EXPOSE DU LITIGE
La société Overlap a acquis dans le cadre de son activité un ensemble d'équipements informatiques pour une valeur de 1.822.594,70 € HT auprès de la société Arrow ECS, ci-après Arrow. Ces équipements étaient soumis à une clause de réserve de propriété en vertu de l'article 5 des conditions générales de vente.
Parallèlement, un contrat d'affacturage a été souscrit le 9 avril 2008 entre Overlap et la société Factofrance aux termes duquel la société Overlap transférait à la société Factofrance, par subrogation, la propriété des créances qu'elle détenait sur sa clientèle.
Par
jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 11 juin 2013, la société Overlap a été placée en redressement judiciaire avec désignation de Me [N] en qualité d'administrateur judiciaire et Me [W] en qualité de mandataire judiciaire.
Le 27 juin 2013, la société Arrow a revendiqué auprès de Me [N], ès qualités, un ensemble d'équipements informatiques et sollicité leur restitution ou, à défaut, le paiement de leur prix pour un montant de 2.179.823,26 € TTC. Le 8 août 2013, Me [N] ès qualités a reçu la revendication de la société Arrow en acquiesçant à sa demande à hauteur de 1.633.606,12 € après en avoir informé la société Factofrance.
Par requête du 27 août 2013, la société Factofrance a saisi le juge-commissaire pour contester l'acte de l'administrateur judiciaire et obtenir le rejet de la revendication de la société Arrow.
Par requête du 30 août 2013, la société Arrow a saisi le juge-commissaire pour acquiescer à l'action en revendication sur la totalité du montant revendiqué, soit la somme de 2.179.823,26 € TTC.
Par ordonnance du 5 février 2014 (13M7715), le juge commissaire a déclaré irrecevable la requête présentée par la société Factofrance pour défaut de droit d'agir.
Par ordonnance du 6 février 2014 (13M7755), le juge-commissaire a déclaré irrecevable la requête de la société Arrow sur la partie de la revendication acquiescée par l'administrateur judiciaire (1.390.975,02 € HT, soit 1.633.606,12 € TTC) et débouté celle-ci de sa demande en revendication sur la somme de 431.619,68 € HT correspondant à des prestations de services. Le juge-commissaire n'a pas statué sur l'intervention volontaire de la société Factofrance.
Le 28 février 2014, la société Factofrance a formé opposition à ces ordonnances.
Le 11 juin 2014, la liquidation judiciaire de la société Overlap a été prononcée et la société C.[W], prise en la personne de M. [A] [W], a été nommée mandataire judiciaire à la liquidation.
Par jugement du 26 novembre 2014, le tribunal de commerce de Nanterre a joint les causes et jugé la société Factofrance recevable et bien fondée en son opposition et débouté la société Arrow ainsi que Me [N] et Me [W], ès qualités, de leurs demandes.
La société Arrow a interjeté appel de ce jugement.
Par arrêt du 19 mai 2016, la cour d'appel de Versailles a, notamment, confirmé le jugement en ce qu'il a joint les instances et dit recevable la société Factofrance en son recours formé à l'encontre de l'ordonnance du 5 février 2014 (13M7715) et celui formé à l'encontre de l'ordonnance du 6 février 2014 (13M7755). Elle a, néanmoins, confirmé l'ordonnance du juge-commissaire du 5 février 2014 (13M7715) et celle du 6 février 2014 (13M7755) en toutes leurs dispositions. Elle a ajouté à l'ordonnance du 6 février 2014 (13M7755), déclarant irrecevable la société Factofrance en son intervention volontaire. Elle a rejeté les autres demandes de Arrow (ecs) et de Me [W] ès qualités.
Un pourvoi en cassation a été formé par la société Factofrance et un autre par M.[A] [W], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Overlap, à l'encontre de cet arrêt.
Par acte du 17 novembre 2017, la société Arrow a assigné la société Factofrance devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins de se voir restituer la somme de 638.750,26 euros toutes taxes comprises.
Par un arrêt du 24 janvier 2018, la
Cour de cassation a joint les pourvois puis a rejeté le pourvoi formé par la société Factofrance (n° S 16-22.021). Sur le second pourvoi (n° C
16-21.364⚖️), elle a cassé et annulé l'arrêt de la
cour d'appel de Versailles du 19 mai 2016, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de la société C. [W], en qualité de liquidateur de la société Overlap, d'exclure du champ des restitutions à la société Arrow le prix des biens revendus correspondant aux créances cédées à la société Factofrance.
Par un arrêt du 29 janvier 2019, la cour d'appel de Versailles, sur renvoi, a infirmé le
jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 26 novembre 2014 en ce qu'il avait débouté la société Arrow et Me [W], ès qualités de leurs demandes. Elle a dit que c'est à bon droit que la société C. [W], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Overlap, a restitué à la société Arrow les sornrnes de 490.839,27 € TTC et 13.717 € TTC, a rejeté la demande de la société C. [W], ès qualités, tendant à exclure du champ des restitutions à la sociélé Arrow par la liquidation judiciaire de la société Overlap les créances cédées à la société Factofrance, dit que la société C. [W], ès qualités, doit restituer à la société Arrow la somme de 39.469,99 € TTC (facture FV13060434). Elle a débouté la société Arrow du surplus de sa demande de restitution et dit n'y avoir lieu à déclarer l'arrêt opposable à la société Factofrance.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 29 mars 2022, la société Factofrance demande à la cour de :
- Infirmer le jugement prononcé par le tribunal de commerce de Nanterre le 4 novembre 2020 en toutes ses dispositions, notamment en ce qu'il a :
- Condamné la société Factofrance à payer à la société Arrow la somme de 629.433,74 euros toutes taxes comprises avec intérêts au taux légal a compter du 17 novembre 2017, avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'
article 1343-2 du code civil🏛;
- Condamné la société Factofrance à payer à la société Arrow la somme de 15.000 euros sur le fondement des dispositions de l'
article 700 de code de procédure civile🏛 ;
- Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;
- Ordonné l'exécution provisoire du jugement ;
- Condamné la société Factofrance aux dépens ;
Statuant à nouveau,
- Débouter la société Arrow ECS de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
- Juger qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Factofrance les frais qu'elle a été contrainte d'engager afin de défendre ses intérêts légitimes dans le cadre de la présente procédure ;
En conséquence,
- Condamner la société Arrow ECS à payer à la société Factofrance la somme de 10.000 euros, outre tous dépens de première instance et d'appel, avec faculté de recouvrement au profit de Me Christophe Debray, Avocat près la cour d'appel de Versailles, conformément aux dispositions de l'
article 699 du code de procédure civile🏛.
Par dernières conclusions notifiées le 23 mars 2022, la société Arrow demande à la cour de:
- Déclarer recevable et bien fondée la société Arrow en l'ensemble de ses fins, moyens et prétentions ; y faire droit et en conséquence ;
- Déclarer mal fondée la société Factofrance en son appel ;
- Confirmer le jugement rendu par la 6ème chambre du
tribunal de commerce de Nanterre en date du 4 novembre 2020 R 2017F02027 en toutes ses dispositions ;
En conséquence,
- Débouter la société Factofrance de l'intégralité de l'ensemble de ses fins, moyens et prétentions ;
- Condamner la société Factofrance à payer à Arrow la somme de 629.433,74 euros toutes taxes comprises avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2017 avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'
article 1343-2 du code civil🏛;
- Condamner la société Factofrance à payer à la société Arrow la somme de 15.000 euros au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛 ;
- Condamner la société Factofrance aux dépens ;
- Confirmer l'exécution provisoire du jugement ;
Et y ajoutant,
- Condamner la société Factofrance à payer à la société Arrow la somme de 20.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel avec intérêt au taux légal à compter de sa première demande;
- Condamner la société Factofrance aux dépens d'appel, dont distraction au profit de la société Lexavoué Paris-Versailles.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 31 mars 2022.
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l'
article 455 du code de procédure civile🏛.
MOTIFS
Sur la créance de 629.433,74 euros
L'action en paiement de la somme de 629 433,74€ TTC, initiée par la société Arrow contre la société Factofrance, vise par l'effet de la clause de réserve de propriété, à obtenir le remboursement par la société Factofrance des montants qu'elle a perçus des sous-acquéreurs en sa qualité de créancier subrogé de la société Overlap.
Le jugement entrepris a fait droit à la demande de la société Arrow. Il a admis la recevabilité de la contestation formée par la société Factofrance. Il a, en effet, retenu que si l'intervention de la société Factofrance dans le cadre de l'action en revendication menée par la société Arrow à l'encontre de la procédure collective avait été définitivement déclarée irrecevable, en revanche la société Factofrance disposait du droit de contester la demande en paiement de la société Arrow à son encontre, action distincte de l'action en revendication. Il a ensuite validé la clause de réserve de propriété revendiquée par la société Arrow la déclarant opposable à la société Factofrance et a, en conséquence, condamné cette dernière à la somme précitée de 629 433,74€ TTC.
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La société Factofrance fait valoir qu'elle ne saurait être privée du droit d'opposer ses moyens à l'encontre d'une demande en paiement de la société Arrow qui lui cause incontestablement grief, l'autorité de la chose jugée attachée aux décisions précédemment rendues dans le cadre de l'action réelle en revendication par la société Arrow étant étrangère à sa contestation à l'encontre de cette dernière. Elle soutient que la clause de réserve de propriété ne lui est pas opposable car les conditions de son application ne sont pas réunies. Elle fait valoir qu'une telle clause n'a pas été prévue dans les rapports contractuels entre la société Arrow et la société Overlap. A titre subsidiaire, elle expose que cette clause ne pourrait pas s'appliquer aux prestations de services et aux licences d'utilisation de logiciels. En tout état de cause, elle conteste certains montants objet de la revendication de la société Arrow.
La société Arrow sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions. Elle soutient que la clause de réserve de propriété sur laquelle elle fonde son action en paiement est valable car elle a été expressément acceptée par la société Overlap. Elle soutient que sa demande de restitution qui vise notamment des logiciels est bien fondée et que le quantum de sa demande est justifié.
*
- Sur le droit de la société Factofrance à contester l'action en paiement à son encontre
Ainsi qu'il a été rappelé précédemment, la société Arrow sollicite la confirmation du jugement entrepris qui a, notamment, déclaré recevable la contestation par la société Factofrance de la validité et de l'opposabilité de la clause de réserve de propriété.
Il s'en déduit que la société Arrow ne conteste plus, devant la cour, la recevabilité de la contestation formée par la société Factofrance.
Au surplus, il est admis que le droit de propriété du bien retenu à titre de garantie par l'effet d'une clause de réserve de propriété se reporte sur la créance du débiteur à l'égard du sous-acquéreur. La revendication qu'il permet du prix ou de la partie du prix des biens vendus avec réserve de propriété, qui n'a été ni payé, ni réglé en valeur, ni compensé entre le sous-acquéreur et le débiteur à la date du jugement ouvrant la procédure collective de ce dernier, tend seulement à rendre opposable à cette procédure le report du droit de propriété du vendeur initial sur la créance du prix de revente. ll s'ensuit que l'autorité de la chose jugée attachée à la décision statuant sur cette revendication ne prive pas l'affactureur, se prétendant subrogé dans les droits du débiteur au titre de la créance du prix de revente, de la possibilité de faire trancher, en vue d'obtenir à son profit le paiement de cette créance, le conflit qui l'oppose au vendeur bénéficiaire de la clause de réserve de propriété, la décision s'étant prononcée sur la revendication de celui-ci n'ayant pas eu pour objet de résoudre un tel conflit.
Dès lors, ainsi que l'a jugé le tribunal, la société Factofrance peut contester, dans le cadre du litige qui l'oppose à la société Arrow, la validité de la clause de réserve de propriété revendiquée par cette dernière.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
- Sur la validité de la clause de réserve de propriété
Le fondement de l'action en paiement de la société Arrow, vendeur initial, contre la société Factofrance, affactureur, repose sur l'effectivité d'une clause de réserve de propriété qui serait valablement applicable aux biens acquis par les sous-acquéreurs et dont le prix aurait été remis par ces derniers entre les mains de la société Factofrance, subrogée dans les droits de la société Overlap.
Il est admis que le créancier subrogataire, ici la société Factofrance, ne peut bénéficier de plus de droits que le créancier subrogé, en l'espèce la société Overlap. Il ne peut donc faire échec à la revendication du vendeur réservataire, la société Arrow, fondée sur une clause de réserve de propriété de sorte que cette dernière lui sera opposable si elle est jugée valable.
*
Selon les dispositions de l'
article 2367 du code civil🏛 : 'La propriété d'un bien peut être retenue en garantie par l'effet d'une clause de réserve de propriété qui suspend l'effet translatif d'un contrat jusqu'au complet paiement de l'obligation qui en constitue la contrepartie. La propriété ainsi réservée est l'accessoire de la créance dont elle garantit le paiement.'.
L'article 2368 stipule que : 'La réserve de propriété est convenue par écrit.'.
L'
article 2372 du code civil🏛, dans ses dispositions alors applicables, dispose que : 'Le droit de propriété se reporte sur la créance du débiteur à l'égard du sous-acquéreur ou sur l'indemnité d'assurance subrogée au bien.'.
L'
article L.624-18 du code de commerce🏛 prévoit que peut être revendiqué le prix ou la partie du prix des biens vendus avec une clause de réserve de propriété qui n'a été ni payé, ni réglé en valeur, ni compensé entre le débiteur et l'acheteur à la date du jugement ouvrant la procédure.
*
Il est admis que, pour être opposable, la clause de réserve de propriété doit figurer dans un écrit, le cas échéant régissant un ensemble d'opérations commerciales, et doit être convenue entre les parties. Elle doit être établie au plus tard au moment de la livraison.
La société Arrow soutient que ses conditions générales de vente contiennent une clause de réserve de propriété prévue à l'article 5 et figurent systématiquement au verso des factures, en permanence sur son site internet et de manière spécifique sur les conditions générales de vente signées par Overlap le 2 mai 2012 de sorte que la clause de réserve de propriété a été expressément acceptée par la société Overlap avant la livraison des biens concernés.
La société Arrow verse aux débats (sa pièce n°33) un document imprimé tenant sur une page intitulé : Conditions Générales de Ventes (CGV) visées le 2 mai 2012 par l'acheteur devenu la société Overlap. L'article 5 de celles-ci prévoit une clause de réserve de propriété, rédigée ainsi:
'5. RÉSERVE DE PROPRIÉTÉ ET TRANSFERT DE RISQUES
1. LES MATÉRIELS VENDUS RESTENT LA PROPRIÉTÉ PLEINE ET ENTIÈRE DE ARROW ECS JUSQU'AU PARFAIT PAIEMENT DU PRIX PRINCIPAL, FRAIS ET TAXES COMPRIS. ,
2. LA PROPRIÉTÉ DES LOGICIELS N'EST JAMAIS TRANSFÉRÉE.
3. LE TRANSFERT DES RISQUES RELATIFS AUX PRODUITS S'EFFECTUE LORS DE LA REMISE AU TRANSPORTEUR.
Il appartient donc au client de contracter à ses frais une assurance afin de couvrir tous les risques (notamment dégradation et perte) pouvant atteindre les matériels achetés et non encore intégralement payés.
4. Le client s'interdit de revendre, louer ou donner en garantie tout ou partie des produits avant le complet paiement des montants dûs à Arrow ECS.
5. En cas de non paiement de l'intégralité du prix a échéance, Arrow ECS sera en droit de reprendre les produits livrés en demandant une indemnité de 1,8% par mois écoulé entre la date de livraison et la date de reprise des produits, plus une indemnité de 200 € HT correspondant aux frais de dossiers relatifs'.
La société Factofrance ne critique pas spécialement l'existence de cette clause de réserve de propriété figurant à l'article 5 précité. Elle relève que, lors de la revendication exercée par la société Arrow auprès de la procédure collective, l'exemplaire des CGV produit par la société Arrow n'était pas signé et qu'il ne l'a été qu'ultérieurement. Toutefois, elle ne forme aucune demande à l'appui de sa constatation sur l'authenticité du document signé.
Elle fait valoir qu'un contrat-cadre signé entre la société Arrow et la société Overlap du 27 décembre 2012, à effet du 1er janvier 2013, régissant leur relations commerciales, ne fait pas mention de l'application d'une clause de réserve de propriété. Elle en tire la conclusion que par ce contrat-cadre, postérieur à l'acceptation des CGV de la société Arrow par la société Overlap (2 mai 2012), les parties ont entendu définir l'ensemble des conditions de leurs relations commerciales lesquelles ne prévoient pas de clause de réserve de propriété de sorte que la société Arrow ne peut s'en prévaloir.
Il est exact que ce contrat-cadre ne prévoit pas l'application d'une clause de réserve de propriété dans les relations commerciales entre les parties.
Cependant, l'annexe 1 (Contrat de services financiers) de ce contrat-cadre prévoit en son article 2.4 que : 'Les achats de Produits effectués par le Revendeur auprès d'Arrow restent régis par les conditions convenues antérieurement à la signature du présent Contrat par les Parties.'.
Le contrat-cadre ne contient aucune disposition visant à annuler les accords précédemment conclus entre les parties.
Il s'en déduit que les parties n'ont pas entendu remettre en cause leurs accords antérieurs notamment l'application des dispositions de l'article 5 des CGV de la société Arrow signées par la société Overlap.
La cour constate que figure aux conditions générales de vente de la société Arrow, une clause de réserve de propriété dont les modalités sont précisées à l'article 5 précédemment citées, que celles-ci ont été signées le 2 mai 2012 par M. [Ab], désigné par l'administrateur judiciaire dans sa lettre d'acquiescement partiel du 8 août 2013 comme étant le directeur des achats Overlap, et portant le cachet de la société Overlap, que les matériels et logiciels revendiqués ont été livrés entre les 9 avril et le 7 juin 2013 (pièces 17 et 18 Arrow) soit postérieurement à l'acceptation du 2 mai 2012.
Il s'en déduit que la clause de réserve de propriété invoquée par la société Arrow est valable.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
- Sur le montant revendiqué par la société Arrow
Il résulte de la combinaison des articles précités du
code civil et du
code de commerce que le droit de propriété du vendeur sous réserve de propriété, dont le bien a été revendu et n'a pas été payé à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective, se reporte sur la créance du débiteur à l'égard du sous-acquéreur, de sorte que le mandataire judiciaire ou le liquidateur ne doit remettre au revendiquant subrogé (ici la société Arrow) que le montant qui lui a été versé après l'ouverture de la procédure par le sous-acquéreur ou un tiers subrogé (en l'espèce la société Factofrance) dans les droits du débiteur contre le sous-acquéreur.
Seules peuvent donc être retenues les revendications sur les biens demeurés impayés par les sous-acquéreurs ou l'affactureur au jour de l'ouverture de la procédure collective de la société Overlap et à l'exception des prestations de service, quel que soit la nature ou le caractère accessoire de ces services, qui ne sont pas des biens meubles existant en nature.
*
Le montant de la créance de prix revendiqué par la société Arrow a été arrêté à la somme de 629.433,74 euros TTC par le tribunal. La société Arrow demande la confirmation de ce montant décomposé ainsi :
- 595.405,29 euros TTC au titre de paiements effectués par vingt (20) sous-acquéreurs sur le compte d'affacturage,
- 27.339,82 euros TTC au titre d'une compensation intervenue entre Factofrance et Overlap
concernant deux factures (FV13040410 et FV13050226),
- 8.091,89 euros TTC au titre de facturations diverses, somme dont le tribunal a déduit le montant de 1.403,26 euros s'agissant d'une prestation de services non couverte par la clause de réserve de propriété.
La société Factofrance ne conteste que le quantum des sommes réclamées sans remettre en cause le principe de l'existence d'une créance de prix détenue par la société Arrow en vertu de la clause de réserve de propriété dans le cadre de la procédure collective de la société Overlap.
La société Factofrance sollicite de la cour d'exclure du montant de 629.433,74 euros TTC la somme de 324.180,04 euros TTC facturée au titre de logiciels qui n'ont en réalité pas fait l'objet d'une vente. Elle fait valoir qu'il convient également de réduire ce montant de la somme de 11.289,35 euros TTC correspondant, selon elle, à des prestions de services non couvertes par la clause de réserve de propriété. Elle conteste enfin une somme de 8.091,89 euros TTC estimant qu'elle concerne des prestations de services (1.403,26 euros TTC) non soumises à la clause de réserve de propriété, une double facturation (5.264,19 euros TTC) ou n'est pas justifiée (1.424,44 euros).
- Sur la somme de 324.180,04 euros TTC
La société Factofrance soutient que cette somme correspondrait, selon elle, à la facturation de logiciels (pièce 48 - Arrow). Elle fait valoir que la clause de réserve de propriété prévoit que la propriété des logiciels ne peut faire l'objet d'un transfert. Elle expose qu'une clause de réserve de propriété ne peut s'appliquer qu'à des biens destinés à être vendus in fine. Elle en conclut que la clause de réserve de propriété ne peut s'appliquer aux logiciels puisqu'ils ne seront jamais vendus.
Il est exact que la clause de réserve de propriété exclut le transfert de la propriété des logiciels mais l'examen des factures correspondant à ce montant de 324.180,04 euros TTC révèle qu'il s'agit d'une facturation relative à des licences de logiciels conférant un droit d'utilisation à son bénéficiaire sans cession de ceux-ci.
Il est admis que la mise à disposition d'une copie d'un logiciel par téléchargement et la conclusion d'un contrat de licence d'utilisation y afférente visant à rendre ladite copie utilisable par le client, de manière permanente, et moyennant le paiement du prix destiné à permettre au titulaire du droit d'auteur d'obtenir une rémunération correspondant à la valeur économique de la copie de l'oeuvre dont il est propriétaire, impliquent le transfert du droit de propriété de cette copie.
La société Factofrance prétend que les licences ne seraient pas accordées à 'titre perpétuel' Cependant la société Arrow produit des copies de 'contrat de licence d'utilisateur final' de logiciels, mentionnant le caractère 'perpétuel' de celles-ci (pièce 61 et 62 - Arrow) et non contestées par la société Factofrance.
La demande de la société Factofrance sera rejetée et le jugement confirmé en ce qu'il a dit que la clause de réserve de propriété était applicable sur la somme de 324.180,04 euros.
- Sur la somme de 11.289,35 euros TTC
La société Factofrance fait valoir que cette somme correspondrait, selon elle, à une extension de garantie et de support des prestions de services non couvertes par la clause de réserve de propriété.
Il résulte de l'examen de la commande du 17 mai 2013 et de la facture du 21 mai 2013 relative à cette réclamation, que le montant de 11.289. 35 euros TTC correspond à la facturation de 3 licences d'utilisation (licence Oracle Standard One) de sorte qu'il ne s'agit pas d'une prestation de service non couverte par la clause de réserve de propriété mais d'un droit d'utilisation d'un logiciel couvert par cette clause.
La demande de la société Factofrance sera rejetée et le jugement confirmé sur ce point.
- Sur la somme de 8.091,89 euros TTC
Cette somme se décompose ainsi :
- 1.403,26 euros TTC que le tribunal a déjà rejetée s'agissant de prestations de services ce qui n'est plus contesté par la société Arrow,
- une somme de 5.264,19 euros TTC pour laquelle la société Factofrance ne justifie pas d'une double facturation alors que la facture litigieuse (FV130501113 du 17 mai 2013) fait suite à la commande 30 avril 2013 par la société Overlap à destination du sous-acquéreur Roquette Frères, de deux équipements identiques. La société Factofrance sera déboutée de sa demande à cet égard.
- une somme de 1.424,44 euros pour laquelle la société Factofrance fait valoir que la société Arrow réclame ce montant alors qu'elle ne produit, pour en justifier, qu'une facture de 332,49 euros TTC ( FV13050233) laquelle apparaît avoir été réglée le 20 août 2013 par le sous acquéreur (La Mutualité Française - pièce 48 Arrow). Le décompte établi par Me [W] (pièce 48 - Arrow) fait apparaître un règlement limité à la somme de 332,49 euros pour un montant facturé de 1.424,44 euros de sorte que la revendication de la société Arrow sera réduite à 332,49 euros TTC au lieu de 1.424,44 euros TTC.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
Sur la compensation de 27.339,82 euros TTC
La société Factofrance soutient que deux factures (FV13040410 et FV13050226) totalisant 27.339,82 euros TTC qui lui avaient été cédées en sa qualité d'affactureur, ont été réglées directement par les sous-acquéreurs à la société Overlap de sorte que la société Arrow ne peut en revendiquer la restitution.
La société Arrow produit un courrier du 19 juin 2017 (pièce 7 - Arrow) du conseil de Me [W] (mandataire judiciaire devenu liquidateur) aux termes duquel ce dernier indique que les sommes correspondantes ont été compensées avec des factures non cédées, encaissées par la société Factofrance, dans le cadre d'un accord entre cette dernière, la société Overlap et l'administrateur judiciaire. Ce courrier précise que 'Dans ces conditions, le montant de 27 339,82 € TTC doit effectivement être retenu dans la somme totale revendiquée par ARROW ..... En conséquence, il revient à GE FACTOFRANCE de payer à votre client la part revendicable correspondante, qui s'élève à la somme de 27.339,82....'.
La société Factofrance oppose à la société Arrow une analyse comptable des écritures passées dans les comptes de Factofrance à propos de ces deux factures (compte courant 'CCV' et compte d'affacturage 'CAF' - pièce 12 - Arrow ; pièce 34 - Factofrance) aux termes de laquelle la société Arrow ne démontrerait pas l'existence d'un paiement direct effectué par les sous-acquéreurs entre les mains de la société Factofrance.
La société Arrow dispose d'une créance de prix, correspondant au montant qui lui est dû par la société Overlap, à l'égard des sous-acquéreurs qui ont été livrés des biens affectés par la clause de réserve de propriété sans en avoir encore payé le prix entre les mains de la société Overlap, ou, le cas échéant, à l'égard des affactureurs si les sous-acquéreurs ont payé le prix entre les mains de ces derniers.
En l'espèce, il est constant que les deux factures ont été payées par les sous-acquéreurs directement entre les mains de la société Overlap, ou de la procédure collective, de sorte que
la société Arrow ne peut en revendiquer restitution, peu important qu'une compensation soit intervenue entre des créances réciproques existant entre la société Overlap et la société Factofrance. Cette compensation ne vaut pas encaissement par la société Factofrance d'un prix payé par un sous-acquéreur entre les mains de la société Factofrance, créancier subrogé.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
*
Ainsi, la société Factofrance sera condamnée à payer à la société Arrow la somme de 601.001,97 euros TTC (629.433,74 - 1.424,44 + 332,49 - 27.339,82) avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2017, avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'
article 1343-2 du code civil🏛.
Sur les dépens et l'
article 700 du code de procédure civile🏛 :
Les dispositions relatives aux dépens et à l'
article 700 du code de procédure civile🏛, prises par le tribunal, seront confirmées.
La société Factofrance qui succombe pour l'essentiel sera condamnée aux dépens d'appel.
La société Factofrance sera condamnée à verser à la société Arrow une indemnité de 10.000 euros au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛. La société Factofrance sera déboutée de sa demande à cet égard.