Jurisprudence : CE Contentieux, 05-06-1985, n° 43253

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 43253

Bigo

Lecture du 05 Juin 1985

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Requête, de M. Bigo, tendant à : 1° l'annulation du jugement du tribunal administratif de Lille, du 16 mars 1982 en tant que, par ce jugement, il a rejeté sa demande en réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de 1973, 1974, et 1975, ainsi qu'à la majoration exceptionnelle établie au titre de 1973 et 1975 et à la taxe exceptionnelle sur les profits immobiliers établies au titre de 1973 ; 2° la décharge ou la réduction des impositions dont s'agit ;
Vu le code général des impôts et notamment les articles 31 1649-quinquies-A ; la loi n° 74-644 du 16 juillet 1974 notamment ses articles 3 et 5 ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition : En ce qui concerne les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, à la majoration exceptionnelle et la taxe exceptionnelle sur les profits immobiliers établies au titre de l'année 1973 :
Considérant qu'aux termes du 5 ajouté à l'article 1649 quinquies A du code général des impôts par l'article 67 de la loi du 30 décembre 1975 : « Quand elle a procédé à une vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu, l'administration doit, même en l'absence de redressement, porter les résultats à la connaissance du contribuable. Elle ne peut plus procéder à des redressements pour la même période et le même impôt, à moins que le contribuable n'ait fourni à l'administration des éléments incomplets ou inexacts » ; Cons. qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que les impositions dont s'agit ont donné lieu, en temps utile, à une réclamation au directeur des services fiscaux du département du Nord, rejetée par celui-ci le 6 décembre 1978 ; que, dans sa demande au tribunal administratif de Lille, enregistrée le 27 février 1979, dans le délai du recours contentieux, M. Bigo faisait valoir que ces impositions avaient été établies en méconnaissance des dispositions précitées du 5 de l'article 1649 quinquies A du code général des impôts ; que, par suite, contrairement à ce que soutient dans ses observations en défense le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget, M. Bigo est recevable à présenter à nouveau ce moyen en appel ; Cons. qu'il résulte de l'instruction que, par un avis de vérification du 1er avril 1976, le service de recherches et vérifications de comptabilités du département du Nord a informé M. Bigo, notaire, qu'un inspecteur central se présenterait à son étude, le 3 avril de la même année, pour « vérifier (les) déclarations fiscales afférentes aux périodes susceptibles d'être examinées et relatives aux ... impôts relevant du service des contributions directes relatives aux années 1972, 1973, 1974 et 1975 » ; que cet avis invitait M. Bigo à tenir à la disposition de l'inspecteur « les divers documents comptables ... en particulier les grands livres, livres journaux, copies de lettres, inventaires, relevés de comptes bancaires ou C.C.P. » ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, les opérations de contrôle ainsi annoncées ne se sont pas limitées à un examen sur place des documents se rattachant à l'activité professionnelle de M. Bigo, mais ont porté également sur les revenus de la catégorie des traitements et salaires, sur les revenus fonciers et sur les revenus de capitaux mobiliers, lesquels ont donné lieu à des redressements ; qu'ainsi, comme l'a d'ailleurs expressément reconnu le directeur des services fiscaux du département du Nord, dans des observations déposées le 27 février 1978 devant le tribunal administratif de Lille, les opérations dont s'agit ont constitué une vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble de M. Bigo ; que, par suite, dès lors qu'une notification de redressement consécutive à ces opérations, portant notamment sur l'année 1973, avait été reçue par M. Bigo le 31 mai 1976, et qu'il n'est pas allégué que celui-ci aurait fourni des éléments incomplets ou inexacts, l'administration n'était pas en droit, comme elle l'a fait par la notification de redressements du 22 août 1977, dont sont issues les impositions complémentaires contestées, de procéder à de nouveaux rehaussements, s'agissant du même impôt, ou de la majoration exceptionnelle à cet impôt, ou d'une taxe que le législateur a entendu y rattacher, et de la même année par rapport à ceux qui étaient visés dans la notification de redressement du 31 mai 1976 ; que, par voie de conséquence, les impositions dont s'agit ont été établies sur une procédure irrégulière ; que, dès lors, M. Bigo est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a refusé d'en prononcer la décharge : En ce qui concerne les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle établies au titre respectivement, des années 1974 et 1975 et de l'année 1975 :
Sur la procédure d'imposition : Cons. qu'il ressort des termes mêmes de la demande introductive d'instance formée par M. Bigo, le 4 août 1977, devant le tribunal administratif de Lille que l'intéressé s'est borné à contester le bien-fondé des compléments d'imposition auxquels il a été assujetti au titre des années 1974 et 1975 par le motif que les dépenses dont l'administration a refusé d'admettre le caractère de charges déductibles, pour le calcul de ses revenus fonciers, n'avaient pas le caractère de « frais correspondant à des travaux de construction de reconstruction ou d'agrandissement » au sens de l'article 31 du code général des impôts ; qu'il a, ansi, limité sa contestation au bien-fondé de l'imposition ; que c'est seulement dans un mémoire déposé le 2 mai 1978, soit après l'expiration du délai de recours contentieux, qu'il a soulevé un moyen relatif à la procédure d'imposition ; que, fondé sur une cause juridique distincte de celle sur laquelle reposait la demande initiale, ce moyen était irrecevable ; que, si le contribuable fait également valoir devant le Conseil d'Etat que les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 1974 et 1975 ont été établies en méconnaissance des dispositions précitées du 5 de l'article 1649 quinquies A du code général des impôts, ce moyen, qui se rattache à la procédure d'imposition, est irrecevable, dès lors que, comme il vient d'être dit, aucun moyen relevant de cette cause juridique n'avait été soulevé en temps utile devant le tribunal administratif ;
Sur le bien-fondé des impositions établies au titre des années 1974 et 1975 : Cons. que l'administration a refusé d'admettre comme charges déductibles, pour le calcul du revenu net foncier de M. Bigo, des dépenses correspondant à des travaux que celui-ci a fait exécuter dans une maison rurale ancienne à Marcq-en-Baroeul ; Cons. qu'aux termes de l'article 31 du code général des impôts : « I. Les charges de la propriété déductible pour la détermination du revenu net comprennent : 1. Pour les propriétés urbaines : a) les dépenses de réparation et d'entretien ... ; b) les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation ... à l'exclusion des frais corres- pondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement » ; qu'en vertu du 2° du même article, ces dispositions s'appliquent aux propriétés rurales ; Cons. que doivent être regardés comme des travaux de construction ou de reconstruction ceux qui comportent la création de nouveaux locaux d'habitation, notamment dans des locaux antérieurement affectés à un autre usage, ceux qui ont pour effet d'apporter une modification importante au gros euvre des locaux d'habitation existants, ainsi que les travaux d'aménagement internes qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction ; Cons. qu'il résulte de l'instruction que M. Bigo a fait réaliser, au cours des années 1974 et 1975, dans la maison dont s'agit, donnée en location, des travaux qui, outre le percement de deux petites fenêtres, sur un pignon au Nord ont, notamment, comporté la transformation en pièces d'habitation d'un grenier situé au-dessus du rez-de-chaussée ; que ces travaux, alors même qu'à raison de l'abaissement des plafonds de pièces du rez-de-chaussée ainsi rendues partiellement inutilisables, la surface habitable de la maison n'aurait pas été accrue s'analysent en travaux de reconstruction ; que les dépenses correspondantes ne sont, dès lors, pas déductibles pour la détermination du revenu foncier en vertu des dispositions précitées de l'article 31 du code général des impôts ; que, si ont été également réalisés divers travaux de simple modernisation de l'immeuble, ceux-ci ne sont pas dissociables des travaux de reconstruction, ce qui fait obstacle à leur déduction ; Cons. qu'il résulte de ce qui précède que M. Bigo n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle auxquelles il a été assujetti au titre, respectivement, des années 1974 et 1975, et de l'année 1975 ; (décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle auxquelles il a été assujetti, au titre de l'année 1973, ainsi que des pénalités correspondantes ; réformation du jugement en ce sens).

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