Jurisprudence : CJCE, 21-01-1999, aff. C-120/97, Upjohn Ltd c/ The Licensing Authority established by the Medicines Act 1968 e.a.

CJCE, 21-01-1999, aff. C-120/97, Upjohn Ltd c/ The Licensing Authority established by the Medicines Act 1968 e.a.

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Cour de justice des Communautés européennes

21 janvier 1999

Affaire n°C-120/97

Upjohn Ltd
c/
The Licensing Authority established by the Medicines Act 1968 e.a.



61997J0120

Arrêt de la Cour (cinquième chambre)
du 21 janvier 1999.

Upjohn Ltd contre The Licensing Authority established by the Medicines Act 1968 e.a..

Demande de décision préjudicielle: Court of Appeal (England) - Royaume-Uni.

Spécialités pharmaceutiques - Retrait d'une autorisation de mise sur le marché - Contrôle juridictionnel.

Affaire C-120/97.

Recueil de Jurisprudence 1999 page I-0223

1 Rapprochement des législations - Spécialités pharmaceutiques - Autorisation de mise sur le marché - Retrait de l'autorisation - Pouvoir d'appréciation des autorités nationales - Contrôle juridictionnel - Limites (Directive du Conseil 65/65) 2 Rapprochement des législations - Spécialités pharmaceutiques - Autorisation de mise sur le marché - Retrait de l'autorisation - Pouvoir d'appréciation des autorités nationales - Contrôle juridictionnel - Obligation de prendre en compte des éléments d'appréciation scientifique révélés après l'adoption de la décision de retrait - Absence (Directive du Conseil 65/65) 3 Rapprochement des législations - Spécialités pharmaceutiques - Autorisation de mise sur le marché - Retrait de l'autorisation - Comité des spécialités pharmaceutiques - Absence d'avis dans le délai prescrit - Absence d'incidence sur la compétence des autorités nationales pour prendre une décision de retrait (Directives du Conseil 65/65 et 75/319, telles que modifiées par la directive 83/570)

1 La directive 65/65, relative aux spécialités pharmaceutiques, et plus généralement le droit communautaire n'imposent pas aux États membres d'instaurer une procédure de contrôle juridictionnel des décisions nationales de retrait des autorisations de mise sur le marché de spécialités pharmaceutiques, habilitant les juridictions nationales compétentes à substituer leur appréciation des éléments de fait, et notamment des moyens de preuve scientifique utilisés à l'appui de la décision de retrait, à celle des autorités nationales compétentes en matière de retrait des autorisations de mise sur le marché. La directive 65/65 ne réglemente pas les modalités de mise en oeuvre du droit de recours contre les décisions nationales portant retrait des autorisations de mise sur le marché des spécialités pharmaceutiques, laissant ainsi aux États membres le soin d'organiser leur propre système de contrôle juridictionnel de telles décisions. En ce qui concerne lesdites décisions, prises par les autorités nationales compétentes à l'issue d'appréciations complexes relevant du domaine médico-pharmacologique, il n'apparaît pas que seule une procédure de contrôle juridictionnel des décisions nationales de retrait des autorisations, habilitant les juridictions nationales compétentes à substituer leur appréciation des éléments de fait, et notamment des moyens de preuve scientifique utilisés à l'appui de la décision de retrait, à celle des autorités nationales compétentes en matière de retrait des autorisations, soit apte à empêcher que l'exercice des droits conférés par l'ordre juridique communautaire soit rendu pratiquement impossible ou excessivement difficile. En effet, lorsqu'une autorité communautaire est appelée, dans le cadre de sa mission, à effectuer des évaluations complexes, elle jouit de ce fait d'un large pouvoir d'appréciation dont l'exercice est soumis à un contrôle juridictionnel limité qui n'implique pas que le juge communautaire substitue son appréciation des éléments de fait à celle de ladite autorité. Dès lors, le droit communautaire n'exige pas que les États membres instaurent une procédure de contrôle juridictionnel des décisions nationales de retrait des autorisations de mise sur le marché, prises au titre de la directive 65/65 et dans l'exercice d'appréciations complexes, impliquant un contrôle plus étendu que celui qu'exerce la Cour dans des cas similaires. 2 Le droit communautaire n'exige pas que la juridiction nationale saisie d'un recours en annulation contre une décision de retrait d'une autorisation de mise sur le marché d'une spécialité pharmaceutique déterminée statue sur celui-ci en prenant en compte tout élément d'appréciation scientifique pertinent révélé après l'adoption de cette décision. Un système de contrôle juridictionnel selon lequel la juridiction nationale statue sur les recours en annulation contre de telles décisions sans prendre en compte les éléments d'appréciation scientifique pertinents révélés après l'adoption de la décision contestée n'est pas de nature à rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice des droits conférés par la directive 65/65, relative aux spécialités pharmaceutiques, la personne concernée ayant toujours la possibilité d'introduire une nouvelle demande d'autorisation, dans l'hypothèse où de nouveaux éléments viendraient à être révélés à la suite de l'adoption de la décision de retrait d'une autorisation de mise sur le marché. 3 La directive 65/65 et la directive 75/319, relatives aux spécialités pharmaceutiques, dans leur version résultant de la directive 83/570, doivent être interprétées en ce sens que, dans l'hypothèse où le comité des spécialités pharmaceutiques a été saisi par plusieurs États membres à la suite d'une décision de suspension d'une autorisation de mise sur le marché prise par l'autorité nationale compétente et que le délai pour l'émission de cet avis est écoulé, elles ne s'opposent pas à ce que cette autorité rende une décision de retrait de ladite autorisation de mise sur le marché sans attendre l'avis du comité des spécialités pharmaceutiques. En effet, d'une part, l'avis du comité n'est nullement contraignant et, d'autre part, la santé publique étant en jeu, les États membres ne sauraient se voir imposer d'attendre l'avis du comité, même après que le délai pour l'émission de celui-ci est écoulé, avant de statuer sur le retrait d'une spécialité pharmaceutique considérée comme pouvant mettre en péril la santé publique dont la sauvegarde constitue l'objectif essentiel de la directive 65/65.

Dans l'affaire C-120/97,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE, par la Court of Appeal (England & Wales) (Royaume-Uni) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Upjohn Ltd

The Licensing Authority established by the Medicines Act 1968 e.a.,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de la directive 65/65/CEE du Conseil, du 26 janvier 1965, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives, relatives aux spécialités pharmaceutiques (JO 1965, 22, p. 369),

LA COUR

(cinquième chambre),

composée de MM. J.-P. Puissochet, président de chambre, J. C. Moitinho de Almeida, C. Gulmann (rapporteur), D. A. O. Edward et M. Wathelet, juges,

avocat général: M. P. Léger,

greffier: Mme D. Louterman-Hubeau, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

- pour Upjohn Ltd, par MM. Richard Gordon, QC, et Nicholas Green, barrister, mandatés par MM. Simon Pearl et Peter Ellis, solicitors,

- pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme Lindsey Nicoll, du Treasury Solicitor' s Department, en qualité d'agent, assistée de MM. Peter Duffy, QC, et Richard McManus, barrister,

- pour le gouvernement français, par Mmes Kareen Rispal-Bellanger, sous-directeur à la direction des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, et Régine Loosli-Surrans, chargé de mission à la même direction, en qualité d'agents,

- pour la Commission des Communautés européennes, par MM. Richard Wainwright, conseiller juridique principal, et Fernando Castillo de la Torre, membre du service juridique, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de Upjohn Ltd, représentée par MM. Richard Gordon et Nicholas Green, du gouvernement du Royaume-Uni, représenté par M. John E. Collins, Assistant Treasury Solicitor, en qualité d'agent, assisté de MM. Peter Duffy et Richard McManus, du gouvernement français, représenté par Mme Régine Loosli-Surrans, et de la Commission, représentée par M. Richard Wainwright, à l'audience du 24 mars 1998,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 9 juin 1998,

rend le présent

Arrêt

1 Par ordonnance du 26 octobre 1995, parvenue à la Cour le 24 mars 1997, la Court of Appeal (England & Wales) a posé, en application de l'article 177 du traité CE, trois questions préjudicielles relatives à l'interprétation de la directive 65/65/CEE du Conseil, du 26 janvier 1965, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives, relatives aux spécialités pharmaceutiques (JO 1965, 22, p. 369).

2 Ces questions ont été posées dans le cadre d'un litige opposant Upjohn Ltd (ci-après "Upjohn") à la Licensing Authority créée par le Medicines Act de 1968 ainsi qu'aux ministres collectivement compétents en tant que Licensing Authority, à propos de la décision de cette autorité de retirer avec effet immédiat toutes les autorisations de mise sur le marché (ci-après les "AMM") d'un médicament dénommé le "Triazolam", également enregistré par la demanderesse au principal sous la marque Halcion.

Le droit communautaire

3 L'article 11 de la directive 65/65, dans sa version résultant de la directive 83/570/CEE du Conseil, du 26 octobre 1983, modifiant les directives 65/65/CEE, 75/318/CEE et 75/319/CEE (JO L 332, p. 1), dispose:

"Les autorités compétentes des États membres suspendent ou retirent l'autorisation de mise sur le marché lorsqu'il apparaît que la spécialité pharmaceutique est nocive dans les conditions normales d'emploi ou que l'effet thérapeutique fait défaut ou enfin que la spécialité n'a pas la composition qualitative et quantitative déclarée. L'effet thérapeutique fait défaut lorsqu'il est établi que la spécialité pharmaceutique ne permet pas d'obtenir de résultats thérapeutiques.

L'autorisation est également suspendue ou retirée lorsqu'il est reconnu que les renseignements figurant dans le dossier en vertu des articles 4 et 4 bis sont erronés ou n'ont pas été modifiés conformément à l'article 9 bis, ou lorsque les contrôles visés à l'article 8 de la présente directive ou à l'article 27 de la deuxième directive 75/319/CEE du Conseil, du 20 mai 1975, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives aux spécialités pharmaceutiques n'ont pas été effectués."

4 Selon l'article 12, premier alinéa, de la directive 65/65, toute décision prise notamment aux termes de l'article 11 devra être motivée de façon précise. Elle sera notifiée à l'intéressé avec l'indication des moyens de recours prévus par la législation en vigueur et du délai dans lequel le recours peut être présenté.

5 Aux termes de l'article 21 de cette directive, l'AMM ne peut être refusée, suspendue ou retirée que pour les raisons énumérées dans cette même directive.

6 La directive 75/319 (JO L 147, p. 13), telle que modifiée par la directive 83/570, prévoit, en son article 8, que, "En vue de faciliter l'adoption par les États membres d'une attitude commune en ce qui concerne les décisions de délivrance d'autorisations de mise sur le marché et de favoriser ainsi la libre circulation des spécialités pharmaceutiques, il est institué un comité des spécialités pharmaceutiques... qui est composé de représentants des États membres et de la Commission [et qui peut être] saisi par un État membre ou par la Commission...".

7 Selon l'article 11, premier et deuxième alinéas, de la directive 75/319, modifié par la directive 83/570, lorsqu'un ou plusieurs États membres ont suspendu ou retiré une AMM, alors qu'un ou plusieurs États membres n'ont pas procédé à cette suspension ou à ce retrait, un des États membres concernés ou la Commission peuvent saisir le comité des spécialités pharmaceutiques pour application de la procédure visée à l'article 14 de cette même directive.

8 L'article 14, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 75/319, modifié par la directive 83/570, dispose que, lorsqu'il est fait référence à la procédure visée à cet article, ledit comité délibère et émet un avis motivé dans un délai de 60 jours à compter de sa saisine. Cet article précise, en son paragraphe 2, premier alinéa, que l'avis du comité porte notamment sur les motifs pour lesquels l'AMM a été suspendue ou retirée dans les cas visés à l'article 11.

9 Aux termes de l'article 14, paragraphe 2, deuxième alinéa, le comité informe immédiatement le ou les États membres concernés et le responsable de la mise sur le marché de son avis ou de ceux de ses membres en cas d'avis divergents. Enfin, cette disposition prévoit, en son paragraphe 3, que le ou les États membres concernés se prononcent sur la suite à donner à l'avis du comité dans un délai n'excédant pas 60 jours à compter de l'information visée au paragraphe 2, deuxième alinéa, du même article.

Le droit national

10 Le Medicines Act de 1968, qui est le texte de base en matière d'AMM de spécialités pharmaceutiques au Royaume-Uni, désigne la Licensing Authority comme l'autorité compétente en matière d'AMM. Celle-ci délègue ses fonctions de régulation à une instance exécutive, la Medicines Control Agency (ci-après la "MCA").

11 Le Committee for the Safety of Medicines (ci-après le "CSM") est un organisme qui doit être consulté par la Licensing Authority dans le cadre des procédures portant sur la suspension, le retrait ou la modification de l'AMM.

12 La Medicines Commission est également un organisme chargé de conseiller la Licensing Authority sur les autorisations et certificats concernant les spécialités pharmaceutiques.

13 Conformément à la législation nationale en vigueur, lorsque la Licensing Authority envisage de retirer une AMM, s'ouvre une phase administrative durant laquelle le titulaire de l'AMM peut faire valoir ses moyens de défense et, notamment, produire toutes pièces utiles et se faire assister d'experts de son choix pour démontrer que la spécialité pharmaceutique sur laquelle l'administration enquête présente les caractéristiques requises par la directive 65/65 pour être autorisée.

14 Selon l'article 107 du Medicines Act, toute personne concernée notamment par une décision de retrait d'une AMM peut, dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle la décision lui a été notifiée, saisir la High Court d'un recours visant à en contester la validité au motif:

a) que cette décision ne relève pas des compétences conférées par la présente loi, ou

b) qu'une des conditions prévues par la présente loi ou par toute réglementation adoptée au titre de la présente loi, applicable à la question visée par la décision, n'a pas été respectée.

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