Jurisprudence : CE 7/9 SSR, 15-04-1992, n° 78300

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 78300

M. GUIDONI-TARISSI

Lecture du 15 Avril 1992

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du Contentieux, 7ème et 9ème sous-sections réunies), Sur le rapport de la 7ème sous-section de la Section du Contentieux,
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 7 mai et 9 juillet 1986, présentés pour M. GUIDONI-TARISSI, demeurant 60 route de Champiot à Durtol (63830) ; M. GUIDONI-TARISSI demande que le Conseil d'Etat : 1°) réforme le jugement en date du 16 janvier 1986 en tant que par ledit jugement le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a partiellement rejeté ses demandes en décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1977 à 1981 dans les rôles de la ville de Clermont-Ferrand ; 2°) prononce la décharge des impositions restant à sa charge et des pénalités dont elles ont été assorties ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu : - le rapport de Mme Hubac, Maître des requêtes, - les observations de Me Cossa, avocat de M. GUIDONI-TARISSI, - les conclusions de Mme Hagelsteen, Commissaire du gouvernement ;
Sur l'étendue du litige e :
Considérant que par une décision en date du 13 août 1991 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence de la somme de 85 675 F, du supplément d'impôt sur le revenu auquel M. GUIDONI-TARISSI a été assujetti au titre de l'année 1977 ; que les conclusions de l'intéressé sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'il résulte de l'examen du jugement attaqué ainsi que des pièces du dossier que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de taxation d'office ; que ce jugement doit dès lors être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. GUIDONI-TARISSI devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition : Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que l'administration a, le 17 novembre 1981, délivré à M. GUIDONI-TARISSI un premier avis de vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble relatif aux années 1977 à 1980 et le 9 mars 1982 un second avis relatif à l'année 1981 ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la vérification dont le contribuable a fait l'objet serait irrégulière faute d'avoir été précédée de l'envoi par l'administration d'un avis de vérification manque en fait ; que si le requérant soutient en outre que le vérificateur aurait entrepris l'examen de sa situation fiscale au titre de l'année 1981 avant le 31 décembre de cette année, il ne le justifie pas ; Considérant, d'autre part, qu'il résulte des dispositions combinées de l'article L. 16 et de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales que l'administration peut, lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés, lui demander des justifications et si le contribuable s'est abstenu de répondre à ces demandes de justification, le taxer d'office à l'impôt sur le revenu, à raison des sommes dont il n'a pu justifier l'origine ;
Considérant qu'à la suite des constatations opérées lors de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble de M. GUIDONI-TARISSI, président-directeur général de la société Socaro, société d'exploitation du casino de Royat, le vérificateur a estimé que les sommes portées au crédit des comptes bancaires de l'intéressé, d'une part, et de ses comptes courants ouverts dans les sociétés Catma et Socaro, d'autre part, excédaient notablement le montant des revenus bruts déclarés au titre de chacune des années vérifiées ; qu'il a alors adressé le 15 juillet 1982 une demande de justification de l'origine de sommes portées au crédit de ses comptes bancaires et de ses comptes courants au titre des années 1978 à 1981 ainsi que des soldes créditeurs des balances espèces établies au titre des années 1980 et 1981 ; Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'examen des pièces du dossier que les sommes portées au crédit des comptes bancaires et des comptes courants du requérant s'élevaient à 309 232 F en 1978, 689 752 F en 1979, 1 392 958 F en 1980 et 1 178 122 F en 1981 ; que ces montants excédaient notablement le double des revenus bruts déclarés au titre de ces quatre années ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que le vérificateur n'aurait pas réuni les éléments lui permettant d'établir que le contribuable aurait pu disposer de revenus plus importants que ceux qu'il avait déclarés manque en fait ; Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction qu'à hauteur de 12 012 F en 1978, 18 000 F en 1979, 86 150 F en 1980 et 183 684 F en 1981, M. GUIDONI-TARISSI n'avait fourni aucune justification de l'origine des fonds portés à ses comptes ou n'avait apporté que des réponses imprécises et non vérifiables ; que l'administration était, dès lors, en droit de réintégrer d'office les sommes susmentionnées dans les revenus imposables de M. GUIDONI-TARISSI ;
Sur le bien-fondé des impositions : En ce qui concerne les années 1978 et 1979 :
Considérant que M. GUIDONI-TARISSI a été taxé d'office à raison de sommes d'un montant de 12 012 F en 1978 et 18 000 F en 1979 qui lui ont été versées par chèques bancaires ; qu'il résulte de l'instruction et notamment des extraits de comptes produits par le requérant que, s'agissant de l'année 1979 et à hauteur d'une somme de 9 000 F, M. GUIDONI-TARISSI, après avoir encaissé cette somme l'a immédiatement reversée à un client du casino de Royat ; que si M. GUIDONI-TARISSI rapporte ainsi devant le Conseil d'Etat la preuve de l'origine et de la nature de la somme en cause, il ne justifie pas, en revanche, de l'origine du surplus de celles qui ont été imposées d'office à l'impôt sur le revenu au titre des années 1978 et 1979 ; En ce qui concerne l'année 1980 :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, notamment, du certificat établi par le notaire de M. GUIDONI-TARISSI qu'à la suite de la vente d'une maison dont il était propriétaire indivis, le requérant a perçu une somme de 33 333 F ; qu'il résulte, en outre, de l'instruction que l'administration n'a pas tenu compte du produit de cette vente dans la balance espèces qu'elle a établie au titre de cette année ; qu'ainsi le solde de cette balance espèces demeuré inexpliqué doit être ramené à 48 817 F ; que M. GUIDONI-TARISSI, à qui il appartient de rapporter la preuve de l'origine et de la nature de cette dernière somme, ne rapporte pas cette preuve en se bornant à soutenir qu'elle serait d'un montant trop faible pour être regardée comme un revenu d'origine indéterminé et être, comme telle, taxée d'office ; En ce qui concerne l'année 1981 1 :
Considérant que si M. GUIDONI-TARISSI soutient que le vérificateur a omis de tenir compte des salaires dont son ménage aurait disposé en espèces et aurait, en outre, refusé de tenir compte des retraits opérés par chèques de ses comptes bancaires, il n'en justifie pas ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. GUIDONI-TARISSI est seulement fondé à demander que les bases des suppléments d'impôt sur le revenu mis à sa charge au titre des années 1979 et 1980 soient respectivement réduites de 9 000 F et 33 333 F ;
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. GUIDONI-TARISSI tendant à la décharge du supplément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1977.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé.
Article 3 : Les bases des suppléments d'impôt sur le revenu mis à la charge de M. GUIDONI-TARISSI au titre des années 1979 et 1980 sont respectivement réduites de 9 000 F et 33 333 F.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par M. GUIDONI-TARISSI devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. GUIDONI-TARISSI et au ministre délégué au budget.

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