CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 68461
Commune de Crolles
Lecture du 06 Mars 1989
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 9 mai et 9 septembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE CROLLES (Isère) et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule le jugement en date du 1er mars 1985 par lequel le tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à rembourser à la société civile immobilière Briselierre la somme de 36 600 F qu'elle avait payée à la commune pour les raccordements de son immeuble ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu : - le rapport de M. Aberkane, Conseiller d'Etat, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de la COMMUNE DE CROLLES et de Me Boullez, avocat de la société civile immobilière Brise Lierre, - les conclusions de M. E. Guillaume, Commissaire du gouvernement ; Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme : "Dans les communes où est instituée la taxe locale d'équipement ... aucune contribution aux dépenses d'équipements publics ne peut être obtenue des constructeurs, notamment sous la forme de participation financière, de fonds de concours ou de réalisation de travaux, à l'exception : ... 3° de la participation pour raccordement à l'égout prévue à l'article L 35-4 du code de la santé publique, ... 5° du financement des branchements ; ... Les contributions qui seraient accordées en violation des dispositions qui précèdent seraient réputées sans cause ; les sommes versées ou celles qui correspondent au coût des prestations fournies seraient sujettes à répétition." ;
Considérant que le conseil municipal de Crolles (Isère), commune dans laquelle est instituée la taxe locale d'équipement, a, par une délibération du 15 décembre 1978, décidé "de créer dans la commune un droit de branchement global aux différents réseaux d'un montant de 10 000 F par lot", ce droit se décomposant de la façon suivante : "eau : 3 000 F, assainissement : 4 000 F, autres réseaux : 3 000 F ..." ; que ce droit ne saurait être regardé, même dans sa partie consacrée à l'assainissement, comme constituant la participation prévue à l'article L. 35-4 du code de la santé publique, dès lors qu'il est établi que le conseil municipal n'a pas entendu faire application de cet article, dont il n'a d'ailleurs pas entendu respecter les conditions, notamment celle relative à la fixation du montant de la redevance par référence au coût d'une installation d'évacuation ou d'épuration individuelle ; qu'il ne correspond donc pas à l'exception prévue au 3° de l'article L.332-6 du code de l'urbanisme, ni d'ailleurs à aucune autre de celles prévues à cet article ; que, par suite, il a été institué illégalement et ne pouvait servir de base aux versements réclamés à la société civile immobilière Brise Lierre ;
Considérant que le 5° de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme, relatif au financement des branchements, ne pouvait davantage permettre à la commune d'exiger aucun versement, dès lors que le permis de construire accordé le 15 janvier 1979 à la société obligeait celle-ci à effectuer elle-même et à ses frais les travaux de branchement dont s'agit ;
Considérant que la société civile immobilière Brise Lierre a versé à la commune, à titre de contribution aux dépenses d'équipements publics, la somme de 36 600 F ; que la circonstance que la société s'était engagée à verser cette somme par une convention du 10 janvier 1979, confirmant une précédente convention du 21 novembre 1978, ne fait pas obstacle à ce que son paiement soit réputé sans cause en vertu des dispositions précitées de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme ; que la commune de Crolles n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à rembourser cette somme à la société civile immobilière Brise Lierre ;
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE CROLLES est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE CROLLES, à la société civile immobilière Brise Lierre et au ministre d'Etat, ministre de l'équipement et du logement.