Jurisprudence : CE 2/6 SSR, 11-03-1996, n° 138486

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 138486

CENTRE HOSPITALIER DE MOUTIERS

Lecture du 11 Mars 1996

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, 2ème et 6ème sous-sections réunies), Sur le rapport de la 2ème sous-section, de la Section du Contentieux,
Vu la requête, enregistrée au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat le 19 juin 1992, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER DE MOUTIERS, représenté par le président de son conseil d'administration en exercice ; le CENTRE HOSPITALIER DE MOUTIERS demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement en date du 21 avril 1992 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a, sur déféré du préfet de Savoie, annulé les délibérations en date des 7 et 23 janvier 1992 de son conseil d'administration, relatives au don d'un scanographe par une association ; 2°) de rejeter le déféré présenté par le préfet de Savoie devant le tribunal administratif de Grenoble ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. Mary, Maître des Requêtes, - les observations de Me Guinard, avocat du CENTRE HOSPITALIER DE MOUTIERS, - les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité des déférés du préfet de Savoie :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 714-4 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue des dispositions de la loi du 31 juillet 1991 portant réforme hospitalière, le conseil d'administration de l'établissement public de santé : "... définit la politique générale de l'établissement et délibère sur ... 15° l'acceptation et le refus des dons et legs ..." ; que l'article L. 714-5 entend fixer les modalités selon lesquelles les délibérations prévues par l'article L. 714-4 deviennent exécutoires ; qu'il procède à cet égard à une distinction ; que selon le 1° de l'article L. 714-5, sont exécutoires de plein droit dès leur réception par le représentant de l'Etat les délibérations : "portant sur les matières énumérées aux 4°, 5° et 8° à 17° ... "de l'article L. 714-4 ; que, selon le 2° du même article L. 714-5, sont soumises au représentant de l'Etat en vue de leur approbation : "... les délibérations portant sur les matières mentionnées aux 1°, à l'exclusion du contrat pluriannuel mentionné à l'article L. 712-4, 2°, 3° à l'exception du rapport prévu à l'article L. 714-6, 6° et 7°" ;
Considérant que ces dispositions doivent être interprétées en ce sens qu'à la seule exception de celles qui sont limitativement et expressément mentionnées au 2° de l'article L. 714-5, les délibérations des conseils d'administration des établissements publics de santé sont, qu'elles soient ou non au nombre de celles auxquelles se réfère le 1° de l'article L. 714-5, exécutoires de plein droit dès leur réception par le représentant de l'Etat ; qu'elles entrent ainsi dans le champ d'application du 3ème alinéa de l'article L. 714-5-1° qui prévoit que le représentant de l'Etat défère au tribunal administratif les délibérations exécutoires de plein droit qu'il estime illégales "dans les deux mois suivant leur réception" ;
Considérant que, par délibération du 7 janvier 1992, le conseil d'administration du CENTRE HOSPITALIER DE MOUTIERS a accepté le don d'un scanographe par l'association "Scanner en Tarentaise" ; que, par délibération du 23 janvier suivant, il a accepté également la prise en charge par l'association des travaux d'installation de l'appareil et décidé notamment de déléguer à cette association la maîtrise d'ouvrage des travaux ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, cette dernière décision n'avait pas un caractère seulement préparatoire ; que les délibérations dont s'agit étaient exécutoires de plein droit en application des dispositions susrappelées ; que le préfet de la Savoie était par suite recevable à les déférer au tribunal administratif de Grenoble ;
Sur la légalité des délibérations des 7 et 23 janvier 1992 : Considérant, en premier lieu, que la délibération du 7 janvier 1992 acceptant le don d'un scanographe est intervenue alors que l'autorité compétente venait, en application desdispositions du code de la santé publique soumettant à autorisation préalable l'installation d'équipements matériels lourds, de refuser d'autoriser l'installation d'un scanographe au CENTRE HOSPITALIER DE MOUTIERS ; qu'aux termes de l'article L. 712-8 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de la loi du 31 juillet 1991 : "Sont soumis à l'autorisation du ministre chargé de la santé ou du représentant de l'Etat les projets relatifs à ... 2°) la création, l'extension, la transformation des installations... y compris les équipements matériels lourds..." ; que ces dispositions qui visent à assurer une bonne répartition, en fonction des besoins de la population, des installations et équipements matériels lourds ont une portée générale et s'appliquent quel que soit le mode d'acquisition ou de financement de ces installations et équipements matériels ; qu'elles étaient ainsi applicables dans le cas, qui est celui de l'espèce, d'acquisition à titre gratuit d'un tel équipement ; que la délibération du 7 janvier 1992 est ainsi entachée d'illégalité ; Considérant, en second lieu, que les associations de la loi de 1901 n'entrent dans aucune des catégories de personnes morales, auxquelles, en application de l'article 4 de la loi 85-704 du 12 juillet 1985, peut être confiée par une collectivité ou un établissement public, une mission de maîtrise d'ouvrage déléguée ; qu'ainsi, nonobstant la prise en charge par l'association donatrice du coût d'installation du scanographe dans les locaux du CENTRE HOSPITALIER DE MOUTIERS, ce dernier ne pouvait lui confier la maîtrise d'ouvrage déléguée de cette installation ; qu'ainsi, et en tout état de cause, la délibération du 23 janvier 1992 est également entachée d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le centre hospitalier requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les délibérations litigieuses des 7 et 23 janvier 1992 ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête du CENTRE HOSPITALIER DE MOUTIERS est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER DE MOUTIERS et au ministre du travail et des affaires sociales.

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