Jurisprudence : Cass. soc., Conclusions, 29-06-2022, n° 20-22.220

Cass. soc., Conclusions, 29-06-2022, n° 20-22.220

A84632RU

Référence

Cass. soc., Conclusions, 29-06-2022, n° 20-22.220. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/105409036-cass-soc-conclusions-29062022-n-2022220
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AVIS DE Mme LAULOM, AVOCATE GÉNÉRALE

Arrêt n° 787 du 29 juin 2022 – Chambre sociale Pourvoi n° 20-22.220 Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar du 29 septembre 2020 Mme [Y] [P] C/ la société BNP Paribas _________________ Le pourvoi s'ordonne autour de trois moyens. Nous renvoyons au rapport concernant l'analyse du premier moyen du pourvoi, qui invoque une méconnaissance des prescriptions en matière disciplinaire, pour conclure au rejet non spécialement motivé de ce moyen. Le deuxième moyen est relatif à l'exigence de motivation de la lettre de licenciement. La première branche reproche à l'arrêt attaqué d'avoir jugé régulier et bien-fondé le licenciement de la salariée pour faute grave, alors “qu'il incombe à l'employeur de préciser dans la lettre de licenciement que le salarié peut, en vertu des dispositions de l'article R. 1232-13 du code du travail, lui demander d'apporter des précisions sur les motifs de la rupture”. La question soulevée par la première branche du deuxième moyen est inédite et sa réponse ne sera pas sans portée. Quelle doit être la sanction de l'absence d'information, dans la lettre de licenciement, par l'employeur, de la possibilité

qu'a un salarié de demander des précisions sur le motif de la rupture, en vertu de l'article L. 1235-2 du code du travail? L'absence de cette mention dans la lettre de licenciement peut-elle ou doit-elle conduire à considérer le licenciement comme étant sans cause réelle et sérieuse? L'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, relative à la prévisibilité et à la sécurisation des relations de travail, a modifié les règles de motivation des licenciements et leurs sanctions. Jusqu'alors, une jurisprudence constante, initiée par l'arrêt Rogié de 1990 1 , imposait à l'employeur une motivation de la lettre de licenciement précise, dès la notification de la rupture, toute imprécision du motif étant sanctionnée par l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement. Selon A. Fabre, “cette exigence de précision s'explique par la double finalité de l'obligation de motivation: permettre au salarié de connaître les raisons de son éviction tout en limitant l'espace du débat judiciaire en cas de contestation”2. L'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 ne remet pas en cause l'exigence de motivation du licenciement pesant sur l'employeur, pas plus que ses finalités. Mais désormais les motifs inscrits dans la lettre de notification du licenciement pourront être précisés postérieurement et surtout le régime des sanctions attachées à l'imprécision de la motivation a été revu. Par ailleurs, il est prévu des modèles types de lettre de licenciements mis à disposition des employeurs (art. L. 1232-6 du Code du travail). L'objectif du législateur est double. Il s'agit, d'une part, d'aider les employeurs, et notamment les TPE et PME, à bien motiver les décisions de licenciement. Les modèles de lettre doivent permettre de sécuriser l'employeur en clarifiant les exigences de forme nécessaires à l'énoncé des motifs du licenciement 3. Il s'agit, d'autre part, de permettre aux salariés de mieux comprendre les raisons de son licenciement. Selon l'Etude d'impact, “un certain nombre de litiges sont directement liés au sentiment du salarié que les griefs invoqués par la lettre de licenciement sont peu expliqués et détaillés”.

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Soc. 29 nov. 1990, pourvoi n° 88-44.308, Bull. 1990 V n° 598.

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A. Fabre, Répertoire de droit du travail, Contrat de travail à durée indéterminée: rupture licenciement - droit commun, Avril 2020, § 107. Voir l'Etude d'impact du projet de loi d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social. Voir également le Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2017-1387: “ce formulaire, facultatif, permettra d'éviter les erreurs de procédure portant atteinte aux droits des salariés et pouvant entraîner la condamnation de l'employeur, notamment d'une petite entreprise, aux prud'hommes alors même qu'il est de bonne foi”. 3

L'ordonnance organise une possibilité de dialogue entre le salarié et l'employeur sur les motifs du licenciement, dont l'objectif est de prévenir le contentieux4. Ainsi, l'article L. 1235-2 du code du travail prévoit désormais que “les motifs énoncés dans la lettre de licenciement prévue aux articles L. 1232-6, L.1233-16 et L. 1233-42 peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l'employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié, dans les délais et conditions fixés par décret en Conseil d'Etat”. L'article R.1232-13 du code du travail, issu du décret n° 2017-1702 du 15 déc. 2017, fixe ce délai à 15 jours à compter de la notification du licenciement. Il précise également que la demande doit être faite par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. L'employeur dispose alors d'un délai de quinze jours, après la réception de la demande du salarié, pour apporter des précisions s'il le souhaite. L'article R. 1232-13 ajoute: “Il communique ces précisions au salarié par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Dans un délai de 15 jours suivant la notification du licenciement et selon les mêmes formes, l'employeur peut à son initiative, préciser les motifs du licenciement”. Désormais la motivation du licenciement peut se faire en deux temps. Souhaitant rompre avec la jurisprudence antérieure, le législateur a introduit une “progressivité” dans la motivation, en offrant à l'employeur une “session de rattrapage” s'il le souhaite. “La lettre de licenciement n'est plus le siège exclusif de la motivation, l'employeur pouvant désormais, de sa propre initiative ou à la demande du salarié, préciser les motifs du licenciement après la notification”5. C'est sur le terrain de la sanction, que les ordonnances Macron opèrent la réforme la plus importante. L'article L. 1235-2 prévoit désormais que le salarié, qui n'a pas demandé à l'employeur de préciser les motifs de licenciement, pourra certes contester devant le juge l'insuffisance de la motivation de lettre de licenciement, et en obtenir réparation, mais verra cette réparation plafonnée à un mois de salaire. Reste-t-il une place pour la sanction de l'absence de cause réelle et sérieuse dans l'hypothèse d'une motivation insuffisante? Les textes ne le prévoient pas explicitement et il serait possible de s'appuyer sur l'alinéa 5 de l'article L. 1235-2 du code du travail, pour répondre négativement. Selon cet article, “lorsqu'une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement d'un salarié On peut se demander s'il n'existe pas une certaine contradiction dans ces deux objectifs, dont l'un conduit à une normalisation de la motivation, par l'utilisation de formulaire type, alors que l'autre conduit à une individualisation plus forte de la motivation (Sur la normalisation de cette procédure, F. Favennec-Héry, “Le droit du licenciement et les ordonnances portant sécurisation des relations de travail”, JPC S, 2017, 1309; A. Fabre, Répertoire Dalloz, § 112. Sur le caractère contradictoire des objectifs : Y. Tarasewicz, “La motivation de la lettre de licenciement: dialogue ou modélisation?”, RDT, 2017, p. 763). 4

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A. Fabre, “La motivation du licenciement”, Droit social, 2018, p. 4.

intervient sans que la procédure requise aux articles L. 1232-2, L. 1232-3, L. 1232-4, L. 1233-11, L. 1233-12 et L. 1233-13 ait été observée [...], mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire”. Ainsi que l'évoque Y. Pagnerre, “le texte ne vise pas l'article L. 1232-6 du Code du travail sur l'obligation de motivation; mais l'adverbe notamment pourrait l'englober. Ainsi, le défaut de motivation ou de réponse de la part de l'employeur serait condamné de la même façon que le défaut de diligence du salarié”6. Néanmoins, Y. Pagnerre rejette une telle interprétation, qui serait incohérente avec la lettre de l'alinéa 3 de l'article L. 1235-2 du code du travail. C'est également à cette conclusion que parvient, très majoritairement, la doctrine qui considère qu'une insuffisance de motivation peut conduire à reconnaître l'absence de caractère réel et sérieux du licenciement, dans un nombre très limité de cas 7. D'une part, l'absence de cause réelle et sérieuse pourra être retenue dans l'hypothèse d'une absence de motivation. D'autre part, l'insuffisance de motivation pourra également conduire à cette même sanction dans l'hypothèse où la motivation est toujours insuffisante, malgré la précision apportée par l'employeur, de sa propre initiative ou suite à une demande du salarié.C'est ce qui ressort d'une lecture a contrario de l'article L. 1235-2 du code du travail et cette interprétation nous semble également conforme à l'exigence de motivation du licenciement8. Loin de remettre en cause cette exigence, l'objectif de l'ordonnance est d'en assurer une meilleure effectivité. Enfin, l'existence des modèles de lettres devrait réduire les hypothèses de motivation insuffisante 9. 6

Y. Pagnerre, “Précisions” sur la précision de la lettre de licenciement”, RJS 2018 chro.

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Voir notamment A. Fabre, Répertoire de droit du travail, Contrat de travail à durée indéterminée: rupture - licenciement - droit commun, Avril 2021, § 260. F. Guiomard, “Procédure prud'homale, Les nouveaux enjeux de la procédure prud'homale et de la procédure de licenciement”, Cahiers de droit de l'entreprise, n° 2, Mars 2019, dossier 12. C. Wolmark, E. Peskine, Droit du Travail, Dalloz Hypercours, 2022, 15ème éd. § 645. G. Auzero, D. Baugard, E. Dockès, Droit du travail, Précis Dalloz, 2022, 35ème éd., p. 593. C'est également la position adoptée, implicitement, par le ministère du travail, dans ses questions-réponses relatives à la rupture du contrat de travail, diffusées en juillet 2020 et qui indiquent aux employeurs qu'ils ont tout intérêt “à préciser votre lettre de licenciement si vous vous rendez compte après son envoi qu'il manque un ou plusieurs éléments essentiels à sa motivation. Vous avez également intérêt à préciser la lettre initiale si le salarié en fait la demande afin de limiter le risque d'annulation ou de condamnation à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en cas de contentieux”. 8

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Sur ce point, les commentaires sont néanmoins plutôt critiques du dispositif mis en place. Voir par exemple, F. Taquet, “Modèles de lettres de notification de licenciement: une intention louable non dénuée de critiques”, JCP S n° 2, Act. Le dispositif a d'ailleurs déjà été modifié. Un premier décret du 29 décembre 2017 a été adopté et établi des premiers modèles de lettre. La loi n° 2018-217 de ratification du 29 mars 2018 a prévu que les lettres modèles devaient être établies non plus par décret mais par arrêté du ministre chargé du travail dans un but de souplesse et de réactivité. Depuis néanmoins, aucun nouvel arrêté n'a été adopté.

La question qui se pose alors est celle soulevée par le pourvoi: comment appliquer l'article L. 1235-2 lorsque le salarié n'a pas formé de demande auprès de l'employeur mais que la lettre de licenciement ne mentionnait pas qu'il disposait de cette faculté? La lettre de licenciement ne devrait-elle pas mentionner ce droit? Lorsqu'elle ne prévoit rien, le salarié peut-il se voir opposer l'article L. 1235-2 du code du travail? Si l'article R. 1232-13 du code du travail prévoit que le salarié peut demander à l'employeur des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement, le législateur n'a prévu aucune modalité spécifique d'information sur ce droit pour le salarié, par exemple en indiquant que la lettre de licenciement doit comporter la mention de ce droit. Saisi d'un recours en excès de pouvoir en annulation du décret n° 2017-1702 du 15 décembre 2017, le Conseil d'Etat a très classiquement considéré qu'aucune disposition ni aucun principe n'imposaient au pouvoir réglementaire d'épuiser, par le décret attaqué, la compétence qu'il tenait de ces dispositions législatives. Ainsi le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait entaché “d'incompétence négative” pour n'avoir pas prévu que l'employeur doit informer le salarié de son droit de demander que les motifs de la lettre de licenciement soient précisés ne peut qu'être écarté”10. Les modèles de lettres de licenciement, dont l'article L. 1232-6 prévoyait initialement qu'ils devaient rappeler les droits et obligations de chaque partie 11, mentionnent tous cette possibilité12. Sans que l'on puisse généraliser sur les pratiques des cabinets d'avocats, certains conseillent à leur client de mentionner ce droit des salariés: “En pratique, s'est posée la question de faire figurer ou non dans la lettre de licenciement, la mention relative à la faculté pour le salarié de demander des précisions sur les motifs du licenciement dans les 15 jours de la notification du licenciement et la faculté pour l'employeur de prendre l'initiative de compléter la motivation de la lettre de licenciement dans les 15 jours dans la mesure où cette mention figure dans les modèles préétablis. Par précaution, nous recommandons à nos clients de faire automatiquement figurer cette mention au sein de la lettre de licenciement dans la mesure où aucun texte ne

10

CE, 4ème -1ère ch., 6 mai 2019, n° 417299.

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La loi de ratification n° 2018-217 du 27 mars 2018 a abrogé cette mention.

La formule est la suivante : “Vous pouvez faire une demande de précision des motifs du licenciement énoncés dans la présente lettre par l'envoi d'une lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé, dans les 15 jours suivant sa notification. Nous avons la faculté d'y donner suite dans un délai de 15 jours après réception de votre demande. Nous pouvons également prendre l'initiative d'apporter des précisions à ces motifs dans un délai de 15 jours suivant la notification du licenciement”. 12

précise quelle sanction est attachée à une omission de cette mention en cas de contentieux”13. Si les employeurs peuvent ainsi être incités à mentionner cette possibilité dans la lettre de licenciement, il reste difficile d'en déduire une obligation pour les employeurs de l'indiquer dans la lettre de licenciement. C'est la position du ministère du travail, dans ses questions-réponses relatives à la rupture du contrat de travail, publiées en juillet 2020 qui indiquent, en réponse à la question “l'ensemble des mentions contenues dans ces modèles doit-il obligatoirement figurer dans une lettre de licenciement?”, “Ces modèles rappellent les droits et obligations de chacune des parties. Plusieurs mentions ont ainsi un rôle informatif et ne sont pas obligatoires. Il en est ainsi de la procédure de précision des motifs qui ne doit pas impérativement apparaître dans une lettre de licenciement. En revanche, les mentions relatives au motif du licenciement sont des mentions obligatoires sur lesquelles le juge se fondera pour apprécier la validité du licenciement, en cas de contentieux”. L'employeur n'est donc pas tenu de faire figurer dans la lettre de licenciement, la possibilité qu'a le salarié de demander des précisions sur les motifs de son licenciement. Pour autant, la sanction, pour le salarié, de l'article L. 1235-2 du code du travail est sévère: à défaut pour le salarié d'avoir demandé à l'employeur de préciser les motifs du licenciement, “l'irrégularité que constitue une insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire”. Selon A. Fabre, “c'est une façon de pénaliser le salarié: en restant inactif, il n'a pas permis à l'employeur de préciser la motivation du licenciement. Cette situation lui est donc pour partie imputable, de sorte qu'il ne peut avoir droit qu'à une indemnité relativement modeste. En revanche, si le salarié a demandé des précisions, comme il en a le droit, et que l'employeur n'a pas remédié à l'insuffisance de motivation, les torts ne peuvent plus être partagés. C'est à l'employeur d'être jugé responsable de la situation”14. Néanmoins, si la lettre de licenciement ne mentionne pas que le salarié peut demander des précisions, ce dernier peut ne pas savoir que cette faculté existe, d'autant que le délai pour faire cette demande est court. La sanction est dès lors particulièrement sévère, alors même que, nous l'avons dit, les ordonnances Macron n'ont pas exclu qu'une insuffisance de motivation puisse priver le licenciement de cause réelle et M. S. Schlupp, avocat du cabinet Hoche Avocats, “Procédure prud'homale, Question réponse sur les nouveaux enjeux de la procédure de licenciement”, Cahiers de droit de l'entreprise n° 2, Mars 2019, dossier 12. 13

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A. Fabre, Répertoire de droit du travail, Contrat de travail à durée indéterminée: rupture licenciement - droit commun, Avril 2020, § 260.

sérieuse. Dans le contexte d'un licenciement, le fait que le salarié ne sache pas qu'il peut demander à l'employeur de préciser les motifs de licenciement semble bien loin d'être une hypothèse d'école. Ne pas prendre en compte l'absence de mention dans la lettre conduirait à une rupture d'égalité entre les salariés, ceux dont la lettre comporte une telle mention et les autres. Les premiers savaient qu'ils pouvaient demander des précisions, les seconds pouvaient ne pas le savoir. Leur appliquer la même règle semble particulièrements sévère pour les second, alors même que l'exigence de motivation doit permettre au salarié de connaître les raisons précises qui ont conduit à son licenciement afin, éventuellement, de les contester et que la lettre de licenciement fixe les limites du litige. Je pense ainsi qu'en l'absence de mention dans la lettre de licenciement, de la possibilité qu'a le salarié de demander des précisions sur les motifs de son licenciement à son employeur, l'article L. 1235-2 du code du travail ne peut lui être opposable, quand bien même l'employeur n'a pas l'obligation de faire figurer dans la lettre une telle mention. Dans cette hypothèse, l'insuffisance de la motivation pourra être sanctionnée par la reconnaissance de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement. Une limite importante découle cependant de l'article L. 1235-2 du code du travail lui-même. Si la lettre de licenciement est suffisamment motivée, la situation ne relève plus de l'article L. 1235-2 du code du travail, qui ne s'applique que lorsque la motivation est insuffisante. Ici, la cour d'appel a retenu que la lettre de licenciement “s'avère précisément motivée” et que la salariée “s'est abstenue d'user des dispositions de l'article R. 1232-13 du code du travail”. Elle a également ajouté sur le bien fondé du licenciement, que “la lettre de licenciement se trouve motivée avec une précision suffisante”. De ce fait, l'absence de mention dans la lettre de licenciement de la possibilité pour le salarié de demander des précisions, ne peut conduire à admettre l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement. Vous pouvez ainsi rejeter le pourvoi en indiquant que la cour d'appel a retenu que la lettre était suffisamment motivée. Il me semble cependant que le pourvoi vous donne l'occasion de préciser l'interprétation de l'article L. 1235-2 et des conséquences que peut produire l'absence de mention, dans la lettre de licenciement, de la possibilité qu'a le salarié de demander à l'employeur de préciser les motifs de son licenciement. Cette indication permettrait de lever une incertitude sur l'interprétation à donner de l'article L. 1235-2 du code du travail. Concernant la motivation de la lettre, la deuxième branche du second moyen soutient qu'elle serait insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne comporte ni le nom des salariés lui imputant des faits de harcèlement moral, ni la date de ces faits, ni la durée de ces prétendus agissements. Il ressort de la jurisprudence que la lettre de licenciement doit faire état de motifs matériellement vérifiables et que si la lettre énonce ces motifs, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif. Ainsi, la datation dans la lettre des faits invoqués n'est pas nécessaire (Soc. 20 oct. 2015, n° 14-15.565). Aucun des éléments, prétendument manquant selon le pourvoi, n'était indispensable à la

motivation du licenciement. La Cour d'appel pouvait à juste titre retenir que la lettre de licenciement était motivée avec une précision suffisante. Enfin, comme l'indique le rapport, la 3ème branche du deuxième moyen manque en fait. Je conclus donc au rejet du second moyen du pourvoi. Enfin, le 3ème moyen du pourvoi reproche à la cour d'appel d'avoir induit des faits de harcèlement sur la base d'une enquête interne ne respectant pas les droits de la défense de la salariée licenciée. Il ressort de la jurisprudence que l'employeur, tenu d'une obligation de prévention des risques professionnels, se doit de diligenter une enquête interne, lorsqu'il est informé de faits de harcèlement moral. Dans un arrêt récent vous avez également considéré qu'une enquête confiée par l'employeur à un organisme externe, à la suite de la dénonciation de faits de harcèlement moral n'est pas soumise aux dispositions de l'article L. 1222-4 du code du travail et ne constitue pas une preuve déloyale. L'absence d'information de celui-ci ou l'absence de son audition n'est pas de nature à rendre déloyale la preuve constituée par cette enquête (Soc. 17 mars 2021, n° 18-25.597, FSP +I). Il résulte ainsi de la jurisprudence que le recours à une enquête interne comme externe n'est pas déloyale et que, dans le cadre d'une telle enquête, l'absence d'audition du salarié mis en cause ou de confrontation aux plaignants ne rend pas la preuve déloyale. Enfin, les juges du fond apprécient souverainement la valeur et la portée des éléments de fait et de preuve produits devant eux par les parties, sans être tenus de les analyser séparément, ni de s'expliquer spécialement sur chacune des pièces produites, ni sur celles qu'ils décident de retenir ou d'écarter. Le 3ème moyen ne peut donc être accueilli. AVIS de REJET

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