Jurisprudence : CE Contentieux, 30-06-1978, n° 99514

CE Contentieux, 30-06-1978, n° 99514

A3743AIH

Référence

CE Contentieux, 30-06-1978, n° 99514. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/970293-ce-contentieux-30061978-n-99514
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CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 99514

Hôpital psychiatrique départemental de Rennes
contre
dame Clotault (Rosalie)

Lecture du 30 Juin 1978

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)



Sur le rapport de la 5ème Sous-Section

Vu 1°), sous le n° 99 514 la requête sommaire et les mémoires ampliatifs présentés pour l'hôpital psychiatrique départemental de Rennes, à ce dûment autorisé par délibération du conseil d'administration en date du 7 octobre 1975, ladite requête et lesdits mémoires enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 26 mai 1975, 7 juillet 1975 et 18 août 1975, et tendant à ce qu'il plaise au Conseil annuler le jugement en date du 26 mars 1975 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a déclaré responsable des conséquences dommageables de l'agression commise le 20 juin 1973, par le sieur Piron (Jean) hospitalisé en "service libre" audit hôpital, contre la dame Clotault (Rosalie);

Vu 2°), sous le n° 1582 la requête présentée pour l'hôpital psychiatrique départemental de Rennes, à ce dûment autorisé par délibération du conseil d'administration en date du 2 mars 1976, ladite requête enregistrée comme ci-dessus le 30 décembre 1975 et tendant à ce qu'il plaise au Conseil réformer le jugement du Tribunal administratif de Rennes en date du 5 novembre 1975, par lequel il a été condamné à verser à la dame Clotault en réparation des dommages par elle subis du fait de l'agression dont elle avait été victime de la part du sieur Piron (Jean), la somme de 5 289,72 francs;

Vu le code de la santé publique;

Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;

Vu la loi du 30 décembre 1977.
Considérant que les requêtes susvisées de l'hôpital psychiatrique de Rennes sont relatives aux conséquences de l'agression perpétrée sur la personne de la dame Clotault par le sieur Piron, alors mineur, hospitalisé dans cet établissement; qu'elles présentent à juger les mêmes questions; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision;
sur la responsabilité:
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jeune Piron, débile mental, avait été mis par décision de justice sous la tutelle d'une oeuvre spécialisée; qu'après plusieurs tentatives infructueuses de réinsertion sociale et professionnelle dans des familles, un centre médice-professionnel et un centre de formation professionnelle, il a été hospitalisé en service libre à l'hôpital psychiatrique de Rennes où il était libre d'aller et venir dans la journée; que, le 20 juin 1973, il a blessé de plusieurs coups de couteau la dame Clotault;
Considérant que, si l'hospitalisation en service libre, prévue par les circulaires du ministre de la Santé publique des 1er mars 1949 et 28 février 1951, ne constitue pas une méthode thérapeutique créant un risque spécial pour les tiers et susceptible d'engager sans faute la responsabilité de l'administration, les services de l'hôpital psychiatrique de Rennes ont commis une faute de nature à engager la responsabilité de cet établissement en plaçant le jeune Piron dans des conditions d'hospitalisation qui lui laissaient une totale liberté pendant la journée alors que l'intéressé n'avait aucune occupation professionnelle et que son agressivité était connue; que, dès lors, l'hôpital psychiatrique de Rennes n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 26 mars 1975, le Tribunal administratif de Rennes l'a déclaré responsable de l'accident survenu à la dame Clotault;

Sur l'indemnité:
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en accordant à la dame Clotault des indemnités s'élevant à 1 500 F pour les souffrances physiques, 500 F pour la détérioration de ses vêtements et 289,72 F pour la perte de la moitié de son salaire pendant la période où elle a dû s'arrêter de travailler, le tribunal administratif a fait une juste appréciation des réparations dues à la dame Clotault pour ces différents chefs de préjudice; qu'en revanche il n'est pas établi que l'incapacité permanente, évaluée par l'expert à 2 %, dont la dame Clotault reste atteinte entraîne pour elle un préjudice de nature à lui ouvrir droit à une réparation distincte de celle qui lui a été allouée au titre des souffrances physiques; que, dès lors, l'hôpital psychiatrique de Rennes est fondé à demander que l'indemnité qu'il a été condamné à payer à la dame Clotault par le jugement attaqué, en date du 5 novembre 1975, soit ramenée de 5 289,72 F à 2 289,72 F.
DECIDE
Article 1er: La somme de 5 289,72 F que l'hôpital psychiatrique de Rennes a été condamné à payer à la dame Clotault par le jugement du Tribunal administratif de Rennes, en date du 5 novembre 1975, est ramené en principal à 2 289,72 F.
Article 2: Le jugement du Tribunal administratif de Rennes, en date du 5 novembre 1975, est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3: La requête n° 99 514 et le surplus des conclusions de la requête n° 1582 de l'hôpital psychiatrique de Rennes sont rejetées.
Article 4: Les frais d'huissier exposés devant le Conseil d'Etat a l'occasion de la requête n° 1582 sont mis à la charge de la dame Clotault.

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