SOC.
BD4
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 13 septembre 2023
Cassation partielle
Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 870 F-B
Pourvoi n° D 22-11.338
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 SEPTEMBRE 2023
M. [F] [C], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 22-11.338 contre l'arrêt rendu le 18 novembre 2021 par la cour d'appel de Versailles (21e chambre), dans le litige l'opposant à la Société d'édition de Canal plus, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La Société d'édition de Canal plus a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Flores, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [C], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la Société d'édition de Canal plus, après débats en l'audience publique du 21 juin 2023 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Flores, conseiller rapporteur, M. Rouchayrole, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 18 novembre 2021), M. [C] a été engagé en qualité d'assistant journaliste reporter stagiaire par la société Sesi le 18 juin 1999. Il a été promu en qualité de journaliste reporter d'images le 1er juillet 2000.
2. Le contrat de travail a été transféré le 1er janvier 2008 à la Société d'édition de Canal plus.
3. Le salarié a été nommé chef de service le 1er juillet 2015.
4. Après avoir pris acte, le 8 mars 2017, de la rupture de son contrat de travail, le salarié a saisi, le 16 mars 2017, la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de diverses sommes.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi incident de l'employeur, qui est préalable, et le deuxième moyen du pourvoi principal du salarié
5. En application de l'
article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal
Enoncé du moyen
6. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement d'un rappel de salaire pour régularisation de la période de juillet 2014 à juin 2015, alors « que l'expérience professionnelle acquise auprès d'un précédent employeur comme la qualification à l'embauche ne peuvent justifier une différence de salaire qu'au moment de l'embauche et pour autant qu'elles soient en relation avec les exigences du poste et les responsabilités effectivement exercées ; qu'en l'espèce, pour débouter le salarié de sa demande au titre de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement, et après avoir relevé que sur la période allant de juillet 2014 à juin 2015, le salarié avait perçu une rémunération inférieure à celle de M. [Aa] La Loi pourtant placé dans une situation similaire, la cour d'appel a retenu que cette différence était justifiée objectivement dès lors que les deux salariés n'avaient pas la même qualification ni la même expérience professionnelle lors de leur embauche en 1999 ; qu'en statuant par un tel motif inopérant, la cour d'appel a violé le principe ''A travail égal, salaire égal.'' »
Réponse de la Cour
Vu le principe d'égalité de traitement :
7. En application de ce principe, si des mesures peuvent être réservées à certains salariés, c'est à la condition que tous ceux placés dans une situation identique, au regard de l'avantage en cause, aient la possibilité d'en bénéficier, à moins que la différence de traitement soit justifiée par des raisons objectives et pertinentes.
8. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un rappel de salaire pour régularisation de la période de juillet 2014 à juin 2015, l'arrêt, après avoir relevé que le salarié avait perçu une rémunération inférieure à celle du salarié de comparaison pour un poste équivalent de grand reporter groupe 9, retient qu'il résulte de la comparaison des contrats de travail que le salarié a été engagé en qualité d'assistant journaliste reporter d'images stagiaire, le 18 juin 1999, alors que le salarié de comparaison avait été engagé en qualité de journaliste reporter d'images le 22 mars 1999. L'arrêt en déduit que cette différence de qualification entre les deux salariés lors de leur embauche constitue une raison objective à la différence de salaire dont se plaint le salarié pour la période de juillet 2014 à juin 2015, antérieure à sa promotion en qualité de chef de service.
9. En se déterminant ainsi, sans préciser en quoi la différence de qualification des salariés lors de leur engagement en 1999, respectivement en qualité d'assistant journaliste reporter d'images stagiaire et d'assistant journaliste reporter d'images, constituait une raison objective et pertinente justifiant la disparité de traitement dans l'exercice des mêmes fonctions de grand reporter groupe 9 entre juillet 2014 et juin 2015, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal
Enoncé du moyen
10. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission et de le débouter de ses demandes au titre de la rupture, alors « que par application de l'
article 624 du code de procédure civile🏛, la censure, qui ne manquera pas d'intervenir du chef du premier et/ou du second moyen emportera la censure de l'arrêt en ce qu'il a dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail du salarié produisait les effets d'une démission et débouté le salarié de ses demandes subséquentes. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 624 du code de procédure civile :
11. La cassation sur le premier moyen, du chef de la demande en paiement d'un rappel de salaire pour régularisation de la période de juillet 2014 à juin 2015 entraîne, par voie de conséquence, la cassation des chefs de dispositif critiqués par le troisième moyen, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
REJETTE le pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [C] de sa demande en paiement de 4 432,56 euros à titre de rappel de salaire pour régularisation de la période de juillet 2014 à juin 2015, dit que la prise d'acte produit les effets d'une démission et déboute M. [C] de ses demandes financières au titre de la rupture, l'arrêt rendu le 18 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la Société d'édition de Canal plus aux dépens ;
En application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par la Société d'édition de Canal plus et la condamne à payer à M. [C] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille vingt-trois.