ARRÊT N° .
RG N° 12/00692
AFFAIRE
M. Frédéric Z
C/
Mme Maryline Y, Compagnie d'assurances AVIVA ASSURANCES
MJ-iB
assurance
Grosse délivrée à
Maître ..., avocat
COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU 16 MAI 2013
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Le SEIZE MAI DEUX MILLE TREIZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe
ENTRE
Monsieur Frédéric Z
de nationalité Française
né le ..... à CALAIS (62)
Profession Sans profession, demeurant BRIVE LA GAILLARDE
représenté par Me Christophe DURAND-MARQUET, avocat au barreau de LIMOGES, Me Bertrand ..., avocat au barreau de TOURS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/2281 du 07/07/2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Limoges)
APPELANT d'un jugement rendu le 16 AVRIL 2010 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BRIVE
ET
Madame Maryline Y
de nationalité Française, demeurant TULLE
Non comparante, assignée à personne
Compagnie d'assurances AVIVA ASSURANCES
dont le siège social est BOIS COLOMBES
représentée par Me Sandrine PAGNOU, avocat au barreau de LIMOGES, Me Soledad ..., avocat au barreau de PARIS
INTIMÉES
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L'affaire a été fixée à l'audience du 14 Mars 2013 par application des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile, la Cour étant composée de Madame Martine JEAN, Président de chambre, de Monsieur Didier ... et de Monsieur Gérard ..., Conseillers, assistés de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier. A cette audience, Madame le Président a été entendue en son rapport,
Maîtres ... et ..., avocats, ont été entendus en leur plaidoirie.
Puis Madame Martine JEAN, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 16 Mai 2013 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
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LA COUR
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Maryline Y, qui avait acquis en viager un immeuble, a souscrit auprès de la société AVIVA une police multirisques habitation à effet du 10 octobre 2002.
Dans la nuit du 2 au 3 janvier 2004, cet immeuble a été le siège d'un incendie.
Une expertise contradictoire amiable a été organisée conformément au contrat d'assurance et, suite à l'établissement le 3 avril 2004 d'un procès verbal d'expertise évaluant les dommages à 101.441,68 euros, Mme Y a signé le même jour un document intitulé 'accord sur le montant des dommages' aux termes duquel elle déclare donner son accord ' sur la somme de 101.441,68 euros a laquelle a été fixée, sous réserve d'application de la garantie, le montant des dommages occasionnés par le
sinistre '.
La compagnie AVIVA a réglé 2 acomptes de 8.000 euros chacun les 26 janvier 2004 et 11 mai 2004 puis, suite à une délégation régularisée au bénéfice de la société DOUSSAUD, la somme de 11.908,98 euros entre les mains de cette dernière, soit au total la somme de 27.908,98 euros.
C'est dans ces conditions que Maryline Y a fait assigner la société AVIVA le 24 février 2005 devant le juge des référés aux fins d'obtenir l'organisation d'une expertise judiciaire et le versement d'une provision de 116.856,71 euros.
Le juge des référés, qui a estimé qu'il existait une contestation sérieuse liée à l'application, revendiquée par l'assureur, de la règle proportionnelle ensuite d'une déclaration non intentionnelle inexacte de l'assurée, a, selon ordonnance du 9 juin 2005 signifiée le 2 août 2005, condamné l'assureur à payer à Mme Y une provision de 12.321,84 euros correspondant à l'indemnité immédiate que l'assureur reconnaissait devoir ( 40.221,82 euros) après déduction des acomptes versées ; cette somme a été payée par l'assureur.
Postérieurement à cette procédure, le 22 décembre 2005, Mme Y a vendu son immeuble à Frédéric Z.
Par acte du 13 juin 2008, Frédéric Z et Maryline Y ont fait assigner l'assureur aux fins d'obtenir, M. Z, la somme de 101.441,68 euros indexée sur le coût de la construction ainsi que les sommes de 10.942,33 euros au titre de ses frais de relogement et 24.000 euros au titre de son préjudice moral et, Mme Y, les sommes de 5.400 euros au titre de ses fais de relogement et 10.000 euros au titre de son préjudice moral .
Par jugement du 16 avril 2010, le tribunal, qui a considéré que l'action n'avait pas été engagée dans le délai biennal de l'article L 114-1 du Code des assurances, a déclaré irrecevables comme tardives les actions exercées par Frédéric Z et Maryline Y et les a condamnés à payer à la société AVIVA la somme de 600 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile .
Frédéric Z a interjeté appel de cette décision selon déclaration du 9 juin 2010 et l'affaire a été radiée le 20 octobre 2010 par le conseiller de la mise en état qui a constaté que l'appelant n'avait pas conclu dans le délai de l'article 915 du Code de Procédure Civile .
L'affaire a été réinscrite suite au dépôt, le 11 juin 2012, des conclusions de l'appelant..
Saisi d'un incident par la société AVIVA, le conseiller de la mise en état a, selon ordonnance du 13 février 2013, rejeté les demandes de cette société tendant à voir déclarer l'appel atteint par la péremption d'instance.
Les dernières écritures des parties, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample information sur leurs demandes et moyens, ont été transmises à la cour les 1er mars 2013 par Frédéric Z et 2 octobre 2012 par la société AVIVA .
Frédéric Z demande à la cour, par réformation du jugement, de condamner la société AVIVA à lui payer la somme de 74.000 euros ré-évaluée en fonction de la variation de l'indice du coût de la construction entre le 3 avril 2005 et la date de cet arrêt ainsi que la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Frédéric Z observe, sur la péremption, que l'instance s'est trouvée interrompue par la cessation de fonction de la SCP CHABAUD-DURAND-MARQUET, liée à la suppression de la profession d'avoué et qu'il ne peut être considéré qu'il n'y a pas eu interruption au seul motif que Me ...- MARQUET a repris l'instance en qualité d'avocat alors que celui-ci a agi sous deux personnalités juridiques différentes, la première comme associé d'une SCP d'avoués et la seconde comme avocat exerçant en nom personnel.
Il soutient par ailleurs au fond que son action repose sur un procès verbal de transaction précédemment égaré qu'il produit devant la cour, signé de la compagnie d'assurances représentée par son inspecteur et Mme Y, peu important selon lui que ce document ne soit ni daté ni paraphé à chaque page ou qu'il ne contienne pas les mentions ' lu et approuvé' ou 'bon pour transaction' ou encore que le montant de la transaction ne soit pas contenue en toutes lettres dans le document transmis par la compagnie d'assurances et signé par Mme Y, la faute commise à cet égard par l'assureur ne pouvant lui préjudicier. .
La compagnie AVIVA invite la cour à constater la péremption d'instance et par voie de conséquence son extinction et, subsidiairement, à écarter des débats les pièces adverses n°5 et n°9 intitulées ' accord sur le montant des dommages du 3 avril 2004", à confirmer le jugement en toutes ses dispositions et par voie de conséquence, à déclarer l'action prescrite, à débouter M. Z et à lui délivrer injonction de produire ses pièces n°5 et 9 en original ; elle sollicite reconventionnellement paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi que la condamnation de M. Z au paiement d'une amende civile et d'une somme de 7.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Elle fait valoir qu'il s'est écoulé plus de deux ans entre la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant de sorte que la péremption d'instance est acquise .
Elle soutient par ailleurs, au cas où la péremption d'instance ne serait pas admise, qu'à bon droit le tribunal a relevé la prescription de l'action ; elle considère à cet égard que le document dont se prévaut M. Z devant la cour, dont elle conteste d'ailleurs l'authenticité, n'a pas force probante et que, en tout cas, il ne peut concerner que les parties signataires et non M. Z, tiers à la prétendue transaction .
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu qu'il est certes constant que plus de deux ans se sont écoulés entre la déclaration d'appel et les conclusions de M. Z déposées le 11 juin 2012 ; qu'il est tout aussi constant toutefois que l'instance s'est trouvée interrompue de plein droit par la cessation de fonction de la SCP Chabaud-Durand Marquet, qui représentait en qualité d'avoué M. Z, laquelle a fait l'objet d'une dissolution au 1er janvier 2012 dans le cadre de la suppression-fusion de la profession d'avoué ; qu'il n'y a pas lieu en conséquence de constater la péremption d'instance, peu important à cet égard que l'interruption ne dessaisisse pas le juge en application de l'article 376 du Code de Procédure Civile ; que la péremption d'instance, dont la finalité est de sanctionner le défaut de diligences des parties, est en effet nécessairement interrompue par la cessation de fonction de l'avoué lorsque la représentation est obligatoire ;
Attendu que, selon les dispositions de l'article 561 du Code de Procédure Civile, l'appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d'appel pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit ; qu'aucun texte n'exclut que puissent être produites devant la cour de nouvelles pièces non portées à la connaissance de la juridiction du premier degré ; que bien au contraire l'article 563 du code de procédure civile prévoit expressément que les parties peuvent produire devant la cour de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves ;
Attendu en l'espèce que M. Z produit devant la cour un procès-verbal de transaction ; que si la société AVIVA conclut à ce que les pièces qui y sont relatives soient écartées des débats, elle ne justifie pas du fondement de cette demande ; que la question de la valeur probante de ces pièces est en effet une question de fond qui ne saurait justifier d'écarter des débats des pièces régulièrement produites devant la cour ;
Et attendu que la demande de M. Z est fondée devant la cour sur l'existence d'une transaction ; qu'elle ne dérive pas en conséquence du contrat d'assurances ; que le jugement sera réformé en conséquence en ce qu'il a déclaré l'action de M. Z irrecevable comme tardive ;
Attendu cependant que constitue une fin de non recevoir, en application de l'article 122 du Code de Procédure Civile, tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ;
Or attendu que la société AVIVA relève de façon pertinente, serait-ce surabondamment, que les effets de la transaction, si tant est qu'elle ait existé, ne pourraient se produire qu'entre les parties elles-mêmes et en aucun cas ne concerne M. Z, irrecevable à s'en prévaloir ;
Et attendu que la cour ne peut que constater, alors même que la juridiction du premier degré a admis sans s'en expliquer le principe d'une subrogation, que M. Z, qui ne produit même pas l'acte par laquelle Mme Y lui a consenti la vente de l'immeuble incendié, n'établit pas les conditions dans lesquelles il pourrait être subrogé dans les droits de son vendeur ; qu'il ne démontre pas en conséquence sa qualité à agir ;
Attendu, pour ce seul motif, que la cour déclarera l'action de M. Z irrecevable, dans les termes de l'article 122 du Code de Procédure Civile susvisé, pour défaut de qualité à agir ;
Attendu que l'action en justice est un droit qui ne dégénère en abus qu'en cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol ; que tel n'est pas le cas, s'agissant de l'action engagée par Frédéric Z ; qu'il n'y pas lieu de faire droit à la demande reconventionnelle en dommages et intérêts de la société AVIVA ;
Attendu qu'il sera alloué en revanche à cette société une indemnité de 2.000 sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
MOTIFS DE LA DÉCISION
LA COUR, statuant par décision réputée contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
REFORME le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
DÉCLARE irrecevable pour défaut de qualité à agir l'action de Frédéric Z,
DÉBOUTE la société AVIVA ASSURANCES de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts,
CONDAMNE Frédéric Z à payer à la société AVIVA la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
CONDAMNE Frédéric Z aux dépens d'instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Marie-Christine .... Martine ....