CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 66536
S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON et autres M. LAHMEK
Lecture du 30 Novembre 1994
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, 10ème et 7ème sous-sections réunies),
Sur le rapport de la 10ème sous-section, de la Section du Contentieux,
Vu 1°, sous le n° 66536, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 1er mars et 28 juin 1985, présentés pour la S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON, dont le siège social est 36, rue du Laos à Paris (75015), représentée par son gérant en exercice, et pour M. LAHMEK, demeurant 2, square Théodore Judlin à Paris (75015) ; la S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON et M. LAHMEK demandent que le Conseil d'Etat : 1/ annule le jugement du 23 novembre 1984 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à ce que la commune de Villebon-sur-Yvette soit condamnée à réparer les préjudices qu'ils ont subis du fait de la dénonciation par cette commune des accords contractuels passés avec les requérants en vue de la réalisation de la zone d'aménagement concerté de la Bretèche ; 2/ condamne la commune de Villebon-sur-Yvette à leur verser respectivement les sommes de 15 146 688 F et 3 936 189 F, avec intérêts et intérêts des intérêts ;
Vu 2°, sous le n° 66537, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 1er mars et 28 juin 1985, présentés pour la S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON, dont le siège social est 36, rue du Laos à Paris (75015) et pour M. LAHMEK, demeurant 2, square Théodore Judlin à Paris (75015) ; la S.C.I.PALAISEAU-VILLEBON et M. LAHMEK demandent que le Conseil d'Etat : 1/ annule le jugement du 23 novembre 1984 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a rejeté la demande de M. LAHMEK tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 15 146 688 F et 3 936 189 F en réparation du préjudice subi du fait de l'inexécution de la convention d'aménagement de la zone d'aménagement concerté de la Bretèche et ordonné une expertise avant de statuer sur la demande de la S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 15 146 688 F en réparation du préjudice résultant de l'inexécution de la même convention ; 2/ condamne l'Etat à leur verser lesdites sommes augmentées des intérêts et des intérêts capitalisés ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de Mme Bechtel, Maître des Requêtes, - les observations de Me Choucroy, avocat de la S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON et de M. LAHMEK, et de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de la ville de Villebon-sur-Yvette, - les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre deux jugements du tribunal administratif de Versailles relatifs à l'indemnisation de préjudices qui auraient été causés par un même acte ; qu'il ya lieu de les joindre pour qu'il soit statué par une seule décision ;
Sur les conclusions de la requête n° 66536 tendant à obtenir la condamnation de la commune de Villebon-sur-Yvette sur le fondement de sa responsabilité contractuelle :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par un arrêté en date du 26 décembre 1978, dont la légalité a été confirmée par une décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux en date du 22 juin 1984, le préfet de l'Essonne a abrogé son arrêté du 4 mars 1971 ayant décidé la création de la zone d'aménagement concerté de la Bretèche à Villebon-sur-Yvette et retiré l'approbation donnée par arrêté préfectoral du 30 mai 1972 à la convention d'aménagement passée entre la commune de Villebon-sur-Yvette d'une part et la S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON et M. LAHMEK d'autre part ;
Considérant que l'arrêté du 26 décembre 1978, pris sur proposition du conseil municipal de la commune, sur le fondement de l'article R. 311-3-3 alors en vigueur du code del'urbanisme, a, en tant qu'il a retiré l'approbation de la convention passée entre la commune et les requérants rétroactivement, mis fin aux liens contractuels en découlant ; que les requérants ne sauraient dès lors se prévaloir des droits qui résulteraient pour eux de la résiliation desdits liens ; qu'il suit de là que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune à réparer le préjudice qu'ils ont subi du fait de la rupture des engagements contractuels qui les liaient à celle-ci pour l'aménagement de la zone d'aménagement concerté ;
Sur les conclusions de la requête n° 66537 :
Considérant que par jugement avant-dire-droit en date du 23 novembre 1984, le tribunal administratif de Versailles a reconnu la responsabilité de l'Etat sur le fondement de la rupture de l'égalité devant les charges publiques à raison de l'intervention de l'arrêté préfectoral du 26 décembre 1978 supprimant la zone d'aménagement concerté de la Bretèche et retirant l'approbation donnée à la convention d'aménagement de ladite zone d'aménagement concerté ; que le litige porté en appel devant le Conseil d'Etat par les requérants se limite à la définition de l'étendue du préjudice subi, en ce qui concerne la société civile immobilière, et porte, en ce qui concerne M. LAHMEK, sur le principe du droit à indemnisation ;
Sur les conclusions de M. LAHMEK tendant à l'indemnisation du préjudice subi :
Considérant que M. LAHMEK, propriétaire de terrains inclus dans la zone d'aménagement concerté de la Bretèche, ne justifie pas d'un dommage certain résultant directement de l'arrêté préfectoral du 26 décembre 1978 ; que M. LAHMEK n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande d'indemnisation ;
Sur les conclusions de la S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON dirigées contre l'Etat et relatives à l'étendue de la réparation :
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'approbation de la convention d'aménagement passée entre la S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON et la commune, la S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON avait engagé dans la zone d'aménagement concerté certains travaux relatifs notamment à la construction d'un pont enjambant un cours d'eau ; que toutefois en l'absence de justification suffisante des frais ainsi engagés c'est à bon droit que le tribunal administratif n'a pas accordé à la société la somme demandée, et a commis un expert en vue de déterminer l'étendue des frais réellement exposés par la société requérante à raison des aménagements mis à sa charge par la convention, ainsi que le manque à gagner résultant éventuellement de la différence entre le coût des constructions édifiées par la S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON et leur valeur vénale à la date de l'évaluation ; que, contrairement à ce qui est soutenu, cette expertise n'est pas frustratoire et la mission confiée à l'expert a été correctement définie par les premiers juges ;
Considérant que les autres chefs de préjudice invoqués résultant de la perte sur loyers du bail à construction, de la moins-value des terrains devant supporter les aménagements de la zone d'aménagement concerté et du manque à gagner résultant de la privation des bénéfices escomptés ne peuvent en ce qui concerne les deux premiers être regardés comme la conséquence directe de l'arrêté abrogeant la création de la zone d'aménagement concerté et retirant l'approbation de la convention et ne présente en ce qui concerne le troisième aucun caractèrecertain ; que c'est, par suite, à bon droit que les premiers juges ont refusé de reconnaître à la société requérante un droit à indemnité à raison de ces chefs de préjudice ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. LAHMEK et la S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON ne sont pas fondés à demander l'annulation des jugements attaqués du tribunal administratif de Versailles ;
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes nos 66536 et 66537 de M. LAHMEK et de la S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. LAHMEK, à la S.C.I. PALAISEAU-VILLEBON, à la commune de Villebon-sur-Yvette, au ministre de l'équipement, des transports et du tourisme et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.