COUR D'APPEL
d'ANGERS
Chambre Sociale
ARRÊT N°
CLM/CP
Numéro d'inscription au répertoire général 11/02989.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 17 Novembre 2011, enregistrée sous le n° 10/00641
ARRÊT DU 09 Juillet 2013
APPELANT
Monsieur Jean-Claude Z
ANGERS
présent, assisté de Maître Paul CAO avocats au barreau d'ANGERS
INTIMÉE
La SAS MACH'TEL, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
ZA Champ Fleuri II
SAINT PAVACE
représentée par Maître Cyrillle BERTRAND, avocat au barreau de LA ROCHE SUR YON
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Avril 2013 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de
Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président
Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller
Madame Anne DUFAU, conseiller
Greffier lors des débats Madame LE GALL, greffier
ARRÊT
prononcé le 09 Juillet 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame PINEL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
La société MACH'TEL, dont le siège social est situé à Saint-Pavace (72), exploite une activité de conception, fabrication et maintenance de machines et automatismes industriels (elle propose aux industriels des solutions d'automatisation de leur production). Au 31 janvier 2009, elle employait 26 salariés.
Elle appartient au groupe sarthois SGGR qui comporte les sociétés suivantes
· SGGR, Saint Pavace (72) holding de gestion administrative et financière,
· MACH'TEL, Saint Pavace (72) fabrication de machines et automatismes industriels,
· ALLIAURA MARINE, Saint Pavace (72), Les Sables d'Olonne (85), Lanester (56) fabrication de navires de plaisance à coque polyester,
· TRESCO Shipyard, Le Château d'Olonne (85) fabrication de coques de bateaux en polyester et ou fibre de carbone,
· ALTRES Design, Le Château d'Olonne (85) Ingénierie et architecture navale ;
· HTPUB, Saint Pavace (72) agence de communication.
Suivant contrat de travail à durée déterminée du 5 juin 2006, la société MACH'TEL a embauché M. Jean-Claude Z en qualité de fraiseur jusqu'au 28 juillet suivant. Par avenant du 24 juillet 2006, ce contrat a été prolongé jusqu'au 22 décembre 2006.
Enfin, par acte du 21 décembre 2006, la relation de travail s'est poursuivie dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée aux termes duquel
M. Z était engagé en qualité de fraiseur, au coefficient 215-3-1 de la convention collective de la Métallurgie de la Sarthe, moyennant une rémunération brute mensuelle de 1 600 euros, laquelle s'élevait à 1 670 euros dans le dernier état de la relation de travail.
Le 13 février 2009, la société MACH'TEL a consulté les délégués du personnel sur un projet de licenciement collectif pour motif économique de nature à conduire à la suppression de 9 emplois relevant des catégories professionnelles suivantes
· suppression de l'unique poste de responsable de production,
. suppression de 2 des 3 postes d'automaticien,
· suppression de l'unique poste de monteur dessinateur,
· suppression de l'unique poste de dessinateur en électricité,
· suppression de l'unique poste de monteur Câbleur,
· suppression des 2 postes de fraiseur.
Les délégués du personnel ont indiqué qu'ils n'avaient pas d'observation à formuler.
Par courrier du 16 février 2009, M. Jean-Claude Z a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique fixé au 23 février suivant. Par lettre recommandée du 5 mars 2009, il s'est vu notifier son licenciement pour motif économique et impossibilité de reclassement.
Le salarié n'a pas adhéré à la convention de reclassement personnalisé. La relation de travail a pris fin le 6 mai 2009, à l'issue du préavis de deux mois et M. Z a fait valoir ses droits à la retraite à compter du 1er juin 2009.
Par actes des 21 avril et 19 mai 2009, 7 des 9 salariés licenciés ont saisi le conseil de prud'hommes pour contester leur licenciement. Parmi eux, M. Jean-Claude Z sollicitait, dans le dernier état de la procédure, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et une indemnité de procédure.
Par jugement du 17 novembre 2011 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, rejetant le moyen tiré de la contestation du motif économique et celui tiré du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, le conseil de prud'hommes du Mans a débouté M. Jean-Claude Z de l'ensemble de ses prétentions et l'a condamné aux dépens, la société MACH'TEL étant déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
M. Jean-Claude Z a régulièrement relevé appel général de ce jugement par lettre recommandée postée le 7 décembre 2011.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses écritures enregistrées au greffe le 8 mars 2013, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. Jean-Claude Z demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de condamner la société MACH'TEL à lui payer une indemnité de 16 600 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail outre 4 000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel, et de la condamner aux entiers dépens.
Enonçant qu'il ne discute pas la réalité des difficultés économiques auxquelles la société MACH'TEL était confrontée au moment de son licenciement, l'appelant critique tout d'abord la motivation contenue dans la lettre de licenciement, en soutenant, d'une part, qu'elle ne caractérise pas le motif économique sur lequel l'employeur s'est fondé en ce qu'elle n'énonce aucun fait précis et matériellement vérifiable, d'autre part, qu'elle n'énonce pas l'incidence des difficultés économiques alléguées sur son emploi mais se contente de mentionner la suppression du poste occupé.
En second lieu, le salarié invoque le manquement de l'employeur à son obligation de reclassement en faisant valoir
- d'une part, que la société MACH'TEL, qui énonce dans la note économique remise aux représentants du personnel qu'un dossier 'de demande de chômage partiel' a été rejeté fin janvier 2009 par la DDTE, ne justifie pas avoir communiqué à cette administration les éléments de nature à permettre la mise en place de cette mesure ; qu'une telle carence est de nature à caractériser un manquement de l'employeur à l'obligation d'adaptation qui pèse sur lui en vertu de l'article L. 1233-4 du code du travail car le recours à une mesure de chômage partiel aurait constitué une mesure d'adaptation permettant d'assurer son maintien en activité ;
- d'autre part, qu'il ressort des termes de la lettre de licenciement que les recherches de reclassement ont été limitées à l'entreprise, l'employeur reconnaissant par là même qu'il n'a pas étendu ses recherches de reclassement au groupe SGGR ; que l'employeur n'a pas recherché de solutions de permutation d'emploi au sein du groupe et qu'il ne justifie pas que les postes disponibles au sein de la société ALLIAURA MARINE, notamment celui de stratifieur, ne pouvaient pas lui être proposés après adaptation ou formation ; que le fait de ne pas lui avoir proposé ce poste de stratifieur caractérise de sa part un manquement à l'obligation de reclassement ;
- enfin que la société MACH'TEL ne justifie pas avoir satisfait aux dispositions conventionnelles issues de l'article 28 de l'accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987 qui impose à l'employeur qui envisage de prononcer des licenciements pour motif économique "de rechercher les possibilités de reclassement à l'extérieur de l'entreprise en faisant appel à la commission territoriale de l'emploi", le courrier qu'elle produit ne répondant pas à l'exigence d'individualisation de la recherche de reclassement.
Aux termes de ses écritures enregistrées au greffe le 27 mars 2013, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société MACH'TEL demande à la cour de débouter M. Jean-Claude Z de son appel et de toutes ses prétentions, de confirmer le jugement entrepris et de condamner l'appelant au paiement d'une indemnité de procédure de 3 000 euros et aux entiers dépens.
Elle oppose que la lettre de licenciement répond à l'exigence de motivation en ce qu'elle énonce des difficultés économiques matériellement vérifiables - et tellement vérifiées que leur réalité n'est pas discutée par le salarié - ainsi que, comme incidence sur l'emploi, la suppression du poste de ce dernier, laquelle n'est pas non plus contestée.
En second lieu, elle dénie tout manquement à son obligation de reclassement arguant de ce que
- au jour du licenciement litigieux, il n'existait, en son sein ou au sein des autres sociétés du groupe, aucun emploi disponible et compatible avec le profil et les compétences professionnels de l'appelant ;
- aucun des postes pourvus au sein de la société ALLIAURA MARINE en février et mars 2009 n'était accessible au salarié même en recourant à une formation complémentaire puisqu'il ne disposait pas de la formation initiale nécessaire ;
- elle a, conformément aux dispositions conventionnelles, mobilisé la commission territoriale paritaire de l'emploi des industries métallurgiques de la Sarthe, en lui adressant un courrier auquel cet organisme a répondu étant observé que le texte conventionnel n'exige pas de l'employeur qu'il procède auprès de cet organisme à une recherche individualisée ; que ceci s'explique d'ailleurs par le fait que cette démarche doit être accomplie en amont de la procédure de licenciement, soit à un moment où la liste des salariés 'licenciables' n'est pas encore nécessairement connue ;
- sa responsabilité ne pourrait être retenue s'agissant du manque à gagner résultant du rejet de la demande d'indemnisation de la mesure de chômage partiel mise en oeuvre au cours de l'automne 2008 qu'à la condition de caractériser à son encontre une faute de gestion procédant d'une légèreté blâmable, preuve qui fait défaut.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu que la lettre de licenciement adressée à M. Jean-Claude Z le 5 mars 2009 et qui fixe les termes du litige est ainsi libellée
'Monsieur,
Comme nous vous l'indiquions au cours de notre entretien du 23 février 2009, nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour motif économique.
Celui-ci est justifié par la situation économique de la société Mach'Tel qui depuis plus de 3 ans se trouve dans une situation économique difficile. Mach'Tel s'est attaché pendant 4 ans à se positionner sur de nouveaux marchés pour sortir de cette situation économique délicate, sans y parvenir. Après avoir engagé des actions de développement dans le secteur de l'agroalimentaire en 2006 qui malheureusement ne débouchent pas sur le volume de chiffre d'affaires estimé, de nouvelles actions commerciales ont été engagées courant 2008 pour développer le chiffre d'affaires sous la dynamique d'une nouvelle équipe dirigeante et commerciale. Le développement de la prestation de service auprès des entreprises et le redéploiement de l'activité usinage en complément de l'activité machines spéciales ont redonné de l'activité à Mach'Tel et permettaient d'espérer un redressement. Depuis octobre 2008, l'activité s'est fortement ralentie et la crise économique actuelle ne permet plus à Mach'Tel d'espérer un redressement rapide.
La situation préoccupante de Mach'Tel nous a conduit à supprimer votre poste. Aucune solution de reclassement n'a pu être trouvée.
Nous n'avons donc pas d'autre solution que de prononcer votre licenciement.' ;
Attendu que la lettre de licenciement se poursuit par les dispositions relatives à l'adhésion possible à la convention de reclassement personnalisé, au préavis, à la priorité de réembauche, aux droits acquis au titre du droit individuel à la formation et au délai de douze mois ouvert au salarié pour contester la régularité ou la validité de son licenciement;
Attendu que, pour répondre aux exigences légales de motivation prévues par les articles L. 1233-3 et L. 1233-16 du code du travail, la lettre de licenciement doit, s'agissant de la cause économique du licenciement, énoncer des faits précis et matériellement vérifiables, ainsi que l'incidence sur l'emploi ou le contrat de travail ;
Attendu qu'en faisant état d'une situation économique difficile de la société MACH'TEL perdurant depuis trois années, de ses vaines tentatives, pour essayer d'y remédier, de se positionner sur de nouveaux marchés qui n'ont pas apporté le volume de chiffre d'affaires espéré, du fort ralentissement de l'activité encore noté depuis le mois d'octobre 2008 et de l'absence d'espoir de redressement rapide en raison de la crise économique sévissant depuis lors, la lettre de licenciement adressée à M. Jean-Claude Z énonce des faits précis et matériellement vérifiables permettant de caractériser des difficultés économiques liées à une baisse persistante d'activité et de chiffre d'affaires ;
Et attendu que la lettre de licenciement énonce l'incidence sur l'emploi en ce qu'elle mentionne expressément que les difficultés économiques précédemment relatées impose de supprimer le poste de M. Jean-Claude Z
Que la lettre de licenciement répond donc aux exigences légales de motivation, de sorte que le premier moyen doit être rejeté ;
Attendu que l'appelant indique expressément ne contester ni la réalité de la suppression de son emploi, ni celle des difficultés économiques auxquelles la société MACH'TEL était en proie au moment de son licenciement, ni que le périmètre d'appréciation de ces difficultés est constitué par la seule société MACH'TEL dans la mesure où, au sein du groupe SGGR, elle est la seule à relever du secteur d'activité de la fabrication de machines et automatismes industriels ;
Attendu, comme l'ont exactement relevé les premiers juges, qu'au regard des documents comptables versés aux débats (bilans et comptes de résultats des exercices arrêtés au 31 décembre 2007 et au 31 décembre 2008), les difficultés économiques invoquées à l'appui du licenciement de M. Jean-Claude Z sont caractérisées par une diminution du chiffre d'affaires de plus de 827 000 euros au cours de l'exercice 2007 sans que l'année 2008 n'ait enregistré de redressement d'activité, par une dégradation constante et importante du résultat comptable, lequel était légèrement bénéficiaire en 2006 et 2007 (bénéfices respectifs de 24 689 euros et de 12 740 euros) tandis que l'année 2008 a enregistré une perte de plus de 377 000 euros et par des pertes d'exploitation cumulées de 963 670 euros sur les deux exercices 2007 et 2008 ;
Attendu, s'agissant du moyen tiré du manquement de l'employeur à son obligation d'adaptation, qu'il convient de relever qu'il ressort du courrier de rejet adressé par le directeur départemental du travail au dirigeant de la société MACH'TEL le 3 février 2009 que cette demande était afférente, non pas comme le laisse entendre le salarié, à la mise en place d'une mesure de chômage partiel pour le printemps 2009, mais à l'indemnisation d'une mesure de chômage partiel déjà mise en oeuvre du 1er septembre au 31 décembre 2008 à l'égard de sept salariés ;
Qu'en tout état de cause, le choix de mettre une telle mesure en oeuvre, d'une part, relève du pouvoir de gestion de l'employeur, d'autre part, n'apparaît pas de nature à répondre à son obligation d'adapter le salarié à l'évolution de son emploi telle qu'elle est édictée par l'article L. 1233-4 du code du travail ; qu'enfin, en tant que de besoin, l'intimée oppose à juste titre que la perte financière de l'ordre de 28 000 euros générée par le rejet de sa demande d'indemnisation motivée par l'absence de consultation des délégués du personnel avant la mise en place de la période de chômage partiel concernée et par le caractère tardif de cette demande n'est pas de nature à caractériser de sa part une faute de gestion procédant d'une légèreté blâmable alors que cette perte représente environ 2 % des pertes d'exploitation cumulées ; que ce moyen doit donc être rejeté ;
Attendu que, même s'il est justifié par une cause économique avérée, le licenciement d'un salarié ne peut être légitimement prononcé que si l'employeur a préalablement satisfait à son obligation générale de reclassement ; que Ie périmètre de cette obligation s'étend, non seulement à l'entreprise mais aussi à toutes les sociétés du groupe auquel elle appartient, même situées à l'étranger dont l'activité, l'organisation et le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, sous réserve, s'agissant des sociétés situées à l'étranger que la législation locale ne s'oppose pas à l'engagement de salariés étrangers ;
Que si des dispositions conventionnelles étendent le périmètre de reclassement à l'extérieur de l'entreprise ou du groupe auquel elle appartient, en prévoyant une procédure destinée à favoriser un reclassement externe avant tout licenciement, le manquement à cette obligation de reclassement externe préalable au licenciement prive celui-ci de cause réelle et sérieuse ;
Que l'obligation de reclassement étant individuelle à chaque salarié, l'employeur est tenu de rechercher, pour chacun des salariés dont le licenciement est envisagé, en considération de sa situation particulière, avant la notification du licenciement, toutes les possibilités de reclassement envisageables au sein de l'entreprise ou du périmètre de reclassement, et qu'il lui appartient de justifier par des éléments objectifs des recherches qu'il a effectuées en ce sens et de l'impossibilité dans laquelle il s'est trouvé de procéder au reclassement du salarié dans un emploi équivalent, de même catégorie, voire de catégorie inférieure ;
Attendu que, dans le cadre des débats à l'audience, par la voix de son conseil, la société MACH'TEL a précisé que le périmètre de recherche du reclassement des salariés concernés par le licenciement économique collectif en cause s'étendait bien à toutes les sociétés du groupe capitalistique ;
Attendu que, contrairement à ce que soutient le salarié, les termes employés dans la lettre de licenciement, à savoir 'La situation préoccupante de Mach'Tel nous a conduit à supprimer votre poste.
Aucune solution de reclassement n'a pu être trouvée.' ne permettent pas de retenir que l'employeur aurait ainsi reconnu lui-même avoir limité ses recherches de reclassement au périmètre de l'entreprise ;
Attendu que l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur ne porte que sur les emplois salariés, disponibles au jour du licenciement et en rapport avec les compétences du salarié, l'employeur n'étant pas tenu d'assurer au salarié dont le licenciement est envisagé une formation initiale ou qualifiante ;
Attendu que l'intimée verse aux débats les registres des entrées et sorties du personnel des six sociétés constituant le groupe SGGR (ses pièces n° 4 à 9) ; qu'il en ressort que seule la société ALLIAURA MARINE a procédé à des embauches dans des temps voisins du licenciement litigieux, à savoir, entre le 28 janvier et le 1er avril 2009 et, qu'au jour du licenciement, aucun poste n'était disponible au sein des sociétés SGGR, MACH'TEL, TRESCO Shipyard, ALTRES Design, HTPUB, ce qui n'est pas discuté par l'appelant ;
Attendu que les deux postes de stratifieur, dont il soutient qu'il aurait pu les occuper avec une formation, n'étaient pas plus disponibles au jour de son licenciement puisqu'ils ont été pourvus au sein de la société ALLIAURA MARINE le 2 mars 2009 alors que son licenciement lui a été notifié le 5 mars 2009 ; qu'aucune fraude n'étant même alléguée à l'encontre de l'employeur et aucun élément ne permettant de la caractériser, l'appelant est mal fondé à soutenir que la société MACH'TEL aurait failli à son obligation de reclassement en ne lui proposant pas ces deux postes ;
Et attendu que M. Z ne disposait pas de la compétence et de la formation initiale requises pour occuper les emplois de chef d'équipe et de directeur de la production qui ont été pourvus le 1er avril 2009 au sein de la société ALLIAURA MARINE, spécialisée dans la fabrication de navires de plaisance à coque polyester, ce qui constitue un métier tout à fait différent de celui relatif à la fabrication de machines et automatismes industriels exercé par l'intimée et qui requiert des compétences et des formations bien particulières;
que l'appelant ne soutient d'ailleurs pas qu'il aurait eu les compétences requises pour exercer ces fonctions ; que la société MACH'TEL, contre laquelle aucune fraude n'est, là encore, caractérisée ni même alléguée, n'a donc pas failli à son obligation de reclassement en ne proposant pas au salarié les postes de chef d'équipe et de directeur de la production pourvus le 1er avril 2009 au sein de la société ALLIAURA MARINE ;
Attendu, par contre, que l'article 28 de l'accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987, applicable à la relation de travail dont s'agit, dispose
"...Si toutefois elle [l'entreprise] est amenée à envisager un licenciement collectif d'ordre économique, elle doit
- s'efforcer de réduire autant qu'il est possible le nombre des licenciements ;
- utiliser les possibilités offertes à cet égard par une politique de mutations internes, éventuellement par l'affichage des emplois à pourvoir, en priorité, à l'intérieur de l'établissement concerné et en cas d'impossibilité dans un autre établissement de l'entreprise ou dans des entreprises qui lui sont reliées ;
- rechercher les possibilités de reclassement à l'extérieur de l'entreprise en particulier dans le cadre des industries des métaux, en faisant appel à la commission territoriale de l'emploi ;
- prendre en considération et étudier les suggestions présentées par le comité d'entreprise ou d'établissement et les délégués syndicaux en vue de réduire le nombre de licenciements ;
- informer la commission territoriale de l'emploi conformément aux dispositions de l'article 2 du présent accord. (. . .)" ;
Attendu que ces dispositions conventionnelles étendent le périmètre du reclassement en imposant à l'employeur qui envisage de prononcer des licenciements pour motif économique de rechercher les possibilités de reclassement à l'extérieur de l'entreprise, en faisant appel à la commission territoriale de l'emploi ;
Qu'en vertu de ces dispositions, il incombait donc à la société MACH'TEL, avant de notifier à M. Z son licenciement, de procéder en sa faveur à des recherches de reclassement externe en faisant appel à ladite commission ;
Attendu que, pour soutenir qu'elle a satisfait à cette obligation, l'intimée verse aux débats un courrier du 13 février 2009, ainsi libellé, qu'elle a adressé à l' 'Union des industries métallurgiques de la Sarthe' (l'UIMS) 'Messieurs, Nous vous remercions de bien vouloir nous faire parvenir la liste des postes disponibles, postes dont vous auriez éventuellement connaissance, dans le secteur de la métallurgie et tout particulièrement de la fabrication de 'machines spéciales'.
Vous pouvez adresser votre courrier à Société SAS SAINT PAVACE.' ;
Attendu que le 26 février 2009, le délégué général de l'Union des industries métallurgiques de la Sarthe a répondu que des postes 'pourraient' être disponibles, 'mais sans garantie', au sein de trois entreprises implantées dans le département de la Sarthe dont il a fourni les coordonnées ;
Attendu, à supposer même que, comme le soutient la société MACH'TEL sans toutefois en justifier, l'UIMS assure le secrétariat de la commission territoriale de l'emploi, en tout état de cause, le courrier qu'elle lui a adressé le 13 février 2009 n'est pas de nature à satisfaire à l'obligation individuelle de reclassement qui pesait sur elle à l'égard de M. Z en ce qu'il s'agit d'un courrier parfaitement général exempt de toute précision personnelle concernant le salarié, relative, notamment, à son identité, à son âge, à son ancienneté, aux fonctions qu'il occupait au moment du licenciement et aux fonctions qu'il avait pu occuper antérieurement, à ses qualifications et éventuels diplômes ;
Attendu, la société MACH'TEL ne justifiant pas avoir procédé en faveur de M. Z à la recherche de reclassement externe que lui imposaient les dispositions conventionnelles que, par voie d'infirmation du jugement entrepris, le licenciement de ce salarié doit être déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Attendu, M. Jean-Claude Z, justifiant d'une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés (26 salariés au moment du licenciement), qu'il peut prétendre à l'indemnisation de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail, selon lequel l'indemnité à la charge de l'employeur ne peut pas être inférieure aux salaires des six derniers mois, lesquels se sont élevés en l'espèce à la somme de 10 020 euros ;
Attendu qu'en considération de la situation personnelle du salarié au moment de son licenciement, notamment, de son âge (59 ans et 9 mois) et de son ancienneté (2 ans et 9 mois) et du fait qu'il a fait valoir ses droits à la retraite à compter du 1er juin 2009, la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer à 12 000 euros le montant de l'indemnité propre à réparer son préjudice et que la société MACH'TEL sera condamnée à lui payer;
Attendu, M. Jean-Claude Z ne justifiant ni n'alléguant avoir perçu des indemnités de chômage, qu'il n'y a pas lieu à mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail ;
Attendu, l'appelant prospérant en son recours que, par voie d'infirmation du jugement déféré, la société MACH'TEL sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel et à lui payer la somme globale de 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel ; que la demande formée par l'intimée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile est rejetée, le jugement déféré étant confirmé en ce qu'il l'a déboutée de ce chef de prétention ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la société MACH'TEL de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déclare le licenciement de M. Jean-Claude Z dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Condamne la société MACH'TEL à payer à M. Jean-Claude Z les sommes suivantes
- 12 000 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel
Dit n'y avoir lieu à mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail ;
Déboute la société MACH'TEL de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
La condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Catherine ... Catherine LECAPLAIN-MOREL