Jurisprudence : Cass. civ. 2, 24-03-2022, n° 20-21.289, F-B, Cassation

Cass. civ. 2, 24-03-2022, n° 20-21.289, F-B, Cassation

A27497RA

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2022:C200337

Identifiant Legifrance : JURITEXT000045422169

Référence

Cass. civ. 2, 24-03-2022, n° 20-21.289, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/82720521-cass-civ-2-24032022-n-2021289-fb-cassation
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Abstract

► La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans son arrêt rendu le 24 mars 2022, vient préciser que l'absence d'opposition des parties à la procédure sans audience doit être recueillie pour toutes les procédures, à l'exception de celles limitativement énumérées par l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, modifiée par l'ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 ; la Haute juridiction relève que la procédure à bref délai régie par l'article 905 du Code de procédure civile n'entre dans aucune des catégories de dérogations énumérées par l'article 8 précité.


CIV. 2

LM


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 24 mars 2022


Cassation


M. PIREYRE, président


Arrêt n° 337 F-B

Pourvoi n° D 20-21.289


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 MARS 2022


L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de la Corse, agence pour la sécurité sociale des indépendants de Corse, venant aux droits de la caisse du régime social des indépendants, devenue caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants de Corse, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 20-21.289 contre l'arrêt rendu le 8 juillet 2020 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [G] [R], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Jollec, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Aa et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF de la Corse, agence pour la sécurité sociale des indépendants de Corse, venant aux droits de la caisse du régime social des indépendants, devenue caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants de Corse, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 février 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Jollec, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 8 juillet 2020), l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (l'URSSAF) de la Corse, venant aux droits de la caisse du régime social des indépendants, devenue caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants de Corse, a fait procéder à une saisie-attribution, le 13 juillet 2018, sur les rémunérations versées à M. [R] par la société Courses services.

2. M. [R] a saisi un juge de l'exécution en nullité et mainlevée de la saisie-attribution, demandes dont il a été débouté par un jugement du 9 mai 2019, dont appel a été interjeté.

3. En application de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, modifiée🏛 par l'ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020🏛, la cour d'appel a statué sans audience.


Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. L'URSSAF de la Corse, agence pour la sécurité sociale des indépendants de Corse, venant aux droits de la caisse du régime social des indépendants, devenue caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants de Corse, fait grief à l'arrêt de la débouter de l'ensemble de ses demandes, de déclarer la nullité de la saisie-attribution du 13 juillet 2018 réalisée à son profit sur les rémunérations versées à M. [R] par la société Courses services, et de prononcer sa mainlevée, alors « que dans le cadre de l'adaptation des procédures judiciaires à l'état d'urgence sanitaire, les parties disposent d'un délai de quinze jours pour s'opposer à la procédure sans audience, sauf dans les procédures en référé, dans les procédures accélérées au fond et dans les procédures dans lesquelles le juge doit statuer dans un délai déterminé ; qu'en l'espèce, il a été statué dans le cadre d'une procédure sans audience, sans possibilité d'opposition offerte aux parties quant à ce choix ; qu'en statuant ainsi, dans une procédure qui n'était ni une procédure de référé, ni une procédure accélérée au fond, ni une procédure dans laquelle le juge devait statuer dans un délai déterminé, la cour d'appel a violé l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304🏛 du 25 mars 2020🏛. »


Réponse de la Cour

Vu l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020🏛, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020🏛 :

5. Aux termes de ce texte, lorsque la représentation est obligatoire ou que les parties sont assistées ou représentées par un avocat, le juge ou le président de la formation de jugement peut, à tout moment de la procédure, décider qu'elle se déroule selon la procédure sans audience. Il en informe les parties par tout moyen. A l'exception des procédures en référé, des procédures accélérées au fond et des procédures dans lesquelles le juge doit statuer dans un délai déterminé, les parties disposent d'un délai de quinze jours pour s'opposer à la procédure sans audience.

6. Il en résulte que l'absence d'opposition des parties à la procédure sans audience doit être recueillie pour toutes les procédures, à l'exception de celles limitativement énumérées par l'article 8.

7. Pour statuer sans audience et sans recueillir l'accord des parties, l'arrêt retient qu'en raison de l'état d'urgence sanitaire, le 7 mai 2020, l'audience prévue ayant été annulée, la procédure a été renvoyée à l'audience du 12 juin 2020, pour être traitée en application de l'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020 dans le cadre d'une audience sans plaidoiries et avec dépôt de dossiers, s'agissant d'une procédure écrite relevant de l'article 905 du code de procédure civile🏛, sans possibilité d'opposition offerte aux parties quant à ce choix.

8. En statuant ainsi, alors que la procédure à bref délai, régie par l'article 905 du code de procédure civile🏛, n'entrant dans aucune des catégories de dérogations énumérées à l'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020, modifiée par l'ordonnance du 20 mai 2020, l'absence d'opposition des parties à la mise en oeuvre de la procédure sans audience devait être recueillie, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second grief du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 juillet 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne M. [R] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mars deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau, Aa et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de la Corse, agence pour la sécurité sociale des indépendants de Corse, venant aux droits de la caisse du régime social des indépendants, devenue caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants de Corse

PREMIER MOYEN DE CASSATION

L'Urssaf de la Corse, Agence pour la sécurité sociale des indépendants de Corse, venant aux droits de la caisse du régime social des indépendants, devenue Caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants de la Corse, fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir déboutée de l'ensemble de ses demandes, d'avoir déclaré la nullité de la saisie-attribution du 13 juillet 2018 réalisée à son profit sur les rémunérations versées à M. [G] [R] par la Sarl Courses Services, et d'avoir prononcé sa mainlevée,

ALORS QUE dans le cadre de l'adaptation des procédures judiciaires à l'état d'urgence sanitaire, les parties disposent d'un délai de quinze jours pour s'opposer à la procédure sans audience, sauf dans les procédures en référé, dans les procédures accélérées au fond et dans les procédures dans lesquelles le juge doit statuer dans un délai déterminé ; qu'en l'espèce, il a été statué dans le cadre d'une procédure sans audience, sans possibilité d'opposition offerte aux parties quant à ce choix ; qu'en statuant ainsi, dans une procédure qui n'était ni une procédure de référé, ni une procédure accélérée au fond, ni une procédure dans laquelle le juge devait statuer dans un délai déterminé, la cour d'appel a violé l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304🏛 du 25 mars 2020🏛.

SECOND MOYEN DE CASSATION

L'Urssaf de la Corse, Agence pour la sécurité sociale des indépendants de Corse, venant aux droits de la caisse du régime social des indépendants, devenue Caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants de la Corse, fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir déboutée de l'ensemble de ses demandes, d'avoir déclaré la nullité de la saisie-attribution du 13 juillet 2018 réalisée à son profit sur les rémunérations versées à M. [G] [R] par la Sarl Courses Services, et d'avoir prononcé sa mainlevée,

1) ALORS QUE l'article L. 3252-1 du code du travail🏛, relatif à la procédure spécifique de saisie des rémunérations, visant toutes les rémunérations perçues par toute personne salariée ou travaillant pour un ou plusieurs employeurs, la notion de rémunération au sens de ce texte suppose l'existence d'un lien de subordination entre le débiteur et le tiers saisi et non un simple lien de dépendance économique ; que le gérant majoritaire d'une société ne se trouvant pas dans un lien de subordination vis-à-vis de la société qu'il dirige, sa rémunération n'a pas la nature d'un salaire et est donc exclue de la protection prévue en matière de saisie des rémunérations par les articles L. 3252-1 et suivants du code du travail🏛 ; qu'en jugeant pourtant que le versement d'une somme par la Sarl Courses Services à son dirigeant et associé unique, M. [R], constituant, à défaut de versement de tout dividende, son seul revenu, cette situation caractérisait un lien évident de dépendance économique avec la société Courses Services et la nature de rémunération du travail des sommes perçues par ce dernier, de sorte qu'il y avait lieu d'annuler la saisie attribution pratiquée le 13 juillet 2018, à la demande de l'Urssaf, sur ces rémunérations et d'en prononcer la mainlevée, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 3252-1 du code du travail🏛, et par refus d'application l'article L. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution🏛.

2) ALORS QU'en tout état de cause, la rémunération versée à un gérant majoritaire, associé unique, d'une société à responsabilité limitée ne peut constituer une rémunération au sens de l'article L. 3252-1 du code du travail🏛 et bénéficier de la protection prévue par le code du travail qu'autant que les sommes qui lui sont versées rémunèrent des fonctions techniques distinctes du mandat social ; qu'en ne caractérisant pas en quoi les sommes versées à M. [R] par la Sarl Courses Services et ayant fait l'objet de la saisie-attribution pratiquée par l'Urssaf auraient été la rémunération d'une activité au titre de fonctions techniques distinctes du mandat social de M. [R], gérant de cette société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3252-1 du code du travail🏛 et L. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution🏛.

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