Jurisprudence : Cass. soc., 30-03-2022, n° 20-14.556, FS-D, Cassation

Cass. soc., 30-03-2022, n° 20-14.556, FS-D, Cassation

A07597SW

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2022:SO00383

Identifiant Legifrance : JURITEXT000045470190

Référence

Cass. soc., 30-03-2022, n° 20-14.556, FS-D, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/83219455-cass-soc-30032022-n-2014556-fsd-cassation
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Abstract

► Si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif.


SOC.

LG


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 mars 2022


Cassation partielle


M. CATHALA, président


Arrêt n° 383 FS-D

Pourvoi n° K 20-14.556


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 MARS 2022


La société Etablissements [J] [H], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° K 20-14.556 contre l'arrêt rendu le 28 janvier 2020 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [Y] [E], domiciliée [Adresse 3],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Pecqueur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, et Goulet, avocat de la société Etablissements [J] [H], de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [E], et l'avis de Mme Molina, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 février 2022 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Pecqueur, conseiller référendaire rapporteur, Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen, M. Aa, Mmes Ab Ac, Capitaine, Lacquemant, Nirdé-Dorail, conseillers, Mmes Valéry, Laplume, conseillers référendaires, Mme Molina, avocat général référendaire, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 28 janvier 2020), Mme [E], engagée le 25 novembre 2005 par la société Etablissements [J] [H] en qualité de secrétaire, a été licenciée pour faute grave le 6 juin 2017.


Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui est irrecevable.

Sur le second moyen, pris en ses deux premières branches

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement de la salariée est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner, en conséquence, à lui payer des sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts réparant la perte injustifiée de l'emploi résultant du licenciement sans cause réelle et sérieuse et de lui ordonner de rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées à la salariée du jour de son licenciement à la date de l'arrêt, mais dans la limite de six mois d'indemnités, alors :

« 1°/ que le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; que, pour dire le licenciement de Mme [E] dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu -après avoir constaté que "le contrat de travail précise : motifs du licenciement : état d'ébriété, vol ou toute autre action ou omission nuisant à la bonne marche de l'entreprise -que cette clause fixait des cas limitatifs dans lesquels Mme [E] pouvait être licenciée" ; que, relevant que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, n'énonce aucun de ces motifs comme cause du licenciement", elle a considéré que dès lors que le licenciement a été prononcé pour un motif autre que ceux auxquels le contrat de travail limite les possibilités de licenciement, il est dépourvu de cause réelle et sérieuse" ; qu'en statuant ainsi, cependant que la stipulation litigieuse du contrat de travail, qui listait uniquement à titre indicatif des comportements particulièrement fautifs pour lesquelles le licenciement serait immanquablement prononcé, n'exprimait nullement la volonté de l'employeur de restreindre son pouvoir de licencier la salariée à ces seules causes, la cour d'appel a dénaturé le contrat de travail et violé le principe susvisé ;

2°/ que l'employeur et le salarié ne peuvent renoncer par avance au droit de se prévaloir des règles relatives à la rupture du contrat de travail, qui sont ainsi indisponibles ; qu'en l'espèce, en donnant pourtant effet à une clause dont elle a estimé, à tort, qu'elle limitait les motifs de licenciement invocables par l'employeur, qui aurait ainsi par avance renoncé à se prévaloir de toute autre cause de licenciement bien que réelle et sérieuse, tandis qu'à supposer que la clause litigieuse ait eu une telle portée -ce qui n'était manifestement pas le cas-, elle devait être réputée non écrite, la cour d'appel a violé l'article L. 1231-4 du code du travail🏛. »


Réponse de la Cour

4. En premier lieu, c'est par une interprétation souveraine des termes de la clause, que son ambiguïté rendait nécessaire, que la cour d'appel a estimé qu'elle fixait les cas limitatifs dans lesquels la salariée pouvait être licenciée, et excluait toute autre cause ou motif de licenciement.

5. En second lieu, l'employeur n'ayant pas discuté devant la cour d'appel la validité de la clause, le moyen, en sa deuxième branche, est nouveau, mélangé de fait, et, partant, irrecevable.

6. Le moyen, irrecevable en sa deuxième branche, n'est donc pas fondé pour le surplus.


Mais sur le second moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

7. L'employeur fait à l'arrêt le même grief, alors « que l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif ; qu'en retenant dès lors que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, n'énonce aucun de ces motifs comme cause du licenciement " et qu' elle ne dit pas et ne fait pas non plus ressortir que les griefs imputés à Mme [E] aient nui à la bonne marche de l'entreprise", pour dire qu' il n'y a donc pas lieu de rechercher si, comme le soutient la société [H] [J], les actions de Mme [E] qui lui sont reprochées nuisaient effectivement à la bonne marche de la société [H] [J]", cependant que l'exposante pouvait préciser et discuter le motif de licenciement devant les juges du fond, notamment en démontrant que les faits reprochés à la salariée dans l'acte de rupture du contrat de travail constituaient une action qui avaient nui à la bonne marche de l'entreprise, ce qui correspondait à un motif de rupture visé dans le contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail🏛 en leur rédaction applicable au litige. »


Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1232-6 du code du travail🏛 :

8. Il résulte de ce texte que si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif.

9. Pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à payer des sommes à la salariée, l'arrêt relève que le contrat de travail précise : « motifs du licenciement : état d'ébriété, vol ou toute autre action ou omission nuisant à la bonne marche de l'entreprise » et retient que cette clause fixe des cas limitatifs dans lesquels la salariée pouvait être licenciée et que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, n'énonce aucun de ces motifs comme cause du licenciement, que notamment, elle ne dit pas et ne fait pas non plus ressortir que les griefs imputés à la salariée aient nui à la bonne marche de l'entreprise. Il en déduit qu'il n'y a pas lieu de rechercher si, comme le soutient l'employeur, les actions de la salariée qui lui sont reprochées nuisaient effectivement à la bonne marche de la société et que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

10. En statuant ainsi, alors que la lettre de licenciement ne fixe les limites du litige que quant aux griefs qui y sont énoncés et qu'il lui appartenait de rechercher, comme elle y était invitée, si ceux-ci constituaient des actions nuisant à la bonne marche de l'entreprise, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette les fins de non recevoir présentées par la société Etablissements [J] [H], l'arrêt rendu le 28 janvier 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne Mme [E] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet avocat aux Conseils, pour la société Etablissements [J] [H]


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR, jugeant implicitement les prétentions de Mme [E] recevables, dit que le licenciement de Mme [E] est dépourvu de cause réelle et sérieuse, condamné la société [H] [J] à payer à Mme [Ad] les sommes de 4.100 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 5.125 euros à titre d'indemnité de licenciement et 12.300 euros à titre de dommages-intérêts réparant la perte injustifiée de l'emploi résultant du licenciement sans cause réelle et sérieuse et ordonné le remboursement aux organismes intéressés, par la société [H] [J], des indemnités de chômage versées à Mme [E] du jour de son licenciement à la date de l'arrêt, mais dans la limite de six mois d'indemnités ;

AUX MOTIFS QU'il résulte des pièces et conclusions des parties que Mme [E] a été engagée à compter du 25 novembre 2005 par la société [H] [J] en qualité de secrétaire ; que par lettre du 15 mai 2017, elle a été convoquée à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement ; que par lettre du 6 juin 2017, elle a été licenciée pour faute grave ; que cette lettre, qui fixe les limites du litige, énonce : « (…) Nous avons le regret de vous informer de notre décision de vous licencier, pour les motifs suivants : - le mardi 23 mai 2017 courant de l'après-midi vous avez quitté un moment l'entreprise sans en tenir informé votre direction ; - suite à votre demande d'augmentation par mail du 24 avril 2017, [H] [Z] vous a demandé 15 jours plus tard de venir dans son bureau pour en discuter. Vous avez refusé en disant que cela ne nécessitait qu'un "oui" ou un "non". M. [H] [Z] vous a alors répondu que dans ce cas c'était "non". Depuis vous refusez d'assurer la saisie des heures de travail des salariés de l'entreprise et, avez déposé les éléments correspondant sur le bureau de M. [H] [Z] alors que vous faites cette tâche depuis plus de deux ans. - depuis, vous passez beaucoup de temps sur votre téléphone portable et attendez que le temps passe devant votre ordinateur ; - le 22 mai 2017, la direction a constaté que vous imprimez toujours les factures fournisseurs en couleur (facture Free Mobile) alors que celle-ci vous ci demandé à plusieurs reprises de les imprimer en noir et blanc ; - à plusieurs reprises, vous avec critiqué violemment la politique des dirigeants de l'entreprise et dénigré votre direction. Ce comportement crée des tensions dans le bureau et incite les autres salariés à se comporter comme vous.- le 7 avril 2017, vous avez saisi la facture n° 1131986 de Sanisitt pour un montant de 30.009,16 euros TTC. Celle-ci et été saisie en tant qu'avoir et non en tant que facture ce qui a généré un écart de TVA déductible de 10.000 euros. Si nous ne l'avions pas constaté, l'entreprise aurait dû payer environ 10.000 euros de TVA en plus, ce qui vu notre trésorerie actuelle, aurait mis en difficulté la société. Vos insubordinations répétitives sont constitutives d'une faute grave rendant impossible votre maintien dans les effectifs de l'entreprise » ; que le contrat de travail précise : « motifs du licenciement : état d'ébriété, vol ou toute autre action ou omission nuisant à la bonne marche de l'entreprise » ; que, contrairement à ce que soutient la société [H] [J], cette clause fixait des cas limitatifs dans lesquels Mme [E] pouvait être licenciée ; qu'il résulte de ce qui précède que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, n'énonce aucun de ces motifs comme cause du licenciement ; que notamment, elle ne dit pas et ne fait pas non plus ressortir que les griefs imputés à Mme [E] aient nui à la bonne marche de l'entreprise ; qu'il n'y a donc pas lieu de rechercher si, comme le soutient la société [H] [J], les actions de Mme [E] qui lui sont reprochées nuisaient effectivement à la bonne marche de la société [H] [J] ; que dès lors que le licenciement a été prononcé pour un motif autre que ceux auxquels le contrat de travail limite les possibilités de licenciement, il est dépourvu de cause réelle et sérieuse, le jugement étant infirmé sur ce point ; qu'en conséquence, et compte tenu de son ancienneté et du montant de son salaire de référence s'élevant à 2.050 euros bruts, Mme [E] a droit au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis correspondant à deux mois, soit à la somme de 4.100 euros bruts, le jugement étant infirmé sur ce point ; qu'en revanche, elle ne détient pas de créance contre la société [H] [J] au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents et sa demande à ce titre sera rejetée, le jugement étant confirmé de ce chef ; qu'en effet, en application de l'article D. 3141-12 du code du travail🏛, dans les entreprises exerçant une ou plusieurs activités entrant dans le champ d'application des conventions collectives nationales étendues du bâtiment et des travaux publics, le service des congés est assuré, sur la base de celles-ci, par des caisses constituées à cet effet ; que tel était le cas en l'espèce, le contrat de travail indiquant être soumis à la convention collective des ETAM du bâtiment, qui est étendue ; que s'agissant de la demande en paiement d'une certaine somme au titre de l'indemnité de licenciement : dès lors que Mme [E] avait déjà, en première instance, demandé le paiement d'une somme à ce titre, elle est recevable à demander, à hauteur d'appel, une somme d'un montant supérieur, s'agissant toujours d'une demande en paiement de l'indemnité de licenciement ; que la fin de non-recevoir sera donc rejetée ; que compte tenu du montant de son salaire et de son ancienneté, il convient de faire droit à sa demande en paiement à hauteur de la somme de 5.125 euros à ce titre, le jugement étant infirmé de ce chef ; que s'agissant de la demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : pour les mêmes motifs que ceux précités, Mme [Ad], qui avait demandé, à ce titre, paiement d'une certaine somme en première instance, est recevable à former, à hauteur d'appel, une demande en paiement d'une somme d'un montant supérieur ; que la fin de non-recevoir sera donc rejetée ; que Mme [Ad] ayant une ancienneté supérieure à deux ans, et l'employeur ne soutenant pas employer moins de onze salariés, elle a droit, par application de l'article L. 1235-3 du code du travail🏛 dans sa rédaction alors en vigueur, à une indemnité qui ne peut être inférieure à six mois de salaire ; que compte tenu du montant de son salaire, il convient de faire droit à sa demande en paiement de la somme de 12.300 euros, le jugement étant infirmé de ce chef ; qu'en application de l'article L. 1235-4 du code du travail🏛, il convient d'ordonner le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage versées à Mme [Ad] dans la limite de six mois d'indemnités ; que la société [H] [J] succombant, il convient de la condamner à payer à Mme [E] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛, de rejeter sa demande de ce chef, le jugement étant confirmé de ce chef au titre de la première instance, et de dire qu'elle supportera les dépens de première instance, le jugement étant infirmé sur ce point, et d'appel ;

1°) ALORS QU'à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dispose d'un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel pour conclure ; qu'en admettant la recevabilité des prétentions de Mme [E], cependant qu'elle constatait expressément que l'appelante avait frappé d'appel le jugement entrepris par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 novembre 2018 et qu'elle n'avait adressé ses conclusions d'appel à la juridiction que le 4 juillet 2019, soit au-delà du délai légal de trois mois, la cour d'appel, qui s'est à tort abstenue de constater d'office la caducité de la déclaration d'appel de Mme [E] et a statué sur les demandes de la salariée, a violé l'article 908 du code de procédure civile🏛 ;

2°) ET ALORS QU'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédure, dont les conclusions prises par les parties, sont remis à la juridiction par voie électronique ; qu'en admettant la recevabilité des conclusions prises par Mme [Ad] le 4 juillet 2019 et « reçues au greffe le 8 juillet 2019 », sans constater qu'elles avaient été transmises par voie électronique, la cour d'appel a violé l'article 930-1 du code de procédure civile🏛.


SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Mme [E] est dépourvu de cause réelle et sérieuse et, en conséquence, d'AVOIR condamné la société [H] [J] à payer à Mme [Ad] les sommes de 4.100 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 5.125 euros à titre d'indemnité de licenciement et 12.300 euros à titre de dommages-intérêts réparant la perte injustifiée de l'emploi résultant du licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR ordonné le remboursement aux organismes intéressés, par la société [H] [J], des indemnités de chômage versées à Mme [E] du jour de son licenciement à la date de l'arrêt, mais dans la limite de six mois d'indemnités ;

AUX MOTIFS QU'il résulte des pièces et conclusions des parties que Mme [E] a été engagée à compter du 25 novembre 2005 par la société [H] [J] en qualité de secrétaire ; que par lettre du 15 mai 2017, elle a été convoquée à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement ; que par lettre du 6 juin 2017, elle a été licenciée pour faute grave ; que cette lettre, qui fixe les limites du litige, énonce : « (…) Nous avons le regret de vous informer de notre décision de vous licencier, pour les motifs suivants : - le mardi 23 mai 2017 courant de l'après-midi vous avez quitté un moment l'entreprise sans en tenir informé votre direction ; - suite à votre demande d'augmentation par mail du 24 avril 2017, [H] [Z] vous a demandé 15 jours plus tard de venir dans son bureau pour en discuter. Vous avez refusé en disant que cela ne nécessitait qu'un "oui" ou un "non". M. [H] [Z] vous a alors répondu que dans ce cas c'était "non". Depuis vous refusez d'assurer la saisie des heures de travail des salariés de l'entreprise et, avez déposé les éléments correspondant sur le bureau de M. [H] [Z] alors que vous faites cette tâche depuis plus de deux ans. - depuis, vous passez beaucoup de temps sur votre téléphone portable et attendez que le temps passe devant votre ordinateur ; - le 22 mai 2017, la direction a constaté que vous imprimez toujours les factures fournisseurs en couleur (facture Free Mobile) alors que celle-ci vous ci demandé à plusieurs reprises de les imprimer en noir et blanc ; - à plusieurs reprises, vous avec critiqué violemment la politique des dirigeants de l'entreprise et dénigré votre direction. Ce comportement crée des tensions dans le bureau et incite les autres salariés à se comporter comme vous. - le 7 avril 2017, vous avez saisi la facture n° 1131986 de Sanisitt pour un montant de 30.009,16 euros TTC. Celle-ci et été saisie en tant qu'avoir et non en tant que facture ce qui a généré un écart de TVA déductible de 10.000 euros. Si nous ne l'avions pas constaté, l'entreprise aurait dû payer environ 10.000 euros de TVA en plus, ce qui vu notre trésorerie actuelle, aurait mis en difficulté la société. Vos insubordinations répétitives sont constitutives d'une faute grave rendant impossible votre maintien dans les effectifs de l'entreprise » ; que le contrat de travail précise : « motifs du licenciement : état d'ébriété, vol ou toute autre action ou omission nuisant à la bonne marche de l'entreprise » ; que, contrairement à ce que soutient la société [H] [J], cette clause fixait des cas limitatifs dans lesquels Mme [E] pouvait être licenciée ; qu'il résulte de ce qui précède que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, n'énonce aucun de ces motifs comme cause du licenciement ; que notamment, elle ne dit pas et ne fait pas non plus ressortir que les griefs imputés à Mme [E] aient nui à la bonne marche de l'entreprise ; qu'il n'y a donc pas lieu de rechercher si, comme le soutient la société [H] [J], les actions de Mme [E] qui lui sont reprochées nuisaient effectivement à la bonne marche de la société [H] [J] ; que dès lors que le licenciement a été prononcé pour un motif autre que ceux auxquels le contrat de travail limite les possibilités de licenciement, il est dépourvu de cause réelle et sérieuse, le jugement étant infirmé sur ce point ; qu'en conséquence, et compte tenu de son ancienneté et du montant de son salaire de référence s'élevant à 2.050 euros bruts, Mme [E] a droit au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis correspondant à deux mois, soit à la somme de 4.100 euros bruts, le jugement étant infirmé sur ce point ; qu'en revanche, elle ne détient pas de créance contre la société [H] [J] au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents et sa demande à ce titre sera rejetée, le jugement étant confirmé de ce chef ; qu'en effet, en application de l'article D. 3141-12 du code du travail🏛, dans les entreprises exerçant une ou plusieurs activités entrant dans le champ d'application des conventions collectives nationales étendues du bâtiment et des travaux publics, le service des congés est assuré, sur la base de celles-ci, par des caisses constituées à cet effet ; que tel était le cas en l'espèce, le contrat de travail indiquant être soumis à la convention collective des ETAM du bâtiment, qui est étendue ; que s'agissant de la demande en paiement d'une certaine somme au titre de l'indemnité de licenciement : dès lors que Mme [E] avait déjà, en première instance, demandé le paiement d'une somme à ce titre, elle est recevable à demander, à hauteur d'appel, une somme d'un montant supérieur, s'agissant toujours d'une demande en paiement de l'indemnité de licenciement ; que la fin de non-recevoir sera donc rejetée ; que compte tenu du montant de son salaire et de son ancienneté, il convient de faire droit à sa demande en paiement à hauteur de la somme de 5.125 euros à ce titre, le jugement étant infirmé de ce chef ; que s'agissant de la demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : pour les mêmes motifs que ceux précités, Mme [Ad], qui avait demandé, à ce titre, paiement d'une certaine somme en première instance, est recevable à former, à hauteur d'appel, une demande en paiement d'une somme d'un montant supérieur ; que la fin de non-recevoir sera donc rejetée ; que Mme [Ad] ayant une ancienneté supérieure à deux ans, et l'employeur ne soutenant pas employer moins de onze salariés, elle a droit, par application de l'article L. 1235-3 du code du travail🏛 dans sa rédaction alors en vigueur, à une indemnité qui ne peut être inférieure à six mois de salaire ; que compte tenu du montant de son salaire, il convient de faire droit à sa demande en paiement de la somme de 12.300 euros, le jugement étant infirmé de ce chef ; qu'en application de l'article L. 1235-4 du code du travail🏛, il convient d'ordonner le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage versées à Mme [Ad] dans la limite de six mois d'indemnités ; que la société [H] [J] succombant, il convient de la condamner à payer à Mme [E] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛, de rejeter sa demande de ce chef, le jugement étant confirmé de ce chef au titre de la première instance, et de dire qu'elle supportera les dépens de première instance, le jugement étant infirmé sur ce point, et d'appel ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; que, pour dire le licenciement de Mme [E] dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu - après avoir constaté que « le contrat de travail précise : « motifs du licenciement : état d'ébriété, vol ou toute autre action ou omission nuisant à la bonne marche de l'entreprise » » - que « cette clause fixait des cas limitatifs dans lesquels Mme [E] pouvait être licenciée » ; que, relevant que « la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, n'énonce aucun de ces motifs comme cause du licenciement », elle a considéré que dès lors que « le licenciement a été prononcé pour un motif autre que ceux auxquels le contrat de travail limite les possibilités de licenciement, il est dépourvu de cause réelle et sérieuse » ; qu'en statuant ainsi, cependant que la stipulation litigieuse du contrat de travail, qui listait uniquement à titre indicatif des comportements particulièrement fautifs pour lesquelles le licenciement serait immanquablement prononcé, n'exprimait nullement la volonté de l'employeur de restreindre son pouvoir de licencier la salariée à ces seules causes, la cour d'appel a dénaturé le contrat de travail (cf. production) et violé le principe susvisé ;

2°) ALORS QUE l'employeur et le salarié ne peuvent renoncer par avance au droit de se prévaloir des règles relatives à la rupture du contrat de travail, qui sont ainsi indisponibles ; qu'en l'espèce, en donnant pourtant effet à une clause dont elle a estimé, à tort, qu'elle limitait les motifs de licenciement invocables par l'employeur, qui aurait ainsi par avance renoncé à se prévaloir de toute autre cause de licenciement bien que réelle et sérieuse, tandis qu'à supposer que la clause litigieuse ait eu une telle portée- ce qui n'était manifestement pas le cas -, elle devait être réputée non écrite, la cour d'appel a violé l'article L. 1231-4 du code du travail🏛 ;

3°) ALORS QUE la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté du titulaire du droit d'y renoncer ; qu'en l'espèce, en estimant que la clause aux termes de laquelle « motifs du licenciement : état d'ébriété, vol ou toute autre action ou omission nuisant à la bonne marche de l'entreprise » fixait des cas limitatifs de licenciement, induisant ainsi que l'employeur aurait renoncé à pouvoir se prévaloir de toute autre cause de licenciement, sans caractériser une volonté claire et non équivoque en ce sens résultant d'une stipulation qui n'indiquait à aucun moment le caractère limitatif des causes de rupture visées, la cour d'appel a violé les articles a violé les articles L. 1232-6, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail🏛 en leur rédaction applicable au litige ;

4°) ALORS, plus subsidiairement, QUE l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif ; qu'en retenant dès lors que « la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, n'énonce aucun de ces motifs comme cause du licenciement » et qu' « elle ne dit pas et ne fait pas non plus ressortir que les griefs imputés à Mme [E] aient nui à la bonne marche de l'entreprise », pour dire qu'« il n'y a donc pas lieu de rechercher si, comme le soutient la société [H] [J], les actions de Mme [E] qui lui sont reprochées nuisaient effectivement à la bonne marche de la société [H] [J] », cependant que l'exposante pouvait préciser et discuter le motif de licenciement devant les juges du fond, notamment en démontrant que les faits reprochés à la salariée dans l'acte de rupture du contrat de travail constituaient une action qui avaient nui à la bonne marche de l'entreprise, ce qui correspondait à un motif de rupture visé dans le contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail🏛 en leur rédaction applicable au litige ;

5°) ALORS, très subsidiairement, QUE la violation par l'employeur de la clause de garantie d'emploi insérée dans un contrat de travail à durée indéterminée, qui ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse, ne dispense pas le juge d'examiner la cause du licenciement et qu'il lui appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement ; qu'en déduisant dès lors l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de la seule violation par l'employeur de la clause stipulée au contrat de travail, sans vérifier le bien-fondé des griefs imputés à faute à Mme [Ad] dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail🏛 ;

6°) ET ALORS, infiniment subsidiairement, QU'un salarié peut toujours être licencié pour faute grave nonobstant une clause de garantie d'emploi ou une stipulation restreignant la faculté de l'employeur de prononcer un licenciement ; qu'en statuant comme elle l'a fait, cependant que la clause du contrat de travail énumérant –au demeurant de manière non limitative– certaines causes de licenciement ne pouvait en toute hypothèse faire obstacle au licenciement de Mme [E] pour une faute grave, la cour d'appel, qui devait rechercher si le comportement gravement fautif imputé à la salariée justifiait le prononcé du congédiement, a violé les articles L. 1232-6, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail🏛 en leur rédaction applicable au litige.

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