Jurisprudence : Cass. civ. 2, Conclusions, 13-06-2024, n° 22-15.721

Cass. civ. 2, Conclusions, 13-06-2024, n° 22-15.721

A98466BB

Référence

Cass. civ. 2, Conclusions, 13-06-2024, n° 22-15.721. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/112300706-cass-civ-2-conclusions-13062024-n-2215721
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AVIS DE Mme TUFFREAU, AVOCATE GÉNÉRALE RÉFÉRENDAIRE

Arrêt n° 613 du 13 juin 2024 (B+R) – Deuxième chambre civile Pourvoi n° 22-22.786⚖️ Décision attaquée : 20 octobre 2022 de la cour d'appel de Pau La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Gironde C/ La société [2] _________________ Avis communs aux pourvois 22-22.786, 22-19.381, 22-15.721 et 22-16.265

En droit de la sécurité sociale, les rapports entre les parties sont asymétriques en raison du principe d'indépendance des rapports caisse-assuré et caisse-employeur. Alors que le contentieux portant sur la faute inexcusable de l'employeur se joue entre le salarié victime et son employeur (en présence de la caisse), le contentieux relatif à la contestation par l'employeur de la reconnaissance de la maladie professionnelle l'oppose à la seule caisse. Le salarié est donc absent de ce litige, alors même que son issue dépend parfois de l'appréciation de données médicales qui le concernent directement. En l'absence du salarié, l'articulation entre le principe de la contradiction et le secret médical est alors extrêmement délicate. La demande de reconnaissance de l'hypoacousie de perception en est un parfait exemple. Il s'agit d'une maladie professionnelle figurant au tableau n° 42, qui nécessite que soit réalisé un test d'audiométrie dans des conditions spécifiques, et dont la retranscription graphique est communément désignée sous le terme d'« audiogramme ».

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En l'espèce, dans les quatre affaires, l'employeur a sollicité que soit prononcée l'inopposabilité de la décision de reconnaissance de la maladie professionnelle par la caisse au motif de l'absence de mise à disposition de cet audiogramme. Les cours d'appel de Pau, Toulouse, Amiens et Metz ont toutes fait droit à cette demande et ont déclaré la décision de la caisse inopposable à l'employeur, au regard de la jurisprudence constante de la Cour de cassation, selon laquelle l'audiogramme est un élément constitutif de la maladie, susceptible de faire grief, lequel échappe au secret médical, et doit donc être transmis à l'employeur sur le fondement de l'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale🏛. À l'appui des pourvois qu'elle a formés à l'encontre de chacune de ces décisions, la caisse sollicite un revirement de cette jurisprudence en faisant valoir que cet audiogramme, relatant les conclusions d'un examen médical, est couvert par le secret médical, de sorte qu'il ne saurait figurer dans le dossier constitué par les services administratifs de la caisse dont l'employeur peut demander consultation. La caisse indique par ailleurs que ses services administratifs n'ont pas accès à cette pièce qui est détenue par le service médical et que ce service ne peut la lui communiquer, à raison des règles légales et déontologiques pesant sur les médecins-conseils, en dehors d'une expertise. Le Conseil national de l'ordre des médecins est intervenu devant la Cour de cassation. Il fait valoir que l'audiogramme est un examen médical, comme tel couvert par le secret médical, et qu'il n'existe aucune disposition législative permettant de le lever. Il s'agit donc de déterminer si cet audiogramme constitue une pièce médicale, couverte par le secret médical. Si tel est le cas, existe-t-il une autorisation légale permettant de déroger au secret médical et de communiquer cette pièce à l'employeur ? En l'absence de dérogation légale permettant la levée du secret médical s'agissant de l'audiogramme, il conviendra alors de procéder à une mise en balance entre, d'une part, le secret médical et, d'autre part, le principe de la contradiction, et plus particulièrement le principe d'égalité des armes. Cette mise en balance permettra de répondre à la question posée par les pourvois : l'absence de transmission à l'employeur de l'audiogramme doit-elle être sanctionnée par l'inopposabilité à son égard de la décision de reconnaissance de la maladie professionnelle ? Après avoir examiné les conditions de prise en charge de l'hypoacousie de perception, prévue au tableau n° 42 des maladies professionnelles (I), nous verrons que l'audiogramme est couvert par le secret médical (II) avant d'envisager les conséquences de son absence de transmission à l'employeur (III).

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I – LA

PRISE EN CHARGE DE L'HYPOACOUSIE DE PERCEPTION AU TITRE DES MALADIES PROFESSIONNELLES

En application de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale🏛, « est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau ». S'agissant de l'hypoacousie de perception, la maladie est désignée avec précision au tableau n° 42 des maladies professionnelles (1), conduisant la Cour de cassation à considérer que l'audiogramme revêt le caractère d'une condition de fond de la reconnaissance de la maladie professionnelle désignée par le tableau (2), la distinguant ainsi d'autres maladies professionnelles pour lesquelles est également exigée la production d'un examen médical (3). 1. Les conditions prévues au tableau n° 42 des maladies professionnelles Le tableau n° 42 des maladies professionnelles 1 est ainsi renseigné : « Désignation des maladies : Déficit audiométrique bilatéral par lésion cochléaire irréversible. Ce déficit est évalué par une audiométrie effectuée de trois semaines à un an après cessation de l'exposition aux bruits lésionnels, en cabine insonorisée avec un audiomètre calibré. Cette audiométrie doit être tonale et vocale et faire apparaître au minimum sur la meilleure oreille un déficit moyen de 35 décibels, calculé en divisant par 10 la somme des déficits mesurés sur les fréquences 500, 1 000, 2 000 et 4 000 hertz, pondérés respectivement par les coefficients 2, 4, 3 et 1. Aucune évolution de ce déficit ne peut être prise en compte après l'expiration du délai de prise en charge, sauf en cas de nouvelle exposition au risque. »

Il y est ensuite précisé le délai de prise en charge 2, ainsi que la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer cette maladie. Le tableau n° 42 des maladies professionnelles donne ainsi une définition médicale précise de l'atteinte auditive professionnelle : doit être constatée une perte permanente d'acuité auditive consécutive à une lésion des cellules de la cochlée affectant les deux oreilles internes. En effet, il s'agit de distinguer l'atteinte auditive d'origine professionnelle d'autres causes (dégénérative, héréditaire ou infectieuse par exemple). L'évaluation de la perte auditive et l'existence d'une hypoacousie de perception sont déterminées au cours d'un examen médical spécifique (audiométrie) effectué dans une cabine insonorisée à l'aide d'un audiomètre calibré, reposant sur des zones 1

Dans sa version issue du décret n° 2003-924 du 25 septembre 2003🏛
.

2

« 1 an après cessation de l'exposition au risque acoustique, sous réserve d'une durée d'exposition d'un an, réduite à trente jours en ce qui concerne la mise au point des propulseurs, réacteurs et moteurs thermiques ».

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audiométrie tonales et vocales concordantes réalisées après un repos auditif d'au moins trois jours. Les résultats de ce test d'audiométrie sont relatés sous forme de graphique dans un document appelé audiogramme. 2. La jurisprudence de la Cour de cassation s'agissant du tableau n° 42 La Cour de cassation juge que les modalités de constat du déficit audiométrique sont un élément constitutif de la maladie inscrite à ce tableau : « l'audiogramme revêt le caractère d'une condition de fond de la reconnaissance de la maladie professionnelle désignée par le tableau » 3. Il appartient dès lors au juge de rechercher si le diagnostic d'hypoacousie a été réalisé dans des conditions conformes aux exigences du tableau n° 42 des maladies professionnelles. Par ailleurs, c'est à la caisse qu'il appartient de démontrer que la pathologie déclarée est conforme à celle décrite au tableau 4 . S'agissant de la charge de la preuve, les articles L. 431-1 et L. 461-2 du code de la sécurité sociale🏛🏛 instituent une présomption d'imputabilité à l'activité professionnelle, des pathologies désignées par les tableaux de maladies professionnelles et contractées dans les conditions visées par ces tableaux. Pour pouvoir bénéficier de cette présomption, il appartient au salarié d'établir que les conditions du tableau sont remplies. Il appartient également à la caisse, subrogée dans les droits du salarié qu'elle a indemnisé, de démontrer que les conditions du tableau des maladie professionnelle dont elle invoque l'application sont remplies. La Cour de cassation a ainsi approuvé la cour d'appel qui, ayant relevé que la caisse ne produisait aucun résultat d'audiométrie, ni aucune autre pièce du dossier de la victime et n'apportait aucune précision quant à l'effectivité et la date de réalisation des examens audiométriques, a retenu que la seule décision du médecin-conseil ne suffisait pas à pallier cette carence et qu'il n'était donc pas démontré que les prescription du tableau n° 42 des maladies professionnelles avaient été respectées5. La Cour de cassation en a déduit également que l'audiogramme devait être inclus dans le dossier mis à la disposition de l'employeur sur le fondement de l'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale (désormais R. 441-14 depuis le décret n°2019-356 du 23 avril 2019🏛 6. Elle a rejeté le moyen tenant au secret professionnel 3 4

2e Civ., 28 novembre 2019, pourvoi n° 18-18.209⚖️.

2e Civ., 19 septembre 2019, pourvoi n° 18-19.993⚖️ ; 2e Civ., 6 novembre 2014, pourvoi n° 13-23.188⚖️ ; 2e Civ., 7 mai 2014, pourvoi n° 13-14.101⚖️. 5

2e Civ., 13 mars 2014, pourvoi n° 13-10.316⚖️.

6

2e Civ., 10 octobre 2013, pourvoi n° 12-24.271⚖️. Antérieurement plusieurs arrêts rendus par la Cour de cassation avaient déjà considéré, san toutefois l'affirmer explicitement, que l'audiogramme devait figurer au nombre des pièces composant le dossier constitué par la caisse en application de l'article R. 441-13 (Soc. 30 janvier 1997, n° 95-14.400⚖️, 22 juin 2000, n° 98-18.312⚖️, Bull., V, n° 244 ; 20 décembre 2001, n° 00-12.615⚖️, Bull., V, n° 398 ; Civ. 2ème, 15 mars 2012, n° 10-25.673⚖️).

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soulevé par les caisses au motif que l'audiogramme est un « élément nécessaire à la réunion des conditions du tableau n° 42 qui comme tel échappe au secret médical » 7. 3. La différence avec d'autres maladies professionnelles exigeant la production d'un examen D'autres maladies professionnelles nécessitent la production d'examen médicaux. La Cour de cassation juge cependant que les examens médicaux dont le résultat sert à caractériser la maladie visée au tableau, et qui constituent donc des éléments du diagnostic, n'ont pas à figurer au dossier que l'employeur a la possibilité de consulter. Il en est ainsi de la teneur de l'examen tomodensitométrique mentionné au tableau n° 30 B des maladies professionnelles. Sont notamment désignées dans ce tableau « B. - Lésions pleurales bénignes avec ou sans modifications des explorations fonctionnelles respiratoires : - plaques calcifiées ou non péricardiques ou pleurales, unilatérales ou bilatérales, lorsqu'elles sont confirmées par un examen tomodensitométrique ». La Cour de cassation juge que « la teneur de l'examen tomodensitométrique mentionné au tableau n° 30 B des maladies professionnelles, qui constitue un élément du diagnostic, ne pouvant être examiné que dans le cadre d'une expertise, n'a pas à figurer dans les pièces du dossier constitué par les services administratifs de la caisse en application de l'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale et dont l'employeur peut demander la communication » 8. Par ailleurs, s'agissant du tableau n°57 A des maladies professionnelles, ce dernier subordonne la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la tendinopathie chronique non rompue non calcifiante avec ou sans enthésopathie de la coiffe des rotateurs, à sa confirmation par une IRM ou un arthroscanner en cas de contre-indication à l'IRM 9. La Cour de cassation a ainsi jugé, dans un arrêt du 29 mai 2019, que « la teneur de l'IRM mentionnée au tableau n° 57 A des maladies professionnelles constitue un élément du diagnostic, qui ne peut être examinée que dans le cadre d'une expertise, de sorte qu'elle n'a pas à figurer dans les pièces du dossier constitué par les services administratifs de la caisse en application de l'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale et dont l'employeur peut demander la communication ».10

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2e Civ., 11 octobre 2018, pourvoi n° 17-18.901⚖️.

8

2e Civ., 17 janvier 2008, pourvoi n° 07-13.356⚖️, Bull. 2008, II, n° 11 et pour une application plus récente 2e Civ., 9 mars 2017, pourvoi n° 16-12.277⚖️.

9

2e Civ., 15 décembre 2016, n° 15-26.900⚖️, Bull. 2016, II, n° 275 ; 2e Civ., 31 mai 2018, n° 17-17.983⚖️.

10

2e Civ., 29 mai 2019, pourvoi n° 18-14.811⚖️.

5

En l'état de la jurisprudence actuelle, l'employeur peut donc obtenir la communication de l'audiogramme sur le fondement de l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale🏛, au motif qu'il s'agit d'un élément constitutif de la maladie, qui échappe au secret médical, alors qu'il ne peut obtenir communication ni de l'I.R.M. ni de l'examen tomodensitométrique, qui constituent des éléments de diagnostic ne pouvant être examinés que dans le cadre d'une expertise.

II- L'AUDIOGRAMME, UN PIECE MEDICALE COUVERTE PAR LE SECRET MEDICAL Après des rappels plus généraux sur le secret médical (1), nous examinerons les dérogations au secret médical apportées par le droit de la sécurité sociale en matière de reconnaissance des maladies professionnelles (2), afin d'envisager s'il existe une telle dérogation, permettant la production de l'audiogramme, pièce médicale couverte par le secret médical (3). 1. Éléments de rappel s'agissant du secret médical a) Un droit consacré par la loi et la jurisprudence La jurisprudence, tant judiciaire qu'administrative, proclame que le secret médical revêt un caractère général et absolu. La Cour de cassation affirme ainsi que « l'obligation au secret professionnel […] s'impose aux médecins, hormis les cas où la loi en dispose autrement, comme un devoir de leur état [et] que, sous cette seule réserve, elle est générale et absolue » (Cass. Crim., 8 avril 1998, n° 97-83.656⚖️, Bull. crim., n° 138). Le code de la santé publique consacre le secret médical, notamment à l'article L. 1110-4, introduit par la loi n°2002-303 du 4 mars 2002, qui en fait un droit du patient. Le code de déontologie médicale a été intégré dans le code de la santé publique, dont l'article R. 4127-4 donne la définition du secret médical : « Le secret professionnel institué dans l'intérêt des patients s'impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi. Le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l'exercice de sa profession, c'est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu'il a vu, entendu ou compris. »

Par ailleurs, selon la Cour européenne des droits de l'homme, « les données de nature médicale relèvent du droit au respect de la vie privée et familiale du patient, garantis par l'article 8 de la Convention »11 et « le respect du caractère confidentiel des informations sur la santé constitue un principe essentiel du système juridique de toutes les Parties contractantes à la Convention »12. 11

CEDH arrêt du 13 octobre 2020, Frâncu c. Roumanie, n°69356/13⚖️, § 51.

12

CEDH, arrêt du 25 février 1997, Z. c. Finlande, n°22009/93, §95.

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Le secret médical s'impose avant tout au personnel médical et donc au médecin. Il s'impose également à l'égard d'autres médecins dès lors qu'ils ne concourent pas à un acte de soins. La violation du secret médical est sanctionnée par l'article 226-13 du code pénal🏛, lequel dispose que « la révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ». b) les dérogations au secret médical : l'autorisation de la loi Toutefois, l'article 226-14 du code pénal🏛 précise que ces dispositions ne sont pas applicables dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. Il est ainsi fait exception à la règle du secret médical non seulement lorsque cette exception est prévue par une loi mais aussi lorsqu'elle est la conséquence nécessaire de dispositions législatives13. Pour déterminer si une dérogation au secret médical est ou non une conséquence nécessaire de dispositions législatives, M. Lallet, rapporteur public, indiquait que le Conseil d'État examinait « au cas par cas si le respect d'une obligation législative requiert impérativement la transmission d'informations couvertes par le secret médical, ou si l'objectif poursuivi par le législateur peut être atteint sans qu'il soit nécessaire de le transgresser »14 . Illustre cette hypothèse, par exemple, le remboursement par l'Etat de dépenses médicales15, la transmission par le psychiatre aux autorités de police du certificat médical qu'il a rédigé en vue du prononcé, par le préfet, d'une hospitalisation sans consentement16 ou encore la connaissance par le président de la Polynésie française, en vue du prononcé des sanctions prévues par une loi du pays rendant la vaccination obligatoire, des personnes non-vaccinées sans motif légalement prévu17.

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14

Conseil d'État, 26 juillet 1996, Syndicat des médecins d'Aix et région, n° 160557⚖️.

A. Lallet, conclusions sur CE, 22 octobre 2014, Section française de l'OIP, n°362681⚖️.

15

Conseil d'État, 8 février 1989, Conseil national de l'ordre des médecins et autres, n° 54494, 54678, 54679, 54812, 54813. 16⚖️

Conseil d'État, 4 octobre 2019, M. C…, n°40599. 17

Conseil d'État, 10 décembre 2021, Mme CO… et autres, n° 456004, 456447, 456714, 456879, 456886, 456888, 456930, 456935, 456955, 456978⚖️, 457001.

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Par ailleurs, la Cour de cassation admet qu'un professionnel de santé puisse révéler des informations dans le cadre de la « défense de l'ordre et à la protection des droits de la partie civile au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme🏛 des droits »18 ou de manière plus générale pour « faire valoir ses droits en justice »19 . Enfin, en matière d'expertise, la Cour de cassation considère que « le secret médical ne saurait être opposé à un médecin-expert appelé à éclairer le juge sur les conditions d'attribution d'une prestation sociale, ce praticien, lui-même tenu au respect de cette règle, ne pouvant communiquer les documents médicaux examinés par lui aux parties et ayant pour mission d'établir un rapport ne révélant que les éléments de nature à apporter la réponse aux questions posées et excluant, hors de ces limites, ce qu'il a pu connaître à l'occasion de l' expertise »20. 2- Les dérogations apportées au secret médical par le droit de la sécurité sociale en matière de reconnaissance des maladies professionnelles La prise en charge par l'assurance maladie des dépenses de santé implique la communication d'informations nominatives plus ou moins révélatrices de l'état de santé de l'assuré. Si l'assuré peut consentir à la levée du secret médical s'agissant de ses données personnelles de santé, encore faut-il que cette acceptation soit explicite. La Cour de cassation a ainsi jugé que « la simple sollicitation de prestations sociales ne saurait impliquer, à elle seule, ni l'accord du demandeur, ni son absence d'opposition à la levée du secret médical, lequel continue de s'imposer aux médecins conseils des caisses ainsi qu'au juge »21. La levée du secret médical en droit de la sécurité sociale est envisagée différemment selon le dépositaire de ce secret, qu'il s'agisse du médecin de la victime, du praticien conseil de la caisse ou encore de la caisse elle-même. 18

Crim., 24 avril 2007, n° 06-88.051⚖️, Bull. crim. 2007, n° 108 : « N'a pas donné de base légale à sa décision la cour d'appel qui, dans la procédure engagée, du chef de fausse attestation et usage, par le médecin psychiatre d'un établissement spécialisé, contre, notamment, la mère d'un majeur protégé qui y a séjourné, refuse d'écarter des débats les pièces du dossier médical et psychologique de ce dernier, produites par la partie poursuivante, sans rechercher si l'examen public et contradictoire, devant la juridiction correctionnelle, de ces pièces, couvertes par le secret professionnel, constitue une mesure nécessaire et proportionnée à la défense de l'ordre et à la protection des droits de la partie civile au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ». 19

1re Civ., 18 mars 1997, n° 95-12.576⚖️, Bulletin 1997, I, n° 99 : « Si les dispositions relatives au secret professionnel font obstacle à ce que l'identité d'un malade soit divulguée sans son consentement, toute partie qui se prétend victime d'un dommage doit pouvoir faire effectivement valoir ses droits en justice ». 20

2e Civ., 22 novembre 2007, pourvoi n° 06-18.250⚖️, Bull. 2007, II, n° 261).

21

2e Civ., 13 novembre 2008, pourvoi n° 07-18.364⚖️, Bull. 2008, II, n° 240 ; 2e Civ., 13 novembre 2008, pourvoi n° 07-18.368⚖️.

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a) La communication d'informations victime

l'assurance maladie par le médecin de la

Les déclarations d'accident du travail et de maladie professionnelle font l'objet de certificats nominatifs et descriptifs, rédigés par le médecin de la victime (article L. 441-6 du code de la sécurité sociale🏛 s'agissant des accidents du travail et L. 461-5 du code de la sécurité sociale🏛 s'agissant des maladies professionnelles). S'agissant des accidents de travail, il appartient ainsi au praticien d'adresser directement à la caisse les certificats médicaux initial, de guérison ou de consolidation (L. 441-6 du code de la sécurité sociale). La loi lève ainsi, à l'encontre du médecin traitant de la victime, le secret médical s'agissant de ces certificats médicaux. L'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale🏛 précise les mentions devant figurer sur « les certificats médicaux adressés à la caisse primaire d'assurance-maladie par le praticien, conformément aux dispositions de l'article L. 441-6 ». Par ailleurs, l'article R.4127-50 code de la santé publique🏛 dispose que : « Le médecin doit, sans céder à aucune demande abusive, faciliter l'obtention par le patient des avantages sociaux auxquels son état lui donne droit. A cette fin, il est autorisé, sauf opposition du patient, à communiquer au médecinconseil nommément désigné de l'organisme de sécurité sociale dont il dépend, ou à un autre médecin relevant d'un organisme public décidant de l'attribution d'avantages sociaux, les renseignements médicaux strictement indispensables. »

Toutefois, le Conseil d'Etat a jugé que « ces dernières dispositions n'ont pas pour objet et ne peuvent avoir légalement pour effet d'autoriser la divulgation de renseignements couverts par le secret médical en dehors des cas prévus par la loi ou sur le fondement de dispositions réglementaires qui sont la conséquence nécessaire d'une loi ; que, par suite, elles ne sont pas contraires à la règle du secret professionnel »22. L'article R. 4127-50 du code de la santé publique permet donc, si le patient ne s'y oppose pas, l'échange de renseignements nécessaires à l'octroi d'une prestation entre le médecin consulté par le patient et le médecin-conseil, lui-même tenu au secret (« secret partagé »). L'on relèvera que les renseignements doivent être communiqués, non au service médical, mais à un médecin-conseil nommément désigné, sous pli confidentiel. Par ailleurs, saisi de l'obligation faite aux médecins, lorsqu'ils établissent une prescription d'arrêt de travail donnant lieu à l'octroi d'indemnités journalières par l'assurance maladie, de mentionner sur les documents produits à cet effet « les éléments d'ordre médical justifiant l'interruption de travail », le Conseil constitutionnel a d'abord rappelé que le droit au respect de la vie privée « requiert que soit observée une particulière vigilance dans la transmission des informations 22

Conseil d'Etat, 30 avril 1997, Syndicat des médecins d'Aix et région et X…, n° 173044 et 174212⚖️.

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nominatives à caractère médical entre les médecins prescripteurs et les organismes de sécurité sociale ; qu'il appartient toutefois au législateur de concilier le droit au respect de la vie privée et l'exigence de valeur constitutionnelle qui s'attache à l'équilibre financier de la sécurité sociale ». Il a ensuite constaté que ces informations étaient destinées au seul « service du contrôle médical » et que les médecins-conseils composant ce service étaient tenus au secret médical, y compris envers l'organisme qui fait appel à eux. Par une réserve d'interprétation, il a toutefois exigé que soient « mises en place des modalités d'acheminement de ces documents aux médecins-conseils de nature à assurer la stricte confidentialité de la transmission des informations qu'ils contiennent ». Sous cette réserve, et compte tenu de la finalité poursuivie, qui était de remédier à l'augmentation des dépenses de santé en cause et à leur caractère éventuellement injustifié, le Conseil a jugé la disposition conforme au droit au respect de la vie privée »23. b) La communication des pièces médicales par le médecin-conseil du service médical de la caisse - Le médecin-conseil, un médecin soumis au secret médical L'article L. 315-1 V du code de la sécurité sociale🏛 dispose que « Les praticiensconseils du service du contrôle médical et les personnes placées sous leur autorité n'ont accès aux données de santé à caractère personnel que si elles sont strictement nécessaires à l'exercice de leur mission, dans le respect du secret médical. ». Les médecins-conseils n'accomplissent pas d'actes de soins. Ils sont néanmoins astreints au secret médical24, y compris à l'égard des services administratifs des caisses, par l'article R. 4127-4 du code de la santé publique🏛 : « Le médecin chargé du contrôle est tenu au secret envers l'administration ou l'organisme qui fait appel à ses services. Il ne peut et ne doit lui fournir que ses conclusions sur le plan administratif, sans indiquer les raisons d'ordre médical qui les motivent. Les renseignements médicaux nominatifs ou indirectement nominatifs contenus dans les dossiers établis par ce médecin ne peuvent être communiqués ni aux personnes étrangères au service médical ni à un autre organisme. »

La Cour de cassation a dès lors jugé, au visa des articles 9 du code civil🏛 et R. 41274 du code la santé publique, que le secret médical, institué dans l'intérêt des patients, s'opposait à ce que les juges fassent injonction au médecin du service 23

Décision n° 99-422 DC du 21 décembre 1999.

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L'article 5 du décret n° 69-505 du 24 mai 1969🏛 fixant le statut des praticiens conseils chargés du service du contrôle médical du régime général de la sécurité sociale, abrogé par le décret n° 2008-586 du 19 juin 2008🏛, disposait que : « Conformément aux dispositions de l'article 378 du code pénal🏛, les praticiens conseils sont astreints au respect du secret professionnel. »

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médical de la caisse de communiquer le dossier médical de la victime alors que des informations couvertes par le secret médical ne peuvent être communiquées à un tiers sans que soit constaté l'accord de la victime ou son absence d'opposition à la levée du secret25. Les dérogations au secret médical permettant la transmission de données médicales par le médecin-conseil -

Peu de dispositions du code de la sécurité sociale autorisent le médecinconseil à divulguer des données médicales. La loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009🏛 avait créé l'article L.143-10 du code de la sécurité sociale🏛, lequel permettait la transmission du rapport médical au médecin mandaté à cet effet par l'employeur en cas d'expertise judiciaire, mais uniquement s'agissant du contentieux technique de l'incapacité. Cet article a été abrogé par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 (à compter du 31 décembre 2022, date à laquelle la Cour nationale de l'incapacité de la tarification de l'assurance et des accidents du travail, la CNITAAT, a cessé son activité). Il disposait que : « Pour les contestations mentionnées aux 2° et 3° de l'article L. 143-1, le praticienconseil du contrôle médical du régime de sécurité sociale concerné transmet, sans que puissent lui être opposées les dispositions de l'article 226-13 du code pénal, à l'attention du médecin expert ou du médecin consultant désigné par la juridiction compétente, l'entier rapport médical ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité de travail permanente. A la demande de l'employeur, ce rapport est notifié au médecin qu'il mandate à cet effet. La victime de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle est informée de cette notification. »

S'agissant du contentieux général de la sécurité sociale, la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016🏛, en vigueur du 28 janvier 2016 au 1er janvier 2019, a créé l'article L. 141-2-2 du code de la sécurité sociale🏛, aux termes duquel : « Lorsque sont contestées, en application de l'article L. 142-1 du présent code, les conditions de reconnaissance du caractère professionnel d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ou l'imputabilité des lésions ou des prestations servies à ce titre, le praticien-conseil du contrôle médical du régime de sécurité sociale concerné transmet, sans que puisse lui être opposé l'article 226-13 du code pénal, à l'attention du médecin expert désigné par la juridiction compétente, les éléments médicaux ayant contribué à la décision de prise en charge ou de refus et à la justification des prestations servies à ce titre. A la demande de l'employeur, ces éléments sont notifiés au médecin qu'il mandate à cet effet. La victime de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle est informée de cette notification. »

Désormais, la distinction entre le contentieux général et le contentieux technique n'existant plus, ces articles ont été transférés par l'ordonnance n° 2018-358 du 16 mai 2018🏛 à l'article L. 142-10 du code de la sécurité sociale🏛, lequel prévoit, dans sa version en vigueur du 1er janvier 2019 au 1er janvier 2020, que :

25

2e Civ., 19 février 2009, pourvoi n° 08-11.959⚖️, Bull. 2009, II, n° 62.

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« Pour les contestations mentionnées au 1° de l'article L. 142-1 et pour celles mentionnées aux 1°, 2°, 3° de l'article L. 142-2, le praticien-conseil ou l'autorité compétente pour examiner le recours préalable transmet à l'expert ou au médecin consultant désigné par la juridiction compétente, sans que puisse lui être opposé l'article 226-13 du code pénal, l'intégralité du rapport médical ayant fondé sa décision. A la demande de l'employeur, partie à l'instance, ce rapport est notifié au médecin qu'il mandate à cet effet. La victime de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle est informée de cette notification. »

Cet article a été légèrement modifié par la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019, en vigueur depuis le 1er janvier 2020. Cette communication au médecin mandaté par l'employeur est également prévue au stade du recours amiable, à l'article L. 142-6 du code de la sécurité sociale🏛, dans sa version issue de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019🏛, en vigueur depuis le 1er janvier 2020 devant la commission médicale de recours amiable (CMRA). Cet article dispose que : « Pour les contestations de nature médicale, hors celles formées au titre du 8° de l'article L. 142-1, le praticien-conseil du contrôle médical du régime de sécurité sociale concerné transmet, sans que puisse lui être opposé l'article 226-13 du code pénal, à l'attention exclusive de l'autorité compétente pour examiner le recours préalable, lorsqu'il s'agit d'une autorité médicale, l'intégralité du rapport médical reprenant les constats résultant de l'examen clinique de l'assuré ainsi que ceux résultant des examens consultés par le praticien-conseil justifiant sa décision. A la demande de l'employeur, ce rapport est notifié au médecin qu'il mandate à cet effet. La victime de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle est informée de cette notification. […]

La levée du secret médical auquel est tenu le médecin-conseil est donc doublement limitée. D'une part, la levée du secret médical ne peut être faite qu'au profit de l'expert, du médecin consultant désigné par la juridiction, du médecin mandaté par l'employeur ou de « l'autorité compétente pour examiner le recours préalable, lorsqu'il s'agit d'une autorité médicale ». À aucun moment cette levée du secret médical n'est prévue au profit de l'employeur. D'autre part, la levée du secret médical n'est possible que dans deux hypothèses : devant la commission de recours amiable et lorsque la juridiction a décidé d'ordonner une mesure d'instruction. c) La communication des pièces médicales par la caisse sur le fondement de l'article R. 441-13, devenu R. 441-14 du code de la sécurité sociale S'il y a lieu de distinguer le médecin6conseil, appartenant au service médical de la caisse, des services administratifs de celle-ci, ces derniers ne sont pas moins tenus au respect du secret professionnel au regard des nombreuses données médicales qui leur sont transmises. En effet, l'article L.314-1 du code de la sécurité sociale🏛 dispose que « Lorsqu'elles reçoivent les documents établis pour l'ouverture du droit aux prestations de l'assurance maladie, les caisses, avec l'appui des services médicaux de chacun des régimes d'assurance maladie obligatoire, dans le respect du secret professionnel et

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médical, vérifient :1° Que l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée la prise en charge est rempli, […]. » Sous l'empire de l'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue du décret n° 2016-756 du 7 juin 2016🏛 , en vigueur du 10 juin 2016 au 1er décembre 2019, la caisse était destinatrice du « dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial et le résultat des examens médicaux complémentaires le cas échéant prescrits par les tableaux de maladies professionnelles pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie. » Toutefois, s'agissant de documents médicaux, c'est le service du contrôle médical qui recevait ces examens médicaux complémentaires pour le compte de la caisse26. L'article R. 461-9 du code de la sécurité sociale🏛, qui reprend ces dispositions, est plus explicite : le délai dont dispose la caisse pour statuer sur la maladie professionnelle « court à compter de la date à laquelle la caisse dispose de la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial mentionné à l'article L. 461-5 et à laquelle le médecin-conseil dispose du résultat des examens médicaux complémentaires le cas échéant prévus par les tableaux de maladies professionnelles ». Les services administratifs de la caisse ne devraient donc pas avoir en leur possession les résultats des examens médicaux complémentaires, tels que l'audiogramme. L'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale prévoyait que le dossier constitué par la caisse devait comprendre diverses pièces, dont « les divers certificats médicaux », qui peuvent être communiqué à l'employeur. Le décret n° 2016-756 du 7 juin 2016 est venu préciser « les divers certificats médicaux détenus par la caisse ».27 Il s'agit donc de déterminer si les dispositions légales du droit la sécurité sociale permettent, de lever le secret médical s'agissant de l'audiogramme. 3. L'audiogramme, une pièce médicale couverte par le secret médical L'audiogramme, document qui retrace les résultats des mesures des seuils auditifs pour chaque oreille sous forme d'un graphique standardisé, constitue indiscutablement une pièce médicale couverte par le secret médical. En réponse à la consultation faite par le parquet général, la direction de la sécurité sociale a ainsi indiqué par courrier du 29 mars 2004 qu'il s'agissait « d'un examen de mesure objective des performances auditives qui permet d'établir un diagnostic. 26

CIR-19/2016 du 13 octobre 2016.

27

Cet article a été transféré à l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale par décret n°2019-356 du 23 avril 2019.

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L'audiogramme tonal permet en effet de mesurer la perte auditive et de connaître la localisation de l'atteinte : oreille interne, oreille moyenne (osselets, en particulier) ou autre. A ce titre, l'audiogramme est à considérer comme comportant des données médicales. »28 La direction de la sécurité sociale en a dès lors conclu que « l'audiogramme, dans lequel figurent les résultats des tests auditifs en l'absence de tout diagnostic revêt la nature d'une pièce médicale, par conséquent couverte par le secret professionnel. » Cette pièce est transmise par la victime de la maladie professionnelle au médecinconseil de la caisse qui est le seul à pouvoir l'examiner. Le fait qu'il s'agisse d'un élément constitutif de la maladie ne peut à mon sens permettre une dérogation au secret médical, que seule la loi peut lever. Or, il n'est prévu aucune dérogation légale au secret médical permettant au médecin-conseil de transmettre l'audiogramme à la caisse, afin que cette dernière la communique à l'employeur sur le fondement de l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale. Dans le pourvoi n° 22-22.786, la société soutient, dans ses observations complémentaires en défense (pages 17-18), que « la Cour de cassation considère qu'une disposition législative qui-sans se référer expressément au secret médicalconfère à une partie des droits qui seraient dépourvus de toute effectivité sans un constat médical vaut autorisation de dérogation au secret médical »29. Elle en déduit que « l'audiométrie exigée par le tableau n° 42 étant indissociable du certificat médical constatant la maladie, elle est couverte par la dérogation au secret médical prévu par les articles L. 461-5 et R. 441-13 du code de la sécurité sociale et doit donc figurer au dossier constitué par les services administratifs de la caisse et mis à la disposition de l'employeur ». Cette position est également celle de la direction de la sécurité sociale. Consultée par le parquet général sur le fondement légal de l'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale, devenu R. 441-14, en ce que, prévoyant la communication des certificats médicaux à l'employeur, il constitue une dérogation au secret médical, la direction de la sécurité sociale a considéré, dans sa réponse du 30 avril 2024, que « l'accès par l'employeur aux certificats médicaux peut se fonder d'une part sur les dispositions des articles L. 441-6 et L. 461-5 du code de la sécurité sociale qui autorisent, par dérogation, la communication à la caisse de sécurité sociale des 28

À cet égard, l'on relèvera que l'article 4-15 du RGPD définit les données concernant la santé comme « les données à caractère personnel relatives à la santé physique ou mentale d'une personne physique, y compris la prestation de soins de santé, qui révèlent des informations sur l'état de santé de cette personne ». Par ailleurs, la Recommandation N°R (97) 5 relative à la protection des données médicales adoptée par le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe le 13 février 1997 définit quant à elle des données médicales comme « toutes les données à caractère personnel relatives à la santé d'une personne » ainsi que « toutes les données ayant un lien manifeste et étroit avec la santé ainsi qu'aux données génétiques ». 29

Se référant à l'étude réalisée par Pierre Sargos, Président de la Chambre sociale à la Cour de cassation, « Les principes d'immunité de légitimité en matière de secret professionnel médical », La Semaine Juridique Edition Générale n° 50, 8 Décembre 2004, I 187.

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certificats médicaux AT/MP porteurs d'informations de nature médicale, et d'autre part sur le caractère contradictoire de l'instruction des dossiers AT/MP et le respect de l'égalité des armes entre les caisses de sécurité sociale et des employeurs. » 30 Cette position est toutefois discutable. En effet, l'article L. 461-5 du code de la sécurité sociale porte uniquement sur la déclaration de la maladie professionnelle par la victime et la rédaction du certificat médical initial par son médecin. Il ne peut selon moi constituer le fondement d'une dérogation au secret médical, qui permettrait à la caisse de communiquer à l'employeur des pièces médicales en dehors des hypothèses légalement prévues, c'est-à-dire des actuels articles L. 142-6 et L. 142-10 du code de la sécurité sociale. Aucune disposition légale ne permet donc la transmission de l'audiogramme directement à l'employeur. Ce dernier ne pourra avoir légalement accès à cette pièce que par l'intermédiaire du médecin qu'il a mandaté dans le cadre d'une expertise ou devant la CMRA. Reste à définir les conséquences à tirer de cette impossibilité pour l'employeur d'accéder à cette pièce, couverte par le secret médical. Le principe de la contradiction est-il suffisamment respecté ?

III – LA

MISE EN BALANCE DES INTERETS CONTRADICTION ET ATTEINTE AU SECRET MEDICAL

ENTRE

RESPECT

DE

LA

La tension permanente existant entre le principe de la contradiction et le secret médical est une problématique ancienne (1), sur laquelle la Cour européenne des droits de l'homme a eu l'occasion de se prononcer (2). Il y a donc lieu de se demander si les mécanismes juridiques actuels permettent d'assurer le respect de la contradiction en dépit de l'impossibilité pour l'employeur de se faire communiquer directement l'audiogramme (3). 1. Une problématique ancienne La Cour de cassation a été confrontée à une problématique similaire, s'agissant de la transmission des documents médicaux dans le cadre du contentieux de l'incapacité. En effet, l'article R. 143-8 du code de la sécurité sociale🏛, dans sa rédaction résultant du décret n° 2003-614 du 3 juillet 2003🏛, disposait que « la caisse devait transmettre au secrétariat de la juridiction les documents médicaux concernant l'affaire et en adresser copie 30

La Cour de cassation a également jugé, dans un arrêt qui semble toutefois isolé, que l'article R. 44111 du code de la sécurité sociale valait autorisation au sens de l'article 226-14 du code pénal : « Mais attendu qu'il résulte de l'article R. 441-11, alinéa 1er, du Code de la sécurité sociale🏛 que la CPAM, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis qui lui sont défavorables et de la possibilité de consulter le dossier avant la date prévue pour sa décision ; que par l'effet de ces dispositions, qui valent autorisation au sens de l'article 226-14 du Code pénal, la caisse est tenue de communiquer à l'employeur sur sa demande l'entier rapport d'autopsie prévu par l'article L. 442-4 du Code de la sécurité sociale🏛 ; Et attendu que la cour d'appel, ayant constaté que la caisse n'avait communiqué que les conclusions du rapport, en a déduit, à bon droit, que l'employeur n'avait pu faire valoir ses droits avant la décision de prise en charge, de sorte que celle-ci ne lui était pas opposable » ; Civ., 22 février 2005, pourvoi n° 03-30.308⚖️, Bull. 2005, II, n° 38.

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au requérant, ou, le cas échéant, au médecin qu'il a désigné ». Mais, comme dans la présente espèce, le service de contrôle médical des caisses refusait de transmettre les pièces médicales justifiant l'attribution du taux d'incapacité s'agissant de documents couverts par le secret médical et les caisses ne transmettaient pas ces documents qu'elles ne détenaient pas ; les employeurs se trouvaient dans l'impossibilité de connaître les éléments médicaux fondant la décision de la caisse afin de la critiquer utilement. La deuxième chambre civile a jugé, dans un arrêt de principe du 19 février 2009, que la CNITAAT « ayant retenu à bon droit, d'une part, que ni l'indépendance du service de contrôle médical vis-à-vis de la caisse ni les réserves émises par celle-ci sur le respect du secret médical ne pouvaient exonérer les parties à la procédure du respect des principes d'un procès d'équitable, d'autre part, que la caisse n'avait pas fourni les pièces nécessaires permettant un réel débat contradictoire, de sorte que l'employeur n'avait pu exercer de façon effective son droit de recours, elle en avait exactement déduit que la décision de la caisse n'était pas opposable à l'employeur »31. Les caisses se trouvaient dès lors dans une « impasse » puisqu'elles étaient tenues de produire, à peine d'inopposabilité de la décision pour violation du principe de la contradiction, le dossier médical détenu par le médecin du service du contrôle médical qui refusait de le communiquer en raison du secret médical. C'est la création de l'article L. 143-10 du code de la sécurité sociale par la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 qui a permis de concilier les exigences du respect du principe de la contradiction et du secret médical. 2. Secret médical et respect de la contradiction, deux droits protégés par la Conv. EDH Le principe de la contradiction, et plus particulièrement le principe d'égalité des armes, et le secret médical sont tous les deux des droits qui sont garantis par la Convention européenne des droits de l'homme. Il s'agit de l'article 6 pour le principe d'égalité des armes et de l'article 8 pour la protection du secret médical. Toutefois, l'un comme l'autre ne sont pas des droits absolus. Ce sont des droits relatifs, leur atteinte est donc susceptible de faire l'objet d'un contrôle de proportionnalité. La Cour européenne des droits de l'homme a ainsi été conduite à se prononcer sur la conciliation du principe de la contradiction et du secret médical dans un domaine très voisin, à propos de l'examen tomodensitométrique mentionné au tableau n° 30 des maladies professionnelles. Dans cette affaire, la deuxième chambre civile32 ayant jugé que, s'agissant d'un élément de diagnostic, cet examen n'avait pas à figurer dans les pièces du dossier constitué par les services administratifs de la caisse en application de l'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale, et dont l'employeur pouvait demander la communication, la société Eternit s'est plainte de n'avoir pas eu accès aux pièces médicales ayant conduit à la reconnaissance de la maladie professionnelle de son salarié et d'avoir été privée de toute possibilité de contester efficacement la décision de la caisse en méconnaissance du principe de la contradiction. Elle invoquait également une violation de l'égalité des armes en ce qu'elle n'avait pas eu accès aux mêmes pièces que celles dont la caisse avait disposé.

31 32

2e Civ., 19 février 2009, pourvoi n° 08-11.888⚖️, Bull. 2009, II, n° 62. 2e Civ., 10 septembre 2009, pourvoi n° 08-18.078⚖️. 16

Dans sa décision du 27 mars 2012 Eternit c/ France33, la Cour européenne des droits de l'homme rappelle que « le droit au respect du secret médical n'est pas absolu, mais il doit en être tenu compte au même titre que le droit de la requérante à une procédure contradictoire. En d'autres termes, ces deux droits doivent coexister de manière à ce qu'aucun ne soit atteint dans sa substance même ». Elle décide ensuite, d'une part, que l'équilibre entre les droits de l'employeur à une procédure contradictoire et le droit du salarié au respect médical est réalisé, dès lors que l'employeur contestant le caractère professionnel de la maladie peut solliciter du juge la désignation d'un expert médecin indépendant à qui seront remises les pièces composant le dossier médical du salarié et dont le rapport aura pour objet d'éclairer la juridiction et les parties, d'autre part, que le principe de l'égalité des armes n'est pas méconnu dès lors que les services administratifs de la caisse n'étaient pas en possession des documents médicaux litigieux qui émanent du médecin conseil, indépendant de la caisse sur le plan statutaire et sont couverts par le secret professionnel, ce dont il résulte que la caisse n'a pas été placée en situation de net avantage, vis-à-vis de l'employeur, dans la procédure. Enfin, elle souligne que « le fait que l'expertise ne soit pas ordonnée dans tous les cas où l'employeur la demande, mais qu'elle ne soit décidée que dans le cas où la juridiction s'estime suffisamment informée, est conforme aux exigences de la Convention en matière de procès équitable ». Elle rappelle ainsi que « la recevabilité des preuves relève au premier chef des règles du droit interne et qu'il revient en principe aux juridictions nationales d'apprécier les éléments recueillis par elles ». À cette époque, le mécanisme prévu à l'article L. 143-10 du code de la sécurité sociale n'avait pas encore été étendu au contentieux général de la sécurité sociale. Ce sera fait par la création de l'article L. 142-2-2 par la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016, puis par l'article L. 142-10 du code de la sécurité sociale, par ordonnance n° 2018-358 du 16 mai 2018. Il s'agit donc d'examiner, si cette disposition, applicable aux présentes affaires, permet de garantir suffisamment le principe de la contradiction. 3. Les dispositions du code de la sécurité sociale sont-elles suffisamment protectrices du principe de la contradiction ? Les dispositions de l'article L. 142-10, telles que modifiées par la loi du 23 mars 2019, puis du 24 décembre 2019, sont applicables « aux recours préalables et aux recours juridictionnels introduits à compter d'une date fixée par décret en Conseil d'Etat, et au plus tard le 1er janvier 2020 »34. Dans les quatre pourvois, les juridictions de première instance ont statué en 2020. L'article L. 142-10 du code de la sécurité sociale, dans sa version résultant de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019, en vigueur depuis le 1er janvier 2020, est donc applicable, les appels ayant été interjetés postérieurement à son entrée en vigueur. L'employeur avait donc la possibilité de solliciter une expertise sur le fondement de l'article L. 142-10 du code de la sécurité sociale, expertise qui aurait permis la transmission de l'intégralité du rapport médical au médecin qu'il aurait mandaté à cet effet. Le contenu de ce rapport médical est précisé à l'article R. 142-1 A -V du code de la sécurité sociale🏛. Il comprend :

33

CEDH, arrêt du 27 mars 2012 Eternit c. France, req. n° 20041/10⚖️, §37 à 39.

34

Article 96 VII de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019🏛.

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« 1° L'exposé des constatations faites, sur pièces ou suite à l'examen clinique de l'assuré, par le praticien-conseil à l'origine de la décision contestée et ses éléments d'appréciation ; 2° Ses conclusions motivées ; 3° Les certificats médicaux, détenus par le praticien-conseil du service du contrôle médical et, le cas échéant, par la caisse, lorsque la contestation porte sur l'imputabilité des lésions, soins et arrêts de travail pris en charge au titre de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle. » Comme le relève le professeur Patrick Morvan, « cet inventaire n'a rien d'exhaustif. S'il était communiqué dans une version réellement « intégrale », le rapport médical du médecinconseil devrait contenir : les antécédents de l'assuré, tous les certificats médicaux (initial, de prolongation, de guérison ou de consolidation) établis par le médecin traitant, les examens et compte rendus d'examens médicaux, les fiches de liaison médico-administratives (entre le SCM et la CPAM), etc. »35 À la demande de transmission de l'audiogramme dans le cadre d'une expertise ordonnée par le juge, il est donc probable que le médecin-conseil oppose une vision restrictive de ce que constitue le rapport médical. Or, l'audiogramme me paraît être le complément indispensable du certificat médical initial, permettant de constater que toutes les conditions figurant au tableau n° 42 sont remplies. À mon sens, cette pièce devrait donc être également transmise à l'expert et au médecin mandaté par l'employeur. Toutefois, pour que le principe de la contradiction soit respecté, encore faut-il que la juridiction fasse droit à la demande d'expertise sollicitée par l'employeur. Or, cette expertise n'est pas de droit, elle relève du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond, ainsi qu'il ressort de l'arrêt de la deuxième chambre civile du 11 janvier 2024. Dans cette décision, la deuxième chambre civile a rappelé, conformément à son avis du 7 juin 202136, qu' « au stade du recours devant la commission médicale de recours amiable, l'absence de transmission du rapport médical et de l'avis au médecin mandaté par l'employeur n'entraîne pas l'inopposabilité, à l'égard de ce dernier, de la décision de prise en charge par la caisse des soins et arrêts de travail prescrits jusqu'à la date de consolidation ou guérison, dès lors que l'employeur dispose de la possibilité de porter son recours devant la juridiction de sécurité sociale à l'expiration du délai de rejet implicite de quatre mois prévu à l'article R. 142-8-5 du code de la sécurité sociale🏛 et d'obtenir, à l'occasion de ce recours, la communication du rapport médical dans les conditions prévues par les articles L. 142-10 et R. 142-16-3 du même code ». Elle a ensuite jugé que « c'est sans porter atteinte au droit à un procès équitable ni rompre l'égalité des armes entre l'employeur et l'organisme de sécurité sociale, que la cour d'appel a estimé, au regard des éléments débattus devant elle, qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner de mesure d'instruction »37. Cette solution a été critiquée par la doctrine38. Ainsi, selon le professeur Dominique Asquinazi-Bailleux, « en ne faisant pas jouer pleinement les obligations de transmission des 35

Patrick Morvan, Droit de la protection sociale, LexisNexis, 2021, 10e édition.

36

Avis de la Cour de cassation, 17 juin 2021, n° 21-70.007.

37

2e Civ., 11 janvier 2024, pourvoi n° 22-15.939⚖️.

38

Voir notamment Marine FERRERI, « Absence de transmission du rapport médical à l'occasion de l'exercice par l'employeur d'un recours médical préalable », Gazette du Palais, n° 8 du 5 mars 2024, p. 54.

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pièces médicales devant la CMRA, la Cour invite à une saisine du juge afin que celui-ci y supplée par la nomination d'un expert. C'est faire jouer à l'expertise judiciaire un rôle plus substantiel que celui envisagé initialement par le législateur. Refuser alors cette expertise place l'employeur dans une situation préjudiciable et peu satisfaisante au regard du respect du principe de la contradiction »39. Si le mécanisme prévu par les textes comporte des garanties pour l'employeur, il n'est donc pas pleinement satisfaisant. Seule une communication de droit du rapport médical au médecin mandaté par l'employeur, incluant les examens médicaux nécessaires à la caractérisation de la maladie et dont l'absence serait sanctionnée par l'inopposabilité de la décision de la caisse, permettrait de satisfaire pleinement au respect du principe de la contradiction. Cette communication pourrait intervenir dès le stade de l'instruction de la demande, avant la prise de décision de la caisse, ou lors de la saisine de la juridiction. S'agissant de la réponse à apporter aux présentes espèces, le mécanisme existant, bien que lacunaire, comporte toutefois des garanties pour l'employeur. L'atteinte au principe de la contradiction doit donc être envisagée au regard des éléments de l'espèce. En effet, une mesure d'instruction ne peut être ordonnée pour suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve40. Toutefois, s'agissant de la production de l'audiomètre, c'est la caisse qui supporte la charge de la preuve : il lui appartient de démontrer que les conditions du tableau des maladie professionnelle dont elle invoque l'application sont remplies. Et la Cour de cassation s'est montrée jusqu'à présent particulièrement exigeante s'agissant de la caractérisation des conditions du tableau. Ainsi, la deuxième chambre civile a censuré une cour d'appel qui s'était prononcée « sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le déficit audiométrique bilatéral allégué était provoqué par une lésion cochléaire irréversible et était évalué par une audiométrie réalisée après une cessation d'exposition au bruit lésionnel d'au moins trois jours et faisant apparaître sur la meilleure oreille un déficit moyen de 35 décibels »41. Le fait de reconnaître à l'audiogramme la nature de pièce médicale couverte par le secret médical ne devrait pas conduire à remettre en cause cette obligation portant sur la caisse. Et si la caisse ne rapporte pas ces éléments, la juridiction ne pourra à mon sens qu'ordonner une expertise, sous peine d'inopposabilité à l'employeur de la décision de reconnaissance de la maladie professionnelle. À cet égard, la seule mention apposée par le médecin-conseil aux termes de laquelle toutes les conditions prévues au tableau sont remplies ne saurait selon moi s'avérer suffisante. S'agissant des présents pourvois, au regard des éléments précédemment développés, les décisions des cours d'appel doivent, à mon sens, être censurées au motif que la caisse ne pouvait produire l'audiogramme, pièce couverte par le secret médical.

39

D. Asquinazi-Bailleux, « Conséquences pour l'employeur de l'absence de transmission du rapport médical à l'occasion de la saisine de la CMRA puis du juge », La Semaine Juridique Social n° 6, 13 février 2024, 1053. 40

Article 146 du code de procédure civile🏛.

41

2e Civ., 7 mai 2014, pourvoi n° 13-14.101 ; également 2e Civ., 6 novembre 2014, pourvoi n° 1323.188.

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S'agissant des conséquences de cette absence de transmission, dans aucune des espèces, l'employeur n'a formé une demande d'expertise sur le fondement de l'article L. 142-10 du code de la sécurité sociale. Cela est cohérent au vu de la jurisprudence de la Cour de cassation qui sanctionne d'inopposabilité l'absence de production de cet audiogramme. Il appartiendra dès lors à l'employeur de solliciter devant la juridiction de renvoi que soit ordonnée une mesure d'expertise afin de pouvoir bénéficier de la communication de l'audiogramme par l'intermédiaire du médecin qu'il aura mandaté à cet effet. Ce n'est que dans l'hypothèse où la cour d'appel de renvoi viendrait à rejeter cette demande d'expertise ou si cette pièce n'était pas transmise par le médecin-conseil, qu'il y aurait lieu de s'interroger, au vu des éléments produits par la caisse, sur la caractérisation par cette dernière des conditions prévues au tableau n° 42 et l'éventuelle atteinte au principe de la contradiction.

AVIS DE CASSATION.

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