Jurisprudence : TA Paris, du 09-03-2023, n° 2114692

TA Paris, du 09-03-2023, n° 2114692

A97159HB

Référence

TA Paris, du 09-03-2023, n° 2114692. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/94207171-ta-paris-du-09032023-n-2114692
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Références

Tribunal Administratif de Paris

N° 2114692

6e Section
lecture du 09 mars 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 8 juillet 2021, 13 et 15 juillet 2022, Mme D E, représentée par Me Gernez, demande au tribunal :

1°) d'annuler le compte-rendu de l'entretien professionnel au titre de l'année 2020, établi le 29 mars 2021 ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de retirer ce compte-rendu de son dossier administratif, dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Elle soutient que la décision attaquée :

- est entachée d'incompétence, dès lors que la personne ayant établi le compte-rendu d'entretien n'était pas son supérieur hiérarchique direct lors de l'année d'évaluation, en méconnaissance des dispositions de l'article 2 du décret n°2010-888 du 28 juillet 2010🏛 et de l'article 55 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984🏛 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors que ses évaluations précédentes démontraient sa qualité professionnelle, que la baisse du nombre de dossiers traités par elle en 2020 résulte seulement du faible nombre de dossiers transmis par sa hiérarchie pour lui permettre d'atteindre son quota et du changement de ses fonctions la conduisant à ne réaliser que des mémoires en incompétence, et que l'agent qui a réalisé l'entretien ne pouvait se prononcer sur sa manière de servir en 2020 dès lors qu'il n'était arrivé qu'au début de l'année suivante.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 3 juin et le 22 août 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme E ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983🏛 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984🏛 ;

- le décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010🏛 ;

- l'arrêté du 11 janvier 2013 relatif à l'entretien professionnel de certains personnels du ministère de l'intérieur ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A,

- les conclusions de M. Abrahami, rapporteur public,

- et les observations de Mme E et de M. B, représentant le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D E, attachée principale de l'Etat, était affectée au sein du bureau du contentieux statutaire et de la protection juridique des fonctionnaires depuis le 23 mai 2005. Le 29 mars 2021, elle a été reçue en entretien professionnel par la nouvelle cheffe du bureau afin de lui présenter son évaluation au titre de l'année 2020. Sa notation lui a été notifiée le 19 mai 2021. Par la présente requête, Mme E sollicite l'annulation de ce compte-rendu d'entretien professionnel.

2. Aux termes de l'article 17 de la loi du 13 juillet 1983🏛 portant droits et obligations des fonctionnaires : " La valeur professionnelle des fonctionnaires fait l'objet d'une appréciation qui se fonde sur une évaluation individuelle donnant lieu à un compte rendu qui leur est communiqué. " L'article 55 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat dispose : " L'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires se fonde sur un entretien professionnel annuel conduit par le supérieur hiérarchique direct, qui donne lieu à un compte rendu. Lors de cet entretien professionnel annuel, les fonctionnaires reçoivent une information sur l'ouverture et l'utilisation de leurs droits afférents au compte prévu à l'article 22 quater de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983🏛 précitée. () ". Aux termes de l'article 2 du décret du 28 juillet 2010 : " Le fonctionnaire bénéficie chaque année d'un entretien professionnel qui donne lieu à compte rendu. / Cet entretien est conduit par le supérieur hiérarchique direct. / La date de cet entretien est fixée par le supérieur hiérarchique direct et communiquée au fonctionnaire au moins huit jours à l'avance. ". L'article 3 du même décret dispose : " L'entretien professionnel porte principalement sur : / 1° Les résultats professionnels obtenus par le fonctionnaire eu égard aux objectifs qui lui ont été assignés et aux conditions d'organisation et de fonctionnement du service dont il relève ; () ". L'article 4 du même décret dispose : " Le compte rendu de l'entretien professionnel est établi et signé par le supérieur hiérarchique direct du fonctionnaire. Il comporte une appréciation générale exprimant la valeur professionnelle de ce dernier. / Il est communiqué au fonctionnaire qui le complète, le cas échéant, de ses observations. / Il est visé par l'autorité hiérarchique qui peut formuler, si elle l'estime utile, ses propres observations. / Le compte rendu est notifié au fonctionnaire qui le signe pour attester qu'il en a pris connaissance puis le retourne à l'autorité hiérarchique qui le verse à son dossier. ". Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 11 janvier 2013🏛 relatif à l'entretien professionnel de certains personnels du ministère de l'intérieur : " L'entretien professionnel est un échange entre le supérieur hiérarchique direct et l'agent, qui porte, en cohérence avec la fiche de poste, sur les thèmes suivants : / ' les résultats professionnels obtenus par l'agent dans l'année au regard, d'une part, des objectifs individuels qui lui ont été assignés l'année précédente, en cours d'année ou lors de son affectation et, d'autre part, des conditions d'organisation et de fonctionnement du service dont il relève ; / ' les objectifs assignés à l'agent pour l'année à venir et leurs conditions de réussite ; / ' les acquis de son expérience professionnelle ; / ' le cas échéant, la manière dont il exerce les fonctions d'encadrement qui lui ont été confiées ; / ' ses besoins de formation ; / ' les perspectives d'évolution de l'agent en termes de carrière et de mobilité ; / ' l'appréciation générale sur la valeur professionnelle de l'agent intégrant sa manière de servir. ". L'article 6 du même arrêté dispose : " La valeur professionnelle de l'agent est appréciée en tenant compte, d'une part, des résultats obtenus par rapport aux objectifs assignés initialement ou révisés, le cas échéant, au cours de l'année de référence et, d'autre part, de sa manière de servir évaluée au regard de la qualité de son travail, ses qualités relationnelles et son implication personnelle. ".

3. En premier lieu, Mme E soutient que son compte-rendu d'entretien professionnel est entaché d'un vice de procédure, dès lors que l'entretien n'a pas été mené par son supérieur hiérarchique direct pendant l'année examinée. Toutefois, il résulte des dispositions précitées que l'entretien professionnel est conduit par le supérieur hiérarchique direct de l'agent au jour de l'entretien. Mme E ne conteste pas que Mme C, qui a conduit l'entretien pour l'année 2021, était sa supérieure hiérarchique directe depuis le 1er janvier 2021. Par suite, elle était la seule personne compétente pour procéder à son entretien d'évaluation et à son compte-rendu d'entretien professionnel au titre de l'année 2020. Le moyen tiré du vice de procédure doit, ainsi, être écarté.

4. En deuxième lieu, si Mme E soutient que les appréciations portées sur ses aptitudes personnelles ainsi que ses compétences professionnelles sont moins favorables que celles dont elle avait bénéficié au titre des années précédentes, une telle circonstance est par elle-même sans incidence sur la légalité de sa notation pour l'année 2020. Par suite, ce moyen doit être écarté comme inopérant.

5. En troisième lieu, la notation litigieuse est fondée sur la circonstance, non contestée par Mme E, qu'elle n'avait pas respecté les délais des juridictions pour produire ses mémoires, et qu'elle n'avait produit que 63 mémoires au cours de l'année au lieu des 135 demandés. Si Mme E soutient qu'elle ne disposait pas d'un nombre de dossiers suffisant pour produire cette quantité de mémoires au cours de l'année 2020, il ressort des pièces du dossier qu'elle a, à plusieurs reprises, omis de produire un mémoire en défense dans l'une des affaires qui lui ont été confiées ou qu'elle a rendu des mémoires postérieurement à la clôture de l'instruction, ce qui a conduit sa hiérarchie à lui confier moins d'affaires à traiter. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit, par suite, être écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de Mme E doit être rejetée en toutes ses conclusions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme E est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme D E et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 16 février 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Versol, présidente,

M. Pény, premier conseiller,

M. Doan, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 mars 2023.

Le rapporteur,

R. A

La présidente,

F. Versol La greffière,

A. Cardon

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

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