Jurisprudence : CAA Marseille, 6e, 06-05-2013, n° 10MA03447

Références

Cour Administrative d'Appel de Marseille

N° 10MA03447
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre - formation à 3
lecture du lundi 06 mai 2013
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Texte intégral

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 10MA03447 le 1er septembre 2010, présentée pour la société CFA Méditerranée, représentée par sa directrice, et dont le siège est au 7/9 rue Nationale à Boulogne Billancourt (92100), par le cabinet Norton Rose ;

La société CFA Méditerranée demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702890 du 29 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, à la demande de l'association de sauvegarde des terres du patrimoine et des paysages (Steppes), annulé la délibération en date du 5 mars 2007 par laquelle le conseil municipal de Cabriès a adopté le bail emphytéotique administratif pour la construction d'un groupe scolaire au quartier Saint-Pierre et autorisé le maire à signer un bail emphytéotique administratif et la convention de mise à disposition avec le groupement privé Genecomi, la société CFA Méditerranée et le cabinet Fradin ;

2°) de rejeter la demande de l'association ;

3°) de mettre à la charge de l'association Steppes la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.......................................................................................................
Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 24 janvier 2011, admettant l'association Steppes au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 avril 2013 :

- le rapport de Mme Felmy, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Markarian, rapporteur public,

- et les observations de Me A...représentant la société CFA Méditerranée et de Me B... représentant la commune de Cabriès ;

1. Considérant que la commune de Cabriès a décidé, par délibération du conseil municipal en date du 17 novembre 2006, de recourir à un bail emphytéotique administratif pour la construction d'un groupe scolaire au quartier Saint-Pierre concernant des classes maternelles et primaires ; qu'après consultation des entreprises, la société Genecomi, filiale de la Société Générale et de la société CFA Méditerranée, a été retenue pour réaliser le projet ; que par courrier du 2 mars 2007, le maire de Cabriès a interrogé le service des domaines sur la valeur vénale des parcelles objet du bail ; que par délibération en date du 5 mars 2007, le conseil municipal a approuvé le projet de bail emphytéotique administratif ainsi que la convention de mise à disposition avec le groupement privé Genecomi, la société CFA Méditerranée et le cabinet Fradin et autorisé le maire à les signer ; que la société CFA Méditerranée interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille, a, à la demande de l'association de sauvegarde des terres du patrimoine et des paysages (Steppes), annulé ladite délibération ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience est publique. Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou règlementaires dont elle fait application (...) " ;

3. Considérant que la société CFA Méditerranée soutient que le jugement attaqué serait irrégulier dès lors qu'il n'aurait pas analysé le mémoire enregistré le 27 mai 2010, lequel précisait que le projet de bail emphytéotique administratif pouvait bénéficier de subventions ; que, cependant, cette circonstance est sans influence sur la régularité du jugement attaqué dès lors que le tribunal s'est fondé sur l'absence d'avis du service des domaines pour conclure à l'illégalité de la décision litigieuse ;

Sur la légalité de la délibération en cause :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales en vigueur à la date de la décision attaquée : " Un bien immobilier appartenant à une collectivité territoriale peut faire l'objet d'un bail emphytéotique (...) en vue de l'accomplissement, pour le compte de la collectivité territoriale, d'une mission de service public ou en vue de la réalisation d'une opération d'intérêt général relevant de sa compétence. (...) Un tel bail peut être conclu même si le bien sur lequel il porte (...) constitue une dépendance du domaine public, sous réserve que cette dépendance demeure hors du champ d'application de la contravention de voirie " ; qu'aux termes du 3e alinéa de l'article L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales en vigueur à la date de la décision attaquée : " Toute cession d'immeubles ou de droits réels immobiliers par une commune de plus de 2 000 habitants donne lieu à délibération motivée du conseil municipal portant sur les conditions de la vente et ses caractéristiques essentielles. Le conseil municipal délibère au vu de l'avis de l'autorité compétente de l'Etat. Cet avis est réputé donné à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la saisine de ce service. " ; qu'il résulte de ces dispositions que la teneur de l'avis du service des domaines doit, préalablement à la séance du conseil municipal durant laquelle la délibération relative à la décision de cession doit être prise, être utilement portée à la connaissance de ses membres, notamment par la note de synthèse jointe à la convocation qui leur est adressée ;

5. Considérant qu'il ressort de la lecture de la délibération en cause du 5 mars 2007 qu'aucun renseignement n'est donné concernant l'estimation de la valeur vénale des parcelles concernées par le bail litigieux ; qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le conseil municipal aurait été informé de la teneur de l'avis du service des domaines, sollicité le 2 mars 2007, soit trois jours avant, sur la valeur vénale des parcelles faisant l'objet d'une cession de droits réels résultant du bail emphytéotique administratif, qui n'a été donné que par courrier en date du 26 juin 2007 de la direction générale de la comptabilité publique, laquelle a évalué le montant de la redevance annuelle à 4 583 euros en fonction de la valeur vénale des terrains et du montant de l'investissement réalisé ; que la circonstance que les conseillers municipaux auraient été suffisamment informés des éléments financiers de cette opération ne suffit pas à établir la régularité de la procédure suivie en l'absence de l'avis requis ; que la société requérante ne saurait utilement invoquer, au soutien de la légalité de la délibération du 5 mars 2007, ni la circulaire du 12 février 1996 du ministre de l'équipement, ni la circonstance que le bail emphytéotique administratif a été signé, en vertu de son article 1.4, sous condition suspensive de l'avis du service des domaines ; qu'ainsi, la délibération attaquée est intervenue à la suite d'une procédure irrégulière ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée à la requête d'appel par l'association Steppes, que la société CFA Méditerranée n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé la délibération du 5 mars 2007 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que l'association Steppes a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, de mettre à la charge de la société CFA Méditerranée la somme de 2 000 euros au profit de Me Journault, avocat de l'association requérante, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;

8. Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que l'association Steppes verse une quelconque somme au titre des frais exposés par la société CFA Méditerranée et la commune de Cabriès et non compris dans les dépens ;

DECIDE :
Article 1er : La requête de la société CFA Méditerranée est rejetée.
Article 2 : La société CFA Méditerranée versera à Me Journault, avocat de l'association Steppes, la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve qu'il renonce à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Les conclusions de la commune de Cabriès tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société CFA Méditerranée, à l'association Steppes, à la commune de Cabriès et à Me Journault.
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