Jurisprudence : CA Paris, 4, 2, 22-06-2022, n° 21/15410, Infirmation partielle


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


COUR D'APPEL DE PARIS


Pôle 4 - Chambre 2


ARRET DU 22 JUIN 2022


(n° , pages)


Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/15410 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEIOR


Décision déférée à la Cour : Sur renvoi après Cassation selon l'arrêt rendu le 03 novembre 2016 par la 3ème chambre de la Cour de Cassation (pourvoi n° A 15-14.895 et N 15-15.113) de l'arrêt rendu le 21 janvier 2015 par le Pôle 4 chambre 2 de la Cour d'appel de Paris (RG 13/3562) sur appel d'un jugement rendu le 22 janvier 2013 par la 5ème chambre du tribunal de grande instance de Créteil (RG 11/3764)

après rétablissement de l'affaire 13/3562 au rôle sous le numéro 21/15410.



APPELANTE


S.C.I. AVENIR IMMOBILIER III

immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 352 661 672

[Adresse 2]

[Localité 9]


Représentée par Me Agnès LEBATTEUX SIMON de la SCP ZURFLUH - LEBATTEUX - SIZAIRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0154


INTIMES


Monsieur [Aa] [M]

[Localité 1]

[Localité 3] (Etats Unis)


Représenté par Me Philippe POUX JALAGUIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0955


SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES [Adresse 10] représenté par Me Béatrice DUNOGUE-GAFFIE, administrateur provisoire, désigné par ordonnance du 25 janvier 2022 du tribunal judiciaire de Créteil

C/O Me Béatrice DUNOGUE-GAFFIE, administrateur provisoire

[Adresse 4]

[Localité 8]


Représenté par Me Caroline HATET-SAUVAL de la SCP NABOUDET - HATET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046

ayant pour avocat plaidant : Me Xavier PAULET, avocat au barreau de PARIS, toque : P0358



COMPOSITION DE LA COUR :


L'affaire a été débattue le 20 Avril 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre

Madame Muriel PAGE, Conseillère

Mme Nathalie BRET, Conseillère

qui en ont délibéré.


Greffier, lors des débats : Mme Dominique CARMENT


ARRET :


- CONTRADICTOIRE


- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛.


- signé par Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre, et par Dominique CARMENT, Greffière présente lors du prononcé.


* * * * * * * * * * * *



FAITS & PROCÉDURE


La copropriété sise [Adresse 10]) se compose de deux lots :

- un lot n°1 appartenant à M. [I] [M], composé d'une maison d'habitation élevée sur deux étages, de dépendances et du droit à la jouissance exclusive de la parcelle de terrain cadastrée BH [Cadastre 5] ([Adresse 10]) pour 14 ares 45ca (lot acquis en 1982),

- un lot n°2, acquis le 11 mars 1991 par la société Avenir, constitué du droit de construire sur la parcelle cadastrée BH [Cadastre 7] ([Adresse 6]) pour 5 ares 7ca, avec droit à la jouissance exclusive et particulière dudit terrain.


Le 14 juin 2005, la société Avenir Immobilier III a déposé un permis de construire un pavillon sur ce lot, auprès de la mairie de [Localité 11].


Ce permis lui a été refusé par arrêté du 24 octobre 2005🏛, mais sur recours, cet arrêté a été annulé par le Tribunal administratif de Melun du 15 mai 2008 et le permis a été finalement accordé par arrêté du 30 septembre 2008🏛.


Ayant demandé à l'assemblée générale des copropriétaires une autorisation de travaux, cette autorisation lui a été refusée par la 14ème résolution de l'assemblée générale du 23 juin 2010 après deux votes à la majorité des articles 25 puis 24 de la loi du 10 juillet 1965🏛.


Par acte d'huissier du 9 février 2011, la société Avenir Immobilier III a assigné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] afin d'obtenir :

- l'autorisation de réaliser les travaux refusés par l'assemblée générale du 23 juin 2010,

- le paiement d'une somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts,

- le paiement de 3.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

- la dispense des participation aux frais de procédure.


Par jugement du 22 janvier 2013, le tribunal de grande instance de Créteil a :


- dit la demande d'autorisation de travaux recevable,

- autorisé la société Avenir Immobilier III à faire réaliser les travaux refusés par l'assemblée générale des copropriétaires du 23 juin 2010, aux conditions énoncées dans les documents joints à la convocation à l'assemblée générale des copropriétaires du 23 juin 2010 et en conformité avec le permis de construire accordé le 30 septembre 2008,

- débouté la société Avenir Immobilier III de ses demandes de dommages et intérêts,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 10], représenté par son syndic le Cabinet Ifnor, à payer à la société Avenir Immobilier III la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

- condamné le syndicat des copropriétaires aux dépens,

- dispensé la société Avenir Immobilier III de participation à la dépense commune des frais de la procédure,

- accordé à l'avocat de la société le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile🏛,

- rejeté toutes autres demandes plus amples et contraires des parties.


M. [M] a relevé appel de ce jugement par déclaration d'appel du 22 février 2013.


Au cours de la procédure d'appel, le jugement du tribunal administratif de Melun du 15 mai 2008 a été déclaré nul et non avenu par jugement du tribunal administratif du 5 avril 2013 sur tierce opposition formée par M.[M]. Ce même jugement a annulé par ailleurs l'arrêté du maire de [Localité 11] du 24 octobre 2005 portant refus de permis de construire ainsi que la décision du 12 décembre 2005 rejetant le recours gracieux de la société Avenir Immobilier III. Il a aussi annulé l'arrêté du 30 septembre 2008🏛 par lequel le maire de [Localité 11] avait délivré un permis de construire à la société Avenir Immobilier III, ensemble la décision du 19 janvier 2009 rejetant le recours gracieux présenté par les consorts [M].


Par arrêt du 16 juin 2014, la cour administrative d'appel sur recours des consorts [M] a décidé d'annuler le jugement du 5 avril 2013 en ce qu'il avait statué sur la requête des consorts [M] dirigée contre l'arrêté du 30 septembre 2008 et annulé ledit arrêté.


Par arrêt du 21 janvier 2015, la cour d'appel de Paris a :


- confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne la conformité au permis de construire accordé le 30 septembre 2008,

- dit que cette autorisation judiciaire est accordée sous réserve de l'obtention des autorisations administratives nécessaires,

Y ajoutant,

- dispensé la société Avenir Immobilier III de participation à la dépense commune des frais de la procédure d'appel,

- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires à payer à la société Avenir Immobilier III la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

- condamn2 in solidum le syndicat des copropriétaires et M. [M] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile🏛.


La société Avenir Immobilier II a formé un pourvoi en cassation n°15-14.895⚖️ contre l'arrêt du 21 janvier 2015 rendu par la cour d'appel de Paris dans le litige l'opposant à M. [M]. M. [M] a formé un pouvoi n°15-15.113 contre le même arrêt🏛 dans le litge l'opposant à la société Avenir Immobilier III et au syndicat des copropriétaires. Le syndicat des copropriétaires a formé un pourvoi incident contre le même arrêt🏛. Les deux pourvois ont été joints.


Par arrêt du 3 novembre 2016, la Cour de cassation a :


- cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il déboute la société de sa demande en paiement de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 21 janvier 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remis, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se

trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d'appel de Paris, autrement composée,

- condamné M. [M] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] aux dépens des pourvois,

- au visa de l'article 700 du code de procédure civile🏛, condamné M. [M] à payer la somme de 3.000 € à la société Avenir Immobilier III et rejeté les autres demandes,

- dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé.


La société Avenir a saisi la cour d'appel le 2 décembre 2016.


Par ordonnance du 13 janvier 2021, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Paris a ordonné la radiation de l'affaire pour défaut de diligences des parties.


La procédure a été reprise devant la cour d'appel de Paris le 30 août 2021.



Par ordonnance du tribunal judiciaire de Créteil du 25 janvier 2022, Maître [F] [G] a été désignée en qualité d'adminitrateur provisoire du syndicat des copropriétaires.


La procédure devant la cour a été clôturée le 06 avril 2022.



PRÉTENTIONS DES PARTIES


Vu les conclusions en date du 28 juillet 2021 par lesquelles la société Avenir Immobilier III, demanderesse à la saisine, invite la cour, au visa de l'article 1382 (ancien) du code civil🏛, à :

- infirmer le jugement rendu le 22 janvier 2013 par le tribunal de grande instance de Créteil en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes de dommages et intérêts,

et statuant à nouveau sur le chef de jugement infirmé :

- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et M. [M], à lui payer la somme de 479.500 € de dommages et intérêts au titre du préjudice économique lié à l'absence de revenus locatifs,

- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et M. [M], à payer à la société Avenir Immobilier III la somme de 30.000 € de dommages et intérêts au titre du préjudice moral,

à titre subsidiaire,

- juger que le syndicat des copropriétaires et M. [M] ont engagé leur responsabilité à raison du refus d'autorisation opposé à la société Avenir Immobilier III,

- condamner le syndicat des copropriétaires et M. [M] à lui verser une provision de 200.000 € ,

- désigner tel expert qu'il plaira à M. ou Mme le Président de nommer avec pour mission de :


convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertise,

se faire remettre tous documents et pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,

se rendre sur les lieux et en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis,

donner son avis sur les préjudices allégués et chiffrés par la société Avenir Immobilier III,

évaluer les préjudices subis par la société Avenir Immobilier III,


- dire que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile🏛 et qu'il déposera l'original et une copie de son rapport au greffe du tribunal de grande instance de Nanterre dans le délai qui lui sera imparti,

en tout état de cause,

- faire application de l'article 10-1 alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965🏛, et en conséquence, dire qu'elle sera dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure d'appel dont la charge doit être imputée à M. [M] seulement,

- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et M. [M] à lui payer la somme de 7.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛 et les dépens d'appel ;


Vu les conclusions en date du 5 novembre 2020 par lesquelles M. [M], défendeur à la saisine, demande à la cour, de :

Sur l'absence de chose jugée au visa de l'article 480 du code de procédure civile🏛,

- constater que les précédentes décisions de fond, qui statuaient sur une demande d'autorisation judiciaire de travaux après un refus d'autorisation de ces travaux par l'assemblée générale des copropriétaires du 23 juin 2010, n'ayant à aucun moment qualifié de fautif ou abusif ce refus dont la validité n'était pas contestée devant eux, la faute qu'il aurait commise en votant en faveur de ce refus n'est établie par aucune décision ayant l'autorité de la chose jugée, qu'à ce titre cette question relève de l'appréciation de la cour de céans,

Sur la recevabilité de la demande indemnitaire de la société, au visa l'article 42, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965🏛 et l'article 123 du code de procédure civile🏛,

- déclarer irrecevable comme tardive la demande de dommages et intérêts fondée sur le

caractère prétendument fautif ou abusif de la décision de l'assemblée générale des

copropriétaires du 23 juin 2010 refusant la demande d'autorisation de construire de la société Avenir Immobilier III, cette demande n'ayant pas été formée dans le délai de forclusion prévu à l'article 42, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965🏛 en vigueur et la forclusion pouvant être invoquée en tout état de cause aux termes de l'article 123 du code de procédure civile🏛,

Subsidiairement, sur la responsabilité de M. [M], au visa de l'article 1240 du code civil🏛,

- débouter la société Avenir Immobilier III de sa demande tendant à voir reconnaître sa

responsabilité dès lors qu'en aucune façon ne peut être considéré comme fautif ou abusif le fait de s'opposer à une construction entreprise 14 ans après l'acquisition du lot par un professionnel de l'immobilier qui invoquait devant l'assemblée générale du 23 juin 2010 un droit de construire, dont il pouvait légitimement et sans abus de droit considérer qu'il était caduc, plus de dix ans s'étant écoulés depuis la création de ce droit dans le règlement de copropriété de 1982,

encore plus subsidiairement, sur le préjudice, au visa de l'article 9 du code de procédure civile🏛,

- débouter la société Immobilier Avenir III de sa demande indemnitaire fondée sur une

perte de loyer purement hypothétique, la société ne versant aux débats aucun élément permettant de justifier de ce qu'elle présente comme une perte de chance de réalisation d'un projet immobilier qu'elle reconnaît ne pas avoir en définitive réalisé,qu'au surplus il ne saurait être tenu responsable des choix patrimoniaux que la société Avenir Immobilier III déclare en définitive avoir opéré sans fournir le moindre justificatif à cet égard, il s'avère que la société a revendu le 4 janvier 2019 le lot objet du litige assorti d'un permis de construire pour un prix de 645.000 €, réalisant ainsi une confortable plus-value,

à titre encore plus subsidiaire sur le préjudice,

- écarter le chiffrage du préjudice présenté par la société Avenir Immobilier III concernant

exclusivement la perte de revenu locatif, chiffrage qui se limite à un calcul de valeurs

théoriques de loyers, laquelle perte de loyer ne saurait en aucune façon correspondre au préjudice dès lors qu'il devrait être mis en regard avec les coûts de constructions, les aléas de gestion, les charges d'entretien, les risques d'impayés, les impôts fonciers et les divers aléas qu'aurait entrainés une telle opération, que la société ne justifie pas d'avantage que le placement du produit du terrain qu'elle aurait vendu en 2010 ait représenté un montant supérieur à la plus-value qu'elle a réalisé en ne le revendant qu'en 2018,

- débouter en conséquence la société Avenir Immobilière III de toutes ses demandes,

- la condamner à lui payer une somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛 ainsi qu'en tous les dépens ;


Vu les conclusions en date du 4 mars 2022 par lesquelles le syndicat des copropriétaires, défendeur à la saisine, demande à la cour, au visa des articles 1147 devenu 1231, 1382 et suivants devenus 1240 du code civil🏛 et 14 de la loi du 10 juillet 1965🏛, de :

- juger infondées toutes les demandes formulées par la société Avenir Immobilier III à

son encontre,

en conséquence,

- confirmer le jugement rendu le 22 janvier en ce qu'il a débouté la société Avenir Immobilier III de toute demande de dommages et intérêts formulée à son encontre,

- infirmer le jugement pour le surplus, en ses dispositions l'ayant condamné à verser à la société Avenir Immobilier III les sommes de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛 et aux dépens, rejeter l'ensemble des demandes formées de ces chefs par celle-ci à son encontre,

y ajoutant,

- condamner la société Avenir Immobilier III à lui régler la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛 en cause d'appel et tous les dépens conformément à l'article 699 du même code🏛 ;



SUR CE,


La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;


En application de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile🏛, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;


Sur les demandes de dommages et intérêts formées par la société Avenir Immobilier III


Sur la forclusion


Aux termes de l'article 30 alinéa 4 de la loi du 10 juillet 1965🏛, lorsque l'assemblée générale refuse l'autorisation prévue à l'article 25 b de la même loi, tout copropriétaire ou groupe de copropriétaires peut être autorisé par le tribunal de grande instance à exécuter, aux conditions

fixées par le tribunal, tous travaux d'amélioration visés à l'alinéa 1ci-dessus ;


En cas de refus de l'assemblée d'autoriser les travaux projetés par un copropriétaire, celui-ci dispose d'un délai de cinq ans pour saisir le tribunal aux fins d'obtenir cette autorisation ; le délai de deux mois de l'article 42 alinéa 2 n'est pas applicable ;


Lorsque le refus opposé par l'assemblée est fautif, le copropriétaire victime de ce refus est en droit de demander la réparation du préjudice qui lui a été causé ;


Selon M. [M], l'action visant à obtenir des dommages-intérêts en cas de refus fautif de l'assemblée d'autoriser les travaux projetés est soumise au délai de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965🏛 ;


Il soutient que si l'action en contestation d'une décision d'assemblée générale est éteinte par l'effet de la forclusion de deux mois, l'action en responsabilité contre le syndicat ou un copropriétaire du fait de cette décision n'est plus recevable ;


En l'espèce, il n'est pas contesté que l'action intentée par la société Avenir Immobilier III ne s'analyse pas en une contestation de la résolution n° 14 de l'assemblée générale du 23 juin 2010 qui devait être formée dans le délai de deux mois de la notification du procès-verbal prévu par l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965🏛 ;


La société Avenir Immobilier III disposait d'un délai de cinq ans à compter du refus de cette assemblée pour intenter son action en autorisation de travaux ; l'assignation est en date du 9 février 2011 ;


M. [M] ne démontre pas que la demande visant à obtenir des dommages-intérêts de la société Avenir Immobilier III formulée à l'occasion de sa demande d'autorisation de travaux, soit quant à elle, soumise au délai de deux mois de contestation des décisions de l'assemblée générale ;


S'il est exact que la société Avenir Immobilier III n'a exercé aucune action en contestation de la résolution n° 14 de l'assemblée générale du 23 juin 2010 qui conserve sa validité, ce moyen n'est pas une fin de non recevoir susceptible d'être soulevée à tout moment de la procédure ;


Au surplus, la date à laquelle le procès-verbal de l'assemblée générale du 23 juin 2010 a été notifié à la société Avenir Immobilier III n'est pas justifiée ;


La fin de non recevoir soulevée par M. [M] doit être rejetée ;


Sur la responsabilité du syndicat des copropriétaires et de M. [M]


Aux termes de l'article 1240 du code civil🏛 (ancien article 1382 du code civil🏛), tout fait quelconque de l'homme qui cause un dommage à autrui, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ;


M. [M] conteste sa responsabilité et soutient qu'il pouvait légitimement et sans abus opposer à la société Avenir Immobilier III que son droit de construire était caduc ;


Le syndicat des copropriétaires fait valoir qu'il n'a commis aucune faute, que la société Avenir Immobilier III tente de lui imputer la faute qu'il reproche à M. [M] qui est son seul et unique adversaire, que sa responsabilité civile contractuelle ne peut être engagée ;


En l'espèce, il est constant que lorsque M. [M] a acquis le lot n° 1 de la copropriété, il avait parfaitement connaissance de ce qu'une construction devait être réalisée sur le terrain, partie commune, attenant à son lot, eu égard à la consistance du lot n° 2 ;


Néanmoins, il s'est systématiquement opposé aux travaux projetés par la société Avenir Immobilier III ;


Le refus qu'il a opposé à la résolution n° 14 de l'assemblée générale du 23 juin 2010 n'est qu'un élément de cette opposition systématique, ainsi qu'il ressort des courriers échangés avec le conseil de la société Avenir Immobilier III en 2007 et 2008 et des requêtes qu'il a déposées devant le tribunal administratif, aux fins de voir annuler l'arrêté du 30 septembre 2008🏛 par lequel le maire avait accordé le permis de construire outre de voir déclarer non avenu le jugement du 15 mai 2008 annulant l'arrêté du maire portant refus du permis de construire sollicité par la société Avenir Immobilier III ;


Lors de l'assemblée générale du 23 juin 2010, la seule opposition de M. [M] a permis de mettre en échec le projet de construction de la société Avenir Immobilier III, dès lors que la copropriété n'est composée que deux lots détenant chacun 300 tantièmes sur les 600 qui composent la copropriété ;


Selon M. [M], le droit de construire de la société Avenir Immobilier III était caduc et l'autorisation sollicitée relevait des dispositions de l'article 26 et non de l'article 25b ;


Ces moyens qui ont été rejetés par les juridictions judiciaires saisies ne sont pas susceptibles de justifier du refus opposé à l'autorisation de travaux sollicitée par la société Avenir Immobilier III étant rappelé que le lot qu'elle a acquis le 11 mars 1991 était constitué du droit de construire sur la parcelle cadastrée BH [Cadastre 7] avec droit à la jouissance exclusive et particulière dudit terrain ;


M. [M] n'a démontré ni l'atteinte à la destination de l'immeuble ou à son esthétique, ni à ses droits de copropriétaire ;


L'abus d'égalité soutenu par la société Avenir Immobilier III est caractérisé et constitue une faute, qui engage la responsabilité civile de M. [M] ;


En revanche, ce refus qui n'est imputable qu'à M. [M], puisque la copropriété n'est composée que deux lots, n'engage pas la responsabilité du syndicat des copropriétaires ;


Aucune faute du syndicat des copropriétaires n'étant démontrée, la société Avenir Immobilier III sera déboutée de ses demandes de dommages-intérêts dirigées contre lui ;


Le refus d'autorisation de M. [M] aux travaux sollicités a entraîné l'annulation du permis de construire obtenu par la société Avenir Immobilier III le 30 septembre 2008 et ainsi l'impossibilité pour elle de construire sa maison individuelle ;


M. [M] doit donc être condamné à indemniser la société Avenir Immobilier III de son préjudice constitué par l'impossibilité d'édifier sa construction et d'en tirer des revenus locatifs ;


Sur le préjudice économique de la société Avenir Immobilier III


A la date de l'assemblée générale du 23 juin 2010, la société Avenir Immobilier III avait obtenu un permis de construire lequel était annexé à la convocation de cette assemblée ;


L'autorisation de travaux portait bien sur la construction d'une maison individuelle ;


Le projet immobilier de la société Avenir Immobilier III, dont l'activité est la location de biens immobiliers, apparaît suffisamment démontré ;


Comme le soutient à juste titre la société Avenir Immobilier III, les travaux de construction pouvaient être engagés dès l'autorisation donnée par l'assemblée en juin 2010 ;


La société Avenir Immobilier III retient un délai de douze mois pour construire, ce qui correspond au temps moyen de construction d'une maison individuelle ;


Son préjudice s'étend bien sur la période comprise entre le 23 juin 2011 et le 3 janvier 2018, date à laquelle, le bien aurait pu être mis en location suite à l'arrêt de la Cour de cassation du 3 novembre 2016 autorisant définitivement les travaux, en tenant compte du temps d'instruction de la demande de permis de construire et de celui de construction d'une maison individuelle ;


La société Avenir Immobilier III produit aux débats un rapport d'expertise de M. [P] du 1er juillet 2013 chiffrant son préjudice à hauteur de 335.000 € de 2009 à 2013 inclus, soit sur 5 ans, ce préjudice étant fondé sur la valeur locative d'une maison d'habitation avec confort moderne de 170 m² ;


Toutefois, le préjudice de la société Avenir Immobilier III ne se confond pas avec la perte locative dès lors qu'il convient de tenir compte, ainsi que le souligne M. [M], du coût du financement (la construction devait être réalisée à l'aide d'un emprunt), des aléas liés à la construction d'une maison individuelle, des charges d'entretien, du risque d'impayés, des impôts à régler ;


Le préjudice sera évalué à 25 % de la valeur locative sur la période retenue (479.500 €), soit à une somme de 119.875 € ;


En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a débouté la société Avenir Immobilier III de sa demande de dommages-intérêts au titre de son préjudice financier ;


M. [M] doit être condamné à lui payer la somme de 119.875 € au titre du préjudice économique lié à l'absence de revenus locatifs ;


Sur le préjudice moral de la société Avenir Immobilier III


Aucune pièce ne vient en revanche démontrer un préjudice moral, étant rappelé que la construction envisagée était destinée à la location et non au logement personnel de son gérant M. [S] ;


Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile🏛


La société Avenir Immobilier III succombant partiellement en ses demandes et M. [M], partie perdante, doivent être condamnés aux dépens de la saisine ;


M. [M] doit être condamné en outre à payer à la société Avenir Immobilier III la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile🏛 ;


La société Avenir Immobilier III doit être condamnée à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile🏛 ;


Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile🏛 formulée par M. [M] ; 


Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965🏛 formulée par la société Avenir Immobilier III ;



PAR CES MOTIFS


           LA COUR


Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,


Dans la limite de sa saisine :


Rejette la fin de non-recevoir tirée de la forclusion ;


Infirme le jugement en ce qu'il a débouté la société Avenir Immobilier III de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice financier ;


Statuant à nouveau sur ce seul chef réformé et y ajoutant,


Déboute la société Avenir Immobilier III de sa demande dirigée contre le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] ;


Condamne M. [M] à payer à la société Avenir Immobilier III la somme de 119.875 € au titre du préjudice économique lié à l'absence de revenus locatifs ;


Condamne in solidum la société Avenir Immobilier III et M. [M] aux dépens de la saisine qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile🏛 ;


Condamne M. [M] à payer à la société Avenir Immobilier III la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile🏛 ;


Condamne la société Avenir Immobilier III à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile🏛 ;


Rejette toute autre demande ;

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