CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 161146
COMMUNE DE QUETIGNY
contre
Union des chambres syndicales de la publicité extérieure
Lecture du 31 Juillet 1996
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, 2ème et 6ème sous-sections réunies),
Sur le rapport de la 2ème sous-section, de la Section du Contentieux,
Vu la requête, enregistrée le 24 août 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMUNE DE QUETIGNY, représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE DE QUETIGNY demande que le Conseil d'Etat : 1°) annule le jugement en date du 31 mai 1994 par lequel le tribunal administratif de Dijon a annulé, à la demande de l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure, l'arrêté du 16 juillet 1991 par lequel le maire de la COMMUNE DE QUETIGNY a institué des zones de publicité restreinte ; 2°) ordonne qu'il soit sursis à son exécution ; 3°) rejette la demande présentée par l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure devant le tribunal administratif ; 4°) condamne l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure à lui verser la somme de 23 720 F au titre de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et préenseignes et les décrets n°s 80-924 du 21 novembre 1980 et 82-211 du 24 février 1982 pris pour son application ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. Mary, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure, - les conclusions de M. Delarue, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de l'appel incident de l'union des chambres syndicales de la publicité extérieure :
Considérant que l'appel incident de l'union des chambres syndicales de la publicité extérieure en date du 14 novembre 1994 dirigé contre l'article 2 du jugement du 31 mai 1994 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté les conclusions qu'elle avait formées contre les dispositions des autres articles de l'annexe de l'arrêté attaqué, soulève un litige différent de celui que la COMMUNE DE QUETIGNY a porté devant le Conseil d'Etat par sa requête enregistrée le 24 août 1994 qui tend à l'annulation de l'article 1er dudit jugement annulant les articles 14, 15, 19 et 21 de l'annexe de l'arrêté du maire de Quetigny en date du 16 juillet 1991 en tant qu'elle a prévu des dispositions particulières relatives aux enseignes et institué des règles relatives à la publicité et aux préenseignes dans les zones de publicité restreinte n° 1, 3 et 4 dans la même ville ; que, par suite, l'appel incident de l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure n'est pas recevable ;
Sur les conclusions de la requête de la COMMUNE DE QUETIGNY :
Considérant que l'article 15 de l'annexe à l'arrêté attaqué interdit la publicité sur des parcelles de moins de 30 mètres de façade et impose une obligation de recul de 30mètres de façade par rapport aux boulevards Jean Jaurès, de l'Université et de Bourgogne pour les dispositifs scellés au sol dans la zone de publicité restreinte n° 1, qui correspond aux grands secteurs commerciaux et industriels de la commune ; que l'article 19 de la même annexe interdit, dans la zone de publicité restreinte n° 3, constituée par des quartiers d'habitat individuel, la publicité à l'exception des parcelles où s'exerce une activité dans au moins 70 % des locaux construits ; que plusieurs parcelles remplissent ces conditions ; qu'enfin l'article 21 interdit la publicité et les préenseignes dans la zone de publicité restreinte n° 4, essentiellement constituée d'espaces naturels ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que par l'édiction de telles dispositions, le maire de Quetigny ait commis une erreur manifeste d'appréciation ni interdit de manière générale et absolue, en droit comme en fait, l'exercice du droit prévu à l'article 1er de la loi du 29 décembre 1979 ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler l'arrêté du maire deQuetigny en date du 16 juillet 1991 en tant qu'il a institué des règles relatives à la publicité et aux préenseignes dans les zones de publicité restreinte n° 1, 3 et 4, le tribunal administratif s'est fondé sur ce que les mesures restrictives prises par le maire dans ces zones auraient porté atteinte à l'activité des entreprises de publicité dans des proportions qui excèdent celles normalement exigées par la protection du cadre de vie ;
Considérant que l'article 17 de la loi du 29 décembre 1979 dispose, en son deuxième alinéa, que "les actes instituant les zones de publicité autorisées, les zones de publicité restreinte et les zones de publicité élargie peuvent prévoir des prescriptions relatives aux enseignes" ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler l'article 14 de l'annexe à l'arrêté du maire de Quetigny en date du 16 juillet 1991 en tant qu'il a prévu des dispositions particulières relatives aux enseignes, le tribunal administratif s'est fondé en premier lieu sur ce que l'article attaqué méconnaîtrait les dispositions de l'article 5 du décret du 24 février 1982 susvisé, qui n'a vocation à s'appliquer que pour autant que ses dispositions ne sont pas contraires à celles prévues par l'acte instituant une zone de publicité restreinte, et en second lieu, sur les dispositions de l'article 10 du décret n° 80-923 du 21 novembre 1980 qui ne sont pas applicables aux enseignes telles que définies à l'article 2 de la loi du 29 décembre 1979 ; Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure devant le tribunal administratif de Dijon pour contester les dispositions en cause ;
Considérant que le législateur a entendu, comme il est dit à l'article 2 de la loi du 29 décembre 1979 susvisée, fixer les règles applicables à la publicité, aux enseignes et aux préenseignes dans un but de protection du cadre de vie sans les limiter aux lieux faisant l'objet d'une protection particulière ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le maire de Quetigny aurait excédé ses pouvoirs en instituant des zones de publicité restreinte dans une agglomération ne présentant aucun caractère particulier ne peut être accueilli ;
Considérant que l'article 10 de la loi précitée confère, en vue de la protection du cadre de vie, aux autorités locales compétentes un large pouvoir de réglementation de l'affichage en leur permettant notamment "de déterminer dans quelles conditions et sur quels emplacements la publicité est seulement admise" et même "d'interdire la publicité ou des catégories de publicité définies en fonction des procédés et des dispositifs utilisés" ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en n'autorisant la publicité que sur le mobilier urbain et dans quelques lieux précisément fixés par le règlement attaqué, le maire de Quetigny ait institué une discrimination irrégulière entre les entreprises ou les modes d'affichage ;
Considérant qu'il ressort des dispositions combinées des articles 9, 10 et 18 de la loi du 29 décembre 1979, que le législateur n'a pas entendu dénier aux autorités locales la possibilité d'adapter aux circonstances locales les règles relatives à l'installation de certaines préenseignes visées au deuxième alinéa de l'article 18 de la loi précitée ; qu'il s'ensuit qu'en édictant des dispositions de portée limitée propres à certaines préenseignes visées au deuxième alinéa de l'article 18 de la loi précitée, le maire de Quetigny n'a pas méconnu les dispositions dudit article ;
Considérant que de tout ce qui précède il résulte que le maire de Quetigny est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté en date du 16 juillet 1991 en tant qu'il a prévu des dispositions particulières relatives aux enseignes et institué des règles relatives à la publicité et aux préenseignes dans leszones de publicité restreintes n° 1, 3 et 4 ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure à verser à la COMMUNE DE QUETIGNY la somme de vingt-trois mille sept cent vingt francs au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Dijon en date du 31 mai 1994 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la demande présentée devant le tribunal administratif de Dijon par l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Quetigny en date du 16 juillet 1991 en tant qu'il institue des règles générales applicables dans l'ensemble des zones de publicité restreinte de la commune ainsi qu'une zone de publicité restreinte n° 2 dans cette ville, sont rejetées.
Article 3 : L'appel incident de l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure dirigé contr l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Dijon est rejeté.
Article 4 : L'union des chambres syndicales de la publicité extérieure versera à la COMMUNE DE QUETIGNY la somme de vingt-trois mille sept cent vingt francs au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE QUETIGNY, à l'Union des chambres syndicales de la publicité extérieure et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme.