La guerre de Troie n'aura pas lieu" est une pièce qui explore des thèmes tels que la futilité de la guerre, la diplomatie et la tragédie humaine. Elle remet en question la notion de destin et pose la question de savoir si le conflit peut être évité lorsque les forces de la passion, de la fierté et de l'honneur sont en jeu. Cette réinterprétation de la légende de Troie offre une perspective intéressante sur les motivations et les actions des personnages mythiques de l'Iliade.
Alors, comme de nombreuses œuvres classiques -c’est bien là le cœur de notre émission depuis 5 ans-, il y a dans cette pièce une approche juridique et des questions de droit qui sont abordées. Cependant, avouons-le, elles ne sont pas le thème central de la pièce, mais elles contribuent à l'exploration des thèmes plus larges tels que la diplomatie, la guerre, la paix et la nature humaine.
Pour autant, l’extrait de la scène 5 de l’acte 2 que nous avons évoqué en début d’émission revêt bien un intérêt juridique majeur pour qui comprend entre les lignes.
Lorsque Hector dit, au creux de l’oreille de Busiris : "
Mon cher Busiris, nous savons tous ici que le droit est la plus puissante des écoles de l’imagination. Jamais poète n’a interprété la nature aussi librement qu’un juriste la réalité", le fils de Priam fait écho ni plus ni moins qu’au principe de la qualification juridique des faits. En droit, c’est l’interprétation de la réalité au regard de la règle de droit qui emporte sa qualification juridique… d’où l’imagination du juriste, d’où la créativité quasi poétique du magistrat comme de la doctrine.
Cette réflexion du Prince troyen est une réflexion intéressante sur la façon dont le droit peut être une discipline qui fait appel à l'imagination de manière puissante et créative. Elle évoque la relation entre le droit et l'interprétation de la réalité, tout en comparant les juristes aux poètes en termes d'expression créative.
C’est pour cela que Hector contraint Busiris, le menaçant d’emprisonnement, à réinterpréter la réalité au bénéfice de la paix. Le syllogisme de Giraudoux est à la fois exemplaire et effrayant. Les mêmes faits interprétés différemment, selon une volonté différente, sont regardés à l’aune de règles différentes et donc qualifiés différemment. De même faits conduisent aussi bien à la guerre qu’à la paix, du moins l’hospitalité.
Crédits :
- Extrait de la scène 5 de l’acte 2, La guerre de Troie n’aura pas lieu, de Jean Giraudoux, jouée et mise en scène par les membres de l'association de théâtre La Clef des Planches.
- Extrait de Garde à vue, Claude Miller, 1981
- Extrait du Mépris, Jean-Luc Godard, 1963