Jurisprudence : CE 2/6 SSR, 25-04-1990, n° 89678

CE 2/6 SSR, 25-04-1990, n° 89678

A7036AQN

Référence

CE 2/6 SSR, 25-04-1990, n° 89678. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/966570-ce-26-ssr-25041990-n-89678
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CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 89678

MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI
contre
Consorts Takla

Lecture du 25 Avril 1990

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Vu le recours du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI enregistré le 22 juillet 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1°) annule le jugement du 9 avril 1987 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé ses décisions du 13 novembre 1985, maintenues le 11 mars 1986, constatant l'irrecevabilité des demandes de naturalisation présentées par M. Ibrahim Takla et par Mlle Katia Takla ainsi que la demande de réintégration dans la nationalité française présentée par Mme Dahbia Takla, 2°) rejette les demandes présentées par les consorts Takla devant le tribunal administratif de Paris,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la nationalité et notamment ses articles 61 et 78 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu : - le rapport de M. Fratacci, Auditeur, - les observations de Me Choucroy, avocat des Consorts Takla, - les conclusions de M. Faugère, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 61 du code de la nationalité française : "nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation" ; qu'il résulte de ces dispositions que la demande de naturalisation et de réintégration n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France de manière stable le centre de ses intérêts ;
Sur la demande de naturalisation de M. Takla :
Considérant qu'il n'est pas contesté qu'à la date de la décision par laquelle le ministre a déclaré irrecevable la demande de naturalisation de M. Takla, celui-ci, s'il se rendait régulièrement à Paris où habite sa famille, résidait en Arabie Saoudite où il exerçait l'activité professionnelle dont il tire ses revenus ; qu'ainsi le MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris l'a regardé comme ayant en France le centre de ses intérêts et a, pour ce motif, annulé la décision déclarant irrecevable la demande de naturalisation de M. Takla ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par M. Takla devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'aux termes de l'article 78 du même code : "est assimilé à la résidence en France lorsque cette résidence constitue une condition de l'acquisition de la nationalité française : 1) Le séjour hors de France d'un étranger qui exerce une activité professionnelle publique ou privée pour le compte de l'Etat français ou d'un organisme dont l'activité présente un intérêt particulier pour l'économie ou la culture française (..)" ;
Considérant que si M. Takla est employé en qualité de "directeur général exécutif" par une société saoudienne qui importe des produits français, cette circonstance n'est pas, en l'espèce, de nature à permettre de regarder cet organisme comme présentant un intérêt particulier pour l'économie française ; que, par suite, le ministre était tenu de déclarer irrecevable, comme il l'a fait, la demande de naturalisation de l'intéressé ;
Sur la demande de réintégration de Mme Takla :
Considérant que si Mme Takla a résidé et travaillé en France avant son séjour au Liban où elle s'est mariée et où, de 1967 à 1974 sont nés ses enfants, et si elle vit depuis 1975 en France avec ces derniers, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'exerce aucune activité propre et tire toutes ses ressources de l'activité de son mari qui vit et travaille en Arabie Saoudite ; qu'ainsi la requérante ne satisfaisait pas, à la date de la décision attaquée, aux conditions de résidence définies par l'article 61 du code de la nationalité ; que par suite le ministre qui était tenu de déclarer sa demande irrecevable ;
Sur la demande de naturalisation de Mlle Takla :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle Takla, qui réside depuis 1975 en France où elle poursuit des études supérieures, n'y exerce aucune activité salariée et que la totalité de ses ressources est assurée par son père demeurant à l'étranger ; qu'ainsi elle ne peut être regardée comme satisfaisant à la condition de résidence définie par l'article 61 précité ; que, par suite, le ministre était également tenu de déclarer irrecevable sa demande de naturalisation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé ses décisions rejetant comme irrecevables la demande de réintégration dans la nationalité française présentée par Mme Dahbia Takla et les demandes de naturalisation présentées par M. Ibrahim et Mlle Katia Takla ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 9 avril 1987 est annulé.
Article 2 : Les demandes présentées par les consorts Takla devant le tribunal administratif sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle et aux consorts Takla.

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