CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 79684
André TRIVIDIC
Lecture du 24 Octobre 1990
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 23 juin 1986 et 17 octobre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. André TRIVIDIC, demeurant 20, rue René Quilleric à Plouhinec (29149) ; M. TRIVIDIC demande que le Conseil d'Etat : 1°) annule le jugement du 9 avril 1986 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Plouhinec en date du 13 octobre 1983 délivrant un permis de construire à M. Jacques Trividic, de l'arrêté du maire de Plouhinec, en date du 17 août 1984 délivrant un nouveau permis de construire au même pétitionnaire et du permis de construire tacite obtenu par M. Jacques Trividic à compter du 4 février 1985 ; 2°) annule pour excès de pouvoir ces décisions,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 ;
Vu la loi n° 89-663 du 22 juillet 1989 ;
Vu le décret n° 83-051 du 29 septembre 1989 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu : - le rapport de M. Aguila, Auditeur, - les observations de la SCP Rouvière, Lepitre, Boutet, avocat de M. André TRIVIDIC, - les conclusions de M. Hubert, Commissaire du gouvernement ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article R.421-1 du code de l'urbanisme :
Considérant qu'aux termes de l'article R.421-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur aux dates des décisions attaquées : "La demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur ce terrain ... - La demande précise l'identité du demandeur, l'identité et la qualité de l'auteur du projet ... l'identité de son propriétaire au cas ou celui-ci n'est pas l'auteur de la demande ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par acte du 10 janvier 1981, M. Jacques Trividic, bénéficiaire des permis de construire litigieux, avait donné mandat à M. Albert Trividic pour le représenter à l'occasion de toutes les démarches relatives auxdits permis ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que M. Albert Trividic ne détenait aucun mandat manque en fait ; qu'en outre, dans les circonstances de l'espèce, le fait que le mandataire ait cru devoir signer du nom du mandant sur l'une des demandes de permis est sans influence sur la régularité de cette demande ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article R.421-2 du code de l'urbanisme :
Considérant qu'aux termes de l'article R.421-2 du code de l'urbanisme : "Le dossier joint à la demande de permis de construire est constitué par le plan de situation du terrain, le plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les tros dimensions, ainsi que les plans des façades ... - Lorsque la demande concerne la construction de bâtiments ou d'ouvrages devant être desservis par des équipements publics, le plan de masse visé à l'alinéa précédent indique le tracé de ces équipements et les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages y seront raccordés. A défaut d'équipements publics, le plan de masse indique les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement" ; Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire présentée le 22 septembre 1983 par M. Jacques Trividic était accompagnée de divers plans cotés dans les trois dimensions qui permettaient à l'administration de déterminer, notamment, la hauteur de la construction projetée ; Considérant, d'autre part, que si le plan de masse joint à ses demandes par M. Jacques Trividic n'indiquait pas le tracé des équipements publics devant desservir la construction ni les modalités de son raccordement à ces équipements, il ressort des pièces du dossier, et notamment de la mention, figurant sur le permis délivré le 17 août 1984, selon laquelle l'extension du réseau d'eau potable serait à la charge du demandeur, que cette circonstance n'a pas été de nature à empêcher l'autorité administrative d'apprécier exactement la situation de la construction projetée au regard des équipements publics devant la desservir ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article L.421-5 du code de l'urbanisme :
Considérant qu'aux termes de l'article L.421-5 du code de l'urbanisme : "Lorsque, compte tenu de la destination de la construction projetée, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte de ladite construction, le permis ne peut être accordé si l'autorité qui le délivre n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public lesdits travaux doivent être exécutés" ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la réalisation de la construction projetée nécessitait l'exécution, par une collectivité publique ou un concessionnaire de service public, de travaux portant sur les réseaux publics susmentionnés ; que, dès lors, le moyen tiré de la violation de l'article précité ne peut être accueilli ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article R.111-14-2 du code de l'urbanisme :
Considérant qu'aux termes de l'article R.111-14-2 du code de l'urbanisme : "Le permis de construire est délivré dans le respect des préoccupations d'environnement définis à l'article 1er de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature." ;
Considérant que la circonstance que la construction litigieuse, implantée à une vingtaine de mètres de la façade sud de la maison du requérant, modifie les vues dont ce dernier bénéficiait ne constitue pas une atteinte aux préoccupations d'environnement mentionnées par le texte précité ; que le moyen susanalysé ne peut, dès lors, qu'être écarté ;
Sur le moyen tiré de ce que le permis tacite acquis le 4 février 1985 méconnaîtrait les dispositions de l'article L.111-1-2 du code de l'urbanisme : Considérant, en premier lieu, qu'ainsi que l'a décidé le tribunal administratif dont le jugement n'est pas contesté sur ce point, M. Jacques Trividic a obtenu le 17 août 1984 un nouveau permis de construire qui s'est substitué à celui que le maire de Plouhinec lui avait accordé le 13 octobre 1983 ; que si l'intéressé a présenté une nouvelle demande de permis le 26 octobre 1984, il ressort des pièces du dossier que cette demande ne concernait que des modifications minimes apportées au projet approuvé le 17 août 1984 ; que, par suite, contrairement à ce que soutient le requérant, le permis tacitement acquis par M. Jacques Trividic le 4 février 1985 à la suite de sa demande susmentionnée du 26 octobre 1984 n'était pas un nouveau permis, mais un permis modificatif ; Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le permis délivré le 17 août 1984 à M. Jacques Trividic n'est pas entaché d'illégalité ; Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu du dernier alinéa de l'article 38 de la loi du 7 janvier 1983 et de l'article 1er du décret du 23 septembre 1983, les dispositions de l'article L.111-1-2 du code de l'urbanisme, relatives à la limitation de la construction "en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune", sont entrées en vigueur le 1er octobre 1984, soit avant la date à laquelle M. Jacques Trividic a obtenu le permis tacite susmentionné mais postérieurement à la délivrance du permis du 17 août 1984 ; qu'à supposer même que lesdites dispositions eussent pu faire obstacle à la construction d'une maison sur le terrain de M. Jacques Trividic, l'autorité administrative n'aurait pu légalement, sans méconnaître les droits que l'intéressé tenait du permis de construire délivré le 17 août 1984, lui refuser pour ce motif l'autorisation d'apporter au projet des modifications mineures qui n'auraient pas porté aux dispositions de l'article L.111-1-2 du code de l'urbanisme une atteinte excédant celle qui résultait du permis du 17 août 1984 ; que, dès lors, le moyen tiré de la violation de ces dispositions, ne peut être accueilli ;
Sur le moyen tiré d'un détournement de pouvoir :
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que le permis modificatif tacitement acquis le 4 février 1985 portait sur des modifications déjà réalisées par le demandeur ; qu'une telle opération de régularisation n'entache pas par elle-même la décision litigieuse d'un détournement de pouvoir ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. André TRIVIDIC n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête présentée par M. André TRIVIDIC est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. André TRIVIDIC, à Mme Albertine Trividic, Mme Michelle Trividic, Mme Nicole Trividic, M. Jean-Jacques Trividic, et Mme Gisèle Trividic, ayant-droit de M. Jacques Trividic et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer.