’article 29-1 A, le président du conseil syndical, renforçant à nouveau le rôle du conseil syndical. Ainsi, il y a plus de chance qu’un audit de la copropriété soit réalisé précocement par l’administrateur ad hoc, permettant d’éviter que ne s’aggravent les difficultés que rencontre la copropriété.

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