CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 30770
Société financière de placement et de gestion immobilière
Lecture du 09 Juillet 1986
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 9 février 1981 et 9 juin 1981 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la Société financière de placement et de gestion immobilière (S.F.P.G.I.), société anonyme dont le siège est 39, rue de la Bienfaisance à Paris (75008), agissant par ses représentants légaux domiciliés audit siège, et tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1° annule le jugement en dante du 27 novembre 1980 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1971, 1972 et 1973 ; 2° lui accorde la décharge des impositions contestées,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu : - le rapport de M. d' Harcourt, Conseiller d'Etat, - les observations de Me Celice, avocat de la société anonyme "Société financière de placement et de gestion immobilière", - les conclusions de M. Racine, Commissaire du gouvernement ; Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a fondé les redressements assignés à la Société financière de placement et de gestion immobilière au titre de l'impôt sur les sociétés pour les années 1971, 1972 et 1973 non seulement sur les résultats de la vérification de comptabilité à laquelle elle avait procédé, mais aussi sur ceux d'une enquête faisant apparaître, selon elle, que des indemnités d'éviction versées par la société, dont l'objet est la rénovation immobilière, à certains locataires afin d'obtenir la libération des logements qu'ils occupaient n'avaient pas été en tout ou partie perçues par les intéressés, ce qui justifiait leur réintégration dans les résultats de la société ; que, si aucun principe ni aucun texte ne s'oppose à ce que l'administration utilise des renseignements provenant d'autres sources que la vérification pour déterminer les bases d'imposition, c'est toutefois à la condition que le contribuable en soit informé par le service des impôts et soit mis à même de les contester ;
Considérant que la notification de redressements adressée le 16 septembre 1975 à la société requérante récapitulant les redressements mentionnés dans onze notifications reçues par la société entre avril et juin 1975 pour chacune des sociétés en participation par l'intermédiaire desquelles elle réalisait son objet social ; que ces onze notifications, qui indiquaient que certains évincés n'avaient pas perçus tout ou partie des indemnités d'éviction figurant dans sa comptabilité, étaient accompagnées d'une liste de locataires évincés, comportant pour chacun l'indemnité comptabilisée, l'indemnité versée et, par différence, la somme réintégée ; que si ces notifications, qui permettaient au contribuable de connaître la nature et les motifs des rehaussements envisagés étaient suffisamment motivées, il appartenait au contribuable de demander la communication des documents sur lesquels l'administration s'était fondée pour estimer que certaines indemnités d'éviction comptabilisées n'avaient pas été effectivement été versées, notamment des réponses faites par les locataires intéressés aux demandes de l'administration ; que, saisie d'une telle demande par la société requérante, l'administration devait y faire droit avant la mise en recouvrement des impositions ; qu'il est constant que la communication de ces documents n'a été faite que devant le tribunal administratif ; qu'ainsi le caractère contradictoire de la procédure prévue à l'article 1649 quinquies A du code général des impôts, alors en vigueur, n'a pas été respecté ; que, dès lors, la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre des années 1971, 1972 et 1973 à la suite de la réintégration dans ses bénéfices d'une partie des indemnités d'éviction qu'elle en avait déduites ;
Article ler : Il est accordé à la Société financière de placement et de gestion immobilière (S.F.P.G.I.) décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge pour les années 1971, 1972 et 1973, ainsi que des pénalités correspondantes, en tant que ces impositions procèdent de la réintégration de diverses indemnités d'éviction.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 27novembre 1980 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Société financière de placement et de gestion immobilière (S.F.P.G.I.) et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et dela privatisation, chargé du budget.