CIV. 3
VB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 9 novembre 2022
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 770 F-D
Pourvoi n° U 21-17.259
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 NOVEMBRE 2022
1°/ Mme [Z] [Y], veuve [B],
2°/ Mme [H] [B],
3°/ M. [R] [B],
4°/ M. [D] [B],
tous quatre domiciliés [Adresse 5],
ont formé le pourvoi n° U 21-17.259 contre l'arrêt rendu le 22 mars 2021 par la cour d'appel de Basse-Terre (2e chambre civile), dans le litige les opposant à M. [Aa] [M], domicilié [… …], défendeur à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Jessel, conseiller, les observations de Me Balat, avocat des consorts [B], de la SCP Richard, avocat de M. [M], après débats en l'audience publique du 27 septembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Jessel, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 22 mars 2021), par partage du 20 juillet 1982, [K] [B] s'est vu attribuer les parcelles cadastrées BW n° [Cadastre 1] et BW n° [Cadastre 2], laquelle a fait l'objet d'une division en deux parcelles cadastrées BW n° [Cadastre 3] et BW n° [Cadastre 4].
2. Au décès de [K] [B] le 3 septembre 2005, il s'est révélé que cette dernière parcelle était, pour partie, occupée par M. [M], son cousin, qui y avait fait construire une maison d'habitation.
3. Après expertise ordonnée en référé, les consorts [Ab] ont assigné M. [M] en évaluation du prix de la portion de terrain occupée, en indemnisation de la privation de jouissance subie et en expulsion.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Les consorts [Ab] font grief à l'arrêt de dire que M. [M] a acquis un droit de superficie sur les constructions, ouvrages et plantations édifiés sur la portion de 1 575 mètres carrés provenant de la parcelle cadastrée BW n° [Cadastre 4] et de rejeter leurs demandes, alors :
« 1°/ que la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous et que cette présomption de propriété au profit du propriétaire du sol n'est susceptible d'être combattue que par la preuve contraire résultant d'un titre ou de la prescription acquisitive ; qu'il en résulte que le droit de superficie, s'il n'est pas acquis par voie de prescription, ne peut résulter que d'un titre émanant du propriétaire de la parcelle ; qu'une autorisation d'occupation ne peut s'analyser comme un titre de propriété constitutif d'un droit de superficie ; qu'en l'espèce, pour se déterminer, la cour d'appel s'est bornée à constater que M. [Aa] [M] avait bénéficié le 11 août 1982 de la caution de [K] [B], propriétaire de la parcelle litigieuse, dans le cadre d'un prêt destiné à financer la construction par lui d'un bien immobilier sur cette parcelle, ce dont elle a déduit que, justifiant d'une possession conforme à l'accord qui lui a été donné, il était en mesure se prévaloir d'un droit de superficie ; qu'en se déterminant ainsi par un motif manifestement impropre à caractériser l'existence d'un titre conférant un droit de superficie à M. [O] [M], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des
articles 552 et 553 du code civil🏛🏛 ;
2°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que l'acte du 11 août 1982 constitue [K] [B] en qualité de caution, apportant sa garantie au remboursement d'un prêt destiné à financer la construction par M. [O] [M] d'un bien immobilier sur la parcelle litigieuse ; qu'en affirmant que, par cet acte, [K] [B] avait renoncé au bénéfice de l'accession et conféré à M. [Aa] [M] un droit de superficie relativement à cette parcelle, la cour d'appel en a dénaturé les termes, en violation du principe susvisé. »
Réponse de la Cour
5. Sans dénaturation, la cour d'appel a, d'une part, souverainement retenu que, par une stipulation introduite dans l'acte de garantie hypothécaire du 11 août 1982, [K] [B] avait consenti à son cousin l'autorisation de construire, sur la parcelle lui appartenant, une maison d'habitation que M. [M] avait édifiée pour son propre compte et à ses frais au moyen d'un prêt qui lui avait été accordé sous le bénéfice de cette sûreté.
6. Elle a, d'autre part, constaté, qu'à compter de cette date et jusqu'au décès de [K] [B], M. [M] avait toujours occupé cette maison, justifiant ainsi d'une possession paisible conforme à l'accord.
7. Ayant souverainement déduit de ces constatations que [K] [B] avait cédé à son cousin un droit de superficie et renoncé au bénéfice de l'accession, elle a ainsi légalement justifié sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [Z] [Y] veuve [B], Mme [H] [B] et MM. [R], [D] [B] aux dépens ;
En application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour les consorts [Ab]
Les consorts [B] reprochent à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que M. [M] avait acquis un droit de superficie sur les constructions, ouvrages et plantations édifiés sur la portion de 1.575 m² telle que délimitée par M. [W], géomètre, selon projet du 23 juillet 1984 provenant de la parcelle cadastrée BW [Cadastre 4] située au [Adresse 6] ayant appartenu à [K] [B] et de les avoir déboutés de leur demande d'indemnité pour privation de jouissance de cette parcelle et d'expulsion de M. [M] ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous et que cette présomption de propriété au profit du propriétaire du sol n'est susceptible d'être combattue que par la preuve contraire résultant d'un titre ou de la prescription acquisitive ; qu'il en résulte que le droit de superficie, s'il n'est pas acquis par voie de prescription, ne peut résulter que d'un titre émanant du propriétaire de la parcelle ; qu'une autorisation d'occupation ne peut s'analyser comme un titre de propriété constitutif d'un droit de superficie ; qu'en l'espèce, pour se déterminer, la cour d'appel s'est bornée à constater que M. [Aa] [M] avait bénéficié le 11 août 1982 de la caution de [K] [B], propriétaire de la parcelle litigieuse, dans le cadre d'un prêt destiné à financer la construction par lui d'un bien immobilier sur cette parcelle, ce dont elle a déduit que, justifiant « d'une possession conforme à l'accord qui lui a été donné », il était en mesure se prévaloir d'un droit de superficie (arrêt attaqué, p. 9, alinéas 5 à 7) ; qu'en se déterminant ainsi par un motif manifestement impropre à caractériser l'existence d'un titre conférant un droit de superficie à M. [O] [M], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des
articles 552 et 553 du code civil🏛🏛 ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que l'acte du 11 août 1982 constitue [K] [B] en qualité de caution, apportant sa garantie au remboursement d'un prêt destiné à financer la construction par M. [O] [M] d'un bien immobilier sur la parcelle litigieuse ; qu'en affirmant que, par cet acte, [K] [B] avait renoncé au bénéfice de l'accession et conféré à M. [Aa] [M] un droit de superficie relativement à cette parcelle (arrêt attaqué, p. 9, alinéas 5 à 7), la cour d'appel en a dénaturé les termes, en violation du principe susvisé.