Jurisprudence : CA Pau, 08-06-2023, n° 21/01366, Infirmation partielle


AC/SB


Numéro 23/1996


COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale


ARRÊT DU 08/06/2023


Dossier : N° RG 21/01366 - N° Portalis DBVV-V-B7F-H3EI


Nature affaire :


Contestation du motif économique de la rupture du contrat de travail


Affaire :


[Y] [D]


C/


A. ORTHOGRAU TECHNOLOGIES


Grosse délivrée le

à :


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


A R R Ê T


Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 08 Juin 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile🏛.


* * * * *


APRES DÉBATS


à l'audience publique tenue le 04 Janvier 2023, devant :


Madame CAUTRES-LACHAUD, Président


Madame PACTEAU, Conseiller


Madame ESARTE, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles


assistées de Madame LAUBIE, Greffière.


Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.


dans l'affaire opposant :



APPELANTE :


Madame [Y] [D]

[Adresse 2]

[Localité 6]


Représentée par Maître GUILLOT, avocat au barreau de BAYONNE


INTIMEE :


S.A.S.U. ORTHOGRAU TECHNOLOGIES

[Adresse 3]

[Localité 1]


Représentée par Maître SOULIE de la SELARL SOULIE MAUVEZIN, avocat au barreau de TARBES


sur appel de la décision

en date du 22 MARS 2021

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE TARBES

RG numéro : F19/00148



EXPOSÉ DU LITIGE


Mme [Y] [D] a été embauchée le 15 juillet 1986 au sein de l'enseigne Espace santé Grau géré à compter de 2007 par la SAS Orthograu Technologie en qualité de vendeuse spécialisée, suivant contrat à durée indéterminée régi par la convention collective nationale médico-technique : négoce et prestations de services.


Le 12 juillet 2019, la société Orthograu technologies a proposé Mme [Y] [D] un poste de reclassement dans le cadre de l'article L.1233-4 du code du travail🏛.


Le 19 juillet 2019, elle a refusé cette proposition.


Le 23 août 2019, elle a été convoquée à un entretien préalable fixé le 2 septembre suivant.


Le 12 septembre 2019, elle a été licenciée pour motif économique.


Le 16 septembre 2019, un contrat de sécurisation professionnelle a été conclu par les parties.


Le 1er octobre 2019, elle a saisi la juridiction prud'homale.



Par jugement du 22 mars 2021, le conseil de prud'hommes de Tarbes a notamment':

- débouté Mme [Y] [D] de sa demande de dommages et intérêts pour non respect des critères d'ordre de licenciement,

- débouté Mme [Y] [D] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- dit que le licenciement économique repose sur une cause réelle et sérieuse,

- débouté Mme [Y] [D] de sa demande au titre des dommages et intérêts pour rupture brutale du contrat de travail,

- condamné Mme [Y] [D] à verser à la société Orthograu technologies la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

- condamné Mme [Y] [D] aux entiers dépens.



Le 19 avril 2021, Mme [Y] [D] a interjeté appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées.


Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 19 septembre 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour l'exposé des faits et des moyens, Mme [Y] [D] demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :

* l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour non respect des critères d'ordre de licenciement,

* l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* a dit que le licenciement économique repose sur une cause réelle et sérieuse,

* l'a déboutée de sa demande au titre des dommages et intérêts pour rupture brutale du contrat de travail,

* l'a condamnée à verser à la société Orthograu technologies la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* l'a condamnée aux entiers dépens,

- et statuant à nouveau :

- à titre principal :

- dire et juger que la société Orthograu technologies n'a pas respecté les critères d'ordre des licenciements prévus aux articles L. 1233-5 et L. 1233-7 du code du travail🏛🏛,

- en conséquence, condamner la société Orthograu technologies à lui verser la somme de 40'100 € nets à titre de dommages et intérêts,

- à titre subsidiaire :

- dire et juger que son licenciement pour motif économique par la société Orthograu technologies est sans cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, condamner la société Orthograu technologies à lui verser la somme de 40'100 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- en tout état de cause :

- condamner la société Orthograu technologies à lui verser la somme de 4'000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale du contrat de travail,

- condamner la société Orthograu technologies à lui verser la somme de 3'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner l'exécution provisoire,

- condamner la société Orthograu technologies aux dépens.


Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 24 septembre 2021, auxquelles il y a lieu de se référer pour l'exposé des faits et des moyens, la société Orthograu technologies demande à la cour de':

- confirmer le jugement dont appel en son entier,

- en toutes hypothèses,

- débouter Mme [Y] [D] de sa demande indemnitaire formulée sur le fondement des articles L. 1233-5 et L. 1233-7 du code du travail,

- déclarer que le licenciement de Mme [Y] [D] est régulier et fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, débouter Mme [Y] [D] de sa demande indemnitaire fondée sur le fondement des articles L. 1233-3 et L. 1235-3 du code civil,

- débouter Mme [Y] [D] de l'ensemble de ses autres demandes indemnitaires,

- condamner Mme [Y] [D] à lui verser la somme de 3'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [Y] [D] aux entiers dépens.


L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 décembre 2022.



MOTIFS DE LA DÉCISION


Sur la demande principale au titre du non respect des critères d'ordre du licenciement


Attendu qu'il convient de rappeler que le licenciement de Mme [D] est intervenu le 12 septembre 2019';


Attendu que l'inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements n'a pas pour effet de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse';


Attendu que l'existence d'un préjudice résultant de l'inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond';


Attendu que selon l'article L.1233-5 du code du travail lorsque l'employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l'absence de convention ou d'accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements après consultation du comité social et économique';


Que ces critères prennent notamment en compte':


les charges de famille, en particulier celle des parents isolés';

l'ancienneté de service dans l'établissement ou l'entreprise';

la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celles des personnes handicapées et des salariés âgés';

les qualités professionnelles appréciées par catégorie';


Que l'employeur peut privilégier un de ces critères à condition de tenir compte de l'ensemble des critères prévus à cet article';


Que le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements peut être fixé par un accord collectif et qu'en l'absence d'un tel accord, ce périmètre ne peut être inférieur à celui de chaque zone d'emplois dans laquelle sont situés un ou plusieurs établissements de l'entreprise concernés par les suppressions d'emplois';


Attendu que conformément à l'article L.1233-7 du code du travail lorsque l'employeur procède à un licenciement individuel pour motif économique, il prend en compte, dans le choix du salarié concerné, les critères prévus à l'article L.1233-5';


Attendu que le législateur pose désormais le principe suivant lequel le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements peut être fixé par un accord collectif et à défaut d'un tel accord ce périmètre ne peut être inférieur à la limite de la zone d'emploi';


Que ces zones d'emploi sont actuellement définies par l'article D.1233-2 du code du travail🏛';


Attendu que l'article D.1233-2 du code du travail prévoit que les zones d'emploi mentionnées à l'avant dernier alinéa de l'article L.1233-5 sont celles référencées dans l'atlas des zones d'emploi établi par l'Institut National de la Statistique et des Études Économiques et les services statistiques du ministère chargé de l'emploi';


Attendu qu'au cas d'espèce':


Mme [D], seule salariée de l'établissement de [Localité 6], s'est vue proposer par courrier en date du 12 juillet 2019, conformément à l'article L.1233-4 du code du travail, une offre de reclassement consistant en un poste à [Localité 5] dans le département de l'Aveyron. Ce poste proposé implique nécessairement que l'entreprise dispose soit d'un autre établissement à Onet le Château, soit appartient à un groupe au vu des dispositions du périmètre de reclassement du texte susvisé. Il est à noter qu'aucune pièce de l'employeur ne permet de cerner l'exact périmètre de reclassement applicable à Mme [D]';

selon les écritures convergentes des deux parties, aucun licenciement autre que celui de Mme [D] n'a été notifié par l'employeur';

que selon la base de données INSEE produite au dossier la zone d'emploi 7310 de [Localité 6]-[Localité 4] comprend les établissements de [Localité 6] et de [Localité 4]';

la lettre de licenciement énonce «' nous faisons suite à nos différents échanges antérieurs tant verbaux qu'écrits, et plus particulièrement à notre dernier entretien en date du 2 septembre 2019 avec remise d'un dossier de CSP. Comme nous vous l'avons exposé, les mauvais résultats de la société au 31 mars 2019, nouvelle perte de 65 000 euros environ exigent une importante réorganisation nécessaire pour assurer la compétitivité de l'entreprise. Cela implique notamment la fermeture de l'agence de [Localité 6] et la suppression prochaine de votre poste. Nous vous avons donc proposé un poste à temps complet de magasinière à Onet le Château (12) dans le cadre d'une offre de reclassement conformément à l'article L.1233-4 du code du travail (même statut, ancienneté et salaire entièrement conservés). Vous disposiez d'un délai légal d'un mois à compter de la réception de la proposition soit le 18 juillet 2019 pour vous déterminer sur celle-ci afin d'éviter une rupture de contrat pour motif économique. Vous avez décliné cette proposition par courrier reçu en date du 22 juillet 2019...'»';


Attendu que les règles relatives à l'ordre des licenciements ne s'applique que si l'employeur doit opérer un choix parmi les salariés à licencier';


Que tel n'est pas le cas lorsque le licenciement résulte d'un refus d'une proposition de modification du contrat de travail qui ne concernait qu'un seul salarié';


Attendu que tel est le cas de l'espèce, l'employeur n'ayant donc pas à appliquer les critères d'ordre de licenciement';


Attendu que la salariée sera donc déboutée de sa demande de ce chef, le jugement déféré devant être confirmé sur ce point';


Sur le licenciement


Sur la lettre de licenciement


Attendu que conformément à l'article L.1233-16 du code du travail🏛 la lettre de licenciement comporte l'énoncé des motifs économiques invoqués par l'employeur';


Que les faits énoncés doivent être précis et vérifiables';


Attendu que dans le cas d'espèce l'employeur a ciblé les difficultés économiques par une perte de 65 000 euros exigeant une réorganisation nécessaire pour la sauvegarde de sa compétitivité';


Que ces faits sont suffisamment précis et matériellement vérifiables';


Sur la réalité du motif économique


Attendu que l'article L. 1233-3 du code travail dispose':


«'Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat travail, consécutives notamment :


1°) à des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ses difficultés. Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente au moins égale à':

a) un trimestre pour une entreprise de moins de 11 salariés';

b) deux trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins 11 salariés et de moins de 50 salariés';

c) trois trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins 50 salariés et de moins de 300 salariés';

d) quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de 300 salariés et plus';


2°) à des mutations technologiques ;


3°) à une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité';


4°) à la cessation d'activité de l'entreprise.


La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat travail s'apprécie au niveau de l'entreprise.

Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le plan national, sauf fraude.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par l'entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L.233-1, aux I et II de l'article L.233-3 et à l'article L.233-16 du code du commerce🏛.

Le secteur d'activité permettant d'apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée ainsi que les réseaux et modes de distribution se rapportant à un même marché'»';


Attendu qu'il résulte de tant de la lettre de licenciement que des écritures des parties que le motif économique du licenciement de Mme [D] réside dans la réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité';


Attendu que l'employeur ne conteste nullement dans ses écritures que le licenciement opéré est destiné à parer aux difficultés rencontrées par l'entreprise';

Attendu qu'aucune des parties ne conteste que la SAS Orthograu Technologies dispose, sur l'ensemble du territoire national, de plusieurs établissements ';


Attendu que la cour doit donc, conformément au texte susvisé, analyser la nécessité de sauvegarder la compétitivité de la SAS Orthograu Technologies dans la mesure où l'ensemble des établissements se situent dans le même secteur d'activités, soit la commercialisation d'articles médicaux';


Attendu que toute réorganisation de l'entreprise constitue un motif de licenciement si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe dont elle relève en prévenant les difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l'emploi';


Attendu que l'employeur fait état que la SAS Orthograu Technologies doit faire face à une aggravation de sa situation économique, se caractérisant par les mauvais résultats de la société';


Attendu que la SAS Orthograu Technologies produit au dossier notamment les éléments suivants :


un document info-greffe mentionnant les éléments suivants':


Chiffre d'affaires


Décembre 2015': 1 505 066


Décembre 2016': 1 633 687


Décembre 2017': 1 234 978


Mars 2019': 1 268 662


Résultat


Décembre 2015': 111 066


Décembre 2016': -19 983


Décembre 2017': -62 542


Mars 2019': -65 221


Un tableau récapitulant le chiffre d'affaire du magasin de [Localité 6]. Cependant ce document est une seule production de l'employeur';

un document signé du cabinet d'expertise comptable en date du 4 juillet 2019 indiquant que le chiffre d'affaire de la SAS Orthograu technologies est de 1 268 662 et le résultat net comptable de -65 221';

un document du même cabinet d'expertise comptable en date du 31 mars 2020 faisant état d'une analyse sur la nécessité de la fermeture de l'établissement de [Localité 6]';


Attendu que les moyens invoqués à l'appui d'une légèreté blâmable de l'employeur sont inopérants, les pièces produites par la salariée sur ce point ne démontrant pas ladite légèreté';


Qu'en effet, le courriel de Solocal n'est en rien explicite et aucune pièce ne vient confirmer les agissements de l'employeur quant à l'établissement de [Localité 6], la centralisation des commandes ne pouvant s'analyser comme une légèreté blâmable';


Attendu que compte tenu de ces éléments, les difficultés économiques caractérisées par une baisse du chiffre d'affaires sur plusieurs années et des résultats en chute depuis 2016 ont justifié la réorganisation de l'entreprise en vue de sauvegarder sa compétitivité';


Sur le reclassement


Attendu que conformément à l'article L. 1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel';


Que le reclassement s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'occupe le salarié ou un emploi équivalent';


Qu'à défaut, sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi de catégorie inférieure';


Attendu que l'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tous moyens une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés';


Que ces offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises';


Attendu que la salariée a reçu le 12 juillet 2019 une offre de reclassement libellée comme suit «'un poste de magasinière à Onet le Château (12) avec reprise de votre ancienneté et au même niveau de rémunération'»';


Attendu que cette offre ne mentionne nullement le nom de l'entreprise et son activité, la société Orthograu Technologies, au vu du document info-greffe ne comportant pas d'établissement en ce lieu';


Que dans ses écritures l'employeur indique qu'il s'agit d'un établissement appartenant au groupe Euro-Prisme, et admet appartenir à ce groupe, sans pour autant justifier de recherches au sein de ce groupe, dans les limites fixées par l'article susvisé';


Attendu que cette offre est également taisante sur l'adresse de l'entreprise, son activité, la classification du poste, la seule mention «'au même niveau de rémunération'» étant très insuffisante pour permettre à la salariée de répondre valablement à cette offre ;


Attendu que l'employeur produit au dossier 3 courriers adressés à des entreprises extérieures toutes datées du 2 juillet 2019 dont seulement deux ont adressé une réponse négative';


Attendu que dans ces conditions l'employeur n'a pas accompli avec la loyauté nécessaire les recherches de reclassement, se contenant d'une offre de reclassement imprécise et formelle';


Attendu que faute pour l'employeur d'avoir accompli des recherches loyales et sérieuses de reclassement, le licenciement de la salariée sera jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse';


Que le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point';


Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse


Attendu qu'en application de l'article L. 1235-3 du code du travail🏛,'si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis';


Que si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie à Mme [D] une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau ci-dessous':


Ancienneté du salarié dans l'entreprise

(en années complètes)


Indemnité minimale

(en mois de salaire brut)


Indemnité maximale

(en mois de salaire brut)


30 et au delà


3


20


Attendu que compte tenu des pièces personnelles et sociales présentes au dossier et des conditions de la rupture du contrat de travail il y a lieu d'allouer à Mme [D], qui avait une ancienneté de 33 ans, la somme de 40 000 euros de dommages et intérêts de ce chef';


Attendu cependant qu'aucun élément ne permet de caractériser que le licenciement de la salarié a été brutal et vexatoire, la salariée devant être déboutée de sa demande de dommages et intérêts de ce chef';


Que le jugement déféré sera confirmé sur ce point';


Sur les demandes accessoires


Attendu que l'employeur qui succombe, doit supporter les dépens de première instance et d'appel';


Attendu qu'il apparaît équitable d'allouer à Mme [D] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';



PAR CES MOTIFS


La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort


INFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Tarbes en date du 22 mars 2021 sauf en ce qui concerne les demandes de dommages et intérêts pour non respect des critères d'ordre de licenciement'et pour licenciement brutal et vexatoire ;


Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,


DIT que le licenciement de Mme [Y] [D] est dépourvu de cause réelle et sérieuse';


CONDAMNE La SAS Orthograu Technologies à payer à Mme [Y] [D] le somme de 40 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse';


CONDAMNE la SAS Orthograu Technologies aux entiers dépens et à payer à Mme [Y] [D] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.


Arrêt signé par Madame CAUTRES-LACHAUD, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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