Jurisprudence : CA Paris, 6, 4, 31-08-2022, n° 19/11009, Confirmation


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4


ARRET DU 31 AOUT 2022


(n° , 5 pages)


Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/11009 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA4TD


Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Octobre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° F18/01053



APPELANT


Monsieur [K] [R]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Jean-claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945


INTIMEE


SAS ETUDES ET REALISATIONS DE TUYAUTERIES INDUSTRIELLES - ERTI

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Sébastien GOGUEL-NYEGAARD, avocat au barreau de PARIS, toque : B0504



COMPOSITION DE LA COUR :


En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile🏛, l'affaire a été débattue le 09 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre, chargé du rapport.


Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère


Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD


ARRET :


- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.



EXPOSÉ DU LITIGE :


M. [K] [R] a été embauché par la société Etudes et Réalisation de Tuyauteries Industrielles, désignée sous le sigle ERTI selon contrat à durée déterminée du 3 novembre 2003. La relation de travail s'est poursuivie sans contrat à l'issue du terme.


Par lettre du 7 novembre 2017, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Loiret a notifié au salarié que son état 'en rapport avec l'accident' du travail du 7 novembre 2017 était consolidé à la date du 2 juillet 2018. Une déclaration d'accident du travail a été établie le même jour.


L'intéressé a été en arrêt maladie de la date dudit accident, soit du 7 novembre 2017, au 19 février 2018.


Il était délégué du personnel.


La société employait alors 13 salariés.


Dans le cadre de la visite de reprise du 20 février 2018, le médecin du travail a établi un avis d'inaptitude ainsi libellé : 'Inapte à la reprise sur le poste de tuyauteur. Inapte au port de charges lourdes à la station debout prolongée, aux positions en antéflexion'.


Par décision du 2 mai 2018, l'inspection du travail d'[Localité 4] a autorisé le 'licenciement pour inaptitude médicale d'origine professionnelle suite à accident du travail du 7 novembre 2017".


Par lettre du 23 mars 2018, la société ERTI a convoqué M. [K] [R] à un entretien préalable fixé au 4 avril 2018, en vue d'un éventuel licenciement.


Celui-ci a été porté à sa connaissance par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 mai 2018.


L'intéressé a saisi le conseil des prud'hommes de Longjumeau le 17 décembre 2018, aux fins d'obtenir la condamnation de l'employeur à lui payer les sommes suivantes :

- 5.610 euros d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 561 euros d'indemnité de congés payés y afférents ;

- 11.320 euros correspondant à la différence entre l'indemnité spéciale de licenciement et l'indemnité de licenciement versée au moment de la rupture ;

- 5.000 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

- 10.000 euros de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de formation et d'adaptation à l'évolution des emplois ;

- 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile🏛 ;

- avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts ;

- et remise d'un bulletin de paie conforme au préavis sous astreinte de 200 euros par jour de retard.


La défenderesse s'est opposée à ces prétentions et a sollicité l'allocation de la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.



Par jugement du 8 octobre 2019, le conseil a déclaré abusif le refus par le demandeur de l'offre de reclassement qui lui avait été faite, avait rejeté ses prétentions et avait alloué à la société ERTI la somme de 100 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile🏛.


Appel a été interjeté par M. [K] [R] le 4 novembre 2019.



Par conclusions remises via le réseau privé virtuel des avocats le 26 février 2020, l'appelant sollicite l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions et reprend devant la cour ses demandes de première instance en précisant que les intérêts devaient courir à compter de la réception par la société de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil des prud'hommes.


Par conclusions remises via le réseau privé virtuel des avocats le 19 février 2020, l'intimée sollicite la confirmation du jugement en y ajoutant la condamnation du salarié à lui verser la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile🏛.


Pour plus ample exposé sur le litige, la cour se réfère aux conclusions des parties en application de l'article 455 du Code de procédure civile🏛.



MOTIFS :


1 : Sur les demandes liées à l'origine professionnelle de l'inaptitude


Le salarié soutient qu'il a subi un accident du travail le 7 novembre 2017 en soulevant un tube de diamètre 76 mm, ce qui a provoqué une vive douleur dans le dos. Il en veut pour preuve la reconnaissance par la CPAM de cet accident comme accident du travail et sa déclaration comme tel par l'employeur.


L'employeur conteste cette origine professionnelle de la lombalgie. Il souligne que les faits du 7 novembre 2017 ne sont pas démontrés, d'autant plus que le tubes utilisés sur le chantier étaient de petit diamètre et de faible épaisseur et par conséquent légers.


Sur ce


Aux termes de l'article L. 2411-5 du code du travail🏛 le licenciement d'un membre élu de la délégation du personnel du comité social et économique, titulaire ou suppléant, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail.


Il s'ensuit que l'autorité administrative est seule compétente pour apprécier le bien-fondé du licenciement. L'origine de l'inaptitude professionnelle ou non professionnelle, n'entre pas dans le champ du contrôle de l'inspecteur du travail, qui vérifie, au titre du droit de l'inaptitude médicale, le respect de la procédure de constatation de l'inaptitude, ainsi que l'impossibilité de procéder au reclassement ou le refus par le salarié du reclassement proposé, lorsque ce reclassement est conforme aux préconisations du médecin du travail, ainsi que la constatation de l'absence de lien avec le mandat et l'absence de motif d'intérêt général.


La portée de la décision de l'inspecteur du travail ne saurait être étendue au-delà. La référence faite par la décision d'autorisation de licenciement à la notion d'accident du travail ne sert pas à la démonstration qui conduit l'autorité administrative à sa décision. Dès lors, le principe de la séparation des pouvoirs n'interdit pas au juge judiciaire d'écarter la qualification d'accident du travail.


Aux termes de l'article L. 411-1 du code de la Sécurité Sociale🏛, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.


Un accident se définit comme la survenance d'une lésion brutale et soudaine.


Un accident intervenu au temps et lieu du travail est présumé accident du travail.


Il appartient au salarié de rapporter la preuve de l'accident du travail, la juridiction prud'homale appréciant son existence de manière autonome, indépendamment de la juridiction de sécurité sociale et de la CPAM.


En l'espèce, le salarié n'apporte aucun témoignage, ni aucun document médical qui permettrait d'accréditer la thèse d'une lésion brutale et soudaine.


Une attestation de M. [Aa] [T] indique qu'il n'a pas vu M. [K] [R] subir un accident et que celui-ci lui a seulement indiqué dans la matinée qu'il s'était fait mal au dos. Le témoin ajoute que le salarié est néanmoins rentré chez lui en voiture sans se faire raccompagner. Le témoin ajoute que les tuyaux que manipulait le salarié n'étaient pas lourds.


Ainsi, faute de témoin direct et de constatations matérielles, un doute existe sur l'existence de l'accident du travail et celui-ci ne sera pas reconnu par la cour.


Par suite, l'inaptitude d'origine professionnelle sera pareillement écartée et les demandes en paiement d'un complément d'indemnité spéciale de licenciement, d'une indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité de congés payés y afférents seront rejetés. De même le salarié sera débouté de ses demandes de délivrance d'un bulletin de paie conforme à la décision.


2 : Sur l'obligation de formation continue et d'adaptation à l'évolution des emplois


M. [K] [R] sollicite la condamnation de la société à lui payer la somme de 10 000 euros en réparation du manquement de l'employeur à l'obligation de formation continue et d'adapatation. En effet, il estime qu'il n'a reçu des formations que pour les nécessités de son emploi, mais nullement pour suivre les évolutions de celui-ci, ni pour évoluer au sein de l'entreprise. Il souligne que ceci l'a handicapé dans ses recherches d'emploi à la suite de la rupture.


La société ERTI répond qu'elle a permis au salarié de suivre de multiples formations utiles à l'exercice de ses fonctions et qu'elle n'avait pas d'obligation de former l'intéressé en vue de l'occupation d'emplois totalement différents de celui qu'il occupait.


Sur ce


Aux termes de l'article L. 6321-1 du code du travail🏛 l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail et veille au maintien de leurs capacités à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.


La société ERTI produit les justificatifs de formations suivies par M. [K] [R] : CACES de plates formes élévatrices mobiles de personnes, CACES chariots automates à conducteur porté, une formation sécurités entreproses extérieures et un certificat de secouristes du travail.


Il apparaît qu'il a suivi des formations utiles et qu'il n'est pas démontré que d'autres formations lui aient manqué au point de lui causer un préjudice, d'autant plus que le salarié évoque un manque de formation en termes abstraits et n'identifie pas ce qui a pu lui faire défaut, alors qu'il a atteint âge de la retraite.


Dans ces conditions, il sera débouté de sa demande de dommages-intérêts.


3 : Sur les demandes de dommages-intérêts pour résistance abusive, d'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile🏛 et les dépens


Dès lors que le salarié succombe en tout point, il ne peut reprocher utilement à la société ERTI une résistance abusive. Il sera débouté de ce chef.


Il est équitable au regard de l'article 700 du code de procédure civile🏛 de condamner M. [K] [R], qui succombe, à payer à la société ERTI la somme de 100 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et celle de 200 euros au titre des frais irrépétibles d'appel. Il supportera pour le même motif, la charge des dépens.



PAR CES MOTIFS :


La Cour statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe et en dernier ressort ;


Confirme le jugement déféré ;


Y ajoutant ;


Rejette la demande de M. [K] [R] au titre des frais irrépétibles d'appel ;


Condamne M. [K] [R] à payer à la société ERTI la somme de 200 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;


Condamne M. [K] [R] aux dépens.


LA GREFFI'RE LE PR''SIDENT

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