Vu les procédures suivantes :
I - Par une requête, enregistrée le 4 mai 2022 sous le n° 2200956, et un
mémoire enregistré le 27 janvier 2023, la société à responsabilité limitée
(SARL) Leyorra, représentée par Me L'Hoiry, demande au tribunal :
1°) d'annuler la délibération du 5 mars 2022 par laquelle le conseil
communautaire de la communauté d'agglomération Pays Basque a adopté le
règlement fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement
d'usage de locaux d'habitation pour les locations meublées de courtes durées
et déterminant les compensations, en application des
articles L. 631-7 et
suivants du code de la construction et de l'habitation🏛 ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler cette même délibération en tant qu'elle
concerne la commune de Guéthary ;
3°) et de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Pays Basque une
somme de 1 200 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de
justice administrative.
Elle soutient que :
- la délibération attaquée du 5 mars 2022 a été adoptée à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors qu'elle a été adoptée par un nombre trop élevé de conseillers communautaires, en méconnaissance de l'
article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales🏛 ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 9 la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur dès lors que l'article 4.2 du règlement adopté institue une discrimination en créant un régime spécifique aux locations à destination des étudiants, qu'il n'est pas démontré que la réglementation poursuit l'objectif d'intérêt général de lutte contre la pénurie de logements, qu'il existe des mesures moins contraignantes et qu'enfin, il n'est pas démontré que la réglementation précédente, s'appliquant aux seules personnes physiques, ne constituait pas un frein efficace à la pénurie de logements ;
- elle méconnaît également les dispositions de l'article 10 de cette directive du 12 décembre 2006 dès lors que la réglementation n'apparaît pas proportionnée au regard des critères posés par la Cour de justice de l'Union européenne dans sa décision du 22 septembre 2020, C-724/18, qu'il n'est, en outre, pas démontré qu'il existe une pénurie de logements dans la commune de Guéthary, que la réglementation a une portée générale et ne prend pas en compte les caractéristiques de chaque commune, qu'il n'est pas possible de savoir si le local concerné par la compensation doit être dans le même quartier ou la même commune, que l'article 3.2 du règlement exclut les locaux transformés depuis moins de cinq ans, et que le plan local d'urbanisme de Guéthary restreint la transformation de locaux à usage autre que l'habitation en habitation dans certains secteurs de la ville, rendant la compensation impossible ;
- cette réglementation porte une atteinte démesurée à la libre prestation de service et elle ne satisfait pas davantage l'exigence de clarté et de transparence, s'agissant notamment du lieu où doivent se trouver les locaux pouvant venir compenser le bien loué pour de courtes durées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2023, la communauté
d'agglomération Pays Basque, représentée par Me Gauci, conclut au rejet de la
requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la requérante une somme de 2 500
euros au titre de l'
article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
II - Par une requête enregistrée le 5 mai 2022 sous le n° 2200971, et un
mémoire enregistré le 27 janvier 2023, la société à responsabilité limitée
(SARL) Ceada Goze, représentée par Me L'Hoiry, demande au tribunal :
1°) d'annuler la délibération du 5 mars 2022 par laquelle le conseil
communautaire de la communauté d'agglomération Pays Basque a adopté le
règlement fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement
d'usage de locaux d'habitation pour les locations meublées de courtes durées
et déterminant les compensations en application des
articles L. 631- 7 et
suivants du code de la construction et de l'habitation🏛 ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler cette même délibération en tant qu'elle
concerne la commune d'Anglet ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Pays Basque une
somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative.
Elle soulève les mêmes moyens que ceux développés dans la requête n° 2200956
mais en ce qui concerne précisément la commune d'Anglet.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2023, la communauté
d'agglomération Pays Basque, représentée par Me Gauci, conclut au rejet de la
requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la requérante une somme de 2 500
euros au titre de l'
article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
III - Par une requête enregistrée le 5 mai 2022 sous le n° 2200972, et un
mémoire enregistré le 27 janvier 2023, la société par actions simplifiée (SAS)
Guadalquivir, représentée par Me l'Hoiry, demande au tribunal :
1°) d'annuler la délibération du 5 mars 2022 par laquelle le conseil
communautaire de la communauté d'agglomération Pays Basque a adopté le
règlement fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement
d'usage de locaux d'habitation pour les locations meublées de courtes durées
et déterminant les compensations en application des
articles L. 631- 7 et
suivants du code de la construction et de l'habitation🏛 ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler cette même délibération en tant qu'elle
concerne la commune de Bayonne ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Pays Basque une
somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative.
Elle soulève les mêmes moyens que ceux développés dans la requête n° 2200956,
mais en ce qui concerne plus précisément des biens situés à Bayonne.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2023, la communauté
d'agglomération Pays basque, représentée par Me Gauci, conclut au rejet de la
requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la requérante une somme de 2 500
euros au titre de l'
article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
IV - Par une requête enregistrée le 7 septembre 2022 sous le n° 2202002, la
société à responsabilité limitée (SARL) Ceada Goze, représentée par Me
L'Hoiry, demande au tribunal :
1°) d'annuler la délibération du 9 juillet 2022 par laquelle le conseil
communautaire de la communauté d'agglomération Pays Basque a modifié le
règlement fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement
d'usage de locaux d'habitation pour les locations meublées de courtes durées
et déterminant les compensations, pris en application des
articles L. 631-7 et
suivants du code de la construction et de l'habitation🏛 ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler cette même délibération en tant qu'elle
concerne la commune d'Anglet ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Pays Basque une
somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative.
Elle soulève les mêmes moyens que ceux développés dans la requête n° 2200956,
mais en ce qui concerne précisément la commune d'Anglet.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2023, la communauté
d'agglomération Pays Basque, représentée par Me Gauci, conclut au rejet de la
requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la requérante une somme de 2 500
au titre de l'
article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
V - Par une requête enregistrée le 7 septembre 2022 sous le n° 2202003, la
société à responsabilité limitée (SARL) Leyorra, représentée par Me L'Hoiry,
demande au tribunal :
1°) d'annuler la délibération du 9 juillet 2022 par laquelle le conseil
communautaire de la communauté d'agglomération Pays Basque a modifié le
règlement fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement
d'usage de locaux d'habitation pour les locations meublées de courtes durées
et déterminant les compensations, pris en application des
articles L.631-7 et
suivants du code de la construction et de l'habitation🏛 ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler cette même délibération en tant qu'elle
concerne la commune de Guéthary ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Pays Basque une
somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative.
Elle soulève les mêmes moyens que ceux développés dans la requête n° 2200956.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2023, la communauté
d'agglomération Pays Basque, représentée par Me Gauci, conclut au rejet de la
requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la requérante une somme de 2 500
au titre de l'
article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Un mémoire, présenté par la société Leyorra, a été enregistré le 27 janvier
2023 dans le dossier n° 2202003.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- l'ordonnance n°s 2201008, 2201010, 2201011 du 7 juin 2022 des juges des référés du tribunal administratif de Pau.
Vu :
- la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, dite directive « services » ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique tenue le 10 février 2023 à 10
h 00 :
- le rapport de Mme Perdu,
- les conclusions de Mme Michaud, rapporteure publique,
- les observations de Me Velasco, représentant les sociétés Leyorra, Ceada Goze et Guadalquivir,
- et les observations de Me Gauci, représentant la communauté d'agglomération Pays Basques, en présence de M. Aa, Mme C, M. Ab et M. Ac.
Des notes en délibéré, enregistrées le 10 février 2023, ont été produites pour
les sociétés requérantes, dans les requêtes n°s 2200956, 2200971, 2200972,
2202002 et 2202003.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 5 mars 2022, le conseil communautaire de la
communauté d'agglomération Pays Basque a adopté un règlement fixant les
conditions de délivrance des autorisations de changement d'usage de locaux
d'habitation pour les locations meublées de courtes durées et déterminant les
compensations, sur le fondement des dispositions des
articles L. 631-7 et
suivants du code de la construction et de l'habitation🏛. Ce règlement abroge
expressément un premier arrêté règlementant les conditions de délivrance des
autorisations temporaires de changements d'usage, prévues par la loi dite Loi
« ALUR » du 24 mars 2014, mises en place, par la communauté d'agglomération
Pays Basque, pour les locations meublées de courtes durées réalisées sur le
territoire de vingt-quatre communes (Ahetze, Anglet, Arbonne, Arcangues,
Ascain, Bassussarry, Bayonne, Biarritz, Bidart, Biriatou, Boucau, Ciboure,
Guéthary, Hendaye, Ad, Lahonce, Larressore, Mouguerre, Saint-Jean-de-Luz,
Saint-Pierre d'Irube, Urcuit, Urrugne, Ustaritz, Villefranque) et instaure un
régime de compensation de ces locations de courtes durées. Par une ordonnance
n° 2200930 du 3 juin 2022, les juges des référés du présent tribunal ont
suspendu l'exécution de cette délibération du 5 mars 2022, en retenant qu'en
l'état de l'instruction, les moyens tirés de ce que le règlement méconnaissait
le principe de proportionnalité tel qu'interprété par la Cour de justice de
l'Union européenne dans son arrêt du 22 septembre 2020, affaires n°s C-274/18
et C-727/18, de ce que ce règlement méconnaissait également le principe de
sécurité juridique, ainsi que le IV de l'article L. 324-1-1 du code du
tourisme, étaient de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de ce
règlement.
2. Par une délibération du 9 juillet 2022, le conseil communautaire de la
communauté d'agglomération Pays Basque (CAPB) a modifié le règlement adopté le
5 mars 2022. Par une première ordonnance n° 2201595 du 16 septembre 2022, les
juges des référés, saisis sur le fondement des dispositions de l'article L.
521-4 du code de justice administrative, ont tenu compte des modifications
apportées à ce règlement et ont mis fin à la mesure de suspension prononcée en
juin 2022 et, par une seconde ordonnance n° 2202015 du 21 octobre 2022, le
juge des référés du présent tribunal, saisi sur le fondement des dispositions
de l'
article L. 521-1 du code de justice administrative🏛, a rejeté la demande
de suspension de l'exécution de la délibération du 9 juillet 2022.
3. Par les requêtes n°s 2200956, 2200971 et 2200972, les sociétés Leyorra,
Ceada Goze et Guadalquivir demandent au tribunal d'annuler la délibération du
conseil communautaire de la CAPB du 5 mars 2022. Par les requêtes n°s 2202002
et 2202003 les sociétés Ceada Goze et Leyorra demandent l'annulation de la
délibération du 9 juillet 2022.
Sur la jonction :
4. Les requêtes n°s 2200956, 2200971, 2200972, 2202002 et 2202003 sont
dirigées contre les délibérations du 5 mars et du 9 juillet 2022 par
lesquelles le conseil communautaire de la communauté d'agglomération du Pays
Basque a adopté un nouveau règlement fixant les conditions de délivrance des
autorisations de changement d'usage des locaux d'habitation en locations
meublées de courtes durées et fixant les conditions de la compensation de ces
locations, et soulèvent les mêmes moyens afin d'obtenir l'annulation de ces
délibérations ou, à titre subsidiaire, pour contester la situation des
communes de Guéthary, d'Anglet et de Bayonne, comprises dans le périmètre des
communes situées en zone dite tendue où s'appliquera cette nouvelle
règlementation. Elles ont, en outre, fait l'objet d'une instruction commune.
Il y a donc lieu de les joindre pour y statuer par un seul jugement.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne les conditions d'adoption des délibérations du 5 mars 2022
et du 9 juillet 2022 :
5. Aux termes de l'article L. 5211-6-1 du code général des collectivités
territoriales : « I. - Le nombre et la répartition des sièges de conseiller
communautaire sont établis :/ 1° Soit selon les modalités prévues aux II à VI
du présent article ; / 2° Soit, dans les communautés de communes et dans les
communautés d'agglomération, par accord des deux tiers au moins des conseils
municipaux des communes membres représentant plus de la moitié de la
population de celles-ci ou de la moitié au moins des conseils municipaux des
communes membres représentant plus des deux tiers de la population de celles-
ci. Cette majorité doit comprendre le conseil municipal de la commune dont la
population est la plus nombreuse, lorsque celle-ci est supérieure au quart de
la population des communes membres. La répartition des sièges effectuée par
l'accord prévu au présent 2° respecte les modalités suivantes : / a) Le nombre
total de sièges répartis entre les communes ne peut excéder de plus de 25 %
celui qui serait attribué en application des III et IV du présent article ; /
b) Les sièges sont répartis en fonction de la population municipale de chaque
commune, authentifiée par le plus récent décret publié en application de
l'
article 156 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002🏛 relative à la
démocratie de proximité ; / c) Chaque commune dispose d'au moins un siège ; /
d) Aucune commune ne peut disposer de plus de la moitié des sièges ; / e) Sans
préjudice des c et d, la part de sièges attribuée à chaque commune ne peut
s'écarter de plus de 20 % de la proportion de sa population dans la population
globale des communes membres, sauf : ( ) / - lorsque la répartition effectuée
en application des III et IV du présent article conduirait à ce que la part de
sièges attribuée à une commune s'écarte de plus de 20 % de la proportion de sa
population dans la population globale et que la répartition effectuée par
l'accord maintient ou réduit cet écart ; / - lorsque deux sièges seraient
attribués à une commune pour laquelle la répartition effectuée en application
du 1° du IV conduirait à l'attribution d'un seul siège. / II. - Dans les
métropoles et les communautés urbaines et, à défaut d'accord, dans les
communautés de communes et les communautés d'agglomération, la composition de
l'organe délibérant est établie par les III à VI selon les principes suivants
: / 1° L'attribution des sièges à la représentation proportionnelle à la plus
forte moyenne aux communes membres de l'établissement public de coopération
intercommunale, en fonction du tableau fixé au III, garantit une
représentation essentiellement démographique ; / 2° L'attribution d'un siège à
chaque commune membre de l'établissement public de coopération intercommunale
assure la représentation de l'ensemble des communes. / III. - Chaque organe
délibérant est composé de conseillers communautaires dont le nombre est établi
à partir du tableau ci-dessous. / ( ) De 250 000 à 349 999 habitants ; 72
sièges. / Ce nombre peut être modifié dans les conditions prévues aux 2°, 4°
ou 5° du IV. / IV. - La répartition des sièges est établie selon les modalités
suivantes : / 1° Les sièges à pourvoir prévus au tableau du III sont répartis
entre les communes à la représentation proportionnelle à la plus forte
moyenne, sur la base de leur population municipale authentifiée par le plus
récent décret publié en application de l'article 156 de la loi n° 2002-276 du
27 février 2002 relative à la démocratie de proximité ;/ 2° Les communes
n'ayant pu bénéficier de la répartition de sièges prévue au 1° du présent IV
se voient attribuer un siège, au-delà de l'effectif fixé par le tableau du III
; ( ) V. - Dans les communautés de communes, les communautés d'agglomération (
) si les sièges attribués sur le fondement du 2° du IV excèdent 30 % du nombre
de sièges définis au deuxième alinéa du III, 10 % du nombre total de sièges
issus de l'application des III et IV sont attribués aux communes selon les
modalités prévues au IV. Dans ce cas, il ne peut être fait application du VI.
/ ( ) VII. - Au plus tard le 31 août de l'année précédant celle du
renouvellement général des conseils municipaux, il est procédé aux opérations
prévues aux I, IV et VI. Au regard des délibérations sur le nombre et la
répartition des sièges prévues aux I et VI et de la population municipale
authentifiée par le plus récent décret publié en application de l'
article 156
de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002🏛 précitée, le nombre total de sièges
que comptera l'organe délibérant de l'établissement public de coopération
intercommunale ainsi que celui attribué à chaque commune membre lors du
prochain renouvellement général des conseils municipaux est constaté par
arrêté du représentant de l'État dans le département lorsque les communes font
partie du même département ou par arrêté conjoint des représentants de l'Etat
dans les départements concernés dans le cas contraire, au plus tard le 31
octobre de l'année précédant celle du renouvellement général des conseils
municipaux. / ( ) ».
6. S'il est soutenu qu'en vertu des dispositions du III de l'article L.
5211-6-1 du code général des collectivités territoriales l'organe délibérant
de la communauté d'agglomération Pays Basque ne devrait comprendre que 72
conseillers, au lieu du nombre beaucoup plus important de conseillers en
exercice (232) mentionné dans les délibérations des 5 mars et 9 juillet 2022
en litige, le nombre de conseillers communautaires de la communauté
d'agglomération Pays Basque a été déterminé sur le fondement des dispositions
combinées des III, IV, et V de l'article L. 5211-6-1 précité. Par suite, le
moyen tiré de l'irrégularité de la composition du conseil communautaire lors
de l'adoption des délibérations des 5 mars et 9 juillet 2022, ne peut qu'être
écarté.
En ce qui concerne la méconnaissance des dispositions des articles 9 et 10 de
la directive 2006/ 123/ CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le
marché intérieur :
7. L'article 9 de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 prévoit que :
« 1. Les États membres ne peuvent subordonner l'accès à une activité de
service et son exercice à un régime d'autorisation que si les conditions
suivantes sont réunies : / a) le régime d'autorisation n'est pas
discriminatoire à l'égard du prestataire visé ; / b) la nécessité d'un régime
d'autorisation est justifiée par une raison impérieuse d'intérêt général ; /
c) l'objectif poursuivi ne peut pas être réalisé par une mesure moins
contraignante, notamment parce qu'un contrôle a posteriori interviendrait trop
tardivement pour avoir une efficacité réelle. / 2. Dans le rapport prévu à
l'article 39, paragraphe 1, les États membres indiquent leurs régimes
d'autorisation et en motivent la compatibilité avec le paragraphe 1 du présent
article. / 3. La présente section ne s'applique pas aux aspects des régimes
d'autorisation qui sont régis directement ou indirectement par d'autres
instruments communautaires ». L'article 10 de cette même directive précise que
: « 1. Les régimes d'autorisation doivent reposer sur des critères qui
encadrent l'exercice du pouvoir d'appréciation des autorités compétentes afin
que celui-ci ne soit pas utilisé de manière arbitraire. / 2. Les critères
visés au paragraphe 1 sont : / a) non discriminatoires ; / b) justifiés par
une raison impérieuse d'intérêt général ; / c) proportionnels à cet objectif
d'intérêt général ; / d) clairs et non ambigus ; / e) objectifs ; / f) rendus
publics à l'avance ; / g) transparents et accessibles. / ( ) ».
8. Aux termes, par ailleurs, de l'article L. 631-7 du code de la construction
et de l'habitation : « La présente section est applicable aux communes de plus
de 200 000 habitants et à celles des départements des Hauts-de-Seine, de la
Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. / Dans ces communes, le changement
d'usage des locaux destinés à l'habitation est, dans les conditions fixées par
l'article L. 631-7-1, soumis à autorisation préalable. ( ) Le fait de louer un
local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées
à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile constitue un changement
d'usage au sens du présent article ». Aux termes de l'article L. 631-7-1 du
même code : « L'autorisation préalable au changement d'usage est délivrée par
le maire de la commune dans laquelle est situé l'immeuble ( ). Elle peut être
subordonnée à une compensation sous la forme de la transformation concomitante
en habitation de locaux ayant un autre usage. / ( ) Pour l'application de
l'article L. 631-7, une délibération du conseil municipal fixe les conditions
dans lesquelles sont délivrées les autorisations et déterminées les
compensations par quartier et, le cas échéant, par arrondissement, au regard
des objectifs de mixité sociale, en fonction notamment des caractéristiques
des marchés de locaux d'habitation et de la nécessité de ne pas aggraver la
pénurie de logements. Si la commune est membre d'un établissement public de
coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme, la
délibération est prise par l'organe délibérant de cet établissement ». Enfin,
aux termes de l'article L. 631-9 de ce code : « Dans les communes autres que
celles mentionnées au premier alinéa de l'article L. 631-7, les dispositions
dudit article peuvent être rendues applicables par décision de l'autorité
administrative sur proposition du maire ou, pour les communes appartenant à
une zone d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants dont la liste est
fixée par le décret mentionné au I de l'article 232 du code général des
impôts, par une délibération de l'organe délibérant de l'établissement public
de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme
ou, à défaut, du conseil municipal ( ) ».
9. Ainsi que l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne, saisi par la
Cour de cassation d'une question préjudicielle relative à la compatibilité des
dispositions précitées des articles L. 631-7 et suivants du code de la
construction et de l'habitation avec les dispositions des articles 6 et 13 de
la directive 2006/123/CE, dans son arrêt du 22 septembre 2020, Cali Apartments
SCI et HX (affaires C-724/18 et C- 727/18), les autorités nationales peuvent
adopter des réglementations imposant une autorisation préalable pour
l'exercice d'activités de location de locaux meublés pour de courtes durées,
dès lors qu'elles sont conformes aux exigences figurant aux articles 9 et 10
de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le
marché intérieur. Il s'ensuit qu'il revient au juge administratif de contrôler
si cette réglementation est, d'une part, justifiée par une raison impérieuse
d'intérêt général tenant à la lutte contre la pénurie de logements destinés à
la location et, d'autre part, proportionnée à l'objectif poursuivi, en ce que
celui-ci ne peut pas être réalisé par une mesure moins contraignante,
notamment parce qu'un contrôle a posteriori interviendrait trop tardivement
pour avoir une efficacité réelle. Par ailleurs, si la réglementation nationale
instaure une obligation de compensation, sous la forme d'une transformation
accessoire et concomitante en habitation de locaux ayant un autre usage,
celle-ci doit être justifiée par une raison impérieuse d'intérêt général,
proportionnelle à cet objectif, non discriminatoire, instituée dans des termes
clairs, non ambigus et rendus publics à l'avance, et cette obligation devra
pouvoir être satisfaite dans des conditions transparentes et accessibles.
S'agissant de l'instauration d'un système de compensation de la location de
meublés de courte durée :
10. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que malgré l'adoption,
par une délibération du 28 septembre 2019, d'un règlement fixant les critères
et conditions de location de meublés pour de courtes durées sur le territoire
de vingt-quatre communes, situées en zone dite tendue, c'est-à-dire où l'offre
de logements pour les personnes souhaitant s'installer à l'année est
inférieure à la demande, qui n'instaurait pas un système de compensation, il
ressort des mêmes pièces que le programme local de l'habitat (PLH) adopté le 2
octobre 2021 a abouti au constat que dans ces communes le nombre de meublés
proposés à la location de tourisme de courte durée, ne cessait d'augmenter
depuis 2016.
11. En outre, la délibération du 5 mars 2022 adoptant le nouveau régime
applicable à ces locations de courte durée, et instaurant un régime de
compensation, en application des dispositions précitées de l'article L.
631-7-1 du code de la construction et de l'habitation, retient dans ces motifs
qu'une augmentation de 130 % des location des meublés de tourisme a été
constatée entre 2016 et 2020, que ces locations s'intensifient encore dans les
communes littorales et rétro-littorales, et qu'il existe d'importants écarts
de rentabilité entre le parc locatif loué à l'année et les locations de
meublés de tourisme, de sorte que le règlement adopté en 2019 est considéré
comme n'ayant que « partiellement répondu à l'objectif poursuivi par
l'Agglomération en matière de lutte contre la pénurie de logements », tendant
à garantir une offre de logements accessibles à tous. Ces données sont
corroborées par les pièces versées au dossier, notamment l'étude d'octobre
2021, réalisée en collaboration avec l'université de Pau et des pays de
l'Adour, dans le cadre d'un projet de recherche dédié à ces locations en
Nouvelle-Aquitaine, à partir de données issues des plateformes internet de
location de meublés. En outre, il ressort de données de l'INSEE que le parc
locatif privé de longue durée progresse moins que le parc de résidences
principales et secondaires, que les demandes de logements sociaux ne cessent
d'augmenter et ne sont pas satisfaites, malgré une progression de ce parc, et
une étude de l'Observatoire des loyers atteste d'une offre de location
limitée, d'une demande qui augmente, dans une zone économiquement attractive
où l'emploi salarié s'accroît, et de loyers médians correspondant à un niveau
déjà élevé.
12. Ainsi, il ressort des pièces du dossier que la règlementation adoptée par
la communauté d'agglomération le 5 mars 2022 est suffisamment justifiée et met
en uvre une politique de lutte contre la pénurie de logements qui constitue
un objectif d'intérêt général, ainsi que l'a jugé le Conseil constitutionnel
dans sa décision DC du 20 mars 2014 n° 2014-691 et la Cour de justice de
l'Union européenne dans son arrêt de 2020, précité.
13. À cet égard, l'existence d'un motif d'intérêt général lié à la pénurie de
logements justifie l'adoption d'un règlement relatif au changement d'usage des
locaux d'habitation avec compensation, dès lors que dans une telle situation,
conformément aux dispositions précitées de l'article 9 de la directive
2006/123/CE « l'objectif poursuivi ne peut pas être réalisé par une mesure
moins contraignante, notamment parce qu'un contrôle a posteriori intervenant
trop tardivement pour avoir une efficacité réelle ». Dès lors, il ne peut être
utilement soutenu que la raison pour laquelle le règlement adopté en 2019 n'a
pas permis d'atteindre l'objectif poursuivi de garantir une offre de logements
accessibles à tous, serait uniquement liée à l'absence de contrôle par les
autorités communales du respect par les bailleurs de cette règlementation et à
l'absence de sanction.
14. Dans ces conditions, la nécessité d'instaurer un système de compensation
des locations de courte durée, afin de garantir la réalisation de l'objectif
d'intérêt général consistant à favoriser des locations de longue durée à des
prix abordables, dans les seules communes du littoral et du rétro-littoral du
Pays Basque situées en zone dite tendue, clairement identifiées, est
suffisamment établie.
S'agissant de la contestation des critères d'octroi de l'autorisation de
changement d'affectation et du régime de compensation mis en place :
15. En premier lieu, le système de compensation des locations de meublés de
courtes durées mis en place par le règlement adopté par la communauté
d'agglomération du Pays Basque le 5 mars 2022, modifié par la délibération du
conseil communautaire du 9 juillet 2022, distingue les locations entrant dans
le champ de ce règlement des meublés de tourisme, défini par l'article L.
324-1-1 du code du tourisme, et justifie le périmètre de son application, à
savoir les vingt-quatre communes déjà mentionnées, en tenant compte du niveau
élevé des loyers pratiqués dans lesdites communes, du niveau élevé des prix à
l'acquisition et du nombre élevé de demandes de logements par rapport au
nombre d'emménagements annuels dans le parc locatif social. Est ainsi prise en
compte la liste des communes appartenant à une zone d'urbanisation continue de
plus de 50 000 habitants, fixée par le décret mentionné au I de l'
article 232
du code général des impôts🏛 - à laquelle renvoient les dispositions précitées
de l'
article L. 631-9 du code de la construction et de l'habitation🏛 - situées
en zone dite tendue.
16. En deuxième lieu, ce régime d'autorisations de changement d'usage des
locaux d'habitation en locations de courtes durées avec compensation, laquelle
consiste en la transformation en habitation de locaux ayant un autre usage,
distingue désormais, à son article 3, depuis les modifications apportées par
la délibération du 9 juillet 2022, deux modalités de compensation : la
détention ou l'achat d'un bien par le propriétaire, en vue de sa
transformation en locaux d'habitation, ou bien l'achat de droits dits de «
commercialité » auprès de propriétaires souhaitant affecter à un usage
d'habitation des locaux destinés à un autre usage (avec production de la
convention de cession de commercialité), l'autorisation préalable au
changement d'affectation étant délivrée par le maire de la commune dans lequel
l'immeuble se situe. Il prévoit, enfin, à son article 4, des « régimes
spécifiques », notamment pour les locations « mixtes », c'est-à-dire destinées
aux étudiants pendant l'année scolaire et aux touristes en périodes estivales,
ainsi que des dispenses d'autorisation, à son article 5, pour les meublés de
tourisme mais aussi pour la location d'un meublé déclaré comme résidence
principale, sous réserve d'une location ne dépassant pas cent-vingt jours au
cours d'une année civile.
17. Le règlement précise, au premier alinéa de son article 3.2, que : « Les
locaux de compensation devront être situés dans le quartier ou la commune
concernée par la demande de changement d'usage », pour une surface plancher au
moins équivalente (deuxième alinéa). Le troisième alinéa de cet article ajoute
que : « Les locaux relevant de la sous-destination « artisanat et commerce de
détail » (PLU ayant opté pour les nouvelles destinations) ou de la destination
« commerce » (PLU n'ayant pas opté pour les nouvelles destinations) situés en
rez-de-chaussée, dont la vitrine donne sur le domaine public ou tout autre
espace ouvert à la circulation publique, ne pourront pas servir de
compensation, afin de favoriser le maintien de commerces de proximité ».
18. Si les sociétés requérantes soutiennent d'abord que le régime mis en
place, en particulier ce dernier article, manque de transparence, de clarté et
d'accessibilité, en ce qu'il ne précise pas si le droit de commercialité,
envisagé comme modalité de la compensation à l'article 3.1 du même règlement,
concerne un local situé dans le même quartier ou la même commune, il résulte
cependant des termes de l'article 3.2 du règlement précité, que le lieu de la
compensation est de préférence le quartier où se trouve le bien et, sinon, la
commune concernée, et ces dispositions s'appliquent aux deux modalités de
compensation, ainsi que le précise d'ailleurs la CAPB en défense. Dans ces
conditions, le moyen tiré de ce que le régime de compensation méconnaîtrait
les principes de clarté et de transparence figurant à l'article 10 de la
directive du 12 décembre 2006, doit être écarté.
19. S'il est également soutenu que les conditions de la compensation sont
excessivement restrictives en ce qu'elles excluent les locaux transformés
depuis moins de cinq ans, cette mention, qui figurait dans le règlement adopté
par la délibération du 5 mars 2022, a été expressément abandonnée par la
modification adoptée le 9 juillet 2022.
20. S'il est encore souligné que les plans locaux d'urbanisme des communes de
Guéthary, d'Anglet ou de Bayonne restreignent la transformation de biens à un
usage autre qu'habitation, en usage d'habitation, dans de nombreuses zones de
ces commune (zones Uch, Uatc... etc) de sorte que la compensation serait, dans
ces communes, « impossible à mettre en place », d'une part, ainsi que déjà
précisé, le règlement autorise une compensation à l'échelle de l'ensemble du
territoire communal et la CAPB produit, par ailleurs, une pièce émanant des
services fiscaux qui recense les locaux susceptibles d'être proposés à la
compensation, dont le contenu n'est pas sérieusement contesté, attestant de
l'existence de biens pouvant servir à une compensation. Dans ces conditions,
aucune atteinte au principe de proportionnalité prévu à l'article 9 de la
directive précitée ne peut être retenue.
21. Enfin, aux termes de l'article 4.1 de ce règlement : « Afin de maintenir
une offre de location à destination des étudiants, des autorisations
temporaires de changement d'usage à titre personnel pourront être délivrées
sans compensation. / Ces autorisations concernent des propriétaires pratiquant
un régime de location de forme mixte : estudiantine durant neuf mois minimum
et touristique durant une période estivale de trois mois. / À titre
dérogatoire, ces autorisations temporaires sont délivrées aux personnes
physiques pour une durée d'un an. Ces autorisations délivrées à titre
personnel sont non cessibles ( ) ».
22. Ces dispositions tiennent compte de la situation spécifique des locations
qualifiées de « mixtes », dès lors qu'elles concernent des biens donnés en
location à des étudiants pendant l'année scolaire et loués à des touristes en
période estivale. Si les requérantes soutiennent que cette dérogation instaure
une discrimination et une différence de traitement illégale entre les
propriétaires et administrés « selon la localisation des centres
universitaires et d'enseignements supérieurs », cette circonstance ne peut
être utilement invoquée dès lors qu'elle est totalement étrangère au règlement
ici en litige et repose, en tout état de cause, sur une différence objective.
23. Dans ces conditions, les moyens tirés de ce que le règlement en litige et
le régime de compensation des locations de meublés de courtes durées mis en
place, porteraient des atteintes non proportionnées à l'objectif d'intérêt
général poursuivi, seraient discriminatoires et méconnaîtraient les principes
de clarté, de transparence et d'accessibilité et, en conséquence, l'ensemble
des dispositions des articles 9 et 10 de la directive 2006/123/CE du 12
décembre 2006, doivent être écartés.
24. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions aux fins
d'annulation, totale ou partielle, des délibérations du 5 mars et du 9 juillet
2022 du conseil communautaire de la communauté d'agglomération Pays Basque,
adoptant un nouveau régime de locations meublés de courtes durées, présentées
par l'ensemble des requérants, doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
25. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les
conclusions présentées par toutes les parties, sur le fondement des
dispositions de l'
article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.