CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 54865
Ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale
contre
Benedetti
Lecture du 25 Juillet 1985
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Recours du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale tendant : 1° à l'annulation du jugement du 5 octobre 1983 du tribunal administratif de Paris ayant, sur la demande de M. Benedetti, annulé la décision en date du 8 mars 1982 du secrétaire d'Etat chargé des immigrés constatant l'irrecevabilité de la demande de naturalisation que M. Benedetti lui avait présentée ; 2° au rejet de la demande présentée par M. Benedetti devant le T.A. ;
Vu le code de la nationalité ; le code des tribunaux administratifs ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 62 du code de la nationalité française : « Sous réserve des exceptions prévues aux articles 63 et 64, la naturalisation ne peut être accordée qu'à l'étranger justifiant d'une résidence habituelle en France ou dans les territoires ou pays pour lesquels l'attribution ou l'acquisition de la nationalité française est, ou était lors de sa résidence, régie par des dispositions spéciales, pendant les cinq années qui précèdent le dépôt de sa demande » ; Cons. qu'il ressort des pièces du dossier que M. Benedetti, qui a présenté le 2 octobre 1981 une demande en vue d'être naturalisé français, est né de parents italiens en 1959 à Port-Vila, dans l'archipel des Nouvelles-Hébrides, où il a résidé jusqu'en 1964 ; qu'il s'est ensuite installé avec ses parents en Nouvelle-Calédonie où il a séjourné de 1965 à 1977 ; qu'il a quitté ce territoire à sa majorité, en décembre 1977, et s'est rendu avec ses parents en Italie, où il a tout d'abord suivi des cours afin d'obtenir des diplômes de programmateur et d'opérateur sur machine automatique, puis a travaillé pendant plus de deux ans en qualité d'ouvrier ; qu'il est ensuite retourné en Nouvelle-Calédonie en septembre 1980 ; qu'en raison de son séjour de près de trois années en Italie, entre décembre 1977 et septembre 1980, durant lequel le centre de ses attaches familiales et de ses occupations professionnelles se trouvait en Italie, il ne peut être regardé comme remplissant la condition de résidence habituelle imposée par les dispositions précitées de l'article 62 du code de la nationalité française ; Cons. qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce que M. Benedetti aurait satisfait à la condition de résidence habituelle imposée par les dispositions de l'article 62 du code pour annuler la décision en date du 8 mars 1982 par laquelle le secrétaire d'Etat chargé des immigrés a constaté l'irrecevabilité de la demande de naturalisation que l'intéressé avait présentée ; Cons. toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Benedetti devant le tribunal administratif de Paris. Cons., en premier lieu, que M. Benedetti qui a déposé une demande de naturalisation, ne saurait utilement se prévaloir, pour critiquer la décision constatant l'irrecevabilité de cette demande, des dispositions de l'article 44 du code de la nationalité relatives à l'acquisition de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France ; Cons., en second lieu, que M. Benedetti n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été dispensé de la condition de stage imposée par l'article 62 du code de la nationalité française, en application des dispositions de l'article 3 de l'ordonnance n° 80-703 du 5 septembre 1980 relative aux mesures rendues nécessaires, en matière de nationalité et d'élections, par la déclaration de l'indépendance des Nouvelles-Hébrides, dès lors qu'il a quitté les Nouvelles-Hébrides avant le 30 juillet 1980 ; Cons. enfin que si, aux termes de l'article 78 du code de la nationalité française, « est assimilé à la résidence en France lorsque cette résidence constitue une condition de l'acquisition de nationalité française : (...) 2°. Le séjour dans les pays en union douanière avec la France qui sont désignés par décret », aucun décret ne désigne l'Italie comme étant l'un des pays visés par cette disposition ; que M. Benedetti ne peut donc prétendre que son séjour en Italie devrait être assimilé à une résidence en France en vertu de l'article 78 du code de la nationalité française ; Cons. qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du secrétaire d'Etat chargé des immigrés, en date du 8 mars 1982 constatant l'irrecevabilité de la demande de naturalisation présentée par M. Benedetti ; (annulation du jugement, rejet de la demande).