Jurisprudence : Cass. crim., 15-11-2022, n° 22-85.114, F-B, Rejet

Cass. crim., 15-11-2022, n° 22-85.114, F-B, Rejet

A21578UG

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2022:CR01546

Identifiant Legifrance : JURITEXT000046651883

Référence

Cass. crim., 15-11-2022, n° 22-85.114, F-B, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/90022000-cass-crim-15112022-n-2285114-fb-rejet
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N° V 22-85.114 F-B

N° 01546


SL2
15 NOVEMBRE 2022


REJET


M. BONNAL président,


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 15 NOVEMBRE 2022



M. [L] [U] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 10e section, en date du 28 juillet 2022, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de meurtre, a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire.


Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [L] [U], et les conclusions de M. Aubert, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 15 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.



Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. M. [L] [U] a été mis en examen du chef susvisé le 20 mai 2022, puis placé en détention provisoire.

3. Il a rempli un imprimé disponible à la maison d'arrêt, qu'il a daté du 30 mai 2022, dans lequel il a indiqué qu'il voulait relever appel de son placement en détention provisoire, enregistré au greffe de l'établissement pénitentiaire le 1er juin suivant.

4. Par courriers des 18 et 20 juillet 2022, l'avocat de M. [Aa] a demandé au procureur général la mise en liberté d'office de l'intéressé, au motif que la chambre de l'instruction n'avait pas encore statué sur cet appel.

5. Sur demande du parquet général, un acte d'appel a été formalisé le 20 juillet par le greffe de l'établissement pénitentiaire sur le registre prévu à cet effet, que l'intéressé a refusé de signer, et qui a été enregistré au greffe du tribunal judiciaire le même jour.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré irrecevable l'appel interjeté par M. [L] [U] à l'encontre de l'ordonnance de placement en détention provisoire rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Auxerre le 20 mai 2022, alors :

« 1°/ que dénature les pièces du dossier et méconnait les articles 186, 194, 503 et 593 du code de procédure pénale🏛🏛🏛🏛, la chambre de l'instruction qui déclare irrecevable l'appel interjeté par M. [Aa] contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Auxerre du 20 mai 2022, par une déclaration en date du 30 mai 2022, en énonçant que si « la volonté de M. [U] de faire appel de son placement en détention provisoire ressort clairement du document dont la maison d'arrêt lui a accusé réception le 1er juin 2022 (cf. accusé de réception), soit hors du délai légal de dix jours qui expirait le 30 mai à minuit, seule cette date de réception est en effet certaine, aucun élément de la procédure ne permettant d'établir que [L] [U] a fait connaître de façon certaine le 30 mai 2022 au greffe de la maison d'arrêt, de quelque façon que ce soit et non équivoque, sa volonté de faire appel », alors même qu'il ressortait précisément dudit accusé de réception que le document dont s'agit par lequel M. [U] indiquait « demander l'appel de (son) placement en détention », sur la date de la demande était bien le 30 mai 2022 ;

2°/ que tout document dans lequel une personne provisoirement détenue manifeste sa volonté d'interjeter appel d'une décision de placement en détention ou de rejet de demande de mise en liberté, vaut appel de cette décision à la date à laquelle cette volonté est émise sans équivoque possible ; que l'arrêt ne pouvait ainsi considérer que « seule la date de réception est certaine » et qu'aucun grief tiré d'une absence de diligence ne peut être tiré de ce que la maison d'arrêt a enregistré l'appel le 1er juin 2022, sans s'expliquer précisément sur la date à laquelle a été émise le volonté de M. [U] d'interjeter appel, laquelle figure exactement sur l'accusé de réception comme « date de la demande », même si la « réception par les services du greffe a été datée du surlendemain 1er juin à 15h18 », étant précisé qu'il était mentionné une estimation de temps nécessaire pour une réponse à la demande de dix jours ; qu'en effet, la date de l'appel ne peut dépendre de la diligence mise par l'administration à enregistrer la déclaration d'appel et à y répondre, la chambre de l'instruction a donc méconnu les textes susvisés, ensemble les articles 502 et 503 du code de procédure pénale🏛🏛 et les droits de la défense ;

3°/ qu'en matière de déclaration d'appel, c'est la date à laquelle a été émise la demande qui doit être prise en considération, non point la date à laquelle le greffe a traité cet appel qui dépend de circonstances tout à fait étrangères à la volonté de l'appelant, l'enregistrement tardif d'une déclaration d'appel ne constituant pas une circonstance imprévisible ou insurmontable extérieure au service de la justice, justifiant le retard dont s'agit ; qu'en statuant donc comme elle l'a fait, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés et le principe du droit à un recours effectif ;

4°/ qu'enfin le délai dont dispose la chambre de l'instruction pour statuer sur l'appel d'une ordonnance de mise en détention provisoire est de 10 jours à compter de cet appel, faute de quoi la personne concernée est mise d'office en liberté ; que le retard d'acheminement du document manifestant la volonté de la personne détenue d'interjeter appel de cette ordonnance ne saurait constituer une cause de prorogation de ce délai ; qu'en statuant le 28 juillet 2022 sur les mérites d'un appel formé le 30 mai 2022 et enregistré le 1er juin suivant, la chambre de l'instruction a violé les dispositions sus-rappelées et l'article 194 du code de procédure pénale🏛, ensemble les droits de la défense. La cassation interviendra sans renvoi avec mise en liberté. »


Réponse de la Cour

7. Pour déclarer irrecevable l'appel de M. [U], l'arrêt attaqué énonce que la demande établie par ce dernier en vue d'une déclaration d'appel a été faite sur un imprimé destiné aux requêtes internes à l'établissement pénitentiaire, enregistré au greffe de celui-ci le 1er juin 2022, et qu'un formulaire d'appel a ensuite été établi le 20 juillet suivant, retranscrit au greffe de la juridiction le même jour.

8. Les juges relèvent que, si l'intéressé a ainsi clairement manifesté sa volonté de faire appel, seule peut être retenue comme certaine la date du 1er juin 2022, aucun élément de la procédure ne permettant d'établir que M. [Aa] a fait connaître, de quelque façon que ce soit et non équivoque, sa volonté de faire appel dès le 30 mai 2022, date mentionnée sur sa requête adressée au greffe de la maison d'arrêt.

9. Ils en déduisent que, si l'établissement pénitentiaire devait enregistrer cet appel au 1er juin 2022 et y donner les suites qui s'imposent, aucun grief ne peut être tiré de cette absence de diligence, l'appel étant alors irrecevable.

10. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaître les textes visés au moyen, pour les motifs qui suivent.

11. D'une part, la requête, dont seul l'enregistrement, le 1er juin 2022 au greffe de l'établissement pénitentiaire, lui conférait date certaine, soit postérieurement à l'expiration du délai pour faire appel, ne pouvait produire les mêmes effets qu'une déclaration d'appel.

12. D'autre part, le demandeur ne saurait se faire grief du caractère tardif de l'arrêt de la chambre de l'instruction, dès lors que celle-ci n'était pas saisie d'un appel.

13. Il s'ensuit que le moyen doit être écarté.

14. L'arrêt est par ailleurs régulier, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale🏛🏛.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quinze novembre deux mille vingt-deux.

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